Par une requête, enregistrée le 9 janvier 2017, régularisée le 20 janvier 2017, et un mémoire ampliatif, enregistré le 6 juin 2017, l'assemblée permanente des chambres de métiers et de l'artisanat, représentée par la SCP Matuchansky - Poupot - Valdelièvre demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 8 novembre 2016 du Tribunal administratif de Paris en tant qu'il a partiellement fait droit à la demande de M.B... ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. B...devant le Tribunal administratif de Paris ;
3°) de mettre à la charge de M. B...le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement est insuffisamment motivé ;
- il méconnaît les articles R. 741-7 et R. 741-8 du code de justice administrative ;
- c'est à tort que les premiers juges ont annulé la décision de licenciement du 18 février 2015 ; en effet, il est établi que M.B... n'a pas respecté les différentes directives de sa hiérarchie, en méconnaissance de son devoir d'obéissance, et qu'il ne respectait pas les délais d'exécution des tâches qui lui étaient confiées.
Par deux mémoires en défense, enregistrés le 15 mai 2017 et le 18 juillet 2017, M. B..., représenté par Me C..., conclut au rejet de la requête et, par la voie de l'appel incident, demande à la Cour de condamner l'assemblée permanente des chambres de métiers et de l'artisanat à lui verser une somme de 96 736, 58 euros en réparation du préjudice subi du fait de l'illégalité de la décision du 18 février 2015 ; il demande en outre de mettre à la charge de l'assemblée permanente des chambres de métiers et de l'artisanat le versement d'une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision du 18 février 2015 est irrégulière dès lors que l'entretien préalable a été mené en méconnaissance du principe du respect des droits de la défense ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; en effet, aucune faute grave ne peut être retenue à son encontre ; il n'est pas établi qu'il aurait refusé d'obéir aux instructions de son employeur ; aucun calendrier fixant des délais pour l'exécution de ses tâches n'a été fixé ; il n'existe aucun plan définissant les objectifs à atteindre ; l'assemblée permanente des chambres de métiers et de l'artisanat ne saurait se fonder sur le rapport d'audit du 7 janvier 2015 rendu en méconnaissance des principes d'impartialité et du contradictoire ;
- la décision du 18 février 2015 prononçant son licenciement étant illégale, l'assemblée permanente des chambres de métiers et de l'artisanat engage sa responsabilité pour faute ; ses différents préjudices doivent être indemnisés à hauteur de 96 736, 58 euros.
Par un mémoire en réplique, enregistré le 28 août 2017, l'assemblée permanente des chambres de métiers et de l'artisanat conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens.
Elle soutient en outre que les conclusions indemnitaires présentées par M. B...sont irrecevables puisqu'il n'avait adressé à l'administration aucune réclamation indemnitaire préalable à sa demande devant le Tribunal administratif de Paris.
Par une ordonnance du 29 août 2017, la clôture de l'instruction a été fixée au 22 septembre 2017.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 52-1311 du 10 décembre 1952 relative à l'établissement obligatoire d'un statut du personnel administratif des chambres d'agriculture, des chambres de commerce et des chambres de métiers ;
- l'arrêté du 19 juillet 1971 modifié relatif au statut du personnel administratif des chambres de métiers et de l'artisanat ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pagès,
- les conclusions de M. Baffray, rapporteur public,
- et les observations de Me C...pour M.B....
