Par une décision du 6 juillet 2017, la commission départementale d'aide sociale du Vaucluse a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et deux mémoires, enregistrés les 17 novembre 2017, 4 avril 2018 et 15 juin 2018, M. C... D..., agissant en sa qualité de tuteur de son fils, M. B... D..., demande à la Cour :
1°) d'annuler la décision du 6 juillet 2017 par laquelle la commission départementale d'aide sociale du Vaucluse a confirmé les décisions du président du conseil départemental du 27 janvier 2017 ;
2°) d'annuler les trois décisions du président du conseil départemental du Vaucluse du 27 janvier 2017, ensemble la décision du 4 mars 2017 rejetant son recours gracieux ;
3°) d'admettre M. B... D... au bénéfice de l'aide sociale à l'hébergement pour les périodes comprises entre les 25 et 29 avril, 14 et 15 mai 2016, et 12 et 23 septembre 2016.
Il soutient qu'il ignorait qu'il aurait dû présenter une demande d'aide sociale dans un délai de deux mois à l'issue de chacun des séjours effectués par M. B... D... au sein du foyer de vie, puisque celui-ci bénéficie d'un accord pour un hébergement temporaire d'une durée maximale de 90 jours par an ; il fait également valoir qu'il n'a pas été tenu compte du délai supplémentaire de deux mois qui aurait pu être accordé par le président du conseil départemental pour le dépôt de la demande d'aide sociale et qui aurait permis la prise en charge de M. B... D... au titre de l'aide sociale à l'hébergement pour la période comprise entre les 12 et 23 septembre 2016.
Par deux mémoires en défense, enregistrés les 14 mars 2018 et 5 juin 2018, le département du Vaucluse conclut au rejet de la requête.
Il soutient que la requête est irrecevable faute de qualité pour agir du requérant et qu'en outre les moyens soulevés par lui ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
En application de l'article 12 de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 et du décret n° 2018-928 du 29 octobre 2018, le dossier de la requête susvisée a été transféré à la Cour administrative d'appel de Paris, où elle a été enregistrée le 2 janvier 2019 sous le n° 19PA00365.
Vu :
- le code de l'action sociale et des familles ;
- la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 ;
- le décret n° 2018-928 du 29 octobre 2018 ;
- le code de justice administrative ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A...,
- et les conclusions de Mme Bernard, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... D..., adulte handicapé né en 1990, bénéficie d'un hébergement temporaire d'une durée maximale de quatre-vingt-dix jours par an au sein du foyer de vie " La Maison du Parc aux Cyprès " de Villelaure. Par quatre décisions du 27 janvier 2017, le président du conseil départemental du Vaucluse a admis M. D... à l'aide sociale à l'hébergement pour la période du 26 au 30 décembre 2016 mais lui a refusé le bénéfice de l'aide sociale pour les périodes allant du 25 au 29 avril, du 14 au 15 mai et du 12 au 23 septembre 2016, au motif que la date de dépôt de la demande ne permettait pas une prise en charge rétroactive pour ces périodes. Le recours gracieux formé contre ces dernières décisions par M. C... D..., père de l'intéressé, a été rejeté le 14 mars 2017 par le président du conseil départemental du Vaucluse. Le recours formé par M. C... D... contre les décisions précitées devant la commission départementale d'aide sociale du Vaucluse a été rejeté le 6 juillet 2017, décision dont il relève appel devant la Cour.
Sur la recevabilité de la requête :
2. Aux termes de l'article L. 134-4 du code de l'action sociale et des familles, dans sa rédaction applicable à la date d'enregistrement de la requête : " Tant les recours devant la commission départementale que les recours et les appels devant la commission centrale peuvent être formés par le demandeur, ses débiteurs d'aliments (...) ayant un intérêt direct à la réformation de la décision ". M. C... D..., père de M. B... D... et donc débiteur d'aliments de ce dernier, au surplus tuteur de son fils depuis une décision judiciaire du 24 avril 2018, disposait ainsi de la qualité pour former un recours contre la décision de la commission départementale d'aide sociale du Vaucluse du 6 juillet 2017. Par suite, la fin de non-recevoir opposée par le département du Vaucluse, tirée de l'absence de qualité pour agir du requérant, doit être écartée.
