Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 30 novembre 2017, M. A...B..., représenté par Me Oughcha, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler le jugement attaqué ;
2° d'annuler les arrêtés du 2 novembre 2017 du préfet du Val-d'Oise décidant son transfert aux autorités tchèques et l'assignant à résidence ;
3° d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise d'enregistrer sa demande d'asile en procédure normale et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de 15 jours, valable le temps nécessaire à la notification de la décision prise sur sa demande d'asile ;
4° d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation, dans un délai de 15 jours à compter de la notification de la décision à intervenir, et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour pendant le temps nécessaire à ce réexamen ;
5° de mettre à la charge de l'État le versement, au profit de Me Oughcha, de la somme de 1 200 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
M. B...soutient que :
S'agissant de la décision portant remise aux autorités tchèques :
- elle a été prise en violation de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 et en méconnaissance de l'article R. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que ne lui ont pas été remis les documents d'information exigés ; la décision de remise aux autorités tchèques est entachée d'un vice de procédure en l'absence de preuve que ces informations lui ont été communiquées en temps utile et de manière complète ;
- elle a été prise en violation de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013, l'entretien s'étant déroulé sans l'assistance d'un interprète, le résumé de cet entretien individuel ne lui ayant pas été communiqué, ni le guide du demandeur d'asile et les informations sur les règlements communautaires ;
- elle a été prise en violation de l'article 18 du règlement (CE) n° 2725/2000 ;
- l'accord du 12 septembre 2017 des autorités tchèques n'est pas joint à la décision et, en l'absence de production par la préfecture du fichier Eurodac, il n'est pas établi qu'il soit passé par la République Tchèque et que l'examen de sa demande d'asile relève cet Etat ;
- elle a été prise en violation des articles 7 et 13 du règlement (UE) n° 604/2013, dès lors qu'il est arrivé en France plus d'une année avant la remise de son attestation de demande d'asile et que la France est donc responsable de sa demande ;
- elle a été prise en violation du 2ème alinéa de l'article 53-1 de la Constitution, des articles 3, 2 et 17 du règlement (UE) n° 604/2013 et de l'article L. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'ayant pas mentionné les motifs pour lesquels il n'a pas été fait usage du droit souverain de l'État et du pouvoir discrétionnaire qui lui appartient d'accorder l'asile, alors que la République Tchèque ne respecte pas les règles et principes que le droit international et le droit interne garantit aux demandeurs d'asile ;
- elle a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
S'agissant de la décision portant assignation à résidence :
- elle est illégale, dès lors qu'elle ne comporte pas l'indication du jour et de l'heure où il doit signer l'attestation de présence au centre qui l'héberge, en présence des forces de police.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la Constitution du 4 octobre 1958 ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le règlement (CE) n° 2725/2000 du Conseil du 11 décembre 2000 ;
- le règlement (UE) n° 603/2013 du Parlement européen et du Conseil en date du
26 juin 2013 ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil en date du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Méry a été entendu au cours de l'audience publique.
1. M.B..., ressortissant bangladais, relève appel du jugement en date du 9 novembre 2017 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés du 2 novembre 2017 du préfet du Val-d'Oise décidant sa remise aux autorités tchèques pour l'examen de sa demande d'asile et son assignation à résidence dans le département du Val-d'Oise pour une durée de 45 jours.
