Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 22 mai 2017, M. et Mme A..., représenté par Me C...du cabinet Luzellance avocats, demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1500540/7 du 23 mars 2017 du Tribunal administratif de Melun ;
2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2010 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- l'exercice par l'administration de son droit de communication était irrégulier ;
- l'irrégularité de l'envoi d'une mise en demeure de payer malgré le dépôt d'une réclamation d'assiette assortie d'une demande de sursis de paiement entraîne la nullité de la procédure d'imposition ; le jugement n'est pas motivé en droit sur ce point ;
- le fait générateur de la réduction d'impôt est la livraison des centrales photovoltaïque ; cette livraison est constituée par la remise des titres souscrits au 23 juillet 2010 ;
- les critères d'éligibilité à la réduction d'impôt sur lesquels l'administration fiscale s'est fondée ne sont pas prévus par les textes ;
- à titre subsidiaire, ils doivent obtenir le bénéfice de la réduction d'impôt au titre de l'année 2011.
La présente affaire a été dispensée d'instruction par ordonnance du 14 juin 2017, sur le fondement de l'article R. 611-8 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Vu la décision du Conseil d'Etat n° 398405 du 26 avril 2017.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Jimenez,
- les conclusions de M. Cheylan, rapporteur public,
- et les observations de Me C..., représentant M. et MmeA....
1. Considérant que M. et Mme A...ont imputé sur leur impôt sur le revenu au titre de l'année 2010, sur le fondement des dispositions de l'article 199 undecies B du code général des impôts, une réduction d'impôt résultant d'investissements productifs réalisés outre-mer par les sociétés en participation (SEP) Sunra 063, Sunra 064 et Sunra 065, dont ils étaient les associés, consistant en l'acquisition de centrales photovoltaïques, mises en location auprès de sociétés exploitantes dédiées ; que cette réduction d'impôt a été remise en cause par l'administration fiscale au motif que les investissements correspondants n'avaient pas été réalisés avant le
31 décembre 2010 ; que M. et Mme A...relèvent appel du jugement du 23 mars 2017 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté leur demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2010 en conséquence de la reprise de la réduction d'impôt ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 81 du livre des procédures fiscales : " Le droit de communication permet aux agents de l'administration, pour l'établissement de l'assiette et le contrôle des impôts, d'avoir connaissance des documents et des renseignements mentionnés aux articles du présent chapitre dans les conditions qui y sont précisées (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 83 du même livre : " Les administrations de l'Etat, des départements et des communes, les entreprises concédées ou contrôlées par l'Etat, les départements et les communes ainsi que les établissements ou organismes de toute nature, soumis au contrôle de l'autorité administrative, doivent communiquer à l'administration, sur sa demande, les documents de services qu'ils détiennent sans pouvoir opposer le secret professionnel (...) " ; que, par ailleurs, aux termes des dispositions de l'article L. 85 du même livre : " Les contribuables doivent communiquer à l'administration, sur sa demande, les livres dont la tenue est rendue obligatoire par les articles L. 123-12 à L. 123-28 du code de commerce ainsi que tous les livres et documents annexes pièces de recettes et de dépenses. A l'égard des sociétés, le droit de communication porte également sur les registres de transfert d'actions et d'obligations et sur les feuilles de présence aux assemblées générales " ;
3. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que le droit de communication exercé auprès des entreprises industrielles ou commerciales a seulement pour objet de permettre à l'administration fiscale, pour l'établissement et le contrôle de l'imposition d'un contribuable, de demander à un tiers ou, éventuellement au contribuable lui-même, sur place ou par correspondance, de manière ponctuelle, des renseignements disponibles sans que cela nécessite d'investigations particulières ou, dans les mêmes conditions, de prendre connaissance et, le cas échéant, copie de certains documents existants qui se rapportent à l'activité professionnelle de la personne auprès de laquelle ce droit est exercé ; que les documents dont la communication peut être demandée par l'administration fiscale comprennent non seulement les documents comptables et financiers, mais aussi les documents de toute nature pouvant justifier le montant des recettes et dépenses ;
4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, pour procéder aux redressements litigieux, l'administration fiscale a notamment mis en oeuvre son droit de communication auprès du fournisseur d'électricité, la société EDF, pour obtenir de celle-ci les dates de demandes de raccordement complètes, de réception de l'attestation du Consuel et de mise en production effective des centrales photovoltaïques acquises auprès de la SAS Sfer ; que si M. et Mme A...soutiennent que les documents communiqués à l'administration par EDF ne seraient pas des documents comptables dont la tenue est rendue obligatoire pour les sociétés en vertu des articles L. 123-12 à L. 123-18 du code de commerce, l'administration était en droit, sur le fondement de l'article L. 83 précité, de demander à la société EDF la communication de toute pièce de nature à établir un droit ou à faire la preuve d'un fait se rapportant à l'exécution des tâches dont les administrations, entreprises, établissements ou organismes visés à cet article ont la charge ; qu'en réponse à l'exercice du droit de communication, la société EDF a transmis des attestations mentionnant pour chacune des sociétés en nom collectif (SNC) exploitante d'une centrale photovoltaïque la date de demande de raccordement complète ; que si les requérants soutiennent que les informations transmises par la société EDF ne concerneraient pas les sociétés dans lesquelles ils ont investi, ils n'apportent aucun élément à l'appui de leurs allégations, alors que la charge de la preuve leur incombe, s'agissant de sommes dont ils demandent la déductibilité de leurs revenus, et qu'il résulte des mentions non contestées de la proposition de rectification du
