Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 20 décembre 2019, M. D... représenté par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 4 septembre 2019 ;
2°) d'annuler les arrêtés susvisés du 1er août 2019 ;
3°) d'enjoindre au préfet de Maine-et-Loire, à titre principal, de reconnaître l'Etat français responsable de sa demande d'asile et de lui délivrer une attestation de demande d'asile en procédure normale, et à titre subsidiaire de réexaminer sa demande dans les meilleurs délais ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil, qui renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, d'une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
S'agissant de la décision de transfert aux autorités italiennes :
- la décision n'est pas suffisamment motivée ;
- la décision est entachée d'un vice de procédure dès lors qu'il n'a pas reçu, dès le début de la procédure et dans une langue qu'il comprend, les informations prévues à l'article 4, paragraphe 3, du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;
- son droit à l'information au moment de sa prise d'empreintes le 12 juillet 2019 a été méconnu en violation des dispositions de l'article 29 du règlement n° 603/2013 du 26 juin 2013 ;
- il n'est pas établi que l'entretien individuel se soit déroulé dans les conditions prévues à l'article 5 du règlement n° 604/2013 ; il n'est pas établi qu'il a pu bénéficier d'une information complète et effective dans une langue qu'il comprend, l'interprète étant intervenu par téléphone ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article 9.1 du règlement n° 603/2013 du 26 juin 2013 ;
- il n'est pas justifié que ses problèmes de santé ont été pris en compte par l'administration ;
- la décision de transfert méconnait l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le paragraphe 2 de l'article 3 du règlement du 26 juin 2013 ;
- la décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article 17 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013.
S'agissant de la décision portant assignation à résidence :
- elle est entachée d'un défaut de motivation en l'absence d'indication donnée sur la perspective raisonnable de l'éloigner du territoire français ;
- elle est entachée d'illégalité à raison de l'illégalité de la décision de transfert aux autorités italiennes ;
- elle est enfin entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, est disproportionnée dès lors qu'elle est intervenue automatiquement et qu'il n'a pas été tenu compte de sa particulière vulnérabilité et méconnaît son droit à un recours effectif.
Par un mémoire en défense enregistré le 17 février 2020, le préfet de Maine-et-Loire conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par M. D... n'est fondé.
Par un courrier du 9 mars 2020, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la cour était susceptible de soulever d'office un moyen d'ordre public tiré du non-lieu à statuer sur les conclusions de la requête à fin d'annulation de la décision de transfert en raison de l'expiration du délai de six mois prévu au 1 de l'article 29 du règlement n°604/2013 du 26 juin 2013.
Par un mémoire, enregistré le 10 mars 2020, en réponse au moyen d'ordre public, le préfet de Maine-et-Loire indique à la cour que l'arrêté décidant du transfert de M. D... n'a pas été exécuté dans le délai de six mois à compter de la notification du jugement attaqué.
M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 28 novembre 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le règlement (UE) n° 603/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique ;
- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 modifié ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. B... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... D..., ressortissant nigérian né le 26 décembre 1980, est entré irrégulièrement en France le 15 juin 2019. Sa demande d'asile a été enregistrée le 12 juillet 2019 auprès de la préfecture de Loire-Atlantique. Les recherches entreprises sur le fichier EURODAC ont révélé que le requérant avait sollicité l'asile le 9 septembre 2015 auprès des autorités italiennes. Consécutivement à leur saisine le 15 juillet 2019, les autorités italiennes ont implicitement accepté de reprendre en charge l'intéressé et en ont été informées par courriel du 31 juillet 2019. Par deux arrêtés du 1er août 2019, le préfet de Maine-et-Loire a décidé de le transférer à ces autorités et l'a assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours renouvelable. M. D... relève appel du jugement du 4 septembre 2019 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation des deux arrêtés du 1er août 2019.
