Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 25 décembre 2019 et 12 mars 2020, Mme C..., représentée par Me Traore, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler le jugement attaqué ;
2° d'annuler la décision en litige ;
3° d'enjoindre au préfet de réexaminer la demande d'admission au séjour présentée par Mme C... au bénéfice de son époux ;
4° de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la décision en litige méconnaît les dispositions de l'article R. 411-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet ne pouvait refuser le bénéfice du regroupement familial pour son mari, dès lors qu'elle dispose de ressources stables permettant de subvenir aux besoins de sa famille, que son logement satisfait les conditions de taille et de salubrité et qu'elle n'a fait l'objet d'aucune condamnation ;
- la décision attaquée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation, dès lors que la communauté de vie et de sentiments est réelle entre les deux époux ;
- cette décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors qu'elle a épousé son mari en 2016 et qu'ils ont eu un premier enfant après leur mariage ;
- son mari peut bénéficier d'un regroupement familial sur place.
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme A...,
- et les observations de Mme C....
Considérant ce qui suit :
1. Mme C..., ressortissante tunisienne, a introduit une demande de regroupement familial au bénéfice de son époux. Cette demande a été rejetée par une décision du préfet de la Seine-Saint-Denis, du 22 mai 2018, au motif que son mari est déjà présent sur le territoire français. Mme C... relève appel du jugement du 21 novembre 2019 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 22 mai 2018 et à ce qu'il soit enjoint au préfet de délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " à son époux.
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le regroupement familial ne peut être refusé que pour l'un des motifs suivants : / 1° Le demandeur ne justifie pas de ressources stables et suffisantes pour subvenir aux besoins de sa famille. [...] / 2° Le demandeur ne dispose pas ou ne disposera pas à la date d'arrivée de sa famille en France d'un logement considéré comme normal pour une famille comparable vivant dans la même région géographique ; / 3° Le demandeur ne se conforme pas aux principes essentiels qui, conformément aux lois de la République, régissent la vie familiale en France, pays d'accueil. ".
3. Si Mme C... soutient qu'elle dispose de ressources stables permettant de subvenir aux besoins de sa famille, que son logement satisfait les conditions de taille et de salubrité et qu'elle n'a fait l'objet d'aucune condamnation, il ressort des termes mêmes de la décision attaquée, que le préfet de la Seine-Saint-Denis n'a fondé sa décision que sur le motif tiré de ce que M. C... est présent sur le territoire français. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à supposer qu'il soit soulevé, est inopérant et ne peut qu'être écarté.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 411-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le bénéfice du regroupement familial ne peut être refusé à un ou plusieurs membres de la famille résidant sur le territoire français dans le cas où l'étranger qui réside régulièrement en France dans les conditions prévues aux articles R. 411-1 et R. 411-2 contracte mariage avec une personne de nationalité étrangère régulièrement autorisée à séjourner sur le territoire national sous couvert d'une carte de séjour temporaire d'une durée de validité d'un an. Le bénéfice du droit au regroupement familial est alors accordé sans recours à la procédure d'introduction. Peuvent en bénéficier le conjoint et, le cas échéant, les enfants de moins de dix-huit ans de celui-ci résidant en France, sauf si l'un des motifs de refus ou d'exclusion mentionnés aux 1°, 2° et 3° de l'article L. 411-5 leur est opposé. ".
5. Si Mme C... soutient que la décision attaquée méconnaît les dispositions de l'article R. 411-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, elle n'assortit pas son moyen des précisions suffisantes permettant d'en établir le bien-fondé. En tout état de cause, il est constant que l'époux de la requérante est en situation irrégulière sur le territoire français et qu'il ne peut, par conséquent, prétendre au bénéfice des dispositions précitées. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 411-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne pourra, par suite, qu'être rejeté.
6. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile, de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
7. Mme C... produit plusieurs pièces, en particulier des factures d'électricité au titre des années 2016, 2017, 2018 et 2019, des avis d'imposition au titre des années 2017 et 2018, une attestation de la caisse d'allocations familiales datée du 29 mai 2018, afin de justifier de la réalité de sa vie commune avec son époux. Si elle verse, en outre, au dossier, une déclaration rédigée par ses soins le 7 décembre 2018, attestant que son époux réside à ses côtés depuis octobre 2015, et se prévaut de ce que leur premier enfant est né le 23 mai 2019, il est constant que M. et Mme C... se sont mariés le 6 août 2016 et que, par suite, à la date de la décision attaquée, il ne justifiait que d'une communauté de vie de près de deux ans. En outre, son enfant est né postérieurement à la décision attaquée, dont la légalité s'apprécie à la date à laquelle elle a est intervenue. Dans ces conditions, en refusant le bénéfice du regroupement familial au profit de M. C..., qui demeure fondé à introduire une nouvelle demande depuis son pays d'origine, le préfet de la Seine-Saint-Denis n'a pas porté une atteinte disproportionnée à la vie privée et familiale de Mme C..., ni entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation.
8. Enfin, si Mme C... soutient que son mari peut bénéficier d'une possibilité de regroupement familial " sur place ", elle se borne à se prévaloir de leur communauté de vie et de leurs sentiments mutuels. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que M. C... pouvait bénéficier d'un regroupement familial " sur place " ne peut qu'être rejeté.
9. Il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.
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N° 18VE04321