Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 3 juillet 2015, M.A..., représenté par Me Besse, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1423407/1-3 du 27 mars 2015 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet de police du 7 avril 2014 ;
3°) d'enjoindre au préfet de police, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privé et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour durant cet examen ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au profit de Me Besse, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision de refus de titre de séjour est insuffisamment motivée au regard de la loi du 11 juillet 1979 ;
- le préfet devait saisir la commission du titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, puisqu'il démontre sa résidence habituelle en France depuis plus de dix ans ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- l'obligation de quitter le territoire français est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
La requête a été communiquée le 17 août 2015 au préfet police, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris du 22 mai 2015.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 modifié, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants marocains et de leurs familles ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et son décret d'application n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Notarianni, premier conseiller,
- et les observations de M.A....
1. Considérant que, M.A..., de nationalité marocaine, né le 16 septembre 1971, entré en France en 2002, selon ses déclarations, a demandé la délivrance d'un titre de séjour en qualité de salarié sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par un arrêté du 7 avril 2014, le préfet de police a opposé un refus à sa demande et l'a assorti d'une obligation de quitter le territoire français, en fixant le pays de destination ; que M. A...relève appel du jugement du 27 mars 2015, par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans (...) " ;;
3. Considérant que M. A...établit qu'il résidait en France de façon habituelle depuis plus de dix ans à la date de la décision contestée par la production de très nombreuses pièces, dont certaines nouvelles en appel ; que, particulièrement, s'agissant des périodes au cours desquelles les premiers juges ont considéré que sa présence habituelle en France, n'était pas établie, il justifie de sa présence en France au cours des années 2006 et 2007 par notamment la production de bulletins de salaires et des certificats de travail, des courriers et versements de l'assurance maladie et des avis d'imposition, au cours des années 2008 et 2012 par notamment la production en appel de certificats d'hébergement par lesquels le Samu social de Paris atteste l'avoir pris en charge pour de nombreuses nuitées au cours de l'année 2008 et des années 2012 à 2014, au cours de l'année l'année 2009 par notamment la production d'un certificat d'hébergement par le Samu social, le dépôt d'une demande d'autorisation de travail, des certificats médicaux et l'émission d'une carte Vitale, et au cours de l'année 2010 par notamment la production d'ordonnances médicales, de courriers de versements de l'assurance maladie et l'ouverture d'un compte courant à la banque postale ; qu'il s'ensuit que l'arrêté contesté a été pris au terme d'une procédure irrégulière, faute pour le préfet de police d'avoir recueilli l'avis de la commission du titre de séjour avant de rejeter la demande de titre de séjour dont il était saisi ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. A...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
5. Considérant que le présent arrêt n'implique pas qu'une carte de séjour temporaire soit délivrée à M. A...mais seulement que le préfet de police réexamine sa demande, après l'avoir soumise pour avis à la commission du titre de séjour ; qu'il y a lieu de prescrire ce réexamen dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction de l'astreinte demandée ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
6. Considérant que M. A...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Besse, avocat de M.A..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Besse de la somme de 1 500 euros ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1423407/1-3 du 27 mars 2015 du Tribunal administratif de Paris et l'arrêté du 7 avril 2014 du préfet de police sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de police, dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt, de réexaminer la demande d'admission exceptionnelle au séjour présentée par M. A....
Article 3 : L'Etat versera à Me Besse, avocat de M.A..., une somme de 1 500 euros en application des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que cet avocat renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Article 4: Le présent arrêt sera notifié à M. B...A..., au préfet de police et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée à Me Besse, avocat.
Délibéré après l'audience du 9 juin 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Jardin, président de chambre,
- M. Dalle, président assesseur,
- Mme Notarianni, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 23 juin 2016.
Le rapporteur
L. NOTARIANNILe président,
C. JARDINLe greffier,
C. BUOT La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
''
''
''
''
2
N° 15PA02639