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
En ce qui concerne la décision de remise aux autorités tchèques :
2. En premier lieu, aux termes de l'article 4 du règlement susvisé (UE) n° 604/2013 : " Droit à l'information / 1. Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un État membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement, et notamment : / a) des objectifs du présent règlement et des conséquences de la présentation d'une autre demande dans un État membre différent ainsi que des conséquences du passage d'un État membre à un autre pendant les phases au cours desquelles l'État membre responsable en vertu du présent règlement est déterminé et la demande de protection internationale est examinée ; / b) des critères de détermination de l'État membre responsable, de la hiérarchie de ces critères au cours des différentes étapes de la procédure et de leur durée, y compris du fait qu'une demande de protection internationale introduite dans un État membre peut mener à la désignation de cet État membre comme responsable en vertu du présent règlement même si cette responsabilité n'est pas fondée sur ces critères ; / c) de l'entretien individuel en vertu de l'article 5 et de la possibilité de fournir des informations sur la présence de membres de la famille, de proches ou de tout autre parent dans les États membres, y compris des moyens par lesquels le demandeur peut fournir ces informations ; / d) de la possibilité de contester une décision de transfert et, le cas échéant, de demander une suspension du transfert ; / e) du fait que les autorités compétentes des États membres peuvent échanger des données le concernant aux seules fins d'exécuter leurs obligations découlant du présent règlement ; / f) de l'existence du droit d'accès aux données le concernant et du droit de demander que ces données soient rectifiées si elles sont inexactes ou supprimées, si elles ont fait l'objet d'un traitement illicite, ainsi que des procédures à suivre pour exercer ces droits, y compris des coordonnées des autorités visées à l'article 35 et des autorités nationales chargées de la protection des données qui sont compétentes pour examiner les réclamations relatives à la protection des données à caractère personnel. / 2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend. Les États membres utilisent la brochure commune rédigée à cet effet en vertu du paragraphe 3 (...) / 3. La Commission rédige, au moyen d'actes d'exécution, une brochure commune (...) contenant au minimum les informations visées au paragraphe 1 du présent article. Cette brochure commune comprend également des informations relatives à l'application du règlement (UE) n° 603/2013 et, en particulier, à la finalité pour laquelle les données relatives à un demandeur peuvent être traitées dans Eurodac. La brochure commune est réalisée de telle manière que les États membres puissent y ajouter des informations spécifiques aux États membres.".
3. Il résulte de ces dispositions que le demandeur d'asile auquel l'administration entend faire application du règlement du 26 juin 2013 doit se voir remettre, dès le moment où le préfet est informé de ce qu'il est susceptible d'entrer dans le champ d'application de ce règlement, et, en tous cas, avant la décision par laquelle l'autorité administrative décide de refuser l'admission provisoire au séjour de l'intéressé au motif que la France n'est pas responsable de sa demande d'asile, une information complète sur ses droits, par écrit et dans une langue qu'il comprend. Cette information doit comprendre l'ensemble des éléments prévus au paragraphe 1 de l'article 4 du règlement. Eu égard à la nature desdites informations, la remise par l'autorité administrative de la brochure prévue par les dispositions précitées constitue pour le demandeur d'asile une garantie.
4. Il résulte des pièces du dossier que M. B...s'est vu délivrer, le 8 août 2017, les deux brochures d'information dites " A " (J'ai demandé l'asile dans l'Union européenne - Quel pays sera responsable de l'analyse de ma demande d'asile ') et " B " (Je suis sous procédure Dublin - Qu'est-ce que cela signifie '). Ces documents constituent la brochure commune visée au paragraphe 3 de l'article 4 du règlement précité et contiennent l'intégralité des informations prévues au paragraphe 1 de cet article. L'intéressé a déclaré comprendre le bengali et ne soutient pas que les brochures mentionnées précédemment ne lui auraient pas été remises rédigées dans cette langue. Ces brochures lui ont été délivrées dès le jour de l'enregistrement de sa demande d'asile en France, soit en temps utile avant qu'intervienne la décision litigieuse. Ainsi, le requérant n'est pas fondé à soutenir que les dispositions de l'article 4 du règlement précité auraient été méconnues.
