Par une requête enregistrée le 2 mai 2019, Mme A... B..., représentée par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1708252 du 5 avril 2019 du tribunal administratif de Melun ;
2°) d'annuler l'arrêté du 25 septembre 2017 du préfet du Val-de-Marne ;
3°) d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Mme A... B... soutient que :
- elle est fondée à obtenir un titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet a méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- sa situation lui ouvre droit à régularisation, sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'obligation de quitter le territoire français est illégale par voie de conséquence ;
- dès lors qu'elle peut obtenir un titre de séjour de plein droit sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, elle ne peut être obligée de quitter le territoire français.
La requête a été communiquée au préfet du Val-de-Marne qui n'a pas présenté de mémoire en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- 1'accord du 17 mars 1988 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Tunisie en matière de séjour et de travail ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. F... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A... B..., ressortissante tunisienne, a sollicité son admission exceptionnelle au séjour, sur le fondement des articles L. 313-10 et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 25 septembre 2017, le préfet du Val-de-Marne a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office. Mme A... B... fait appel du jugement du 5 avril 2019 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. En premier lieu, aux termes de l'article 7 quater de l'accord du 17 mars 1988 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Tunisie en matière de séjour et de travail : " Sans préjudice des dispositions du b) et du d) de l'article 7 ter, les ressortissants tunisiens bénéficient dans les conditions prévues par la législation française, de la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
3. Il ressort des pièces du dossier que Mme A... B... n'est entrée en France qu'en mars 2013, soit depuis moins de cinq ans à la date de l'arrêté attaqué, à l'âge de 50 ans, sous couvert d'un visa de court séjour, puis s'y est maintenue en situation irrégulière avant de solliciter son admission au séjour en septembre 2015. Si elle se prévaut de la présence régulière en France de son fils majeur et de la résidence habituelle sur le territoire de sa fille majeure, sans qu'il soit d'ailleurs contesté, ainsi que le mentionne l'arrêté attaqué, que cette dernière fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français, ces circonstances ne lui ouvrent pas droit au séjour en France, de même que les circonstances tirées de ce que la requérante est entrée en France à la suite du décès de son époux en Tunisie en 2012 et que sa mère ainsi que sa fratrie résident régulièrement sur le territoire français. Par ailleurs, la requérante n'allègue pas disposer de ressources en France et ne justifie pas de ses conditions d'existence ni d'aucune insertion privée ou professionnelle sur le territoire français. En outre, si Mme A... B..., qui n'a pas sollicité de titre de séjour en qualité d'étranger malade, se prévaut de son état de santé, elle n'apporte aucun élément probant qui permettrait de supposer qu'elle ne pourrait pas bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé en Tunisie et que sa présence en France auprès sa famille serait nécessaire pour bénéficier d'un soutien psychologique et d'une aide matérielle. Dans ces conditions, compte tenu de la durée et des conditions du séjour en France de Mme A... B..., le préfet du Val-de-Marne n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport au but poursuivi et n'a ainsi pas méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans (...) ".
5. Pour les mêmes motifs que ceux mentionnés au point 3, Mme A... B... ne peut être regardée comme justifiant de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels pour l'application de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
6. En troisième lieu, compte tenu de ce qui a été dit au point 3, les moyens tirés de ce que l'obligation de quitter le territoire français est illégale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour et de ce que la possibilité d'obtenir un titre de séjour de plein droit, sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ferait obstacle à ce que soit édictée une obligation de quitter le territoire français doivent être écartés.
7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Sa requête, y compris ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doit ainsi être rejetée.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme A... B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme G... A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Val-de-Marne.
Délibéré après l'audience du 3 octobre 2019, à laquelle siégeaient :
- Mme E..., présidente,
- M. Legeai, premier conseiller,
- M. F..., premier conseiller.
Lu en audience publique, le 24 octobre 2019.
Le rapporteur,
F. F...La présidente,
S. E...
Le greffier,
M. D...La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N° 19PA01481