Sur les conclusions tendant à l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il a rejeté les conclusions dirigées contre l'arrêté de transfert :
2. D'une part, aux termes de l'article 29 du règlement n° 604-2013 du Parlement européen et du Conseil en date du 26 juin 2013 : " Le transfert du demandeur ou d'une autre personne visée à l'article 18, paragraphe 1, point c) ou d), de l'Etat membre requérant vers l'Etat membre responsable s'effectue conformément au droit national de l'Etat membre requérant, après concertation entre les Etats membres concernés, dès qu'il est matériellement possible et, au plus tard, dans un délai de six mois à compter de l'acceptation par un autre Etat membre de la requête aux fins de prise en charge ou de reprise en charge de la personne concernée ou de la décision définitive sur le recours ou la révision lorsque l'effet suspensif est accordé conformément à l'article 27, paragraphe 3. /2. Si le transfert n'est pas exécuté dans le délai de six mois, l'Etat membre responsable est libéré de son obligation de prendre en charge ou de reprendre en charge la personne concernée et la responsabilité est alors transférée à l'Etat membre requérant. Ce délai peut être porté à un an au maximum s'il n'a pas pu être procédé au transfert en raison d'un emprisonnement de la personne concernée ou à dix-huit mois au maximum si la personne concernée prend la fuite. ".
3. D'autre part, l'introduction d'un recours devant le tribunal administratif contre la décision de transfert a pour effet d'interrompre le délai de six mois fixé à l'article 29 du règlement (UE) n° 604/2013, qui courait à compter de l'acceptation du transfert par l'Etat requis, délai qui recommence à courir intégralement à compter de la date à laquelle le tribunal administratif statue au principal sur cette demande, quel que soit le sens de sa décision. Ni un appel, ni d'ailleurs le sursis à exécution du jugement accordé par le juge d'appel sur une demande présentée en application de l'article R. 811-15 du code de justice administrative n'ont pour effet d'interrompre ce nouveau délai. Son expiration a pour conséquence qu'en application des dispositions du paragraphe 2 de l'article 29 du règlement, l'Etat requérant devient responsable de l'examen de la demande de protection internationale.
4. Le délai initial de six mois dont disposait le préfet de Maine-et-Loire pour procéder à l'exécution du transfert de M. D... vers l'Italie a été interrompu par la saisine du magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes. Ce délai a recommencé à courir à compter de la notification à l'administration du jugement du 4 septembre 2019 rendu par ce dernier. Il ressort des pièces du dossier que ce délai n'a pas fait l'objet d'une prolongation et que cet arrêté n'a pas reçu exécution pendant sa période de validité. Par suite, la décision de transfert litigieuse est devenue caduque sans avoir reçu de commencement d'exécution à la date du présent arrêt. La France est donc devenue responsable de l'examen de la demande d'asile sur le fondement des dispositions du 2 de l'article 29 du règlement n° 604/2013 rappelées ci-dessus. Le litige ayant perdu son objet, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. D... tendant à l'annulation du jugement du 4 septembre 2019 en tant que le magistrat désigné a rejeté ses conclusions dirigées contre l'arrêté du 1er août 2019 portant transfert vers l'Italie.
Sur les conclusions tendant à l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il a rejeté les conclusions dirigées contre l'arrêté portant assignation à résidence :
5. L'arrêté portant assignation à résidence de M. D... ayant été exécuté et ayant produit des effets, il y a lieu de se prononcer sur sa légalité.