5. En deuxième lieu, aux termes de l'article 5 du règlement susvisé (UE) n° 604/2013: " 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'État membre responsable, l'État membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4 (...). 4. L'entretien individuel est mené dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend et dans laquelle il est capable de communiquer. Si nécessaire, les États membres ont recours à un interprète capable d'assurer une bonne communication entre le demandeur et la personne qui mène l'entretien individuel. 5. L'entretien individuel a lieu dans des conditions garantissant dûment la confidentialité. Il est mené par une personne qualifiée en vertu du droit national. / 6. L'État membre qui mène l'entretien individuel rédige un résumé qui contient au moins les principales informations fournies par le demandeur lors de l'entretien. Ce résumé peut prendre la forme d'un rapport ou d'un formulaire type. L'État membre veille à ce que le demandeur et/ou le conseil juridique ou un autre conseiller qui représente le demandeur ait accès en temps utile au résumé. ".
6. Il ressort des pièces du dossier que M. B...a bénéficié, le 8 août 2017, d'un entretien individuel assuré par un agent de la préfecture exerçant ses fonctions en lien avec l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Cet entretien a été effectué avec l'aide d'un interprète par téléphone, en langue bengali, langue que l'intéressé a déclaré comprendre, ainsi qu'il a été rappelé au point 4 du présent arrêt. Lors de cet entretien, ont été remis à l'intéressé le guide du demandeur d'asile et l'information sur les règlements communautaires. L'intéressé s'est également vu remettre le résumé établi à l'issue de cet entretien, qui a permis de déterminer l'État membre responsable de la demande d'asile du requérant. En conséquence, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 doit être écarté.
7. En troisième lieu, aux termes de l'article 29 du règlement (UE) n° 603/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Toute personne relevant de l'article 9, paragraphe 1, de l'article 14, paragraphe 1, ou de l'article 17, paragraphe 1, est informée par l'Etat membre d'origine par écrit et, si nécessaire, oralement, dans une langue qu'elle comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'elle la comprend : / a) de l'identité du responsable du traitement au sens de l'article 2, point d), de la directive 95/46/CE, et de son représentant, le cas échéant ; / b) de la raison pour laquelle ses données vont être traitées par Eurodac, y compris une description des objectifs du règlement (UE) n° 604/2013, conformément à l'article 4 dudit règlement, et des explications, sous une forme intelligible, dans un langage clair et simple, quant au fait que les Etats membres et Europol peuvent avoir accès à Eurodac à des fins répressives ; / c) des destinataires des données ; d) dans le cas des personnes relevant de l'article 9, paragraphe 1, ou de l'article 14, paragraphe 1, de l'obligation d'accepter que ses empreintes digitales soient relevées ; e) de son droit d'accéder aux données la concernant et de demander que des données inexactes la concernant soient rectifiées ou que des données la concernant qui ont fait l'objet d'un traitement illicite soient effacées, ainsi que du droit d'être informée des procédures à suivre pour exercer ces droits, y compris les coordonnées du responsable du traitement et des autorités nationales de contrôle visées à l'article 30, paragraphe 1. / ".
8. A la différence de l'obligation d'information instituée par le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, qui prévoit un document d'information sur les droits et obligations des demandeurs d'asile, dont la remise doit intervenir au début de la procédure d'examen des demandes d'asile pour permettre aux intéressés de présenter utilement leur demande aux autorités compétentes, l'obligation d'information prévue par les dispositions de l'article 18, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 2725/2000 du 11 décembre 2000, aujourd'hui reprises à l'article 29, paragraphe 1, du règlement (UE) n° 603/2013 du 26 juin 2013, a uniquement pour objet et pour effet de permettre d'assurer la protection effective des données personnelles des demandeurs d'asile concernés, laquelle est garantie par l'ensemble des États membres relevant du régime européen d'asile commun. Le droit d'information des demandeurs d'asile contribue, au même titre que le droit de communication, le droit de rectification et le droit d'effacement de ces données, à cette protection. Dès lors, la méconnaissance de cette obligation d'information ne peut être utilement invoquée à l'encontre des décisions par lesquelles le préfet transfère un demandeur d'asile aux autorités compétentes de l'État qui s'est reconnu responsable de l'examen de sa demande.
