Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 16 janvier 2020, Mme D..., représentée par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1914796 du 12 décembre 2019 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler l'arrêté du 19 février 2019 ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour portant la mention " vie privée ou familiale " ou à défaut " salarié ", dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 15 euros par jour de retard et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;
4°) à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de police de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la décision de refus de renouvellement de son titre de séjour est insuffisamment motivée et entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation compte tenu des conséquences de la décision sur sa situation personnelle ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire doit être annulée compte tenu de l'illégalité de la décision de refus de séjour ;
- elle méconnaît l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision fixant le pays de renvoi n'est pas motivée et doit être annulée compte tenu de l'illégalité de la décision d'éloignement.
Par un mémoire en défense enregistré le 15 avril 2021, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif, notamment son article 5.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. A... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme C... D..., ressortissante de la république du Congo née le 24 juillet 1967, a été titulaire de cartes de séjour temporaire mention " visiteur " valables du 26 juin 2009 au 25 juin 2012, puis d'une carte de séjour temporaire mention " salarié " valable du 18 mai 2015 au 17 mai 2016. Elle a sollicité, le 19 octobre 2017, le renouvellement de son titre de séjour. Par un arrêté du 19 février 2019, le préfet de police a rejeté sa demande, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai d'un mois et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement. Mme D... fait appel du jugement du 12 décembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne le refus de titre de séjour :
2. En premier lieu, pour refuser d'accorder un titre de séjour en tant salariée à Mme D..., le préfet de police a visé les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il a ensuite relevé que le service de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi avait refusé, le 11 décembre 2017, de lui délivrer une autorisation de travail. Il a également exposé des éléments suffisants sur la situation personnelle et familiale de l'intéressée en relevant qu'elle est célibataire et sans charge de famille en France. Le refus de titre de séjour comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Ainsi, et alors même que ces motifs ne reprennent pas l'ensemble des éléments caractérisant la situation de l'intéressée, notamment la circonstance qu'elle a bénéficié de titres de séjour temporaire, une telle motivation satisfait aux exigences de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté attaqué manque en fait et doit être écarté.
3. En deuxième lieu, il ne ressort pas des termes de la décision qu'elle serait entachée d'un défaut d'examen de la situation de Mme D....
4. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
5. Mme D... se prévaut de l'ancienneté de sa présence en France et de son intégration professionnelle. Il ressort des pièces du dossier qu'elle est entrée en France en 2007 et qu'elle a été titulaire de cartes de séjour temporaire mention " visiteur " valables du 26 juin 2009 au 25 juin 2012, alors qu'elle était membre actif de la congrégation des oblates du coeur de Jésus, puis d'une carte de séjour temporaire mention " salarié " valable du 18 mai 2015 au 17 mai 2016. Elle justifie en outre avoir travaillé pour la société 2L Nettoyages de mars 2012 à novembre 2013 puis pour la société Entreprise Nettoyage Services à compter de décembre 2016. Toutefois, ainsi qu'il a été dit, le service de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi a refusé, le 11 décembre 2017, de lui délivrer une autorisation de travail. Il ressort en outre des pièces du dossier qu'elle est célibataire, sans charge de famille et qu'elle n'est pas dépourvue d'attaches dans son pays d'origine où elle a vécu, selon ses déclarations, jusqu'à l'âge de 40 ans. Dans ces conditions, malgré la durée de son séjour et sa situation professionnelle, le préfet de police n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport au but poursuivi et le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté.
6. Pour les mêmes motifs, le préfet de police n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de Mme D....
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
7. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas dépourvue de base légale du fait de l'illégalité de la décision de refus de titre.
8. En second lieu, aux termes de l'article L. 514-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 4° L'étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de dix ans, saut s'il a été, pendant toute cette période, titulaire d'une carte de séjour temporaire ou pluriannuelle portant la mention " étudiant " (...) ".
9. Si Mme D... soutient qu'elle ne pouvait faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français dès lors qu'elle réside régulièrement en France depuis plus de dix ans, elle ne l'établit pas.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
10. En premier lieu, compte tenu de ce qui précède, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de retour est illégale compte tenu de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français, ne peut qu'être écarté.
11. En second lieu, l'arrêté litigieux comporte l'exposé des considérations de droit et de fait sur lesquelles le préfet de police s'est fondé pour refuser à Mme D... un titre de séjour, vise l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et mentionne qu'elle n'établit pas être exposée à des peines ou traitements contraires à cette convention en cas de retour dans son pays d'origine. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation de la décision fixant le pays de renvoi ne peut qu'être écarté.
12. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Sa requête, y compris ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doit ainsi être rejetée.
DÉCIDE :
Article 1er : la requête de Mme D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... D..., au préfet de police et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 22 avril 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Diémert, président de la formation de jugement en application des articles L. 234-3 (1er alinéa) et R. 222-6 (1er alinéa) du code de justice administrative,
- M. Gobeill, premier conseiller,
- M. A..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 20 mai 2021.
Le président,
S. DIÉMERT
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 20PA00138 2