3°) d'annuler la décision n° 2015-136 du 25 mars 2015 par laquelle le Conseil supérieur de l'audiovisuel a autorisé la SAS Radio Nostalgie Réseau à exploiter un service de radio de catégorie C par voie hertzienne en modulation de fréquence dénommé " Nostalgie Lens " ;
4°) d'enjoindre au Conseil supérieur de l'audiovisuel de réexaminer sa candidature ;
5°) de mettre à la charge du Conseil supérieur de l'audiovisuel la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le Conseil supérieur de l'audiovisuel ne démontre pas qu'il était régulièrement composé, en particulier que six au moins de ses membres étaient présents lors de la séance au cours de laquelle les décisions attaquées ont été adoptées ni qu'elles ont été adoptées à la majorité des membres présents ;
- il n'apparaît pas que les sociétés qui ont obtenues l'attribution des fréquences litigieuses auraient présenté des dossiers de candidature complets ;
- la décision du 25 mars 2015 rejetant sa candidature est insuffisamment motivée ;
- en ayant considéré qu'elle était susceptible de répondre dans une moindre mesure à l'intérêt du public de la zone que " Radio FG " et " Nostalgie Lens ", le CSA semble avoir fait de la " variété française " un genre musical à part entière commettant ainsi une erreur de droit ;
- ce faisant, il a également entaché sa décision d'erreur d'appréciation dans la mise en oeuvre des critères énoncés à l'article 29 de la loi du 30 septembre 1986, notamment de l'impératif prioritaire de diversification des opérateurs ;
- le CSA aurait dû prendre en compte la diversité musicale proposée par Chante France et analyser de manière détaillée ses programmes afin de les comparer aux autres radios émettant dans la zone ;
- c'est à tort que le CSA a considéré qu'elle viserait un public similaire à celui des radios " Mona FM " et " Chérie FM " déjà autorisées dans la zone alors qu'elle est la seule à proposer une programmation musicale exclusivement francophone ;
- Chante France est cantonnée par le CSA dans une dimension locale et ne dispose que de deux fréquences sur l'ensemble du territoire.
Par un mémoire en défense et un mémoire complémentaire, enregistrés les 1er février et 11 octobre 2016, le Conseil supérieur de l'audiovisuel conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- le moyen tiré de l'irrégularité de la composition du conseil lors de la réunion plénière du 25 mars 2015 manque en fait ;
- le moyen tiré de ce que les dossiers des candidats retenus n'auraient pas été complets, outre qu'il est soulevé sans aucun commencement de preuve, manque également en fait ;
- la décision rejetant la candidature de " Chante France " est suffisamment motivée ;
- la circonstance que le conseil ait estimé que la variété française revêtait les caractéristiques d'un genre musical ne saurait constituer ni une erreur de droit ni une erreur d'appréciation ;
- il demande néanmoins à la Cour de bien vouloir substituer au motif de fait retenu dans la décision du 25 mars 2015 en ce qu'elle rejette la candidature de la société Chante France développement tiré de ce que la programmation essentiellement musicale de cette radio est " dédiée exclusivement à la variété française ", le motif selon lequel la programmation essentiellement musicale de Chante France est " dédiée exclusivement à la chanson française et essentiellement à la variété française " ; que le conseil aurait pris la même décision s'il n'avait pas commis l'erreur matérielle en question ;
- la circonstance que la programmation de " Chante France " comporte 100% de chansons françaises, si elle constitue une spécificité du format du service, n'est pas, à elle seule, suffisante pour établir que le conseil aurait commis une erreur d'appréciation en ne retenant pas le service édité par la requérante ;
- le CSA a pu, sans commettre d'erreur de droit, estimer que le public de la zone de Lens était susceptible d'être davantage intéressé par un service proposant un programme d'intérêt local tel que " Nostalgie Lens " que par le service " Chante France " ;
- dès lors que la programmation musicale de " Chante France " était partiellement représentée dans la zone de Lens par plusieurs services déjà autorisés, à savoir " Chérie FM " et " Mona FM ", la décision en cause n'est pas entachée d'erreur d'appréciation ;
- alors que seulement deux services étaient principalement consacrés à un public jeune, le choix de " Radio FG " pouvait régulièrement apparaître comme susceptible de satisfaire dans une plus grande mesure le public de la zone que " Chante France ".
Par un mémoire, enregistré le 28 octobre 2016, la SAS Nostalgie Réseau conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 4 000 euros soit mise à la charge de la SARL Chante développement au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête est doublement irrecevable en ce qu'elle est dirigée contre la décision par laquelle le service Nostalgie Lens a été autorisée ;
- à titre subsidiaire, et sur le fond, aucun des moyens soulevés par l'appelante n'est fondé.
Par un mémoire, enregistré le 8 novembre 2016, la SAS FG Concept conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 4 000 euros soit mise à la charge de la SARL Chante développement au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient qu'aucun des moyens soulevés par l'appelante n'est fondé.