9. En quatrième lieu, aux termes de l'article 7 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " Hiérarchie des critères : 1. Les critères de détermination de l'État membre responsable s'appliquent dans l'ordre dans lequel ils sont présentés dans le présent chapitre. / 2. La détermination de l'État membre responsable en application des critères énoncés dans le présent chapitre se fait sur la base de la situation qui existait au moment où le demandeur a introduit sa demande de protection internationale pour la première fois auprès d'un État membre. (...) ". Aux termes de l'article 12 du même règlement : " (...) 2. Si le demandeur est titulaire d'un visa en cours de validité, l'État membre qui l'a délivré est responsable de l'examen de la demande de protection internationale, sauf si ce visa a été délivré au nom d'un autre État membre en vertu d'un accord de représentation prévu à l'article 8 du règlement (CE) no 810/2009 du Parlement européen et du Conseil du 13 juillet 2009 établissant un code communautaire des visas (14). Dans ce cas, l'État membre représenté est responsable de l'examen de la demande de protection internationale. [...] 4. Si le demandeur est seulement titulaire (...) d'un ou de plusieurs visas périmés depuis moins de six mois lui ayant effectivement permis d'entrer sur le territoire d'un État membre, les paragraphes 1, 2 et 3 sont applicables aussi longtemps que le demandeur n'a pas quitté le territoire des États membres (...) ". Aux termes de l'article 13 de ce même règlement : " 1. Lorsqu'il est établi, sur la base de preuves ou d'indices tels qu'ils figurent dans les deux listes mentionnées à l'article 22, paragraphe 3, du présent règlement, notamment des données visées au règlement (UE) n° 603/2013, que le demandeur a franchi irrégulièrement, par voie terrestre, maritime ou aérienne, la frontière d'un État membre dans lequel il est entré en venant d'un État tiers, cet État membre est responsable de l'examen de la demande de protection internationale. Cette responsabilité prend fin douze mois après la date du franchissement irrégulier de la frontière. / 2. Lorsqu'un État membre ne peut pas, ou ne peut plus, être tenu pour responsable conformément au paragraphe 1 du présent article et qu'il est établi, sur la base de preuves ou d'indices tels qu'ils figurent dans les deux listes mentionnées à l'article 22, paragraphe 3, que le demandeur qui est entré irrégulièrement sur le territoire des États membres ou dont les circonstances de l'entrée sur ce territoire ne peuvent être établies a séjourné dans un État membre pendant une période continue d'au moins cinq mois avant d'introduire sa demande de protection internationale, cet État membre est responsable de l'examen de la demande de protection internationale. / Si le demandeur a séjourné dans plusieurs États membres pendant des périodes d'au moins cinq mois, l'État membre du dernier séjour est responsable de l'examen de la demande de protection internationale. ".
10. Il ressort des pièces du dossier, et notamment des données issues du système Visabio, que M. B...est entré sur le territoire français le 20 juin 2017 et qu'à la date du 8 août 2017, date à laquelle l'intéressé a introduit sa demande de protection internationale pour la première fois auprès d'un État membre, il était titulaire d'un visa de court séjour pour la République Tchèque, valable jusqu'à la date du 13 juillet 2017, périmé depuis moins de 6 mois. M. B...ne soutient pas qu'il aurait quitté le territoire des états membres après la date de fin de validité de son visa de court séjour. S'il soutient qu'à la date de remise de l'attestation de demande d'asile, soit le 8 août 2017, il était présent sur le territoire français depuis plus d'une année, cette affirmation n'est pas étayée. La circonstance selon laquelle M. B...n'est pas entré dans l'Union européenne en passant par la République Tchèque est sans incidence, en l'espèce sur la détermination de l'État responsable de sa demande d'asile, celui-ci étant déterminé en application des dispositions des paragraphes 2 et 4 de l'article 12 du règlement n° 604/2013. La République Tchèque a donné son accord le 12 septembre 2017 pour que le requérant soit remis aux autorités de ce pays en vue de l'examen de sa demande d'asile. Le requérant ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article 13 du règlement précité. Ainsi, le préfet du Val-d'Oise n'a pas commis d'erreur de droit en décidant la remise de M. B...aux autorités tchèques, responsables de sa demande d'asile. Il suit de là que le requérant ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article R. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicables aux étrangers dont l'examen de la demande d'asile relève de la compétence de la France et qui fixe notamment les documents remis à ces demandeurs.
