Par une requête enregistrée le 12 mars 2018, M. C... D..., représenté par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné du tribunal administratif de Caen du 13 février 2018 ;
2°) d'annuler les arrêtés susvisés du 6 février 2018 ;
3°) d'enjoindre, sous astreinte de 75 euros par jour de retard, au préfet de la Manche de l'admettre au séjour en qualité de demandeur d'asile en France ou à titre subsidiaire, de statuer à nouveau sur sa situation administrative dans un délai de quarante-huit heures à compter de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil, qui renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- l'arrêté portant remise aux autorités italiennes est insuffisamment motivé notamment en ce qui concerne les éléments transmis le 13 novembre 2017 ;
- cette décision révèle un défaut d'examen de sa situation ;
- le préfet a méconnu les dispositions du 2 de l'article 3 du règlement du 26 juin 2013 ;
- il aurait dû mettre en oeuvre la clause dérogatoire prévue aux articles 17 du même règlement et 53-1 de la Constitution ;
- la décision portant assignation à résidence est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de la décision portant remise aux autorités italiennes.
Par un mémoire en défense, enregistré le 13 septembre 2018, le préfet de la Manche conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. C... D...ne sont pas fondés.
Les parties ont été informées le 11 janvier 2019, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que l'arrêt à intervenir était susceptible d'être fondé sur le moyen relevé d'office suivant : non-lieu à statuer sur les conclusions de la requête tendant à l'annulation de l'arrêté de transfert en raison de l'expiration du délai de six mois prévu au 1 de l'article 29 du règlement n°604/2013 du 26 juin 2013, dès lors qu'il ne ressort des pièces du dossier ni que ce délai aurait été prolongé dans les conditions prévues au 2 du même article, ni que cet arrêté aurait reçu exécution pendant sa période de validité.
Par une lettre du 14 janvier 2019 le préfet de la Manche a informé la cour que le transfert de l'intéressé avait été effectué.
M. C... D...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 17 avril 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la Constitution ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique ;
- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 modifié ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Gélard a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C... D..., ressortissant soudanais, relève appel du jugement du 13 février 2018 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 6 février 2018 par lequel le préfet a décidé sa remise aux autorités italiennes, responsables de l'examen de sa demande d'asile, ainsi que de l'arrêté du même jour l'assignant à résidence.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne l'arrêté de remise aux autorités italiennes :
2. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que l'arrêté du 6 février 2018 portant remise de M. C...D...aux autorités italiennes rappelle notamment les dispositions de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du règlement communautaire du 26 juin 2013 sur lequel il est fondé. Il précise que l'intéressé, né le 1er janvier 1994 à El Geneina, est de nationalité soudanaise, qu'il est entré en France sans visa et s'y est maintenu irrégulièrement. Il ajoute que la consultation de la base de données Eurodac a révélé que les empreintes digitales du requérant étaient identiques à celles relevées par les autorités italiennes le 24 mars 2017. Il précise enfin que ces autorités, saisies le 30 juin 2017 d'une demande de prise en charge en application de l'article 13 du règlement (UE) n° 604/2013, ont implicitement accepté leur responsabilité. Le préfet a ensuite fait état de la situation familiale de l'intéressé, tout en soulignant que lors de son entretien individuel qui s'est tenu le 29 juin 2017, il avait déclaré que ses empreintes avaient été enregistrées sous la contrainte par les autorités italiennes. Il n'est pas contesté que dans son courrier du 13 novembre 2017, l'intéressé se borne à réitérer ces propos. Par suite, le préfet qui n'était pas tenu d'y faire expressément référence, a suffisamment motivée sa décision, laquelle ne révèle aucun défaut d'examen de la situation personnelle du requérant.
3. En second lieu, il y a lieu d'écarter, par adoption des motifs retenus par les premiers juges, les moyens tirés de ce que le préfet aurait méconnu les dispositions du 2 de l'article 3 et de l'article 17 du règlement du 26 juin 2013 ainsi que l'article 53-1 de la Constitution, que le requérant réitère en appel, sans apporter de précisions nouvelles.
En ce qui concerne la décision d'assignation à résidence :
4. Compte-tenu de ce qui a été dit aux points 2 et 3 du présent arrêt, le moyen tiré, de ce que l'arrêté portant assignation à résidence serait dépourvu de base légale doit être écarté.
5. Il résulte de ce qui précède que M. C... D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.
Sur le surplus des conclusions :
6. Les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte présentées par M. C...D...et celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées par voie de conséquence du rejet de ses conclusions principales.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. C... D...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C...D...et au ministre de l'intérieur. Une copie sera transmise au préfet de la Manche.
Délibéré après l'audience du 1er mars 2019 à laquelle siégeaient :
- M. Lenoir, président de chambre,
- M. Francfort, président-assesseur,
- Mme Gélard, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 19 mars 2019.
Le rapporteur,
V. GELARDLe président,
H. LENOIR
La greffière,
E. HAUBOIS
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18NT01094