Par une requête enregistrée le 15 janvier 2018, la société Alcom, représentée par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1608720 du 15 novembre 2017 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) de prononcer la décharge des cotisations de taxe annuelle sur les locaux à usage de bureaux, les locaux commerciaux, les locaux de stockage et les surfaces de stationnement auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2013 et 2014 à raison des locaux situés 7, rue Saint-Philippe du Roule à Paris (8ème) ;
3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- elle a présenté une réclamation préalable au titre de l'année 2014 ;
- l'immeuble n'était pas à usage de bureau au 1er janvier 2013 mais à usage d'habitation ainsi qu'en attestent les stipulations de l'acte de cession du 21 septembre 2012, le permis de construire délivré par le maire, un constat d'huissier établi le 12 novembre 2012, le rapport Véritas du 21 mai 2012, le courrier du notaire en charge de la vente entre la société Lupa Patrimoine France et la société Alcom intervenue le 21 octobre 2015 et les courriers échangés avec la mairie de Paris et la Préfecture de Paris en 2015 dans le cadre de sa demande de permis de construire ; l'administration se fonde sur des déclarations trop anciennes datant de l'année 1991 pour établir l'usage des locaux ;
- il n'y a pas d'éléments prouvant l'usage des locaux en litige à titre de bureaux après 1991 ;
- à titre subsidiaire, il résulte des plans d'origine joints que seuls 313 m² sur les 1 437 m² peuvent être retenus à usage de bureaux ; les locaux commerciaux d'une superficie inférieure à 2 500 m² ne sont pas taxables ;
- s'agissant des 313 m² de bureaux, la taxe n'est pas exigible au 1er janvier 2013 et 2014, dès lors que les travaux n'étaient pas achevés et qu'elle n'avait pas la disponibilité de l'immeuble ; l'état de délabrement rendait impossible son exploitation avant le mois d'avril 2016 ;
- l'administration ne l'a pas avisée de la nécessité de déclarer un changement d'affectation, alors qu'elle avait acheté de bonne foi un immeuble désigné comme un immeuble à usage d'habitation dans l'ensemble des documents qui lui ont été remis.
Par un mémoire en défense, enregistré le 10 juillet 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la société Alcom ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Poupineau,
- et les conclusions de M. Lemaire, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. La société Alcom est propriétaire de locaux situés 7 rue Saint-Philippe du Roule, à Paris (8ème) à raison desquels elle a été assujettie à la taxe annuelle sur les locaux à usage de bureaux, les locaux commerciaux, les locaux de stockage et les surfaces de stationnement au titre des années 2013 et 2014. Elle fait appel du jugement en date du 15 novembre 2017 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge de cette taxe.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article R. 200-2 du livre des procédures fiscales : " Le demandeur ne peut contester devant le tribunal administratif des impositions différentes de celles qu'il a visées dans sa réclamation à l'administration ".
3. Si, ainsi que le relève la société Alcom, le Tribunal a rejeté les conclusions de sa demande tendant à la décharge de la taxe annuelle sur les locaux à usage de bureaux à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2014 au motif qu'elles n'avaient pas été précédées d'une réclamation préalable en méconnaissance des dispositions précitées de l'article R. 200-2 du livre des procédures fiscales, alors qu'elle a présenté une telle demande, qui a fait l'objet d'une décision de rejet du 22 mars 2016, il ressort des mentions du jugement attaqué que les premiers juges, qui ont également examiné au fond les conclusions se rapportant à la taxe de l'année 2014, ont entendu viser en réalité l'année 2016 et que la mention de l'année 2014, en ce qui concerne la recevabilité des conclusions à fin de décharge, procède d'une erreur matérielle sans incidence sur la régularité du jugement. Par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que ce jugement est irrégulier.
Sur le bien-fondé des impositions en litige :
4. Aux termes de l'article 231 ter du code général des impôts : " I.-Une taxe annuelle sur les locaux à usage de bureaux, les locaux commerciaux, les locaux de stockage (...) est perçue, dans les limites territoriales de la région d'Ile-de-France (...) / II.-Sont soumises à la taxe les personnes privées ou publiques qui sont propriétaires de locaux imposables ou titulaires d'un droit réel portant sur de tels locaux. / La taxe est acquittée par le propriétaire, l'usufruitier, le preneur à bail à construction, l'emphytéote ou le titulaire d'une autorisation d'occupation temporaire du domaine public constitutive d'un droit réel qui dispose, au 1er janvier de l'année d'imposition, d'un local taxable. / III.-La taxe est due : / 1° Pour les locaux à usage de bureaux, qui s'entendent, d'une part, des bureaux proprement dits et de leurs dépendances immédiates et indispensables destinés à l'exercice d'une activité, de quelque nature que ce soit, par des personnes physiques ou morales privées, ou utilisés par l'État, les collectivités territoriales, les établissements ou organismes publics et les organismes professionnels, et, d'autre part, des locaux professionnels destinés à l'exercice d'activités libérales ou utilisés par des associations ou organismes privés poursuivant ou non un but lucratif ; (...) / IV. Pour le calcul des surfaces visées au 3° du V et au VI, il est tenu compte de tous les locaux de même nature, hors parties communes, qu'une personne privée ou publique possède à une même adresse ou, en cas de pluralité d'adresses, dans un même groupement topographique. / V. Sont exonérés de la taxe : (...) 3°) les locaux à usage de bureaux d'une superficie inférieure à 100 mètres carrés, les locaux commerciaux d'une superficie inférieure à 2 500 mètres carrés, les locaux de stockage d'une superficie inférieure à 5 000 mètres carrés. ".