11. En cinquième lieu, aux termes de l'article 53-1 de la Constitution du 4 octobre 1958 : " La République peut conclure avec les États européens qui sont liés par des engagements identiques aux siens en matière d'asile et de protection des Droits de l'homme et des libertés fondamentales, des accords déterminant leurs compétences respectives pour l'examen des demandes d'asile qui leur sont présentées. Toutefois, même si la demande n'entre pas dans leur compétence en vertu de ces accords, les autorités de la République ont toujours le droit de donner asile à tout étranger persécuté en raison de son action en faveur de la liberté ou qui sollicite la protection de la France pour un autre motif ". Et aux termes du 2 de l'article 3 du règlement susvisé n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " (...) Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'Etat membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet Etat membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entrainent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'Etat membre procédant à la détermination de l'Etat membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre Etat membre peut être désigné comme responsable ". Aux termes de l'article 17 du même règlement : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. / L'État membre qui décide d'examiner une demande de protection internationale en vertu du présent paragraphe devient l'État membre responsable et assume les obligations qui sont liées à cette responsabilité. (...) ". L'article L. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " Lorsque l'autorité administrative estime que l'examen d'une demande d'asile relève de la compétence d'un autre Etat qu'elle entend requérir, l'étranger bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la fin de la procédure de détermination de l'Etat responsable de l'examen de sa demande et, le cas échéant, jusqu'à son transfert effectif à destination de cet Etat. [...] Le présent article ne fait pas obstacle au droit souverain de l'Etat d'accorder l'asile à toute personne dont l'examen de la demande relève de la compétence d'un autre Etat. ".
12. D'une part, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Val-d'Oise n'aurait pas fait usage de la compétence lui permettant, dans le respect du principe posé par l'article 53-1 de la Constitution, et l'article 17 du règlement n° 604/2013, en application de l'article L. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile citées au point précédent, de décider que la demande d'asile de M. B...serait examinée en France, le préfet n'étant pas tenu de motiver sa décision au regard des dispositions précitées. D'autre part, M. B... en se bornant à affirmer que les règles et modalités en vertu desquelles la République Tchèque examine les demandes d'asile méconnaissent le droit international et le droit de l'Union et en évoquant de manière générale l'afflux de réfugiés dans ce pays, n'établit pas que sa demande d'asile est exposée à un risque sérieux de ne pas être traitée par les autorités tchèques dans des conditions conformes à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile, alors que ce pays est un État membre de l'Union européenne et partie tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complétée par le protocole de New-York, qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par suite, M. B...n'est pas fondé à soutenir que le préfet du Val-d'Oise aurait entaché sa décision d'une erreur de droit ou d'une erreur manifeste d'appréciation.
13. Considérant ce qui a été dit au point précédent du présent arrêt quant aux craintes exprimées par le requérant relatives au traitement de sa demande d'asile par les autorités tchèques, M. B...qui, au demeurant n'apporte aucun début de justification à l'appui de ses allégations relatives aux traitements inhumains et dégradants auxquels il serait exposé en cas de retour au Bangladesh, n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté portant remise aux autorités tchèques aurait été pris en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, interdisant les traitements inhumains et dégradants.
14. Il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 2 novembre 2017 prononçant sa remise aux autorités tchèques en vue de l'examen de sa demande d'asile.
