Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 22 mai 2017, M. C... A..., représenté par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Caen du 21 avril 2017 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 20 mars 2017 par lequel le préfet de la Manche l'a assigné à résidence dans ce département pour une durée de six mois ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil, qui renonce à percevoir la contribution versée par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, d'une somme de 1 500 euros au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision contestée est insuffisamment motivée ;
- elle contrevient aux dispositions de l'article L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration ;
- elle contrevient aux dispositions des articles 4 et 5 du règlement du 26 juin 2013 ;
- elle est entachée d'une erreur d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 26 septembre 2017, le préfet de la Manche conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 modifié ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Bouchardon a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M.A..., ressortissantA..., a été interpellé le 18 mars 2017 à la gare maritime de Cherbourg-en-Cotentin (Manche) ; que la consultation du fichier Eurodac faisant apparaître que l'intéressé était connu des autorités bulgares, hongroises et italiennes, le préfet de la Manche a engagé une procédure tendant à la détermination de l'Etat responsable de la demande d'asile de M.A... et a assigné ce dernier à résidence pour une durée de six mois par arrêté du 20 mars 2017 ; que le requérant relève appel du jugement du 21 avril 2017 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté d'assignation à résidence ;
Sur l'aide juridictionnelle provisoire :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 41 du décret susvisé du 19 décembre 1991 : " Lorsque la demande d'aide juridictionnelle est formée après que la partie concernée ou son mandataire a eu connaissance de la date d'audience et moins d'un mois avant celle-ci, il est statué sur cette demande selon la procédure d'admission provisoire. " ; que M. A...n'a déposé sa demande d'aide juridictionnelle que le 17 avril 2018 auprès du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Nantes ; qu'en application des dispositions précitées, il y a lieu de l'admettre à l'aide juridictionnelle provisoire ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 742-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut, aux fins de mise en oeuvre de la procédure de détermination de l'Etat responsable de l'examen de la demande d'asile et du traitement rapide et du suivi efficace de cette demande, assigner à résidence le demandeur. La décision d'assignation à résidence est motivée. Elle peut être prise pour une durée maximale de six mois et renouvelée une fois dans la même limite de durée, par une décision également motivée. Le demandeur astreint à résider dans les lieux qui lui sont fixés doit se présenter aux convocations de l'autorité administrative, répondre aux demandes d'information et se rendre aux entretiens prévus dans le cadre de la procédure de détermination de l'Etat responsable de l'examen de sa demande d'asile (...) " ;
4. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté contesté vise le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ; qu'il énonce qu'une procédure de détermination de l'Etat responsable de la demande d'asile de M. A...a été engagée auprès des autorités bulgare, hongroise et italienne auprès desquelles il a déjà été enregistré et qu'il est nécessaire, dans l'attente de l'exécution de son transfert, de l'assigner à résidence ; que cet arrêté, qui comporte ainsi les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, est suffisamment motivé ;
5. Considérant, en deuxième lieu, que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions des articles 4 et 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 doit être écarté comme inopérant, l'arrêté portant assignation à résidence ayant été pris en vue de l'exécution de la décision à venir de remise de M. A...aux autorités étrangères et non en vue de déterminer l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale ;
6. Considérant, en troisième lieu, que par l'arrêté contesté, le préfet de la Manche a fait obligation à M. A...de se présenter chaque jour, y compris les dimanches et jours fériés, avant 11 heures, au service de la direction interdépartementale de la police aux frontières à Cherbourg-en-Cotentin ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en fixant de telles modalités de contrôle de la présence du requérant, célibataire et sans enfant, domicilié au siège de l'association " Itinérance " au sein même de cette commune, le préfet aurait entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle de M. Afghan;
7. Considérant, en quatrième et dernier lieu, qu'aux termes de l'article L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Les décisions mentionnées à l'article L. 211-2 n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales (...) " ; que toutefois, M. A...ne peut utilement se prévaloir de la méconnaissance de ces dispositions dans la mesure où elles ne sont pas applicables aux rapports entre l'administration et les étrangers en matière de droit au séjour, ces derniers étant entièrement régis par les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, doivent être également rejetées ses conclusions présentées au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
DECIDE :
Article 1er : M. A...est admis à l'aide juridictionnelle provisoire.
Article 2 : La requête de M. A...est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Une copie en sera transmise pour information au préfet de la Manche.
Délibéré après l'audience du 4 mai 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Francfort, président de chambre,
- M. Pons, premier conseiller,
- M. Bouchardon, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 22 mai 2018.
Le rapporteur,
L. BOUCHARDONLe président,
J. FRANCFORT
La greffière,
E. HAUBOIS La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17NT01592