Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 29 mars 2016, le préfet de police, demande à la Cour d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Paris n° 1513930/3-2 du 2 mars 2016.
Il soutient que, contrairement à ce qu'ont jugé les premiers juges, l'arrêté attaqué repose sur des faits matériellement exacts.
Par un mémoire en défense, enregistré le 27 septembre 2016, la société Frida Kalo, représentée par MeA..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme d'Argenlieu,
- les conclusions de Mme Oriol, rapporteur public,
- et les observations de Me D...substituant Me A..., représentant la société Frida Kalo.
1. Considérant que par un arrêté du 16 juin 2015, pris sur le fondement de l'article
L. 3332-15 du code de la santé publique, le préfet de police a décidé la fermeture administrative, pour une durée de neuf jours, du café " Chilango ", exploité 82 rue de la Folie Méricourt (75011), par la société Frida Kalo, dont les gérants sont MM. B...etC... ; que le préfet de police relève appel du jugement du 2 mars 2016 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé cet arrêté ;
Sur le bien fondé du jugement attaqué :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 3332-15 du code de la santé publique : " 1. La fermeture des débits de boissons et des restaurants peut être ordonnée par le représentant de l'Etat dans le département pour une durée n'excédant pas six mois, à la suite d'infractions aux lois et règlements relatifs à ces établissements. / Cette fermeture doit être précédée d'un avertissement qui peut, le cas échéant, s'y substituer, lorsque les faits susceptibles de justifier cette fermeture résultent d'une défaillance exceptionnelle de l'exploitant ou à laquelle il lui est aisé de remédier. / 2. En cas d'atteinte à l'ordre public, à la santé, à la tranquillité ou à la moralité publique, la fermeture peut être ordonnée par le représentant de l'Etat dans le département pour une durée n'excédant pas deux mois. (...) " ; que les mesures de fermeture de débits de boissons, ordonnées par l'autorité administrative sur le fondement de ces dispositions, qui ont le caractère de mesures de police administrative, ont toujours pour objet de prévenir la continuation ou le retour de désordres liés au fonctionnement de l'établissement, indépendamment de toute responsabilité de l'exploitant ; qu'il appartient à l'autorité investie des pouvoirs de police de prendre, sur le fondement de ces dispositions, toute mesure strictement nécessaire en vue de faire cesser le trouble apporté à l'ordre public ;
3. Considérant que pour prononcer la fermeture du café " Chilango " pendant une durée de neuf jours à compter de sa notification, le préfet de police a précisé que, dans la nuit du
18 avril 2015, à 23 h 35, un tapage nocturne avait été " (...) occasionné par des bruits de musique et des éclats de voix provenant de l'intérieur de ce commerce et audibles de la voie publique, la porte d'entrée ayant été laissée ouverte " et que " une vingtaine de clients étaient debout à l'extérieur de cet établissement et consommaient de l'alcool " ;
4. Considérant que pour établir la réalité de ces faits, le préfet de police s'est uniquement fondé sur une main courante, non signée, établie deux jours plus tard, soit le 20 avril 2015, par un agent de police, dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il était présent le soir des agissements réprimés ; qu'ainsi que le reconnaît un agent du service de prévention et police administrative (SPPAD), aucun procès-verbal de contravention n'a été établi, ni, a fortiori, transmis aux gérants de la société Frida Kalo ; qu'en outre, le rapport du 23 avril 2015 par lequel le commissaire central du 11ème arrondissement a transmis au directeur de la sécurité de proximité de l'agglomération parisienne la proposition de sanction administrative envisagée à l'égard de la société Frida Kalo, ne fait à aucun moment état des agissements qui lui sont reprochés ; que cette société en conteste d'ailleurs la réalité en soutenant, notamment, que le tapage nocturne provenait des clients participant au même moment, à une soirée ayant lieu dans le bar mitoyen " La chambre noire " ; que, par suite, l'arrêté contesté doit être regardé comme reposant sur des faits dont l'exactitude matérielle n'est pas établie ;
5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 16 juin 2015 portant fermeture administrative, pour une durée de neuf jours, du café " Chilango ", exploité 82 rue de la Folie Méricourt (75011), par la société Frida Kalo ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat le versement à la société Frida Kalo d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La requête du préfet de police est rejetée.
Article 2 : L'Etat versera la somme de 1 500 euros à la société Frida Kalo sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Frida Kalo, au préfet de police et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 7 mars 2017 à laquelle siégeaient :
- M. Even, président,
- Mme Hamon, président assesseur,
- Mme d'Argenlieu, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 21 mars 2017.
Le rapporteur,
L. d'ARGENLIEULe président,
B. EVEN
Le greffier,
S. GASPAR
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 16PA01120