En ce qui concerne la décision portant assignation à résidence :
15. Aux termes des dispositions de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I.-L'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, lorsque cet étranger : /1° [...] fait l'objet d'une décision de transfert en application de l'article L. 742-3 ; [...]Les trois derniers alinéas de l'article L. 561-1 sont applicables, sous réserve que la durée maximale de l'assignation ne puisse excéder une durée de quarante-cinq jours, renouvelable une fois. (...) ". Et aux termes des dispositions de l'article R. 562-1 du même code : " L'autorité administrative détermine le périmètre dans lequel l'étranger assigné à résidence en application de l'article L. 561-1, de l'article L. 561-2 ou d'une des mesures prévues aux articles L. 523-3, L. 523-4 et L. 523-5 est autorisé à circuler muni des documents justifiant de son identité et de sa situation administrative et au sein duquel est fixée sa résidence. Elle lui désigne le service auquel il doit se présenter, selon une fréquence qu'il fixe dans la limite d'une présentation par jour, en précisant si cette obligation s'applique les dimanches et les jours fériés ou chômés. (...) ".
16. Le préfet du Val-d'Oise a assigné à résidence dans le département du Val-d'Oise M.B..., au sein duquel sa résidence est située, dans un centre d'hébergement d'urgence. L'article 4 de la décision attaquée précise que l'obligation est faite à l'intéressé de se présenter aux autorités de police du commissariat de Cergy dans l'enceinte du centre une fois par semaine, sans indication du jour et de l'heure. En déterminant ainsi les modalités de la surveillance à laquelle M. B...est soumis, et en ne précisant que la fréquence de celle-ci, le préfet du
Val-d'Oise a imposé au requérant une restriction à son droit d'aller et venir disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels la mesure a été prise. Dans ces conditions, M. B...est fondé à soutenir que la décision du préfet du Val-d'Oise en date du 2 novembre 2017 par laquelle celui-ci l'a assigné à résidence est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation en tant qu'elle l'oblige à se présenter une fois par semaine aux autorités de police au sein du centre d'hébergement dans lequel il réside à une heure et un jour non déterminé, et à demander, pour ce motif, l'annulation de cette décision en tant qu'elle fixe, dans son article 4, les modalités de la surveillance à laquelle il est soumis.
17. Il résulte de tout ce qui précède que M. B...est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté ses conclusions aux fins d'annulation de l'arrêté du préfet du Val-d'Oise du 2 novembre 2017 l'assignant à résidence, en tant que cet arrêté fixe, dans son article 4, les modalités de la surveillance à laquelle il est soumis.
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
18. L'annulation prononcée par le présent arrêt, relative aux mesures de surveillance prévues par l'article 4 de l'arrêté du préfet du Val-d'Oise décidant l'assignation à résidence de M.B..., n'implique pas qu'il soit enjoint au préfet du Val-d'Oise d'enregistrer la demande d'asile de l'intéressé, ni qu'il soit enjoint au préfet du Val-d'Oise de réexaminer la situation de M.B.... Il y a lieu, dès lors, de rejeter les conclusions aux fins d'injonction présentées par M.B....
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
19. M. B...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 14 avril 2018. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Oughcha, avocat de M.B..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'État le versement à Me Oughcha de la somme de 1 000 euros.
DÉCIDE :
Article 1er : L'arrêté du 2 novembre 2017 assignant à résidence M. A...B...est annulé en tant qu'il fixe, dans son article 4, les modalités de la surveillance à laquelle M. A...B...est soumis.
Article 2 : Le jugement n° 1710175 du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise est annulé en tant qu'il rejette les conclusions aux fins d'annulation présentées par M. A...B...dans la mesure de l'annulation définie à l'article 1er.
Article 3 : L'État versera à Me Oughcha une somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sous réserve que cet avocat renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat dans l'instance n° 17VE03582.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête présentée par M. A...B...est rejeté.
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N° 17VE03582