24 avril 2013 que lesdites SNC visées dans les attestations en cause sont les sociétés exploitantes des centrales photovoltaïques appartenant aux SEP Sunra 063, Sunra 064 et Sunra 065 ; que, dans ces conditions, les attestations établies par EDF constituent des documents de service, sans que les requérants ne puissent valablement opposer la doctrine administrative
BOI-CF-COM-10-20-10-20120912 dont ils se prévalent qui est relative à la procédure d'imposition ; que, dès lors, le moyen tiré de l'irrégularité de l'exercice du droit de communication doit être écarté ;
5. Considérant, en second lieu, que les requérants ne peuvent utilement se prévaloir, dans le cadre d'un contentieux d'assiette, de l'irrégularité de la procédure de recouvrement ; que, par suite, le moyen tiré de l'irrégularité de l'envoi d'une mise en demeure de payer malgré le dépôt d'une réclamation d'assiette assortie d'une demande de sursis de paiement doit être écarté comme inopérant ;que, dès lors ils ne soutiennent pas utilement, en tout état de cause que le jugement attaqué était insuffisamment motivé sur ce point ;
Sur le bien-fondé de l'imposition :
6. Considérant qu'aux termes de l'article 199 undecies B du code général des impôts, dans sa rédaction alors en vigueur : " I. Les contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B peuvent bénéficier d'une réduction d'impôt sur le revenu à raison des investissements productifs neufs qu'ils réalisent dans les départements d'outre-mer (...) dans le cadre d'une entreprise exerçant une activité agricole ou une activité industrielle, commerciale ou artisanale relevant de l'article 34 (...) " ; qu'aux termes du vingtième alinéa du même article : " La réduction d'impôt prévue au premier alinéa est pratiquée au titre de l'année au cours de laquelle l'investissement est réalisé. (...). " ; qu'aux termes de l'article 95 K de l'annexe II à ce code : " Les investissements productifs neufs réalisés dans les départements d'outre-mer (...) qui ouvrent droit à la réduction d'impôt prévue au I de l'article 199 undecies B du code général des impôts sont les acquisitions ou créations d'immobilisations corporelles, neuves et amortissables, affectées aux activités relevant des secteurs éligibles en vertu des dispositions du I de cet article " ; qu'aux termes de l'article 95 Q de la même annexe : " La réduction d'impôt prévue au I de l'article 199 undecies B du code général des impôts est pratiquée au titre de l'année au cours de laquelle l'immobilisation est créée par l'entreprise ou lui est livrée (...) " ;
7. Considérant qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que le fait générateur de la réduction d'impôt prévue à l'article 199 undecies B est la date de la création de l'immobilisation au titre de laquelle l'investissement productif a été réalisé ou de sa livraison effective dans le département d'outre-mer ; que, dans ce dernier cas, la date à retenir est celle à laquelle l'entreprise, disposant matériellement de l'investissement productif, peut commencer son exploitation effective et, dès lors, en retirer des revenus ; que, par suite, s'agissant de l'acquisition de centrales photovoltaïques installées sur les toits des habitations des particuliers et données en location à des sociétés en vue de leur exploitation pour la production et la vente d'énergie électrique, la date à retenir est celle du raccordement des installations au réseau public d'électricité, dès lors que les centrales photovoltaïques, dont la production d'électricité a vocation à être vendue par les sociétés exploitantes, ne peuvent être effectivement exploitées et par suite productives de revenus qu'à compter de cette date ; qu'il est constant que les centrales photovoltaïques dans lesquelles avaient investi les SEP dont les requérants étaient les associés n'étaient pas raccordées au réseau public d'électricité au 31 décembre 2010 ; que, par suite, et dès lors qu'il n'est pas contesté que l'électricité produite n'avait pas vocation à être consommée et stockée par les sociétés exploitantes, l'administration était fondée, pour ce seul motif, à remettre en cause la réduction d'impôt reportée par M. et Mme A...sur leur impôt sur le revenu de l'année 2010 ; que, dans ces conditions, les requérants ne sauraient utilement soutenir que l'administration fiscale, en retenant comme critères le raccordement au réseau électrique et l'obtention du certificat de conformité du Consuel avant le 31 décembre de l'année 2010, impose le respect de conditions non prévues par la loi ;
Sur la demande subsidiaire tendant au bénéfice de la réduction d'impôt au titre de l'année 2011 :
8. Considérant que le moyen tiré de ce que M. et Mme A...peuvent bénéficier de la réduction d'impôt au titre de 2011 en vertu des dispositions de l'article 36 de la loi du 29 décembre 2010 puisqu'ils ont souscrit les investissements avant le 29 septembre 2010 est inopérant dans le présent litige, dès lors que les intéressés ont présenté, tant en première instance qu'en appel, des conclusions exclusivement afférentes à l'année 2010 ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté leur demande ; que, par voie de conséquence, leur requête d'appel ne peut qu'être rejetée, ensemble leurs conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B... A...et au ministre de l'action et des comptes publics.
Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris.
Délibéré après l'audience du 11 avril 2018, à laquelle siégeaient :
- Mme Brotons, président de chambre,
- Mme Appèche, président assesseur,
- Mme Jimenez, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 9 mai 2018.
Le rapporteur,
J. JIMENEZLe président,
I. BROTONS
Le greffier,
P. LIMMOIS
La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17PA01733