Mme C...E...épouse D...a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler les arrêtés du 5 décembre 2017 par lesquels le préfet du Finistère a ordonné, d'une part, son transfert aux autorités polonaises et d'autre part son assignation à résidence.
Par un jugement n° 1800092 du 15 janvier 2018 le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
I - Par une requête, enregistrée le 16 janvier 2018 sous le n° 18NT00179, M. B...D..., représenté par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n°1800093 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rennes du 15 janvier 2018 ;
2°) d'annuler les arrêtés du préfet du Finistère du 4 décembre 2017 décidant de son transfert aux autorités polonaises et de son assignation à résidence ;
3°) d'enjoindre au préfet du Finistère, à titre principal, d'instruire sa demande et de se prononcer sur son droit à un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 500 euros par jour de retard, à titre subsidiaire, de procéder à un nouvel examen de sa situation et de lui délivrer dans cette attente une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 2 000 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;
- l'arrêté de transfert est insuffisamment motivé et a été pris sans examen suffisant de la situation de l'intéressé ; il méconnaît les articles 4 et 5 du règlement n°604/2013 ; il méconnaît les dispositions de l'article 20 du règlement n° 343/2003 modifié ; les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, le point 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant ainsi que l'article 17 du règlement n°604/2013 ont été méconnus ; il est en danger de mort tant en Russie qu'en Pologne, pays qui n'offre aucune garantie aux demandeurs d'asile ; l'arrêté litigieux méconnaît le droit d'asile et la possibilité corollaire de solliciter le statut de réfugié.
- En ce qui concerne l'arrêté portant assignation à résidence, cet arrêté est insuffisamment motivé ; il se fonde sur un arrêté de transfert lui-même illégal et doit être annulé par voie de conséquence.
Par un mémoire en défense, enregistré le 14 février 2018, le préfet du Finistère conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
II - Par une requête, enregistrée le 16 janvier 2018 sous le n° 18NT00175, Mme C...D..., représentée par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n°1800092 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rennes du 15 janvier 2018 ;
2°) d'annuler les arrêtés du préfet du Finistère du 4 décembre 2017 décidant de son transfert aux autorités polonaises et de son assignation à résidence ;
3°) d'enjoindre au préfet du Finistère à titre principal, d'instruire sa demande et de se prononcer sur son droit à un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 500 euros par jour de retard à titre subsidiaire de procéder à un nouvel examen de sa situation et de lui délivrer dans cette attente une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 2 000 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;
- l'arrêté de transfert est insuffisamment motivé et a été pris sans examen suffisant de la situation de l'intéressée ; il méconnaît les articles 4 et 5 du règlement n°604/2013 ; il méconnaît les dispositions de l'article 20 du règlement n° 343/2003 modifié ; les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, le point 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant ainsi que l'article 17 du règlement n°604/2013 ont été méconnus ; en effet elle est en danger de mort tant en Russie qu'en Pologne, pays qui n'offre aucune garantie aux demandeurs d'asile ; l'arrêté litigieux méconnaît le droit d'asile et la possibilité corollaire de solliciter le statut de réfugié.
- En ce qui concerne l'arrêté portant assignation à résidence, cet arrêté est insuffisamment motivé ; il se fonde sur un arrêté de transfert lui-même illégal et doit être annulé par voie de conséquence.
Par un mémoire en défense, enregistré le 14 février 2018, le préfet du Finistère s'en remet à ses écritures de première instance et conclut au rejet de la requête.
M. et MmeD... ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par des décisions du 23 février 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la Constitution de la République française et notamment son article 53-1 ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;
- la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 ;
- le règlement (UE) n°604/2013 du parlement européen et du conseil en date du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Francfort, président-assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Les requêtes présentées par M. et Mme D...présentent les mêmes questions à juger et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour y statuer par un même arrêt.
