Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 11 août 2020, Mme C..., représentée par Me B..., demande à la Cour :
1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;
2°) d'annuler le jugement n° 1927643 en date du 30 juin 2020 du Tribunal administratif de Paris ;
3°) d'annuler l'arrêté du 14 novembre 2019 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;
4°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte et de lui délivrer durant cet examen une autorisation provisoire de séjour et de travail ;
5°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sous réserve de renonciation à l'aide juridictionnelle, en application de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- la décision de refus de séjour n'est pas signée par une personne compétente ayant reçu une délégation de signature régulièrement publiée au recueil des actes administratifs de la préfecture ;
- elle est insuffisamment motivée ;
- elle est entachée d'un défaut d'examen sérieux de sa situation ;
- elle est entachée d'un vice de procédure car la commission du titre de séjour n'a pas été consultée en méconnaissance de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle a été prise en méconnaissance des stipulations du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- elle a été prise en méconnaissance de l'alinéa 5 de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle a été prise en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision d'obligation de quitter le territoire français est illégale par la voie de l'exception d'illégalité de la décision de refus de séjour ;
- elle a été prise en méconnaissance de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec l'administration.
Par un mémoire en défense enregistré, le 12 janvier 2021, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal judiciaire de Paris en date du 15 février 2021, Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- l'ordonnance n° 2020-1402 du 18 novembre 2020 ;
- les décrets n° 2020-1404 et n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 portant application de la loi sur l'aide juridictionnelle ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme D... a été entendu à l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme C..., ressortissante algérienne, née le 10 janvier 1962, est entrée en France le 26 janvier 2017, munie d'un passeport revêtu d'un visa de court séjour. Elle a sollicité le 7 février 2019 la délivrance d'un certificat de résidence, sur le fondement des stipulations du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. Par un arrêté du 14 novembre 2019, le préfet de police a refusé de lui délivrer le certificat de résidence, 1'a obligée à quitter le territoire dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Par un jugement du 30 juin 2020, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation présentée par Mme C... de l'arrêté du préfet de police du 14 novembre 2019. Mme C... fait appel de ce jugement.
Sur l'admission à l'aide juridictionnelle à titre provisoire :
2. Par une décision du 15 février 2021, le président de section du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à Mme C.... Par suite, les conclusions présentées par l'intéressée aux fins d'admission au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire sont devenues sans objet.
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
En ce qui concerne la décision de refus de séjour :
3. En premier lieu, par un arrêté n° 2019-00832 du 18 octobre 2019, régulièrement publié au recueil des actes administratifs spécial du 18 octobre 2019, le préfet de police a donné délégation à Mme E... A..., attachée d'administration, à l'effet de signer les décisions dans la limite de ses attributions, dont relève la police des étrangers, en cas d'absence ou d'empêchement d'autorités dont il n'est pas établi ni même allégué qu'elles n'étaient pas absentes ou empêchées lors de la signature de la décision attaquée. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision de refus de séjour aurait été signée par une autorité incompétence doit être écarté comme manquant en fait.
4. En deuxième lieu, l'arrêté attaqué, qui vise notamment les dispositions applicables du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, mentionne également différents éléments de la situation personnelle et familiale de Mme C.... Il expose ainsi avec une précision suffisante les considérations de droit et de fait sur lesquelles le préfet de police s'est fondé pour rejeter la demande de titre de séjour.
5. En troisième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de police n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation personnelle de Mme C....
6. En quatrième lieu, pour refuser la délivrance de son titre de séjour, le préfet de police s'est fondé notamment sur l'avis du 19 juillet 2019 du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration indiquant que si l'état de santé de Mme C... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, l'intéressée peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Il ressort des pièces du dossier que Mme C... souffrait d'un cancer du sein gauche pour lequel elle a fait l'objet d'une tumorectomie, d'une radiothérapie et d'une chimiothérapie en France en 2017. Elle présente également des antécédents de diabète de type 2, d'hypertension, ainsi qu'une ostéophytose lombaire. Mme C... produit plusieurs certificats médicaux établis par un médecin du service d'oncologie médicale de l'hôpital La Pitié Salpêtrière, le dernier en date du 22 janvier 2020, attestant qu'elle est suivie dans ce service pour une pathologie inscrite sur la liste des affections de longue durée correspondant à une tumeur maligne et qu'elle nécessite des consultations spécialisées régulières. Cependant, ils n'établissent pas que cette prise en charge médicale ne pourrait pas être assurée en Algérie. Par ailleurs, les autres documents fournis par la requérante, tels que les articles de journaux datés de 2018 relatifs à la prise en charge du cancer du sein en Algérie, et le certificat médical daté du 12 octobre 2020 d'un médecin généraliste faisant état d'une " polypathologie " ne pouvant pas être traitée en Algérie ne permettent pas davantage de remettre en cause l'appréciation du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration sur l'existence et la disponibilité d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressée. Enfin, le certificat médical du 22 janvier 2021 d'un médecin psychiatre faisant état d'un syndrome post-traumatique qui a été établi plus d'un an après la décision litigieuse n'est pas davantage de nature à remettre en cause l'appréciation du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Il suit de là que le préfet de police n'a pas fait une inexacte application des stipulations du 7) de l'accord franco-algérien en refusant de délivrer un titre de séjour à Mme C... sur ce fondement.
7. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à l'étranger mentionné à l'article L. 313-11 (..) ".
8. Mme C... soutient que le préfet de police aurait dû, préalablement à l'examen de sa demande, saisir la commission du titre de séjour mentionnée à l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il résulte des dispositions de cet article, applicable aux ressortissants algériens, que le préfet est tenu de saisir la commission du titre de séjour du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions relatives à la délivrance de plein droit des cartes de séjour citées audit article, auxquels il envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour, et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions. Par suite, alors que la requérante ne justifie pas entrer dans le champ des stipulations du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien, ainsi qu'il vient d'être dit, le moyen tiré du défaut de saisine de la commission du titre de séjour doit être écarté.
9. En sixième lieu, la décision portant refus de titre de séjour n'a pas pour objet ni pour effet de déterminer le pays de renvoi. Par suite, le moyen tiré de ce que cette mesure aurait été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant.
10. En dernier lieu, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 1 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
11. Mme C... réside sur le territoire français depuis 2017 et elle est sans charge de famille en France. Par ailleurs, elle n'établit pas ni même n'allègue être dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine, où elle a vécu jusqu'à l'âge de 55 ans et où réside son époux ainsi que ses trois enfants. Par suite, il ne ressort pas des pièces du dossier, eu égard à la durée de son séjour en France et à sa situation personnelle et familiale, que le préfet aurait porté une atteinte disproportionnée au droit de Mme C... au respect de sa vie privée et familiale. Dès lors, le préfet n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
En ce qui concerne 1'obligation de quitter le territoire français :
12. En premier lieu, pour les motifs exposés ci-dessus, le refus de délivrance d'un titre de séjour opposé à Mme C... n'est pas entaché d'illégalité. Par suite, l'exception d'illégalité du refus de titre invoquée à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire doit être écartée.
13. En deuxième lieu, un étranger peut utilement faire valoir que le principe du contradictoire imposait qu'il soit préalablement entendu et mis à même de présenter toute observation utile sur la mesure d'éloignement envisagée. Le droit d'être entendu préalablement à 1'adoption d'une décision de retour implique que 1'autorité administrative mette le ressortissant étranger en situation irrégulière à même de présenter, de manière utile et effective, son point de vue sur l'irrégularité du séjour et les motifs qui seraient susceptibles de justifier que l'autorité s'abstienne de prendre à son égard une décision de retour. Toutefois, il n'implique pas que l'administration ait l'obligation de mettre l'intéressé à même de présenter ses observations de façon spécifique sur la décision l'obligeant à quitter le territoire français, dès lors qu'il a pu être entendu sur l'irrégularité du séjour ou la perspective de l'éloignement.
14. Il ressort des pièces du dossier que Mme C... a été reçue par les services préfectoraux le 7 février 2019 et qu'à cette occasion, elle a pu présenter ses observations sur sa demande tendant à la délivrance d'un titre de séjour. Ainsi, le moyen tiré du non-respect du principe du contradictoire doit être écarté.
15. Il résulte de ce qui précède que C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du préfet de police du 14 novembre 2019.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
16. Il résulte de ce qui précède que, pour l'application des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative, le présent arrêt n'appelle aucune mesure d'exécution. Les conclusions à fin d'injonction présentées par la requérante doivent donc être rejetées.
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
17. En vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge. Les conclusions présentées à ce titre par Mme C..., partie perdante, doivent dès lors être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête présentée par Mme C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F... C... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée, pour information, au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 4 mars 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Formery, président de chambre,
- Mme D..., premier conseiller,
- M. Sibilli, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 1er avril 2021.
Le rapporteur,
I. D...Le président,
S.-L. FORMERY
La greffière,
F. DUBUY-THIAM
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20PA02245