Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 30 novembre 2018, M.A..., représenté par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'admettre M. A...au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;
2°) d'annuler le jugement n° 1810204/3-1 du 19 juillet 2018 du tribunal administratif de Paris ;
3°) d'annuler l'arrêté du 31 mai 2018 du préfet de police ;
4°) d'enjoindre au préfet de police de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement ;
5°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et d'ordonner son versement à Me B...en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- sans ressources, il a demandé l'aide juridictionnelle le 14 novembre 2018 mais n'a pas reçu de réponse ;
- sa requête est recevable car la décision constatant la caducité de sa demande d'aide juridictionnelle du 20 juillet 2018, qui a conservé le délai de recours, lui a été notifiée le 6 novembre 2018 ;
- le jugement est irrégulier car il n'est pas signé en méconnaissance des dispositions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;
- il est insuffisamment motivé ;
- en rejetant le recours de M.A..., le premier juge a porté atteinte au principe du non-refoulement ;
- l'arrêté litigieux est irrégulier car M. A...n'a pas été entendu, en méconnaissance du principe du droit au respect du contradictoire et de ceux de bonne administration et de respect des droits de la défense consacrés par les articles 41 et 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- l'arrêté est insuffisamment motivé ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation ;
- l'arrêté méconnait l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- il méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense enregistré le 19 avril 2019, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de la requête sont infondés.
Par une décision du 20 mai 2019 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Paris, M. A...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention de Genève du 28 juillet 1951 ;
- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Pellissier a été entendu au cours de l'audience publique.
1. M.A..., ressortissant mauritanien né en décembre 1980 et entré en France en mai 2015 selon ses déclarations, y a sollicité l'asile. Sa demande a été rejetée le 30 novembre 2016 par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) et le 3 avril 2017 par la Cour nationale du droit d'asile. Sa demande de réexamen a été rejetée pour irrecevabilité le
9 mars 2018 par l'OFPRA. Par un arrêté du 31 mai 2018, le préfet de police a, sur le fondement du 6° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, fait obligation à M. A... de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. A...fait appel du jugement du 19 juillet 2018 par lequel le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.
Sur l'admission à l'aide juridictionnelle provisoire :
2. Le président du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Paris a, par une décision du 20 mai 2019, admis M. A... au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, les conclusions présentées par l'intéressé aux fins d'admission au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire sont devenues sans objet.
Sur la régularité du jugement :
3. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier de première instance que la minute du jugement a été signée, conformément aux dispositions du deuxième alinéa de l'article R. 741-8 du code de justice administrative par le magistrat statuant seul et le greffier d'audience.
4. En deuxième lieu, le premier juge a suffisamment répondu, aux points 3, 7 et 8, puis 9 de son jugement, aux moyens soulevés en première instance par M. A...et tirés de l'insuffisante motivation de l'arrêté et de la méconnaissance des articles 8 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
5. Enfin, à supposer que, comme le soutient M.A..., le premier juge ait commis une erreur d'appréciation en estimant qu'il pouvait être renvoyé sans risque vers la Mauritanie et méconnu le principe de non-refoulement des réfugiés, cette erreur, dont il appartient au juge d'appel de connaitre dans le cadre de l'effet dévolutif, affecterait le bien-fondé et non la régularité du jugement.
Sur le bien-fondé du jugement :
6. L'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 6° Si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou si l'étranger ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 743-1 et L. 743-2 (...). La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée (...) ".
7. En premier lieu, l'arrêté attaqué indique de façon précise qu'il est fondé sur le 6° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il mentionne en outre la nationalité et la date de naissance de M.A..., la date de son entrée en France, celle de sa demande de réexamen de sa demande d'asile, et précise qu'en application de l'article L. 743-2 (4°) du même code, le recours introduit par M. A...contre la décision d'irrecevabilité prise le 9 mars 2018 par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides sur cette demande de réexamen n'a pas d'effet suspensif. Il comporte ainsi l'ensemble des éléments de fait et de droit sur lesquels le préfet de police s'est fondé pour prononcer une obligation de quitter le territoire français, sans qu'il soit utile de détailler les autres éléments de fait qui l'ont amené à considérer que son arrêté ne méconnaissait ni l'article 8 ni l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Le moyen tiré de l'insuffisante motivation de l'arrêté, notamment au regard des dispositions des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration, et celui tiré du défaut d'examen particulier de la demande doivent être écartés.
8. En deuxième lieu, les dispositions de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ne sont pas en elles-mêmes invocables par un étranger faisant l'objet d'une mesure d'éloignement telle qu'une obligation de quitter le territoire français, dès lors qu'elles ne créent pas d'obligation pour les États membres mais uniquement pour les institutions, organes et organismes de l'Union. Cet étranger peut néanmoins utilement faire valoir que le principe général du droit de l'Union relatif au respect des droits de la défense impose qu'il soit mis à même de présenter toute observation utile sur la mesure d'éloignement envisagée. Dans le cas prévu au 6° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la décision faisant obligation à un étranger de quitter le territoire français est prise après que la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire lui a été refusé et découle du défaut de reconnaissance de cette qualité ou de ce bénéfice. Il appartient à l'étranger, qui ne saurait ignorer qu'en cas de rejet de sa demande d'asile il est susceptible de faire l'objet d'une mesure d'éloignement immédiate, d'apporter, tant lors du dépôt de sa demande qui doit en principe faire l'objet d'une présentation personnelle en préfecture, que postérieurement en cas d'évolution de sa situation, toutes précisions utiles, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux qui justifieraient son admission au séjour en France en application d'autres dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dans les circonstances de l'espèce, M. A..., qui a personnellement formulé le 23 février 2018 en préfecture une demande de réexamen de sa demande d'asile, rejetée le
9 mars 2018, n'allègue même pas avoir été empêché de faire connaitre avant la décision litigieuse du 31 mai 2018 des éléments s'opposant à ce qu'il lui soit fait obligation de quitter le territoire français. Le moyen tiré de la violation du respect des droits de la défense et du droit d'être entendu doit être écarté. Le moyen tiré de ce que l'arrêté méconnaitrait les dispositions de l'article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, qui garantissent le droit à un recours effectif et l'accès à un tribunal impartial, n'est assorti d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé et doit également être écarté.
9. En troisième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'obligation de quitter le territoire français porte au droit de M. A..., âgé de 37 ans à la date de la décision litigieuse et résidant en France depuis trois ans pour les besoins de l'examen de sa demande d'asile, une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté.
10. En dernier lieu, M. A...fait valoir qu'il craint de subir en Mauritanie des traitements proscrits par l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Ce moyen, qui n'est opérant qu'à l'encontre de la décision fixant le pays de renvoi, doit être écarté par adoption des motifs retenus par le premier juge aux points 9 et 10 de son jugement. M. A...ne pouvant être regardé comme réfugié, il n'est pas fondé à invoquer le principe de non-refoulement proclamé par la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur les réfugiés.
11. Il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du préfet de police du 31 mai 2018 lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi. Sa requête d'appel ne peut qu'être rejetée, y compris les conclusions à fin d'injonction et celles tendant à ce que l'État, qui n'est pas partie perdante, supporte les frais de procédure sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative ou 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
DÉCIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la demande d'admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle présentée par M.A....
Article 2 : La requête de M. A...est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...A...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 9 mai 2019, à laquelle siégeaient :
- Mme Pellissier, présidente de chambre,
- M. Diémert, président-assesseur,
- M. Legeai, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 23 mai 2019.
Le président-assesseur,
S. DIÉMERT La présidente de chambre,
rapporteur
S. PELLISSIER Le greffier,
M. C...La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18PA03737