Sur le bien-fondé de la décision de la commission départementale d'aide sociale du Vaucluse du 14 mars 2017 :
3. Aux termes de l'article L. 131-4 du code de l'action sociale et des familles : " Les décisions attribuant une aide sous la forme d'une prise en charge de frais d'hébergement peuvent prendre effet à compter de la date d'entrée dans l'établissement à condition que l'aide ait été demandée dans un délai fixé par voie réglementaire ". Aux termes de l'article R. 131-2 du même code : " Sauf dispositions contraires, les demandes tendant à obtenir le bénéfice de l'aide sociale prévue aux titres III et IV du livre II prennent effet au premier jour de la quinzaine suivant la date à laquelle elles ont été présentées. / Toutefois, pour la prise en charge des frais d'hébergement des personnes accueillies dans un établissement social ou médico-social, habilité à recevoir des bénéficiaires de l'aide sociale ou dans un établissement de santé dispensant des soins de longue durée, la décision d'attribution de l'aide sociale peut prendre effet à compter du jour d'entrée dans l'établissement si la demande a été déposée dans les deux mois qui suivent ce jour. Ce délai peut être prolongé une fois, dans la limite de deux mois, par le président du conseil départemental ou le préfet. / Le jour d'entrée mentionné au deuxième alinéa s'entend, pour les pensionnaires payants, du jour où l'intéressé, faute de ressources suffisantes, n'est plus en mesure de s'acquitter de ses frais de séjour ". Il résulte de ces dispositions qu'elles ne sont pas applicables, en tant qu'elles instaurent une solution de continuité dans la prise en charge des frais d'hébergement, lorsque, antérieurement à l'entrée dans l'établissement, l'intéressé bénéficiait déjà et à un même titre de la prise en charge de ses frais d'hébergement ou lorsque la demande porte sur le renouvellement de cette prise en charge dans l'établissement où l'intéressé était déjà accueilli. Dans ces cas, la prise en charge des frais d'hébergement doit prendre effet à compter de la date d'entrée dans l'établissement ou de la date d'expiration de la prise en charge précédente.
4. Il résulte de l'instruction que M. B... D..., qui été accueilli au sein du foyer de vie " La Maison des Parcs au Cyprès ", situé à Villelaure, dans le cadre d'un accueil temporaire d'une durée maximale de 90 jours par an, pour les périodes du 22 au 26 février, du 25 au 29 avril, du 14 au 15 mai, du 12 au 23 septembre et du 26 au 30 décembre 2016, a été admis à l'aide sociale à l'hébergement pour la période du 22 au 26 février 2016 par une décision du président du conseil départemental du Vaucluse du 12 avril 2016. Dès lors que la demande d'admission à l'aide sociale à l'hébergement tendant à la prise en charge des séjours effectués en avril, mai et septembre 2016 portait sur le renouvellement de la prise en charge de M. D... dans l'établissement où il était déjà accueilli, les délais prévus par l'article R. 131-2 du code de l'action sociale et des familles n'étaient pas applicables à la situation de l'intéressé, et la prise en charge des frais relevant de l'aide sociale devait prendre effet à compter de la date d'expiration de la prise en charge précédente, sans que puisse y faire obstacle la circonstance que M. C... D... a déposé tardivement une demande tendant au bénéfice de l'aide sociale à l'hébergement. Par suite, le président du conseil départemental du Vaucluse, en n'accordant le bénéfice de l'aide sociale que pour la période du 26 au 30 décembre 2016, a entaché d'une erreur de droit ses décisions du 27 janvier 2017, confirmées sur recours gracieux le 14 mars 2017. Dès lors, il convient d'annuler ces décisions en tant qu'elles ont refusé le bénéfice de l'aide sociale à l'hébergement pour les périodes du 25 au 29 avril, du 14 au 15 mai, et du 12 au 23 septembre 2016, d'annuler la décision de la commission départementale du Vaucluse du 6 juillet 2017 rejetant la demande de M. C... D..., et d'enjoindre au président du conseil départemental du Vaucluse de réexaminer la demande présentée par M. C... D... tendant à ce que le bénéfice de l'aide sociale à l'hébergement soit accordé à M. B... D... pour les périodes du 25 au 29 avril, du 14 au 15 mai et du 12 au 23 septembre 2016.
DÉCIDE :
Article 1er : La décision du 6 juillet 2017 de la commission départementale d'aide sociale du Vaucluse et les décisions du 27 janvier 2017 et du 14 mars 2017 du président du conseil départemental du Vaucluse sont annulées.
Article 2 : Il est enjoint au président du conseil départemental du Vaucluse de réexaminer la demande présentée par M. C... D... tendant à ce que le bénéfice de l'aide sociale à l'hébergement soit accordé à M. B... D... pour les périodes du 25 au 29 avril, du 14 au 15 mai et du 12 au 23 septembre 2016.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D..., au président du conseil départemental du Vaucluse et au ministre des solidarités et de la santé.
Délibéré après l'audience du 12 novembre 2020, à laquelle siégeaient :
- M. A..., président,
- Mme Collet, premier conseiller,
- Mme Larsonnier, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 décembre 2020.
Le rapporteur, président de la formation de jugement,
I. A...
La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 19PA00365