En ce qui concerne l'exception d'illégalité de l'arrêté de transfert :
6. En premier lieu, aux termes de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 visé ci-dessus : " Droit à l'information /1. Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un Etat membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement, et notamment: /a) des objectifs du présent règlement et des conséquences de la présentation d'une autre demande dans un Etat membre différent ainsi que des conséquences du passage d'un Etat membre à un autre pendant les phases au cours desquelles l'Etat membre responsable en vertu du présent règlement est déterminé et la demande de protection internationale est examinée; /b) des critères de détermination de l'Etat membre responsable (...); /c) de l'entretien individuel en vertu de l'article 5 (...) ; /d) de la possibilité de contester une décision de transfert et, le cas échéant, de demander une suspension du transfert;/e) du fait que les autorités compétentes des Etats membres peuvent échanger des données le concernant aux seules fins d'exécuter leurs obligations découlant du présent règlement; /f) de l'existence du droit d'accès aux données le concernant (...). /2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend. Les Etats membres utilisent la brochure commune (...). Cette brochure commune comprend également des informations relatives à l'application du règlement (UE) n° 603/2013 et, en particulier, à la finalité pour laquelle les données relatives à un demandeur peuvent être traitées dans Eurodac. La brochure commune est réalisée de telle manière que les Etats membres puissent y ajouter des informations spécifiques aux Etats membres. Ces actes d'exécution sont adoptés en conformité avec la procédure d'examen visée à l'article 44, paragraphe 2, du présent règlement. / 3. Si c'est nécessaire à la bonne compréhension du demandeur, les informations lui sont également communiquées oralement, par exemple lors de l'entretien individuel visé à l'article 5. ". Enfin selon les dispositions de l'article 5 du même règlement : " 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'Etat membre responsable, l'Etat membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4 (...) " ;
7. Il résulte de ces dispositions que le demandeur d'asile auquel l'administration entend faire application du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 doit se voir remettre, en temps utile pour lui permettre de faire valoir ses observations, c'est-à-dire au plus tard lors de l'entretien prévu par les dispositions de l'article 5 du même règlement, entretien qui doit notamment permettre de s'assurer qu'il a compris correctement ces informations, l'ensemble des éléments prévus au paragraphe 1 de l'article 4 du règlement. Eu égard à la nature de ces informations, la remise par l'autorité administrative de la brochure prévue par les dispositions de l'article 4 du règlement du 26 juin 2013 citées au point précédent constitue pour le demandeur d'asile une garantie.
8. Au cas d'espèce, il ressort des pièces du dossier que M. D... s'est vu remettre, le 12 juillet 2019, lors de l'enregistrement de sa demande d'asile dans les services de la préfecture, et à l'occasion de son entretien individuel, les brochures A et B conformes aux modèles figurant à l'annexe X du règlement d'exécution (UE) n° 118/2014 de la Commission du 30 janvier 2014, et qui contiennent l'ensemble des informations prescrites par les dispositions précitées. Ces documents, dont les pages de garde ont été signées par l'intéressé, ont été remis au requérant en langue anglaise langue officielle du Nigéria qu'il a déclaré comprendre. Dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir que l'administration l'aurait privé d'une garantie au motif que l'information qui lui a été donnée par les services préfectoraux aurait dû l'être dès son passage dans la structure de pré-accueil qui l'avait accueilli. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du droit à l'information du demandeur d'asile énoncé à l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 doit être écarté.
9. En deuxième lieu, l'article 9 du règlement (UE) n° 603/2013 du 26 juin 2013, relatif à la collecte, à la transmission et à la comparaison des empreintes digitales, impose aux Etats membres de relever sans tarder et de transmettre dès que possible et au plus tard soixante-douze heures suivant l'introduction de la demande de protection internationale les données concernant les demandeurs d'asile.
10. L'article 29 relatif aux droits des personnes concernées édicte une obligation d'information des personnes relevant du règlement au moment où les empreintes digitales de la personne concernée sont prélevées. Le paragraphe 3 de cet article prévoit, au bénéfice des personnes concernées, la réalisation d'une brochure commune aux Etats membres dont le modèle figure à l'annexe X du règlement d'exécution (UE) n° 118/2014 de la Commission du 30 janvier 2014, dans laquelle figurent au moins les informations visées au paragraphe 1 du même article et celles visées à l'article 4, paragraphe 1, du règlement UE n° 604/2013 du 26 juin 2013. Les paragraphes 4 et 5 reconnaissent à toute personne concernée un droit d'accès, de rectification et d'effacement des données la concernant qui sont enregistrées dans le système central.