Vu :
- les autres pièces du dossier ;
- la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Pena, rapporteur,
- les conclusions de Mme Delamarre, rapporteur public,
- et les observations de Me B... pour la société Radio Nostalgie Réseau.
1. Considérant que, par une décision du 24 juillet 2013, le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) a lancé un appel à candidature pour l'exploitation de services de radio par voie hertzienne en modulation de fréquence à temps complet ou à temps partagé dans le ressort du comité territorial de l'audiovisuel de Lille, dont une fréquence pour la zone de Lens ; que la SARL Chante France développement demande l'annulation des décisions du 25 mars 2015 par lesquelles le CSA a rejeté sa demande d'autorisation d'exploiter par voie hertzienne terrestre le service " Chante France ", de catégorie D, dans ladite zone et des décisions du même jour par lesquelles il a accordé une autorisation d'exploiter les deux fréquences disponibles à " Nostalgie Lens " et à " Radio FG " ;
Sur la fin de non-recevoir opposée par la SAS Radio Nostalgie à l'encontre des conclusions tendant à l'annulation de la décision du Conseil supérieur de l'audiovisuel lui délivrant une autorisation d'exploiter un service de radio :
2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée " ; qu'il résulte de ces dispositions que le délai de recours à l'encontre des autorisations d'exploitation de services de radio court à compter de leur publication au Journal officiel et non à compter de la date de la notification des décisions rejetant les autres candidatures ;
3. Considérant que l'autorisation attaquée a été publiée au Journal officiel de la République française le 14 avril 2015 ; que les conclusions tendant à son annulation n'ont été enregistrées au greffe de la Cour que le 7 juillet 2015 ; que, dès lors, elles ont été présentées tardivement et ne sont, par suite, pas recevables ;
Sur les conclusions à fin d'annulation des autres décisions contestées :
En ce qui concerne la légalité externe :
4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du second alinéa de l'article 32 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication : " Les refus d'autorisation sont motivés (...) " ; que la décision du 25 mars 2015 rejetant la candidature de la SARL Chante France développement mentionne ceux des critères énumérés à l'article 29 de la loi du 30 septembre 1986 sur lesquels le CSA s'est fondé pour refuser l'autorisation demandée par elle et précise les éléments de fait qu'il a retenus pour rejeter sa candidature ; qu'il a ainsi relevé que Radio Chante France est un " service dont la programmation essentiellement musicale, dédiée exclusivement à la variété française vise un coeur de cible adulte déjà en partie représenté par Mona FM et Chérie FM déjà autorisés avant l'appel " et était susceptible " de compléter dans une moindre mesure l'offre radiophonique de la zone et de présenter de ce fait, un intérêt moindre pour le public de la zone que les candidats retenus ", en l'occurrence " Radio FG " et " Nostalgie Lens " ; que la décision rejetant la candidature de la SARL Chante France développement est ainsi suffisamment motivée ;
5. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des mentions du procès-verbal de la séance du collège plénier 25 mars 2015, au cours de laquelle ont été adoptées les décisions attaquées, que les huit membres du CSA étaient présents ; qu'ainsi le moyen tiré d'une méconnaissance de la règle de quorum fixée par les dispositions de l'article 4 de la loi du 30 septembre 1986 manque en fait ;
6. Considérant, en troisième lieu, que la SARL Chante France développement n'apporte aucun commencement de preuve à l'appui de ses allégations selon lesquelles les deux sociétés ayant obtenu l'attribution des fréquences litigieuses n'auraient pas présenté des dossiers de candidature complets ; que, dans ces conditions, et alors que lesdites candidatures ont été jugées recevables par décision du CSA du 11 décembre 2013, le moyen tiré du caractère incomplet des dossiers déposés doit être écarté ;
En ce qui concerne la légalité interne :
7. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 29 de la loi du 30 septembre 1986, le Conseil supérieur de l'audiovisuel " accorde les autorisations en appréciant l'intérêt de chaque projet pour le public, au regard des impératifs prioritaires que sont la sauvegarde du pluralisme des courants d'expression socioculturels, la diversification des opérateurs, et la nécessité d'éviter les abus de position dominante entravant le libre exercice de la concurrence. / Il tient également compte : (...) 5° de la contribution à la production des programmes réalisés localement. / (...) Le Conseil supérieur de l'audiovisuel veille, sur l'ensemble du territoire, à ce qu'une part suffisante des ressources en fréquences soit attribuée aux services édités par une association et accomplissant une mission sociale de proximité (...) / Le Conseil veille également au juste équilibre entre les réseaux nationaux de radiodiffusion, d'une part, et les services locaux, régionaux et thématiques indépendants, d'autre part (...) " ;