1. Considérant que M. B...a été recruté par l'assemblée permanente des chambres de métiers et de l'artisanat (APCMA) en qualité d'agent contractuel chargé de mission au sein du département mutualisation des ressources informatiques par un contrat à durée déterminée à compter du 29 novembre 2010 ; que ce contrat a été renouvelé le 1er mars 2011, le 1er janvier 2012 puis le 1er janvier 2014 ; que, par une décision du 18 février 2015, le président de l'APCMA a prononcé son licenciement pour faute ; que, par un jugement du 8 novembre 2016, le Tribunal administratif de Paris a annulé cette décision du 18 février 2015 et a rejeté le surplus des conclusions de M.B... ; que l'APCMA relève appel de ce jugement en ce qu'il a annulé la décision du 18 février 2015 ; que M. B...demande, par la voie de l'appel incident, la réformation de ce même jugement en ce qu'il a refusé de condamner l'APCMA à lui verser une somme de 96 736, 58 euros en réparation du préjudice subi du fait de l'illégalité de la décision prononçant son licenciement ;
Sur la régularité du jugement attaqué:
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés " ; que, contrairement à ce que soutient l'APCMA, les premiers juges, qui ne sont pas tenus de répondre à l'ensemble des arguments des parties, ont suffisamment motivé leur jugement, en exposant notamment au point 4 de ce jugement, les raisons pour lesquelles ils estimaient que la décision du 18 février 2015 prononçant le licenciement de M. B...était entachée d'illégalité ;
3. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience " ; qu'aux termes de l'article R. 741-8 de ce code : " Si le président de la formation est rapporteur, la minute est signée, en outre, par l'assesseur le plus ancien dans l'ordre du tableau " ; qu'il ressort des pièces du dossier que la minute du jugement attaqué est signée par le président-rapporteur, l'assesseur le plus ancien et le greffier d'audience ; que, par suite, l'APCMA n'est pas fondée à soutenir que les dispositions précitées du code de justice administrative auraient été méconnues;
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
4. Considérant qu'aux termes de l'article 61 du statut du personnel administratif des chambres de métiers et de l'artisanat : " Toute faute commise par un agent dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions l'expose à une sanction disciplinaire sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale. / Les sanctions disciplinaires sont : / (...) - sanctions du troisième degré : / (...) la révocation (...). " ; qu'il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire sont matériellement établis et constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes ;
5. Considérant que si l'APCMA soutient que M. B...n'a pas respecté les directives qui lui avaient été données, et qui figuraient notamment dans un courriel du 20 juin 2014, ce seul courriel, ne suffit pas à établir que l'intéressé aurait sciemment ignoré les instructions qui lui avaient été données ; que la requérante soutient également que M. B...ne respectait pas les objectifs qui lui étaient fixés dans les délais impartis ; que, toutefois, l'APCMA ne justifie pas plus qu'en première instance qu'elle aurait imposé un calendrier d'exécution à M.B..., la seule production d'un planning établi par l'intéressé lui-même ne pouvant être regardé comme constituant des objectifs qu'elle lui aurait imposés ; qu'enfin, si les échanges de courriels produits par l'APCMA font état de retards importants dans l'exécution des tâches, il n'apparaît pas que ces retards seraient imputables à M. B...qui n'a reçu aucun avertissement à ce sujet, et dont le contrat a été renouvelé à trois reprises ; que, dans ces conditions, il n'est pas établi que M. B...aurait manqué à ses obligations professionnelles, ni que son comportement serait constitutif d'une faute de nature à justifier son licenciement ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'APCMA n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé sa décision du 18 février 2015 ;
Sur l'appel incident :
7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et n'est pas contesté par M. B...qu'il n'a formé aucune demande indemnitaire préalable tendant à l'indemnisation des préjudices résultant de la décision de licenciement contestée ; que l'assemblée permanente des chambres de métiers et de l'artisanat a opposé en première instance à ses demandes indemnitaires une fin de non recevoir à titre principal tirée du défaut de liaison du contentieux ; que dès lors c'est à juste titre que les premiers juges ont rejeté sa demande indemnitaire comme irrecevable faute de liaison du contentieux ; que la demande d'indemnisation présentée par M. B...postérieurement au jugement attaqué n'est pas susceptible de lier le contentieux ; que les conclusions indemnitaires de M. B...doivent donc être rejetées comme irrecevables ;
Sur les conclusions des parties tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Considérant que les dispositions susvisées font obstacle à ce que M.B..., qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante à titre principal, verse une somme à l'APCMA au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'APCMA le versement à M. B...de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de l'assemblée permanente des chambres de métiers et de l'artisanat est rejetée.
Article 2 : Les conclusions d'appel incident de M. B...sont rejetées.
Article 3 : L'assemblée permanente des chambres de métiers et de l'artisanat versera à M. B...la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'assemblée permanente des chambres de métiers et de l'artisanat et à M. A...B....
Délibéré après l'audience du 27 mars 2018, à laquelle siégeaient :
- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,
- M. Niollet, président-assesseur,
- M. Pagès, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 10 avril 2018.
Le rapporteur,
D. PAGESLe président,
O. FUCHS TAUGOURDEAU
Le greffier,
P. TISSERAND
La République mande et ordonne au préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17PA00073