11. A la différence de l'obligation d'information instituée par le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, qui prévoit un document d'information sur les droits et obligations des demandeurs d'asile, dont la remise doit intervenir au début de la procédure d'examen des demandes d'asile pour permettre aux intéressés de présenter utilement leur demande aux autorités compétentes, l'obligation d'information prévue par les dispositions de l'article 18, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 2725/2000 du 11 décembre 2000, aujourd'hui reprises à l'article 29, paragraphe 1, du règlement (UE) n° 603/2013 du 26 juin 2013, a uniquement pour objet et pour effet de permettre d'assurer la protection effective des données personnelles des demandeurs d'asile concernés, laquelle est garantie par l'ensemble des Etats membres relevant du régime européen d'asile commun. Le droit d'information des demandeurs d'asile contribue, au même titre que le droit de communication, le droit de rectification et le droit d'effacement de ces données, à cette protection.
12. Il s'ensuit que la méconnaissance de cette obligation d'information ne peut être utilement invoquée à l'encontre des décisions par lesquelles l'Etat français refuse l'admission provisoire au séjour à un demandeur d'asile et remet celui-ci aux autorités compétentes pour examiner sa demande. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 29 du règlement (UE) n° 603/2013 du 26 juin 2013, qui est inopérant, ne peut, par suite, qu'être écarté.
13. En deuxième lieu, aux termes de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 susvisé : " 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'Etat membre responsable, l'Etat membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4. / (...) / 5. L'entretien individuel a lieu dans des conditions garantissant dûment la confidentialité. Il est mené par une personne qualifiée en vertu du droit national. (...) ".
14. D'une part, aucune disposition n'impose la mention sur le compte rendu de l'entretien individuel prévu à l'article 5 précité de l'identité de l'agent qui a mené l'entretien. Par suite, les services de la préfecture de la Loire-Atlantique, et en particulier les agents recevant les étrangers au sein du guichet unique des demandeurs d'asile mis en place dans cette préfecture, doivent être regardés comme ayant la qualité, au sens de l'article 5 précité du règlement n° 604/2013, de " personne qualifiée en vertu du droit national " pour mener l'entretien prévu à cet article.
15. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que l'entretien individuel a été mené par un agent de la préfecture avec l'assistance d'un interprète. Enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier que cet entretien individuel aurait été conduit dans des conditions qui n'en auraient pas garanti la confidentialité.
16. Enfin, il ressort du résumé de l'entretien individuel que l'intéressé a été interrogé sur son parcours migratoire, qu'il a déclaré être célibataire et n'avoir aucun enfant mineur en France ni dans un autre Etat membre, ni en Islande, Norvège, Suisse ou Liechtenstein. Il a également précisé avoir une soeur appelée Lynda Osaretin Egbobamwonyi, résidant légalement en France, n'avoir aucun autre membre de sa famille en France, dans un autre Etat membre, en Islande, Norvège, Suisse ou Liechtenstein et indiqué avoir déposé une demande d'asile en Italie et souffrir de rhumatismes et de douleurs à la main droite. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 5 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 doit être écarté.
17. En troisième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier et notamment des motifs de la décision de transfert litigieuse que le préfet n'aurait pas examiné les risques encourus par l'intéressé en cas de retour en Italie, en particulier au vu des problèmes de santé - rhumatismes et douleurs à la main droite - qu'il avait alors évoqués sans d'ailleurs les justifier par la production d'un quelconque certificat médical. Les éléments produits en appel, postérieurs à l'arrêté du 1er août 2019, qui sont sans lien avec les pathologies dont il faisait état, ne permettent pas d'établir qu'un suivi médical ne pourrait pas se poursuivre en Italie.
18. En quatrième lieu, aux termes du paragraphe 2 de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'Etat membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet Etat membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'Etat membre procédant à la détermination de l'Etat membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre Etat membre peut être désigné comme responsable. Lorsqu'il est impossible de transférer le demandeur en vertu du présent paragraphe vers un Etat membre désigné sur la base des critères énoncés au chapitre III ou vers le premier Etat membre auprès duquel la demande a été introduite, l'Etat membre procédant à la détermination de l'Etat membre responsable devient l'Etat membre responsable. ". Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. ".
