Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 4 septembre 2017 et 28 mars 2018, la SELARL Gauthier-Sohm, agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la société Avenir Energie, représentée par Me Naim, avocat, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1503725 du 29 juin 2017 du Tribunal administratif de Melun ;
2°) de prononcer la décharge de la cotisation litigieuse et des pénalités correspondantes ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la méthode de reconstitution du résultat est sommaire et viciée ; il convient de prendre en compte le chiffre d'affaires ayant servi de base au calcul de la TVA collectée de l'exercice du 1er avril 2012 au 31 mars 2013, plutôt que le chiffre d'affaires de l'exercice précédent ;
- les rappels de TVA déductible effectués au titre de l'exercice doivent être ajoutés au forfait de charges de 92 % retenu par le service ;
- le résultat ressortant de son grand-livre, qu'elle verse au dossier, doit être substitué au résultat déterminé par le service ;
- elle a obtenu gain de cause devant la Cour administrative d'appel de Paris dans un litige portant sur la TVA déductible des périodes de novembre 2010 à juin 2012 et d'août 2012 à janvier 2013 ;
- elle tient à la disposition de la Cour les factures de charges de l'exercice litigieux ;
- pour établir un rappel de TVA collectée au titre de la période de mars 2012 à avril 2013, qui correspond pratiquement à l'exercice en litige dans la présente affaire, le service s'est fondé sur un chiffre d'affaires toutes taxes comprises de 6 423 890 euros, ainsi qu'il ressort de la proposition de rectification du 3 février 2014, qui lui a été adressée ;
- elle a comptabilisé au titre de l'exercice précédent, clos le 31 mars 2012, une perte de 1 422 605 euros, qui doit en conséquence être déduite du résultat évalué d'office par le service au titre de l'exercice clos le 31 mars 2013.
Par un mémoire en défense, enregistré le 7 décembre 2017, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- la société Avenir Energie supporte la charge de la preuve en application de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales, faute pour elle d'avoir déposé en temps utile sa déclaration de résultat ;
- la société Avenir Energie n'établit pas que la méthode d'évaluation retenue par le service aboutit à un montant de résultat exagéré.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Dalle,
- et les conclusions de Mme Mielnik-Meddah, rapporteur public.
1. Considérant que la société Avenir Energie relève appel du jugement en date du 29 juin 2017 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande en décharge de la cotisation d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos le 31 mars 2013, à la suite d'un contrôle sur pièces ;
Sur la fin de non-recevoir opposée en première instance par l'administration fiscale :
2. Considérant que, contrairement à ce que soutient l'administration, la société Avenir Energie demandait dans son mémoire introductif d'instance devant le Tribunal, à la page 4, la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a assujettie ; que la fin de non-recevoir opposée devant le Tribunal, tirée de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 411-1 du code de justice administrative, doit, dès lors, être écartée ;
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales : " Sont taxés d'office : (...) à l'impôt sur les sociétés, les personnes morales passibles de cet impôt qui n'ont pas déposé dans le délai légal leur déclaration, sous réserve de la procédure de régularisation prévue à l'article L. 68 (...) " ;
4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société Avenir Energie n'a pas souscrit dans le délai qui lui était imparti la déclaration de ses résultats de l'exercice clos le 31 mars 2013 ; que le service l'a en conséquence taxée d'office ; que, pour déterminer le résultat imposable de l'exercice clos le 31 mars 2013, il a retenu le même montant de chiffre d'affaires que celui déclaré par la société au titre de l'exercice précédent, clos le 31 mars 2012, soit 16 988 719 euros hors taxes, duquel il a déduit un montant de charges d'exploitation de 15 629 621 euros, déterminé en appliquant au chiffre d'affaires le même rapport charges/chiffre d'affaires que celui constaté au titre de l'exercice clos le 31 mars 2012, soit 92 % ; qu'il a ainsi fixé à 1 359 098 euros le montant du résultat imposable de l'exercice clos le 31 mars 2013 ;
5. Considérant que la société Avenir Energie soutient que cette méthode est sommaire et qu'elle aboutit à un résultat exagéré ; qu'elle fait valoir, d'une part, que pour établir un rappel de TVA collectée au titre de la période de mars 2012 à avril 2013, c'est-à-dire une période correspondant pratiquement à l'exercice en litige, le service s'est fondé sur un montant de chiffre d'affaires toutes taxes comprises de 6 423 890 euros, ainsi qu'il ressort de la proposition de rectification du 3 février 2014 qui lui a été adressée à cette occasion, d'autre part, qu'au titre de l'exercice clos le 31 mars 2012, elle a déclaré un déficit d'exploitation de 1 422 605 euros, lequel doit être imputé sur le résultat évalué d'office de l'exercice clos le 31 mars 2013 ; que ces allégations ne sont pas contestées par l'administration et sont confirmées par les pièces produites par la requérante en annexe à son mémoire du 28 mars 2018 auquel le ministre n'a pas répliqué ; que celle-ci doit en conséquence être regardée comme apportant la preuve qui lui incombe dès lors qu'elle a été régulièrement taxée d'office, que la méthode d'évaluation du résultat de l'exercice clos en 2013 est sommaire et aboutit à un résultat inexact ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Avenir Energie est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif a rejeté sa demande en décharge de l'imposition en litige ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1503725 du 29 juin 2017 du Tribunal administratif de Melun est annulé.
Article 2 : Il est accordé à la société Avenir Energie la décharge de la cotisation d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos le 31 mars 2013 et des pénalités correspondantes.
Article 3 : L'Etat versera à la société Avenir Energie une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SELARL Gauthier-Sohm, en qualité de mandataire liquidateur de la société Avenir Energie et au ministre de l'action et des comptes publics.
Copie en sera adressée à la direction régionale des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris (pôle fiscal parisien 1).
Délibéré après l'audience du 25 octobre 2018 à laquelle siégeaient :
M. Jardin, président de chambre,
M. Dalle, président assesseur,
Mme Stoltz-Valette, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 15 novembre 2018.
Le rapporteur, Le président,
D. DALLE C. JARDIN
Le greffier,
C. BUOT
La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17PA03008