8. Considérant, d'autre part, que par ses communiqués n° 34 du 29 août 1989 et n° 281 du 10 novembre 1994, le Conseil supérieur de l'audiovisuel, faisant usage de la compétence que lui confère le deuxième alinéa de l'article 29 de la loi du 30 septembre 1986 de déterminer des catégories de services en vue de l'appel à candidatures pour l'exploitation de services de radiodiffusion sonore par voie hertzienne terrestre, a déterminé cinq catégories ainsi définies : services associatifs éligibles au fonds de soutien, mentionnés à l'article 80 (catégorie A), services locaux ou régionaux indépendants ne diffusant pas de programme national identifié (B), services locaux ou régionaux diffusant le programme d'un réseau thématique à vocation nationale (C), services thématiques à vocation nationale (D), et services généralistes à vocation nationale (E) ;
9. Considérant que la SARL Chante France développement fait valoir qu'en ayant considéré qu'elle était susceptible de répondre dans une moindre mesure à l'intérêt du public de la zone que " Radio FG " et " Nostalgie Lens ", le CSA aurait fait de la " variété française " un genre musical à part entière, entachant, ce faisant, sa décision d'erreur d'appréciation dans la mise en oeuvre des critères énoncés à l'article 29 de la loi du 30 septembre 1986 ; que toutefois, le motif selon lequel la programmation essentiellement musicale de cette radio était " dédiée exclusivement à la variété française " retenu pour écarter la candidature de la société Chante France développement, n'apparait entaché que d'une simple erreur matérielle dépourvue d'effet, ne pouvant être entendu, ainsi que le soutient le CSA, que comme signifiant que la programmation essentiellement musicale de Chante France est " dédiée exclusivement à la chanson française et essentiellement à la variété française " ; qu'en tout état de cause, le conseil n'a, ce faisant, commis aucune erreur de droit ni erreur d'appréciation à avoir considéré que la " variété française " constituait un genre musical reconnu, ce motif étant au demeurant corroboré par l'étude Yacast datée d'avril-juin 2014 produite au dossier dont il ressort que la programmation de Chante France est composée à 100 % de chansons francophones réparties entre de la variété française pour 92 %, les 8 % restants l'étant entre le genre pop-rock pour 7 % et le Reggae pour 1 % ;
10. Considérant que, dans la zone de Lens où étaient autorisés un service de catégorie A, RBM 99,6, deux services de catégorie B, Mona FM et Contact, un services de catégorie C, Chérie FM Haut de France, deux services de catégorie D, NRJ et Rire et Chansons et deux services de catégorie Etat, RTL et Europe 1, et où deux fréquences étaient disponibles, le CSA a autorisé deux services, Nostalgie Lens en catégorie C, eu égard au programme d'intérêt local qu'il propose ainsi qu'à son expérience antérieure dans la zone et Radio FG en catégorie D, eu égard à son format musical axé sur les nouvelles tendances en matière de musique électronique ; que si la société requérante fait valoir à bon droit que le service " Chante France " présente une spécificité par rapport aux programmes notamment proposés par Mona FM et Chérie FM, il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier qu'en se fondant, pour écarter la candidature de la SARL Chante France développement en catégorie D, sur le motif que le coeur de cible adulte visé par cette dernière était déjà en partie représenté par ces deux radios déjà autorisées avant l'appel, le choix du CSA soit davantage entaché d'une erreur d'appréciation au regard du critère, prévu à l'article 29 de la loi du 30 septembre 1986, de l'intérêt de chaque projet pour le public au regard de l'impératif prioritaire de sauvegarde du pluralisme des courants d'expression socioculturels ; que la circonstance que la candidature du service Chante France, qui ne dispose que de deux fréquences sur l'ensemble du territoire, n'a pas été retenue, n'est pas, à elle seule, de nature à établir que le CSA aurait méconnu l'impératif de diversification des opérateurs également prévu par la loi ;
11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SARL Chante France développement n'est pas fondée à demander l'annulation des décisions contestées du 25 mars 2015 ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
12. Considérant que, par voie de conséquence, les conclusions à fin d'injonction de réexamen de sa candidature présentées par la société requérante ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
13. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du CSA, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la SARL Chante France développement demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions susmentionnées de la SAS Radio Nostalgie Réseau et de la SAS FG Concept ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SARL Chante France développement est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la SAS Radio Nostalgie Réseau et de la SAS FG Concept présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Chante France développement et au Conseil supérieur de l'audiovisuel. Copie en sera adressée à la SAS Radio Nostalgie Réseau, à la SAS FG Concept et au ministre de la culture et de la communication.
Délibéré après l'audience du 17 novembre 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Bouleau, premier vice-président,
- Mme Julliard, premier conseiller
- Mme Pena, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 8 décembre 2016.
Le rapporteur,
E. PENALe président,
M. BOULEAULe greffier,
E. MOULIN
La République mande et ordonne au ministre de la culture et de la communication en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 10PA03855
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N° 15PA02675