19. Il résulte de ces dispositions que la présomption selon laquelle un Etat " Dublin " respecte ses obligations découlant de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est renversée en cas de défaillances systémiques de la procédure d'asile et des conditions d'accueil des demandeurs d'asile dans l'Etat membre responsable, impliquant un traitement inhumain ou dégradant subi par ces derniers.
20. M. D... soutient que les autorités italiennes sont confrontées à un afflux massif de migrants sans précédent, entraînant de grandes difficultés pour traiter les demandes d'asiles correspondantes et que, notamment, plusieurs observateurs ont relevé l'existence de difficultés dans l'accès aux soins en Italie. Toutefois, l'Italie est un Etat membre de l'Union européenne et partie tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complétée par le protocole de New-York, qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il doit alors être présumé que le traitement réservé aux demandeurs d'asile dans cet Etat membre est conforme aux exigences de ces deux conventions internationales. Si cette présomption peut être renversée lorsqu'il y a lieu de craindre qu'il existe des défaillances systémiques de la procédure d'asile et des conditions d'accueil des demandeurs d'asile dans l'Etat membre responsable, impliquant un traitement inhumain ou dégradant, M. D... n'établit pas l'existence de défaillances en Italie qui constitueraient des motifs sérieux et avérés de croire que sa demande d'asile ne serait pas traitée par les autorités italiennes dans des conditions conformes à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile. Par ailleurs, si un rapport de février 2018 de l'organisation non gouvernementale MSF révèle des défaillances, elles ne concernent que la gestion matérielle de l'accueil initial des flux de réfugiés arrivant dans certaines zones saturées du territoire, et ne sont pas structurelles, de sorte qu'elles ne sauraient être regardées comme révélant une défaillance systémique. Ainsi, les circonstances invoquées par M. D... ne suffisent pas à établir que le préfet de Maine-et-Loire aurait ainsi méconnu les dispositions du paragraphe 2 de l'article 3 précité du règlement (UE) du 26 juin 2013.
21. Pour le surplus, M. D... se borne à reprendre devant le juge d'appel le même moyen que celui invoqué en première instance sans plus de précisions ou de justifications et sans l'assortir d'éléments nouveaux. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par le premier juge et tirés de ce que l'arrêté du 1er août 2019 décidant son transfert est suffisamment motivé.
Sur les conclusions dirigées contre l'arrêté portant assignation à résidence :
22. Aux termes de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. L'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, lorsque cet étranger : (...) 1° bis Fait l'objet d'une décision de transfert en application de l'article L. 742-3 ou d'une requête aux fins de prise en charge ou de reprise en charge en application du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride (...) ".
23. En premier lieu, il résulte compte tenu de ce qui a été dit précédemment aux points 2 à 21 que M. D... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision de transfert contre la décision l'assignant à résidence.
24. En second lieu et pour le surplus, M. D... se borne à reprendre devant le juge d'appel les mêmes moyens que ceux invoqués en première instance sans plus de précisions ou de justifications et sans l'assortir d'éléments nouveaux. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par le premier juge et tirés de ce que l'arrêté du 1er août 2019 décidant son assignation à résidence n'est entaché ni d'une erreur manifeste d'appréciation ni n'est disproportionné quant à ses effets sur la situation personnelle de M. D... et ne méconnaît pas son droit à un recours effectif.
25. Il résulte de ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 1er août 2019 l'assignant à résidence. Par voie de conséquence doivent être rejetées les conclusions du requérant aux fins d'injonction ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. D... tendant à l'annulation du jugement du magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes du 4 septembre 2019 en tant qu'il rejette sa demande d'annulation de l'arrêté du 1er août 2019 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a décidé son transfert aux autorités italiennes.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. D... est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D... et au ministre de l'intérieur. Une copie sera transmise au préfet de Maine-et-Loire.
Délibéré après l'audience du 11 septembre 2020 à laquelle siégeaient :
- M. Lenoir, président de chambre,
- M. B..., président-assesseur,
- Mme Gélard, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 29 septembre 2020.
Le rapporteur,
O. B...
Le président,
H. LENOIR
La greffière
E. HAUBOIS
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 19NT04936 4