Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 23 juillet 2018, et des mémoires enregistrés les 30 juillet et 27 août 2018, MmeC..., représentée par MeB..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 20 juin 2018 du magistrat désigné par le Président du Tribunal administratif de Melun ;
2°) d'annuler l'arrêté mentionné ci-dessus du 20 mars 2018 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative, dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, à verser à son conseil moyennant renonciation de ce dernier à percevoir l'aide juridictionnelle.
Elle soutient que :
- l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé ;
- elle devait bénéficier d'un titre de séjour de plein droit en qualité de réfugié ;
- l'arrêté attaqué méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- il méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- il méconnaît les dispositions de l'article 511-4-10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision fixant le pays de destination méconnaît l'article 3 de convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 19 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.
La requête a été communiquée au préfet du Val-de-Marne, lequel n'a pas produit de mémoire en défense.
Mme C...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 19 octobre 2018 du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Pagès a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. MmeC..., ressortissante congolaise (Congo-Kinshasa) née le 4 mai 1994, déclare être entrée en France le 13 février 2017 afin d'y solliciter l'asile. Par une décision du 10 juillet 2017 de l'Office français des réfugiés et apatrides (OFPRA), confirmée par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 16 novembre 2017, cette demande a été rejetée. Par un arrêté du 20 mars 2018, le préfet du Val-de-Marne a obligé Mme C...à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Mme C... relève appel du jugement du 20 juin 2018 par lequel le magistrat désigné par le Président du Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
2. En premier lieu, l'arrêté litigieux vise les dispositions pertinentes du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et mentionne que la demande d'asile présentée par Mme C...a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 10 juillet 2017, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 16 novembre 2017. Par conséquent, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision attaquée doit être écarté.
3. En deuxième lieu, Mme C...soutient qu'elle devrait bénéficier de plein droit d'un titre de séjour en qualité de réfugié en vertu des articles L. 711-1 et L. 712 1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui prévoient la reconnaissance du statut de réfugié ou l'octroi du bénéfice de la protection subsidiaire aux personnes qui, comme elle, encourent de risques graves en cas de retour dans leur pays d'origine. Toutefois, ainsi qu'il a été dit au point 1, la demande d'asile présentée par Mme C...a été rejetée tant par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, que par la Cour nationale du droit d'asile. Elle ne bénéficie donc pas du statut de réfugié et ne peut dés lors soutenir que cette qualité ferait obstacle à ce qu'une mesure d'éloignement soit prise à son encontre.
4. En troisième lieu, si Mme C...fait valoir que son fils, âgé de 6 ans, est scolarisé en France depuis le 13 février 2017 et y retrouve une certaine stabilité, cette circonstance ne suffit pas à établir qu'en l'obligeant à quitter le territoire français, le préfet du Val-de-Marne aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale, garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, une atteinte disproportionnée au but poursuivi. Elle n'établit pas davantage qu'en prenant une telle mesure, le préfet du Val-de-Marne n'aurait pas pris en compte l'intérêt supérieur de son enfant, protégé par l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
5. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) / 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) ".
6. Si Mme C...fait valoir qu'elle bénéficie d'un suivi pluridisciplinaire auprès du centre Primo Levi, il ne ressort des pièces du dossier ni qu'un défaut de prise en charge pourrait entraîner pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité, ni qu'un traitement ne serait pas disponible dans son pays d'origine. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 511-4 cité au point 5 doit être écarté.
Sur la décision fixant le pays de destination :
7. En premier lieu, la décision attaquée mentionne les dispositions de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et fait état des décisions prises par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et par la Cour nationale du droit d'asile sur sa demande d'asile. L'arrêté doit, par conséquent, être regardé comme suffisamment motivé.
8. En second lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". L'article 19 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne prévoit : " Nul ne peut être éloigné, expulsé ou extradé vers un Etat où il existe un risque sérieux qu'il soit soumis à la peine de mort, à la torture ou à d'autres peines ou traitements inhumains ou dégradants ". Aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ".
9. Si Mme C...soutient qu'elle appartient au Mouvement pour la Libération du Congo et qu'elle a été incarcérée et violée, les pièces du dossier ne permettent cependant d'étayer ni son appartenance politique, ni les violences qu'elle affirme avoir subies, ni le caractère personnel des risques encourus en cas de retour dans son pays d'origine, alors d'ailleurs que, comme il a été dit ci-dessus, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides puis la Cour nationale du droit d'asile ont rejeté sa demande d'asile. Il s'ensuit que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions citées au point 8 ne peut qu'être écarté.
10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le Président du Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles présentées par son avocat sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...C...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Val-de-Marne.
Délibéré après l'audience du 25 juin 2019, à laquelle siégeaient :
- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,
- M. Niollet, président-assesseur,
- M. Pagès, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 5 juillet 2019.
Le rapporteur,
D. PAGES
Le président,
O. FUCHS TAUGOURDEAU
Le greffier,
P. TISSERAND
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
3
N° 18PA02467