Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés le 7 février 2020 et le 4 octobre 2020, Mme B..., représentée par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1915471 du 7 janvier 2020 du tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler l'arrêté du 18 juin 2019 du préfet de police ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de lui délivrer un titre de séjour temporaire portant la mention " salarié " dans le délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Mme B... soutient que :
- le jugement n'est pas suffisamment motivé ;
- l'arrêté contesté n'est pas suffisamment motivé ;
- sa situation n'a pas fait l'objet d'un examen particulier ;
- le préfet de police a commis une erreur de droit en examinant sa situation au regard de sa vie privée et familiale ;
- elle est fondée à obtenir son admission exceptionnelle au séjour en qualité de salarié sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de la circulaire du 28 novembre 2012.
Par un mémoire en défense enregistré le 22 septembre 2020, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Le préfet de police soutient que les moyens invoqués par Mme B... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. D... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B..., ressortissante cambodgienne, a sollicité son admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 18 juin 2019, le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office. Mme B... fait appel du jugement du 7 janvier 2020 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".
3. Les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à l'ensemble des arguments présentés par Mme B..., ont suffisamment répondu aux moyens tirés du défaut de motivation de l'arrêté attaqué et de l'erreur de droit qu'aurait commise le préfet de police aux points 3 et 4 du jugement attaqué. Le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de ce jugement doit ainsi être écarté.
Sur le bien-fondé du jugement :
4. Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2 (...) ". En présence d'une demande d'admission exceptionnelle au séjour présentée sur le fondement de ces dispositions, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et, à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ". Dans cette dernière hypothèse, un demandeur qui justifie d'une promesse d'embauche ou d'un contrat de travail ne saurait être regardé, par principe, comme attestant, par là-même, des motifs exceptionnels exigés par la loi. En effet, il appartient à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner, notamment, si cette promesse d'embauche ou ce contrat de travail, de même que tout élément de sa situation personnelle dont l'étranger ferait état à l'appui de sa demande, tel que par exemple, l'ancienneté de son séjour en France, peuvent constituer, en l'espèce, des motifs exceptionnels d'admission au séjour.
5. L'arrêté du 18 juin 2019 du préfet de police, après avoir rappelé le fondement de la demande de Mme B..., mentionne que l'intéressée, entrée en France selon ses déclarations le 4 novembre 2013, exerce une activité professionnelle de cuisinière depuis le 10 septembre 2018 au sein d'une société qui est identifiée, qu'elle a produit à l'appui de sa demande des bulletins de salaire émis par son employeur et un contrat de travail à durée déterminée et qu'elle est par ailleurs célibataire et sans charge de famille en France et n'est pas dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine. Il indique que la situation professionnelle de Mme B..., appréciée au regard de son absence de vie privée et familiale établie sur le territoire français, ne peut constituer à elle seule un motif à caractère exceptionnel ou humanitaire justifiant une admission exceptionnelle au séjour et précise que l'intéressée n'est pas particulièrement intégrée dans la société française. Le préfet de police en a conclu, en examinant par ailleurs le dossier au regard des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, que la situation de Mme B... ne permettait pas son admission exceptionnelle au séjour au titre de la vie privée et familiale ou de sa situation professionnelle sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
6. D'une part, il résulte de ce qui précède que l'arrêté attaqué comprend les considérations de fait et de droit qui en constituent le fondement et a été pris après un examen particulier de la situation de Mme B.... Les moyens tirés de l'insuffisance de motivation et du défaut d'examen doivent dès lors être écartés.
7. D'autre part, il résulte des termes mêmes de l'arrêté attaqué que le préfet de police a examiné la demande de Mme B..., présentée sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, conformément aux principes rappelés au point 4, ainsi qu'il lui incombait. Mme B... n'est ainsi pas fondée à soutenir que le préfet de police aurait commis une erreur de droit en examinant sa situation en tenant compte de sa situation personnelle, notamment de sa vie privée et familiale, et non pas seulement au regard de son activité professionnelle, aucun motif exceptionnel d'admission au séjour n'étant d'ailleurs en l'espèce établi pour l'application de cet article en qualité de salarié. A cet égard, Mme B... ne peut pas utilement se prévaloir de la circulaire du 28 novembre 2012 prise pour l'application dudit article, dès lors qu'elle se borne à énoncer des orientations générales destinées à éclairer les préfets dans l'exercice de leur pouvoir de prendre des mesures de régularisation, sans les priver de leur pouvoir d'appréciation.
8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Sa requête, y compris ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doit dès lors être rejetée.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 8 octobre 2020, à laquelle siégeaient :
- M. D..., président de la formation de jugement,
- Mme Marion, premier conseiller,
- M. Sibilli, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 12 novembre 2020.
Le président-rapporteur,
F. D...L'assesseur le plus ancien,
I. MARION
La greffière,
C. DABERTLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20PA00469