Procédure devant la Cour :
Par une requête et des pièces complémentaires enregistrées le 15 mai 2021 et le 29 juillet 2021, M. A..., représenté par Me Traoré, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de police du 29 octobre 2020 ;
3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié " dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 30 euros par jour de retard ou, à défaut, de lui délivrer un récépissé de carte de séjour temporaire " salarié " et à titre infiniment subsidiaire de procéder au réexamen de sa situation selon les mêmes modalités ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
M. A... soutient que :
- la décision portant refus de titre de séjour est illégale du fait de l'absence de dépôt d'une demande de titre de séjour de sa part ; le préfet ne peut se prévaloir de sa propre turpitude en lui opposant le rejet d'une supposée demande ;
- eu égard à l'ancienneté de son séjour et de son expérience professionnelle sur le territoire français, le préfet de police pouvait, conformément aux recommandations de la circulaire du 28 novembre 2012, lui délivrer un récépissé de carte de séjour temporaire " salarié " afin de lui permettre de rechercher un emploi ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire est insuffisamment motivée ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision l'obligeant à quitter le territoire français est fondée sur une décision illégale.
Par un mémoire enregistré le 22 septembre 2021, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-sénégalais du 23 septembre 2006 relatif à la gestion concertée des flux migratoires entre la France et le Sénégal, modifié ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme B... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant de nationalité sénégalais né le 18 septembre 1985, est entré en France le 6 août 2013. Par un arrêté du 29 octobre 2020, le préfet de police a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. A... relève appel du jugement du 13 avril 2021 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. En premier lieu, si M. A... soutient que le préfet " ne peut se prévaloir de sa propre turpitude en lui opposant le rejet d'une supposée demande de titre de séjour ", il ressort des pièces du dossier, en particulier de la fiche de salle du 22 novembre 2019, qu'il a présenté une demande de titre de séjour en qualité de salarié pour laquelle il a été convoqué en préfecture le 2 septembre 2020. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision portant refus de titre de séjour serait illégale du fait de l'absence de dépôt d'une demande de titre de séjour manque en fait.
3. En deuxième lieu, les moyens tirés de l'irrégularité de la procédure suivie par la préfecture et de l'insuffisance de motivation de la décision portant obligation de quitter le territoire doivent être écartés par adoption des motifs retenus par les premiers juges.
4. En troisième lieu, aux termes du paragraphe 42 de l'article 4 de l'accord susvisé relatif à la gestion concertée des flux migratoires entre la France et le Sénégal du 23 septembre 2006 modifié, dans sa rédaction issue du point 31 de l'article 3 de l'avenant signé le 25 février 2008 :
" Un ressortissant sénégalais en situation irrégulière en France peut bénéficier, en application de la législation française, d'une admission exceptionnelle au séjour se traduisant par la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant : - soit la mention "salarié" s'il exerce l'un des métiers mentionnés dans la liste figurant en annexe IV de l'Accord et dispose d'une proposition de contrat de travail ; / - soit la mention "vie privée et familiale" s'il justifie de motifs humanitaires ou exceptionnels ". Ces stipulations, qui renvoient à la législation française en matière d'admission exceptionnelle au séjour des ressortissants sénégalais en situation irrégulière rendent applicables à ces ressortissants les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en vigueur à la date de l'arrêté litigieux.
5. Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " (...) la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article
L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7(...) ".
6. D'une part, M. A... fait valoir qu'il réside en France depuis 2013 et que ses quatre frères et sœurs y résident également. Toutefois, ni la durée de sa résidence en France, ni la présence en France de ses frères et sœurs, ne constituent des motifs exceptionnels ou des considérations humanitaires au sens des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
7. D'autre part, s'il invoque également son activité d'employé commercial exercée de décembre 2015 à juin 2017, de responsable de rayon de juillet 2015 à décembre 2018 et son activité de directeur de magasin de 2017 à 2020, et se prévaut d'une promesse d'embauche de la SARL 2KB NET, en date du 9 septembre 2019 pour un emploi d'agent de propreté, ces éléments ne peuvent, à eux seuls, être regardés comme constituant des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels de nature à justifier son admission exceptionnelle au séjour.
8. En quatrième lieu, M. A... ne peut utilement se prévaloir de la circulaire n° NOR INTK1229185C du 28 novembre 2012, qui se borne à énoncer des orientations générales que le ministre de l'intérieur a pu adresser aux préfets pour les éclairer dans la mise en œuvre de leur pouvoir de régularisation, sans les priver de leur pouvoir d'appréciation, et dont les dispositions sont dépourvues de tout caractère impératif et ne constituent pas des lignes directrices.
9. En cinquième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ".
10. M. A... se prévaut de sa bonne intégration professionnelle et sociale et de la présence en France de ses quatre frères et soeurs. Toutefois, il ressort des pièces du dossier, en particulier de la fiche de salle précitée, que ses deux enfants mineurs et sa mère résident au Sénégal où il a vécu au moins jusqu'à l'âge de vingt-huit ans. En outre, il ressort également des pièces du dossier qu'il s'est maintenu en France en dépit de la décision du 29 septembre 2017 lui faisant obligation de quitter le territoire. Dans ces conditions, il n'est pas fondé à soutenir que la décision contestée aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été édictée, en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, la décision litigieuse n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé.
11. Enfin, les moyens dirigés contre la décision de refus du titre de séjour ayant été écartés, l'exception d'illégalité de cette décision invoquée par M. A... à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écartée par voie de conséquence.
12. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Ses conclusions tendant à l'annulation du jugement et de l'arrêté du 15 mai 2019 doivent être rejetées. Ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte, ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doivent l'être par voie de conséquence.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience publique du 28 septembre 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Ivan Luben, président de chambre,
- Mme Marianne Julliard, présidente-assesseure,
- Mme Gaëlle Mornet, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 octobre 2021.
La rapporteure,
M. B...Le président,
I. LUBEN
Le greffier,
E. MOULIN
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 21PA02650