Par une requête enregistrée le 23 juillet 2014, M. B..., représenté par Me A... demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1306904/1 du 20 juin 2014 du Tribunal administratif de Melun ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet du Val-de-Marne du 25 juillet 2013 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de lui délivrer une carte de séjour temporaire " salarié " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour, sous la même astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
M. B... soutient que :
- l'arrêté est entaché d'un défaut de motivation ;
- les décisions sont entachées d'un vice de procédure pour défaut de saisine de la commission du titre de séjour ;
- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation et a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, eu égard à l'ancienneté de son séjour, à son intégration professionnelle et à la présence en France de sa fille née sur le sol français ;
- le préfet a méconnu les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les prescriptions du point 2.2.3 de la circulaire NOR INTK1229185C du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012.
La requête a été communiquée au préfet du Val-de-Marne le 28 août 2014, qui n'a pas produit de mémoire en défense.
Vu :
- les autres pièces du dossier ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- la circulaire NOR INTK1229185C du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 sur les conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière dans le cadre des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Par une décision du 18 décembre 2014, le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris a accordé à M. B...l'aide juridictionnelle à hauteur de 70%.
Par décision du président de la formation de jugement, le rapporteur public a été dispensé, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
M. Lapouzade a présenté son rapport lors de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., de nationalité ukrainienne, a sollicité la régularisation de sa situation administrative. Par un arrêté du 25 juillet 2013, le préfet du Val-de-Marne, examinant sa situation administrative au regard des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 et de celles de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a opposé un refus à sa demande de titre de séjour et a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français. M. B... relève régulièrement appel du jugement du 20 juin 2014 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur le refus de titre de séjour :
2. En premier lieu, l'arrêté contesté, qui vise les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et les articles L. 313-11 7°, L. 313-14 et L. 511-1 I du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, fait mention de ce que M. B... s'est vu refuser, à la suite de l'avis défavorable de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi le renouvellement, de son titre de séjour " salarié " par arrêté du 24 mai 2012, confirmé par le Tribunal administratif de Paris le 30 mai 2013, qu'il ne produit aucun élément nouveau à l'appui de sa demande de régularisation, qu'il n'atteste pas du caractère habituel de sa présence en France au cours des années 2003, 2005, 2006 et 2007, qu'il ne justifie pas d'une insertion professionnelle en dépit de quelques mois d'activités salariées, qu'il ne fait valoir ni de considérations humanitaires ni de motifs exceptionnels à l'appui de sa demande et qu'il n'a pas établi le centre de ses intérêts en France. L'arrêté mentionne, en outre, que M. B... ne justifie pas relever d'un autre cas d'attribution d'un titre de séjour en application du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et que la décision ne contrevient pas aux stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Ainsi, l'arrêté attaqué comporte l'ensemble des considérations de fait et de droit sur lesquelles il s'appuie. Par suite, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de l'insuffisance de motivation et du défaut d'examen complet de la situation personnelle du requérant.
3. En deuxième lieu, aux termes des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article
L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans ".
4. D'une part, M. B... soutient résider en France de façon ininterrompue depuis l'année 2001, soit depuis plus de 10 ans. Toutefois, il ne produit que divers courriers, qui n'impliquent pas sa présence sur le territoire français dès lors qu'il est domicilié.... Ces pièces sont insuffisantes pour établir la réalité de sa présence en France durant les années 2003, 2005 et 2006. Ainsi, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le préfet du Val-de-Marne devait soumettre pour avis sa demande d'admission exceptionnelle au séjour à la commission du titre de séjour.
5. D'autre part, il ressort des bulletins de salaire versés au dossier que M. B... n'a travaillé en France que seize mois, non consécutifs, à la date de la décision contestée et, ainsi qu'il a été dit au point 4, le requérant n'établit pas le caractère habituel de sa présence sur le territoire français au titre des années 2003, 2005 et 2006. Par suite, M. B..., qui ne justifie d'aucune considération humanitaire ou motif exceptionnel au sens des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, n'est pas fondé à soutenir que le préfet de police aurait commis une erreur manifeste d'appréciation dans l'application de ces dispositions.
6. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " et aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile susvisé : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée (...) ".
7. M. B..., d'une part, ne réside habituellement en France que depuis l'année 2007, ainsi qu'il a été vu au point 4, et n'établit pas, ni même n'allègue, être dépourvu de toute attache familiale dans son pays d'origine, où il a lui-même vécu jusqu'à ses 35 ans au moins. M. B...ne saurait, d'autre part, utilement se prévaloir de sa qualité de père d'enfant né en France dès lors que cette circonstance est postérieure à la date de l'arrêté contesté. En tout état de cause, compte-tenu de ce qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la concubine de M.B..., dont la régularité du séjour en France n'est pas établie, ne serait pas légalement admissible en Ukraine, du jeune âge de l'enfant, rien ne s'oppose à ce que la cellule familiale se reconstitue en Ukraine. Dès lors, et nonobstant la circonstance que l'intéressé a pu justifier de périodes d'emploi en France dans le secteur du bâtiment, l'arrêté contesté n'a pas porté au droit de M. B... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée compte tenu des buts en vue desquels il a été pris. Ainsi, le préfet du Val-de-Marne n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
8. En quatrième lieu, pour les mêmes raisons que celles exposées au point précédent, le préfet du Val-de-Marne n'a pas entaché son arrêté d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle du requérant.
9. En cinquième lieu, M. B... ne peut, en tout état de cause, utilement se prévaloir de la méconnaissance du point 2.2.3 de la circulaire du 28 novembre 2012, aux termes duquel : " a) Dans le cas où un étranger atteste d'une durée de présence particulièrement significative, de l'ordre de sept ans par exemple, et du versement effectif de salaires attestant une activité professionnelle égale ou supérieure à douze mois, consécutifs ou non, au cours des trois dernières années, mais ne présente ni contrat de travail, ni promesse d'embauche, il vous est possible de lui délivrer un récépissé de carte de séjour temporaire " salarié " en vue de lui permettre de rechercher un emploi et l'autorisant à travailler. Ce récépissé ne sera renouvelable qu'une fois. (...) " qui concerne la délivrance d'un récépissé de demande de carte de séjour temporaire, à l'encontre de la décision lui refusant un titre de séjour.
Sur l'obligation de quitter le territoire et la décision fixant le pays de destination :
10. Enfin, compte tenu de ce qui précède, les moyens de la requête tirés de l'exception d'illégalité de la décision de refus de titre de séjour formulés à l'appui des conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire et la décision fixant le pays à destination duquel M. B..., doivent être écartés.
11. Il résulte de ce tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Doivent également être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M.C... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Val-de-Marne.
Délibéré après l'audience du 1er février 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Lapouzade, président,
- M. Luben, président assesseur,
- Mme Bernard, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 15 février 2016.
Le président rapporteur,
J. LAPOUZADE
Le président assesseur,
I. LUBEN
Le greffier,
A. CLEMENT
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 14PA03418