Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 19 avril 2017, Mme B..., représentée par MeC..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement précité du Tribunal administratif de Melun ;
2°) de faire droit à ses conclusions de première instance ;
3°) d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de condamner le préfet du Val-de-Marne aux entiers dépens ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à MeC..., sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- la décision attaquée est entachée d'un vice de procédure dès lors que le droit de l'intéressée à présenter des observations a été méconnu ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen individuel de sa situation personnelle ;
- la décision attaquée est insuffisamment motivée au regard de l'article 3 de la loi du
11 juillet 1979 ;
- le préfet a méconnu les dispositions de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il a méconnu les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il a méconnu les dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- il a commis une erreur manifeste au regard de la situation personnelle du requérant.
Mme B...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 13 septembre 2017 du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris.
Vu :
- les autres pièces du dossier ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Pena a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que MmeB..., ressortissante sénégalaise née le 15 novembre 1985, est entrée en France, le 16 septembre 2005 sous couvert d'un visa long séjour valant titre de séjour étudiante ; qu'elle a sollicité le renouvellement de son titre de séjour le 20 novembre 2015, sur le fondement de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par un arrêté du 15 juillet 2016, le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer le titre de séjour qu'elle sollicitait, a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel elle est susceptible d'être éloignée ; que Mme B...relève appel du jugement du 21 mars 2017 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ladite décision ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Considérant, en premier lieu, que si l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration prévoit de soumettre au respect d'une procédure contradictoire préalable les décisions individuelles devant être motivées en application de l'article L. 211-2 de ce code ou celles prises en considération de la personne, l'article L. 121-2 du même code prévoit que ces dispositions ne sont pas applicables en cas d'urgence ou aux décisions pour lesquelles des dispositions législatives ont institué une procédure contradictoire particulière ; qu'il ressort des dispositions de l'article L. 556-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions par lesquelles l'autorité administrative signifie à l'étranger demandeur d'asile le maintien de son placement en rétention administrative ; que dès lors, l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration ne saurait être utilement invoqué à l'encontre de la décision litigieuse ;
3. Considérant, en deuxième lieu, que la décision attaquée vise les textes dont il est fait application et mentionne les faits qui en constituent le fondement ; qu'elle est ainsi suffisamment motivée ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de l'intéressée avant de prendre cette décision ;
4. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire accordée à l'étranger qui établit qu'il suit en France un enseignement ou qu'il y fait des études et qui justifie qu'il dispose de moyens d'existence suffisants porte la mention " étudiant " (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions qu'il appartient, d'une part, à l'étranger qui sollicite le renouvellement de la carte de séjour temporaire portant la mention étudiant de justifier de la réalité et du sérieux des études qu'il a déclaré accomplir et, d'autre part, à l'administration, saisie d'une demande de renouvellement d'une telle carte de séjour, de rechercher, à partir de l'ensemble des pièces du dossier et notamment au regard de sa progression dans le cursus universitaire, de son assiduité aux cours et de la cohérence de ses choix d'orientation, si l'intéressé peut être raisonnablement regardé comme poursuivant effectivement des études ;
5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme B... a régulièrement progressé dans ses études jusqu'en 2010, après avoir validé une licence en droit, économie et gestion, mention " administration économique et sociale ", un diplôme universitaire de langue anglaise en situation professionnelle et deux diplômes de master 1, l'un en droit, économie et gestion et l'autre en développement d'affaires à l'international ; qu'elle n'a toutefois validé depuis aucune des formations entreprises, qu'il s'agisse du master 2 de développeur d'affaires à l'international, du master 2 de management et de stratégie d'entreprise ou du MBA en marketing de la mode ; qu'à supposer ses allégations, au demeurant non établies, sur la non validation du master 2 de développeur d'affaires à l'international du fait de l'absence de stage à l'étranger due à l'impossibilité d'obtenir le visa requis, il ressort des propres déclarations de l'intéressée qu'elle a fait le choix, peu après le début des enseignements du master 2 de management et de stratégie d'entreprise, de ne pas poursuivre sa scolarité ; qu'au demeurant, elle ne fait état d'aucun projet professionnel précis et se borne à produire, devant la Cour, des contrats à durée déterminée pour un emploi de serveuse renouvelés depuis 2013 ainsi que deux promesses d'embauche pour
2017 ; que, dans ces conditions, le préfet du Val-de-Marne n'a pas fait une inexacte application des dispositions de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en refusant à Mme B... le renouvellement de son titre de séjour en qualité d'étudiant ;
6. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; et qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; (...) " ;
7. Considérant, en cinquième lieu, que Mme B...ne peut utilement invoquer la méconnaissance de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que l'autorité administrative n'était pas tenue de rechercher si l'intéressée pouvait prétendre à la délivrance d'un titre de séjour sur un autre fondement du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que celui sur lequel se fondait sa demande de titre ; que s'agissant du moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ce dernier n'est opérant qu'à l'encontre de la décision en tant qu'elle porte obligation de quitter le territoire ; qu'il ressort des pièces du dossier que Mme B...est célibataire, sans charge de famille en France, et n'est pas dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine où réside notamment sa mère et où elle a vécu au moins jusqu'à l'âge de 20 ans ; que, dans ces conditions, Mme B...n'est pas fondée à soutenir qu'en prenant la décision litigieuse, le préfet du Val-de-Marne aurait porté, à son droit au respect de sa vie privée et familiale, une atteinte disproportionnée ;
8. Considérant, en sixième et dernier lieu, qu'ainsi qu'il a été exposé ci-dessus, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Val-de-Marne aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de son arrêté sur la situation personnelle de Mme B...;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ; que, par suite, le présent arrêt n'appelle le prononcé d'aucune mesure d'injonction ; qu'enfin, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, verse à la requérante la somme qu'elle demande au titre des frais exposés dans la présente instance et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... D...B...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Val-de-Marne.
Délibéré après l'audience du 3 avril 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Bouleau, premier vice-président,
- M. Bernier, président assesseur,
- Mme Pena, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 24 avril 2018.
Le rapporteur,
E. PENALe président,
M. BOULEAU
Le greffier,
N. DAHMANI
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 10PA03855
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N° 17PA01317