Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 15 février 2021, M. A..., représenté par Me Kaddouri, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 3 février 2021 ;
2°) d'annuler les arrêtés du 15 janvier 2021 ;
3°) d'enjoindre, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, au préfet de Maine-et-Loire de lui délivrer un récépissé de demandeur d'asile et, à titre subsidiaire, de procéder à un nouvel examen de sa situation dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil, qui renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, d'une somme de 1 800 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- l'arrêté de transfert est insuffisamment motivé, notamment en ce qui concerne le critère de détermination de l'Etat responsable ;
- cette décision méconnaît les stipulations de l'article 4 du règlement du 26 juin 2013 ; il n'a reçu que les pages de garde des brochures A et B et a été privé d'une garantie procédurale essentielle ;
- cette décision méconnaît les stipulations de l'article 5 du règlement du 26 juin 2013 ; l'entretien n'a pas eu lieu ; il n'est pas établi qu'il ait bénéficié d'un interprète ;
- le préfet a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation compte tenu de sa grande vulnérabilité résultant de son parcours migratoire ;
- le préfet s'est estimé lié par les critères de détermination de l'Etat responsable et n'a pas procédé à un examen de sa situation personnelle ;
- la décision portant assignation à résidence est insuffisamment motivée et révèle un défaut d'examen de sa situation par le préfet ;
- cette décision est illégale en raison de l'illégalité de la décision de transfert ;
- le préfet a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'il présente toutes les garanties de représentation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 15 mars 2021, le préfet de Maine-et-Loire conclut au rejet de la requête.
Il précise que M. A... doit être regardé comme étant en fuite de sorte que la validité de l'arrêté de transfert est prolongée jusqu'au 3 août 2022 et soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique ;
- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 modifié ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Gélard a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant somalien, relève appel du jugement du 3 février 2021 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 janvier 2021 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a décidé son transfert aux autorités suédoises, responsables de l'examen de sa demande d'asile, ainsi que de l'arrêté du même jour l'assignant à résidence.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne l'arrêté de transfert aux autorités suédoises :
2. En premier lieu, il y a lieu d'écarter, par adoption des motifs retenus par le premier juge, les moyens tirés de ce que la décision portant transfert serait insuffisamment motivée et contraire aux articles 4 et 5 du règlement du 26 juin 2013 ainsi que les moyens tirés de ce que le préfet se serait estimé en situation de compétence liée au regard des critères de détermination de l'Etat responsable de l'examen de sa demande d'asile et n'aurait pas procédé à un examen complet de sa situation personnelle, que M. A... réitère en appel, sans apporter de précisions nouvelles.
3. En second lieu, aux termes de l'article 17 du règlement du 26 juin 2013 : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque Etat membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. / L'Etat membre qui décide d'examiner une demande de protection internationale en vertu du présent paragraphe devient l'Etat membre responsable et assume les obligations qui sont liées à cette responsabilité. (...) ". Il résulte de ces dispositions que si une demande d'asile est examinée par un seul Etat membre et qu'en principe cet Etat est déterminé par application des critères d'examen des demandes d'asile fixés par son chapitre III, dans l'ordre énoncé par ce chapitre, l'application de ces critères est toutefois écartée en cas de mise en œuvre de la clause dérogatoire énoncée au paragraphe 1 de l'article 17 du règlement, qui procède d'une décision prise unilatéralement par un Etat membre. Cette faculté laissée à chaque Etat membre est discrétionnaire et ne constitue nullement un droit pour les demandeurs d'asile. Ces dispositions doivent être appliquées dans le respect des droits garantis par la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
4. Lors de son entretien individuel qui s'est tenu le 1er décembre 2020 à la préfecture de Maine-et-Loire, M. A... a déclaré que des examens médicaux réalisés en Suède avaient révélé qu'il était atteint d'une hépatite B, tout en précisant que compte tenu de son âge, il n'était soumis à aucun traitement médicamenteux. Si l'intéressé indique souffrir également de stress en raison notamment de son parcours migratoire, il n'apporte aucun justificatif médical à l'appui de ses allégations. Dans ces conditions, le requérant n'établit pas qu'en ne dérogeant pas aux critères de détermination de l'Etat responsable de l'examen de sa demande d'asile et en prononçant son transfert aux autorités suédoises, le préfet de Maine-et-Loire aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013. Par suite ce moyen ne peut qu'être écarté.
En ce qui concerne la décision d'assignation à résidence :
5. En premier lieu, il y a lieu d'écarter, par adoption des motifs retenus par le premier juge, les moyens tirés de ce que la décision portant assignation à résidence serait insuffisamment motivée et révèlerait un défaut d'examen de sa situation personnelle par le préfet ainsi que le moyen tiré de l'exception d'illégalité de l'arrêté portant transfert, que le requérant réitère en appel, sans apporter de précisions nouvelles.
6. En second lieu, il est constant que, si M. A... présentait des garanties de représentation, la perspective de son éloignement vers la Suède demeurait à la date de l'arrêté contesté une perspective raisonnable. En outre, si la décision contestée oblige M. A... à se présenter tous les mardis à l'exception des jours fériés à 8h00 au commissariat de police du Mans, l'intéressé ne justifie d'aucun problème de santé l'empêchant de se déplacer dans la ville où il est hébergé. Par suite, le moyen tiré de ce que cette décision serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ne peut qu'être écarté.
7. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Sur le surplus des conclusions :
8. Les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte présentées par M. A... et celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées par voie de conséquence du rejet de ses conclusions principales.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.
Une copie sera adressée pour information au préfet de Maine-et-Loire.
Délibéré après l'audience du 1er octobre 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Gaspon, président de chambre,
- M. Coiffet, président-assesseur,
- Mme Gélard, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 19 octobre 2021.
La rapporteure,
V. GELARDLe président,
O. GASPON
La greffière,
P. CHAVEROUX
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 21NT00420