Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 6 juillet 2015 et complétée les 10 juillet 2015 et 26 janvier 2016, Mme B..., représentée par MeA..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1421945/3-3 du 2 juin 2015 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler cette décision préfectorale du 5 août 2014 ;
3°) à titre principal, d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dès la notification du présent arrêt sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;
4°) à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de police de procéder au réexamen de sa situation administrative dans un délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt sous astreinte de 200 euros par jour de retard et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour le temps nécessaire à ce réexamen ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la décision contestée est insuffisamment motivée ;
- cette décision est entachée d'erreur de droit dès lors que l'autorité préfectorale dispose du pouvoir de régulariser les ressortissants étrangers qui ne rempliraient pas les conditions légales et méconnaît tant les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 et que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, interprétés à la lumière des circulaires des 12 mai 1998 et 22 juillet 2011, ainsi que pour erreur manifeste d'appréciation.
La requête a été communiquée au préfet de police, qui n'a pas produit de mémoire en défense.
La demande d'aide juridictionnelle de Mme B...a été rejetée par une décision du 25 septembre 2015 du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Auvray,
- les conclusions de M. Ouardes, rapporteur public,
- et les observations de MeD..., pour MmeB....
1. Considérant que MmeB..., ressortissante malienne née le 2 novembre 1983 à Bandiougoula, a vainement sollicité son admission au séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace à l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...). L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) " ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que MmeB..., entrée régulièrement en France le 18 mars 2009 sous couvert d'un visa de court séjour où elle réside depuis lors chez ses parents, établit que ces derniers sont titulaires d'une carte de résident en cours de validité et que ses onze frères et soeurs vivent également en France, les huit qui y sont nés étant de nationalité française ou, pour les deux plus jeunes, ayant vocation à l'acquérir, l'aîné étant titulaire d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ; qu'en outre, le père de la requérante est arrivé en France en 1969 et sa mère en 1983, étant précisé que ce dernier est titulaire d'une pension de retraite versée par le régime général de la sécurité sociale et le régime complémentaire ; que si l'intéressée est venue rejoindre tardivement ses parents en France, elle fait valoir que c'est parce que, comme son frère aîné, elle a été confiée à sa grand-mère maternelle restée au Mali, qui y est décédée en 2001 ; que, dans ces conditions, Mme B...est fondée à soutenir que la décision contestée, par laquelle le préfet de police lui a refusé l'admission au séjour, porte à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elle a été prise ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Mme B...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
5. Considérant qu'eu égard au motif d'annulation de la décision contestée retenu par le présent arrêt, il y a lieu de faire droit aux conclusions de Mme B...tendant à ce que la Cour enjoigne au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt, sans qu'il y ait lieu d'assortir cette injonction de l'astreinte demandée ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 000 euros au titre des frais qu'a exposés Mme B...à l'occasion du litige soumis au juge et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1421945/3-3 en date du 2 juin 2015 du Tribunal administratif de Paris et la décision du 5 août 2014, par laquelle le préfet de police a refusé de délivrer une carte de séjour temporaire à Mme B...et l'a obligée à quitter le territoire français, sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de délivrer à Mme B...une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à Mme B...une somme de 1 000 (mille) euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme B...est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...B..., au ministre de l'intérieur et au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 2 février 2016 à laquelle siégeaient :
M. Krulic, président de chambre,
M. Auvray, président-assesseur,
M. Pagès, premier conseiller,
Lu en audience publique le 23 février 2016.
Le rapporteur,
B. AUVRAY
Le président,
J. KRULIC
Le greffier,
C. RENE-MINE
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice, à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15PA02660