Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 8 mai 2015, M. B...D..., représenté par MeA..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1307408 du 5 mars 2015 du Tribunal administratif de Melun ;
2°) de prononcer la décharge de ces impositions et des pénalités correspondantes ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- il n'a jamais reçu de proposition de rectification au titre de son activité individuelle ; il incombe à l'administration d'apporter la preuve de la notification ; elle n'apporte pas cette preuve par l'attestation postale produite qui est entachée d'erreurs dès lors qu'elle indique une distribution du pli alors qu'il est constant qu'il a été retourné au service comme non réclamé ; en outre, il n'est pas établi que les agents de la poste qui auraient présenté et distribué le pli en cause ont prêté serment conformément aux dispositions du décret n° 93-1229 du 10 novembre 1993 ;
- la proposition de rectification 2120 relative à l'impôt sur le revenu est entachée d'une insuffisance de motivation au regard des dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales dès lors qu'elle ne comporte aucun détail sur les bases et les modalités de calcul du rehaussement des bénéfices non commerciaux de son entreprise individuelle ;
- par voie de conséquences les pénalités sont irrégulières.
Par un mémoire en défense enregistré le 29 janvier 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- l'attestation postale justifie la régularité de la notification de la proposition de rectification 3924 à l'entreprise individuelle en ce qu'elle établit la présentation et la mise en instance du pli, sans qu'il importe qu'elle comporte une erreur matérielle en ce qui concerne la distribution ;
- la proposition de rectification 2120 adressée à M. et Mme D...est suffisamment motivée au regard des prescriptions de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales applicables à la notification des bases imposées d'office ; en tout état de cause elle renvoie aux motifs de la proposition de rectification 3924 dont ils ont été régulièrement informés de la mise en instance et qui doit être regardée comme leur ayant été régulièrement notifiée ;
- les autres moyens soulevés par M. D...ne sont pas non plus fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Notarianni,
- les conclusions de M. Blanc, rapporteur public,
- et les observations de Me A...pour M. C....
1. Considérant que M. D... relève appel du jugement du 5 mars 2015 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande de décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des compléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 2009 à 2011 en conséquence de la vérification de comptabilité de son entreprise individuelle d'artisan du bâtiment ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L 57 du LPF : "L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation " et qu'aux termes de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales : " Les bases ou éléments servant au calcul des impositions d'office et leurs modalités de détermination sont portées à la connaissance du contribuable trente jours au moins avant la mise en recouvrement des impositions " ; qu'il incombe à l'administration de justifier de la régularité de la notification au contribuable de la proposition de rectification prévue tant par les dispositions de l'article L. 57 que de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales ; que, dans le cas où le pli contenant la proposition de rectification, envoyé en recommandé à l'adresse indiquée par le requérant, a été retourné à l'administration avec la mention " pli non réclamé ", la preuve de cette notification régulière peut résulter soit des mentions précises, claires et concordantes portées sur l'enveloppe, soit, à défaut, d'une attestation de l'administration postale ou d'autres éléments de preuve établissant la délivrance par le préposé du service postal, conformément à la réglementation en vigueur, d'un avis d'instance prévenant le destinataire de ce que le pli était à sa disposition au bureau de poste ;
3. Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'à la suite de la vérification de comptabilité de son entreprise individuelle d'artisan du bâtiment, M. D...été rendu destinataire de deux propositions de rectification distinctes en date du 23 décembre 2010, l'une par lettre 3924 adressée à l'entreprise individuelle Do Nascimento Fonseca en matière de bénéfices industriels et commerciaux et de taxe sur la valeur ajoutée, l'autre par lettre 2120 adressée à
M. et Mme D...tirant en matière d'impôt sur le revenu les conséquences financières de la première ; que M. D...conteste la régularité de ces deux propositions de rectification ;
En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée :
4. Considérant qu'il résulte de l'instruction, et qu'il est au demeurant constant, que le pli contenant la proposition de rectification 3924 du 23 décembre 2010, adressée le jour même à l'entreprise individuelle de M. D..., a été retourné avec la mention " non réclamé - retour à l'expéditeur " au service vérificateur ; que l'administration n'établit pas que le destinataire du pli a été régulièrement avisé de sa mise en instance par l'attestation postale qu'elle produit à cette fin, laquelle est dépourvue de toute force probante dès lors qu'elle mentionne de façon erronée que ce pli a été distribué contre signature le 10 janvier 2011 ; que le pli lui-même ne comporte aucune mention selon laquelle le destinataire aurait été avisé de sa mise en instance ; que, dans ces conditions, M. D...est fondé à soutenir que les rappels de taxe sur la valeur ajoutée en litige ont été mis à sa charge à l'issue d'une procédure d'imposition irrégulière ;
En ce qui concerne l'impôt sur le revenu :
5. Considérant que M. et Mme D...ont fait l'objet d'une taxation d'office à l'impôt sur le revenu au titre des trois années en litige sur le fondement de l'article L. 66, 3° livre des procédures fiscales pour défaut de souscription des déclarations d'ensemble de leurs revenus ; que, dans ces conditions, M. D...ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, applicables aux propositions de rectification notifiées dans le cadre de la procédure contradictoire ; qu'il y a lieu, comme l'ont fait les premiers juges, d'apprécier le bien-fondé de son moyen au regard des dispositions de l'article L. 76 du même code ;
6. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la proposition de rectification relative au revenu global du 23 décembre 2010 adressée au foyer fiscal du contribuable en matière d'impôt sur le revenu dans le cadre de la procédure d'imposition d'office ne précise pas les bases ou éléments servant au calcul des rehaussements d'office et leurs modalités de détermination ; que si elle renvoie sur ce point aux motifs de la proposition de rectification catégorielle 3924 du même jour adressée à l'entreprise de M. D...en matières de bénéfices industriels et commerciaux, il ne résulte pas de ses termes qu'une copie de la proposition de rectification catégorielle lui était jointe et, comme il a été dit au point 4, M. C...n'a pas reçu cette proposition de rectification ; que, dans ces conditions, la motivation de la proposition de rectification n° 2120 ne peut être regardée comme répondant aux prescriptions de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales ;
7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. D...est fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
8. Considérant que dans les circonstances de l'espèce il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. D...et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 1307408 du 5 mars 2015 du Tribunal administratif de Melun est annulé.
Article 2 : M. D...est déchargé des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des compléments d'impôt sur le revenu mis à sa charge au titre des années 2009 à 2011 et des pénalités correspondantes.
Article 3 : L'Etat versera à M. D...une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...D...et au ministre de l'économie et des finances.
Copie en sera adressée à la direction régionale des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris (pôle fiscal Paris centre et services spécialisés).
Délibéré après l'audience du 17 novembre 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Dalle, président,
- Mme Notarianni, premier conseiller,
- Mme Stoltz-Valette, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 1er décembre 2016.
Le rapporteur,
L. NOTARIANNI
Le président,
D. DALLE
Le greffier,
C. MONGIS
La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15PA01887