Par une ordonnance n° 1600600/9 du 18 janvier 2016, le juge des référés du tribunal administratif de Paris a annulé la décision du préfet de police plaçant M. C... en rétention administrative.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 26 février 2016, M. C..., représenté par Me F..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1520664/8 du 21 décembre 2015 du tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de police du 17 décembre 2015 en tant qu'il lui fait obligation de quitter le territoire français, refuse de lui accorder un départ volontaire et fixe le pays de destination ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de réexaminer sa situation administrative et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que:
- l'arrêté attaqué est signé par une autorité incompétente ;
- il est insuffisamment motivé et entaché d'un défaut d'examen particulier de sa situation personnelle ;
- la décision lui refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les dispositions de l'article L. 313-11 (7°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
Par un mémoire en défense enregistré le 29 juin 2016, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens du requérant n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Amat ;
- les observations de Me Garavel, avocat de M.C....
1. Considérant que M.C..., ressortissant malien né en juin 1974 et résidant en France selon ses déclarations depuis octobre 2004, a fait l'objet de plusieurs refus de titre de séjour, assortis d'obligations de quitter le territoire français, par arrêtés des 29 décembre 2009, 28 novembre 2011 et 20 mai 2014 ; qu'il a été interpellé le 17 décembre 2015 à l'occasion d'un contrôle d'identité ; que, par arrêté du même jour, le préfet de police lui a fait obligation de quitter le territoire français, a fixé le pays de destination, lui a refusé l'octroi d'un délai de départ volontaire et l'a placé en rétention administrative ; que, par une ordonnance n° 1600600/9 du 18 janvier 2016, le juge des référés du tribunal administratif de Paris a annulé la décision du préfet de police plaçant M. C... en rétention administrative ; que M. C... relève appel du jugement du 21 décembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 décembre 2015, en tant qu'il lui fait obligation de quitter le territoire français, refuse de lui accorder un délai de départ volontaire et fixe le pays de destination ;
Sur les moyens communs aux trois décisions en litige :
2. Considérant, en premier lieu, que par un arrêté n° 2015-00612 du 20 juillet 2015, publié au bulletin municipal officiel de la ville de Paris le 24 juillet 2015, le préfet de police a donné délégation à M. B... E..., attaché d'administration à la direction de la police générale de la préfecture de police, pour signer notamment les décisions contenues dans l'arrêté attaqué ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté contesté doit être écarté comme manquant en fait ;
3. Considérant, en deuxième lieu, que l'arrêté attaqué, qui vise les dispositions applicables du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, comporte l'analyse précise et circonstanciée de la situation personnelle du requérant ; qu'il énonce que M. C...ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français et est dépourvu de titre de séjour en cours de validité, qu'il existe un risque qu'il se soustraie à l'obligation de quitter le territoire français dès lors qu'il ne présente pas de garanties de représentation suffisantes dans la mesure où il ne peut justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité, et, enfin, qu'il n'établit pas qu'il serait exposé à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine ; qu'ainsi l'arrêté attaqué comporte les considérations de fait et de droit sur lesquelles il est fondé ; que, par suite, le moyen tiré de son insuffisante motivation ne peut qu'être écarté ;
4. Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier et notamment des termes mêmes de la décision en litige que le préfet de police a procédé à un examen particulier de la situation personnelle du requérant avant de refuser de lui délivrer un titre de séjour ;
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
5. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée (...) " ;
6. Considérant que si M. C... travaille en qualité d'agent d'entretien depuis le mois de décembre 2010, il n'en demeure pas moins que, célibataire et sans charge de famille en France, il n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où il a vécu au moins jusqu'à l'âge de 30 ans ; que si M. C...fait valoir que les nombreuses pièces qu'il produit attestent de sa présence habituelle en France depuis près de douze ans, elles sont trop peu variées et insuffisamment nombreuses pour établir sa résidence habituelle entre 2004 et 2015 ; qu'en particulier, les documents qu'il produit au titre des années 2005, 2006, 2007 et 2008 sont essentiellement constitués de factures pourvues d'une force probante limitée et d'avis de non imposition ; que, dans ces conditions, c'est sans méconnaître les stipulations et dispositions précitées, ni commettre d'erreur manifeste quant à l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de M. C..., que le préfet de police a pu l'obliger à quitter le territoire français ;
Sur la décision refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire :
7. Considérant qu'aux termes de l'article de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) II. - Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours. Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : (...) 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : a) Si l'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; b) Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France, sans avoir sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; c) Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après l'expiration de son titre de séjour, de son récépissé de demande de carte de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour, sans en avoir demandé le renouvellement ; d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ; e) Si l'étranger a contrefait, falsifié ou établi sous un autre nom que le sien un titre de séjour ou un document d'identité ou de voyage ; f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité, ou qu'il a dissimulé des éléments de son identité, ou qu'il n'a pas déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente, ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues par les articles L. 513-4, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2 " ;
8. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. C...n'a présenté lors de son interpellation aucun document de voyage en cours de validité ni aucun document l'autorisant à séjourner en France ; qu'il est constant qu'il s'était soustrait à l'exécution des obligations de quitter le territoire français notifiées en 2009 et 2014 ; qu'ainsi il se trouvait dans un cas où le risque qu'il se soustraie à l'obligation de quitter le territoire français était présumé établi ; que si M. C...fait valoir qu'il disposait d'une adresse stable, travaillait et avait entrepris des démarches pour sa régularisation, il n'établit pas qu'il avait l'intention de quitter volontairement la France ou que des circonstances particulières justifiaient qu'un délai lui soit accordé pour ce faire ; qu'ainsi il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de police aurait commis une erreur d'appréciation en refusant de lui accorder un délai de départ volontaire ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 1er décembre 2016, à laquelle siégeaient :
- Mme Pellissier, présidente de chambre,
- M. Diémert, président-assesseur,
- Mme Amat, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 15 décembre 2016.
Le rapporteur,
N. AMATLa présidente,
S. PELLISSIERLe greffier,
M. A...La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 16PA00801