Les faits, la procédure :
2. M. B...D...et Mme C...D..., nés respectivement le 15 octobre 1963 et le 17 avril 1969, de nationalité russe, déclarent être entrés en France le 3 août 2017 avec leur fils Razmick, en vue de solliciter leur admission au séjour au titre de l'asile. La consultation du système d'information Eurodac a révélé que les autorités polonaises avaient déjà relevé leurs empreintes digitales. Le 4 octobre 2017, ces autorités ont été saisies d'une demande de prise en charge de la demande d'asile des intéressés. Une décision expresse d'acceptation de reprise en charge de M. et Mme D...et de leur fils est intervenue le 19 octobre 2017. Par des arrêtés du 5 décembre 2017, le préfet du Finistère a décidé de leur transfert aux autorités polonaises. Par deux autres arrêtés du même jour, il a décidé d'assigner les intéressés à résidence pour une durée de quarante-cinq jours. M. et Mme D...relèvent appel des jugements du 15 janvier 2018 par lesquels le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rennes a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des deux arrêtés du 5 décembre 2017.
Sur les conclusions de la requête :
3. En premier lieu il ressort des pièces du dossier que les entretiens individuels organisés séparément le 14 septembre 2017, à la préfecture, avec M. et avec Mme D...se sont tenus en russe, langue que les intéressés ont déclaré comprendre. Par ailleurs ils ont certifié, selon une attestation versée au dossier par le préfet du Finistère, que le guide du demandeur d'asile ainsi que l'information sur les règlements communautaires leur avaient été remis en langue russe. Les requérants ne sont dès lors fondés à soutenir ni que l'information prévue par les dispositions de l'article 4 du règlement n°604/2013 leur aurait été communiquée dans une langue qu'ils ne comprennent pas, ni que l'entretien imposé par l'article 5 du même règlement ne se serait pas tenu en parfaite confidentialité dans une langue comprise par eux.
4. En deuxième lieu et dès lors que l'arrêté de transfert en litige mentionne en son article 2 que " Le transfert de la France vers la Pologne sera effectué dans le délai maximum de six mois à compter de la décision d'acceptation de la réadmission par les autorités polonaises du 12/05/2017 ", le préfet doit être considéré comme ayant satisfait à l'obligation, qui lui était faite par le 2 de l'article 20 du règlement n° 604/2013, d'indiquer à l'étranger les délais applicables à la mise en oeuvre du transfert.
5. En troisième et dernier lieu, sur les moyens tiré de la méconnaissance des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ainsi que de l'article 17 du règlement n°604/2013, tout comme sur celui tiré des stipulations de l'article 3.1 de la convention internationale des droits de l'enfant, M. et Mme D...se bornent à reprendre, sans argumentation ou justifications nouvelles, leurs développements de première instance, qu'il y a lieu d'écarter par adoption des motifs retenus à bon droit par le premier juge.
6. Par voie de conséquence M. et MmeD... ne sont pas fondés à exciper, pour contester les décisions les assignant à résidence, lesquelles énoncent les motifs de droit et les considérations de fait qui les fondent, de l'illégalité des décisions portant remise aux autorités polonaises.
7. Il résulte de ce qui précède que M. et MmeD... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, lesquels sont suffisamment motivés, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rennes a rejeté leurs demandes. Doivent être rejetées par voie de conséquence les conclusions des requérants aux fins d'injonction et celles tendant au bénéfice des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L.761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : Les requêtes de M. et Mme D...sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...D..., à Mme C...E...épouse D...et au ministre de l'intérieur. Une copie en sera transmise pour information au préfet du Finistère.
Délibéré après l'audience du 26 octobre 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Lenoir, président de chambre,
- M. Francfort, président-rapporteur,
- M. Pons, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 19 novembre 2018.
Le rapporteur,
J. FRANCFORTLe président,
H. LENOIR
La greffière,
E. HAUBOIS
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
1
Nos 18NT00175, 18NT00179 2
1