5. Il résulte de ces dispositions que le propriétaire d'un local de stockage, qui n'a pas fait l'objet, au 1er janvier de l'année d'imposition, d'un changement de destination, est assujetti à la taxe annuelle, que le local soit ou non effectivement utilisé à cette fin.
6. La société Alcom a acheté, le 21 septembre 2012, des locaux dans un immeuble situé 7 rue Saint-Philippe du Roule, à Paris (8ème). Elle a souscrit pour l'année 2013 la déclaration au titre de la taxe annuelle sur les locaux à usage de bureau, les locaux commerciaux, les locaux de stockage et les surfaces de stationnement prévue à l'article 231 ter du code général des impôts dans laquelle elle a indiqué que les locaux nouvellement acquis étaient en travaux et qu'elle n'était, dès lors, pas redevable de la taxe. Pour l'année 2014, elle a mentionné dans sa déclaration en être exonérée, les locaux à usage de commerce dont elle était propriétaire développant une superficie inférieure au seuil d'assujettissement de 2 500 m² fixé au III de l'article 231 ter. Par une lettre de notification du 5 mai 2014, l'administration l'a assujettie à la taxe annuelle sur les locaux à usage de bureau au titre des années 2013 et 2014 après avoir relevé qu'il ressortait de déclarations modèle P souscrites en 1991 par les propriétaires de l'immeuble pour l'établissement des bases à la taxe foncière que les locaux en cause étaient à usage de bureau pour une superficie de 933 m².
7. Il résulte de l'instruction, en particulier des déclarations précitées de 1991 et également de la déclaration d'intention d'aliéner établie par l'ancien propriétaire de l'immeuble le 1er août 2012, des diagnostiques immobiliers réalisés le 5 mars 2012 par la société Audit et de l'attestation rédigée le 21 octobre 2015 par le notaire de la vente en litige conclue le 21 septembre 2012, que l'immeuble cédé à la société Alcom était composé d'appartements utilisés à des fins professionnelles pour l'exercice d'activités libérales. Il ressort également de l'attestation précitée du 21 octobre 2015 que cet immeuble était, lors de sa cession en 2012, inoccupé et inhabitable en l'état en raison de travaux inachevés effectués par l'ancien propriétaire des lieux. Toutefois, la circonstance que ces travaux aient rendu les locaux inutilisables aux 1er janvier des années 2013 et 2014, n'est pas de nature à les exclure du champ d'application de la taxe ou à les en exonérer. Par ailleurs, les travaux que la société Alcom a réalisés dans l'immeuble en vue de la transformation des locaux en logements meublés pour le tourisme, en habitation et, pour le reste, en locaux à usage de commerce, ont été autorisés par un permis de construire délivré à la société le 14 octobre 2015 et achevés le 25 avril 2016. Ainsi, à la date des 1er janvier 2013 et 2014, les locaux acquis par la société Alcom n'avaient pas fait l'objet d'un réaménagement et d'une réaffectation à une activité autre que celle de bureaux qui auraient été portés à la connaissance de l'administration, ainsi que l'exigent les dispositions de l'article 1406 du code général des impôts. Contrairement à ce que soutient la société requérante, aucune disposition législative ou réglementaire n'impose à l'administration d'informer les redevables de la taxe de l'obligation qui leur incombe de signaler les changements de consistance, d'affectation ou d'utilisation de leurs propriétés. Par ailleurs, la circonstance alléguée que la contribuable était de bonne foi est sans incidence sur l'appréciation de la nature des locaux en litige. Par suite, c'est à bon droit que l'administration l'a assujettie à la taxe annuelle sur les locaux à usage de bureau au titre des années 2013 et 2014.
8. Enfin, la société requérante ne peut sérieusement faire valoir que la superficie totale de l'immeuble affectée à un usage de bureaux n'est que de 313 m², dès lors que cette superficie est mentionnée sur les plans joints à la demande de permis de construire qu'elle a déposée comme étant celle résultant des travaux réalisés en 2015.
9. Il résulte de tout ce qui précède que la société Alcom n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la société Alcom est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société à responsabilité limitée (SARL) Alcom et au ministre de l'action et des comptes publics.
Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d'Île-de-France et du département de Paris (pôle fiscal parisien 1).
Délibéré après l'audience du 9 mai 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Formery, président de chambre,
- Mme Poupineau, président assesseur,
- Mme Lescaut, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 29 mai 2019.
Le rapporteur,
V. POUPINEAULe président,
S.-L. FORMERYLe greffier,
C. RENÉ-MINE
La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18PA00165