Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 10 juillet 2017 et le 7 mars 2018, M. B..., représenté par MeC...'heur Pitcher, avocat, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement nos 1609371/2-2-1609373/2-2 du 17 mai 2017 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2008, 2009 et 2010 ;
3°) de mettre une somme de 10 000 euros à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- les travaux réalisés d'octobre 2008 à septembre 2010 faisaient obstacle à la location du bien ; celle-ci est intervenue presque aussitôt après l'achèvement des travaux en vertu d'un bail consenti à son profit le 7 décembre 2010 par la SCI Belem ;
- le procès-verbal de l'assemblée générale extraordinaire du 7 décembre 2010 de la SCI Belem, qui a décidé d'une mise en location du bien à son profit et le bail lui-même en date du 7 décembre 2010 sont opposables à l'administration, contrairement à ce qu'elle soutient ; la clause de réméré figurant dans l'acte d'achat du 17 septembre 2008 ne fait pas obstacle à ce que la location dont il bénéficie soit regardée comme bien réelle et prise en compte par le service ;
- les dépenses exposées par la SCI Belem étaient nécessaires à l'acquisition et à la conservation d'un revenu foncier ; le Conseil d'Etat admet dans cette hypothèse la déduction des charges, même si un délai sépare la fin des travaux de la mise en location ;
- pour d'autres SCI dont il était l'associé, ou pour d'autres années, l'administration a admis la déductibilité de charges foncières, bien que les immeubles n'aient pas procuré immédiatement des recettes ;
- par le jeu des reports de déficits, l'abandon de rectification consenti par l'administration dans l'instance engagée devant la Cour administrative d'appel de Versailles sous le numéro 13VE01971 est susceptible d'entraîner une réduction des rectifications qui lui ont été notifiées au titre des années 2008, 2009 et 2010 en conséquence du rehaussement des résultats de la SCI Belem.
Par un mémoire en défense, enregistré le 13 novembre 2017, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens du requérant sont infondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Dalle,
- et les conclusions de M. Platillero, rapporteur public.
1. Considérant que M. B...détient 99 % des parts de la société civile immobilière Belem, laquelle a fait l'acquisition le 17 septembre 2008 d'une maison d'habitation et d'un terrain situés à Rognes, dans le département des Bouches-du-Rhône ; qu'au titre des années 2008, 2009 et 2010, la SCI n'a comptabilisé aucune recette mais des charges correspondant à des dépenses de réparation et à des intérêts d'emprunt ; qu'elle a fait l'objet en 2011 d'un contrôle sur place à l'issue duquel l'administration a remis en cause les déficits fonciers qu'elle avait déclarés ; que les revenus imposables de M. B...ont en conséquence été rehaussés et des compléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales ont été mis à sa charge au titre des années 2008, 2009 et 2010, qu'il a contestés devant le Tribunal administratif de Paris par deux demandes introduites le 20 juin 2016 ; que, par la présente requête, M. B...relève appel du jugement en date du 17 mai 2017 par lequel le Tribunal a rejeté ses demandes ;
Sur le bien-fondé du rehaussement des résultats de la SCI Belem :
2. Considérant qu'aux termes du II de l'article 15 du code général des impôts : " Les revenus des logements dont le propriétaire se réserve la jouissance ne sont pas soumis à l'impôt sur le revenu (...) " ; qu'aux termes de l'article 28 du même code : " Le revenu net foncier est égal à la différence entre le montant du revenu brut et le total des charges de la propriété. " ; qu'aux termes de l'article 31 du même code, dans sa rédaction applicable à l'année d'imposition en litige : " I. Les charges de la propriété déductibles pour la détermination du revenu net comprennent : / 1° Pour les propriétés urbaines : / a) Les dépenses de réparation et d'entretien, les frais de gérance et de rémunération des gardes et concierges, effectivement supportés par le propriétaire (...) d) les intérêts des dettes contractées pour la conservation, l'acquisition, la construction, la réparation ou l'amélioration des propriétés (...) " ;
3. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que les charges afférentes aux logements dont le propriétaire se réserve la jouissance ne peuvent pas venir en déduction pour la détermination du revenu foncier compris dans le revenu global soumis à l'impôt sur le revenu ; que la réserve de jouissance est établie, notamment, par l'accomplissement ou non de diligences ayant pour objet de donner le bien en location ; qu'il appartient donc au propriétaire d'apporter la preuve qu'il a offert à la location pendant l'année en cause le logement resté vacant au titre duquel il demande la déduction de charges foncières, et qu'il a pris toutes les dispositions nécessaires pour le louer ;
4. Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'au cours des années en litige 2008, 2009 et 2010 l'immeuble de Rognes, occupé occasionnellement par M. B...et par sa famille, n'a fait l'objet d'une location qu'à la toute fin de l'année 2010, en vertu d'un bail consenti par la SCI le 7 décembre 2010 au profit de M.B... ; que si M. B...fait valoir que des travaux réalisés d'octobre 2008 à septembre 2010 faisaient obstacle à la location du bien et que celle-ci est intervenue presque aussitôt après l'achèvement des travaux, le ministre soutient, sans qu'aucune des pièces du dossier permette de contredire cette affirmation, que les travaux en cause étaient de simples travaux de viabilisation susceptibles de trouver leur justification aussi bien dans l'occupation du local à titre gratuit par M. B...et sa famille que dans une location éventuelle, que le requérant ne justifie de l'accomplissement d'aucune démarche de la SCI au cours des années en litige en vue de donner le bien en location à des tiers, que l'acte d'acquisition de la propriété du 18 septembre 2008 comportait une clause de réméré par laquelle la SCI s'interdisait de conclure un bail autre que de location saisonnière ou en meublé, que le bail du 7 décembre 2010 n'était justifié que par des raisons d'assurance et que la location du mois de décembre 2010 n'a procuré aucun revenu ; qu'en outre les dépenses litigieuses, comptabilisées en charges par la SCI, ne consistaient pas seulement en des dépenses de réparation mais également en des intérêts d'emprunt ; que, dans ces conditions et nonobstant le bail consenti le 7 décembre 2010 au profit de M.B..., la SCI Belem doit être regardée comme s'étant réservée la jouissance de l'immeuble en 2008, 2009 et 2010 ; qu'il s'ensuit qu'elle ne pouvait déduire de ses revenus fonciers imposables de ces années les dépenses de réparation et les intérêts d'emprunt afférents à cet immeuble ;
Sur le report des déficits fonciers des années antérieures :
5. Considérant qu'en vertu du 3° du I de l'article 156 du code général des impôts, les déficits fonciers s'imputent exclusivement sur les revenus fonciers des dix années suivantes ;
6. Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'à la suite du contrôle de la SCI Leme, dont M. B...était également l'associé, l'administration a réduit les déficits fonciers déclarés par cette société au titre des années 1995 et 1996 ; que dans le cadre d'une instance engagée devant la Cour administrative d'appel de Versailles sous le numéro 13VE01971, le service a abandonné ces rectifications et rétabli les déficits initialement déclarés au titre de 1995 et 1996 par la SCI Leme ; que le requérant soutient que, par le jeu des reports de déficits, cet abandon de rectification est susceptible d'entraîner une réduction des rectifications qui lui ont été notifiées au titre des années 2008, 2009 et 2010, en conséquence du rehaussement des résultats de la SCI Belem ; que toutefois il résulte des dispositions précitées de l'article 156 du code général des impôts qu'un déficit foncier peut s'imputer au plus tard sur un revenu foncier de la dixième année suivante ; que, par ailleurs, le ministre de l'action et des comptes publics produit un tableau faisant apparaître les résultats et déficits fonciers de M. B...de 1993 à 2006 ; qu'il ressort de ce tableau et des explications fournies par le ministre, qu'aucune des pièces du dossier ne permet de remettre en cause, que M. B... ne disposait plus d'aucun déficit foncier imputable sur ses revenus fonciers des années 2008, 2009 et 2010 et ce même en tenant compte de l'abandon des rectifications consenti dans l'instance 13VE01971 ; que le requérant n'explicite pas en quoi sa situation fiscale aurait été " rectifiée à tort au titre de l'année 2006 " et en quoi cette circonstance, à la supposer établie, serait susceptible d'avoir une incidence sur les impositions en litige, mises à sa charge au titre des années 2008, 2009 et 2010 ; que la circonstance que l'administration aurait omis de prononcer un dégrèvement en bases de 46 337 F au titre de l'année 1996 est en tout état de cause, à la supposer établie, sans incidence sur la régularité et le bien-fondé des impositions supplémentaires assignées à M. B...au titre des années 2008, 2009 et 2010 ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'action et des comptes publics.
Copie en sera adressée à la direction régionale des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris (pôle fiscal parisien 1).
Délibéré après l'audience du 17 mai 2018 à laquelle siégeaient :
M. Jardin, président de chambre,
M. Dalle, président assesseur,
Mme Stoltz-Valette, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 31 mai 2018.
Le rapporteur, Le président,
D. DALLE C. JARDIN
Le greffier,
C. MONGIS
La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N° 17PA02425