Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 28 février 2019, le PREFET DES YVELINES demande à la Cour d'annuler le jugement attaqué.
Le PREFET DES YVELINES soutient que l'arrêté portant transfert de M. B...aux autorités italiennes n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application des dispositions de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 du Parlement européen et du Conseil, dès lors que l'Italie n'est pas atteinte d'une défaillance systémique dans l'accueil des demandeurs d'asile et doit être regardée comme un pays sûr, et que l'intéressé ne démontre pas qu'il a souffert de mauvais traitements dans ce pays ou qu'il y aurait été mis dans l'incapacité d'exercer son droit d'asile.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Méry a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Le PREFET DES YVELINES relève appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Versailles a annulé l'arrêté du 10 janvier 2019, prononçant le transfert aux autorités italiennes, pour l'examen de sa demande d'asile, de M.B..., ressortissant bangladais, né le 15 avril 1980, ainsi que l'arrêté du même jour prononçant l'assignation à résidence de celui-ci.
Sur le moyen d'annulation retenu par le Tribunal administratif :
2. Aux termes de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque Etat membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. Dans ce cas, cet État devient l'État membre responsable au sens du présent règlement et assume les obligations qui sont liées à cette responsabilité. ".
3. L'Italie est un État membre de l'Union européenne, partie à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complété par le protocole de New York, et à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il doit alors être présumé que le traitement réservé aux demandeurs d'asile dans cet État membre est conforme aux exigences de la convention de Genève ainsi qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour le contester, M. B...se borne à déclarer que sa demande d'asile n'a pas été correctement examinée en Italie, où elle a été rejetée, sans étayer ses déclarations par aucun élément. En conséquence, le requérant ne démontre pas qu'il existerait une défaillance systémique du traitement des demandes d'asile en Italie, et que le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en ne faisant pas usage de la faculté que lui accorde l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 cité au point précédent d'examiner une demande d'asile dont l'examen incombe à un autre État en vertu des règles fixées par ce règlement.
4. Il résulte de ce qui précède que le PREFET DES YVELINES est fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Versailles a annulé son arrêté du 10 janvier 2019 prononçant le transfert aux autorités italiennes de M.B....
5. Il appartient toutefois à la Cour, saisie de l'ensemble du litige, par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soutenus par M. B...devant Tribunal administratif de Versailles.
Sur les moyens de la demande de M.B..., dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel :
6. En premier lieu, en vertu du paragraphe 1 de l'article 3 du règlement (UE)
n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, lorsqu'une telle demande est présentée, un seul Etat, parmi ceux auxquels s'applique ce règlement, est responsable de son examen. Cet Etat, dit Etat membre responsable, est déterminé en faisant application des critères énoncés aux articles 7 à 15 du chapitre III du règlement ou, lorsqu'aucun Etat membre ne peut être désigné sur la base de ces critères, du premier alinéa du paragraphe 2 de son article 3 du chapitre II. Si l'Etat membre responsable est différent de l'Etat membre dans lequel se trouve le demandeur, ce dernier peut être transféré vers cet Etat, qui a vocation à le prendre en charge. Lorsqu'une personne a antérieurement présenté une demande d'asile sur le territoire d'un autre Etat membre, elle peut être transférée vers cet Etat, à qui il incombe de la reprendre en charge, sur le fondement des b), c) et d) du paragraphe 1 de l'article 18 du chapitre V et du paragraphe 5 de l'article 20 du chapitre VI de ce même règlement.
7. En application de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la décision de transfert dont fait l'objet un ressortissant de pays tiers ou un apatride qui a déposé auprès des autorités françaises une demande d'asile dont l'examen relève d'un autre État membre ayant accepté de le prendre ou de le reprendre en charge doit être motivée, c'est-à-dire qu'elle doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement.
8. Pour l'application de ces dispositions, est suffisamment motivée une décision de transfert qui mentionne le règlement du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 et comprend l'indication des éléments de fait sur lesquels l'autorité administrative se fonde pour estimer que l'examen de la demande présentée devant elle relève de la responsabilité d'un autre État membre, une telle motivation permettant d'identifier le critère du règlement communautaire dont il est fait application.
9. L'arrêté du PREFET DES YVELINES du 10 janvier 2019, prononçant le transfert aux autorités italiennes de M.B..., a été pris au motif que ce dernier a présenté une demande d'asile, qu'une attestation de demande d'asile lui a été remise le 25 octobre 2018, que les autorités italiennes ont été saisies d'une demande de reprise en charge dans le cadre de l'article 18, 1, b) du règlement (UE) n° 604/2013, et que ces dernières ont accepté de reprendre en charge l'intéressé pour l'examen de sa demande d'asile. S'agissant d'une décision de transfert intervenant dans le cadre d'une reprise en charge par un autre État membre, la décision devait faire apparaître les éléments de fait au vu desquels l'État de destination a été déterminé. Les éléments de fait relevés par l'arrêté attaqué, cités précédemment, permettent de comprendre quel est le critère appliqué. En outre, l'arrêté attaqué mentionne le règlement dont il est fait application. Par ailleurs, le PREFET DES YVELINES a motivé sa décision au regard de l'application des articles 3, 2 et 17 du même règlement et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. En conséquence, l'arrêté litigieux est suffisamment motivé au regard des dispositions de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
10. En deuxième lieu, si M. B...fait valoir que la décision prononçant son transfert aux autorités italiennes est entachée d'une erreur de fait, au motif que sa demande d'asile a été rejetée en Italie, il résulte des termes de la décision attaquée, dont la motivation a été exposée au point précédent, que le PREFET DU VAL-D'OISE aurait pris la même décision de transfert aux autorités italiennes s'il s'était fondé sur la circonstance que la demande d'asile de M. B...a été rejetée en Italie. En conséquence, le moyen tiré de l'erreur de fait entachant d'illégalité la décision attaquée, à la supposer établie, ne peut qu'être écarté.
11. En troisième lieu, M. B...fait valoir que la décision prononçant son transfert aux autorités italiennes est entachée d'une erreur de droit, au motif qu'elle devait être motivée sur le fondement de l'article 18, 1, d) du règlement (UE) n° 604/2013, en vertu duquel l'État membre responsable est tenu de reprendre en charge l'étranger dont la demande d'asile a été rejeté. Toutefois, il ne le démontre pas, pour les motifs exposés aux points 9 et 10 du présent arrêt. L'Italie ayant été saisie d'une demande de reprise en charge a donné un accord implicite à celle-ci, dans le cadre de l'article 18 du règlement précité. Dès lors, l'arrêté prononçant le transfert de M. B...n'est pas entaché d'une erreur de droit et le moyen ne peut être accueilli.
12. En quatrième lieu, aux termes de l'article 3, 2 du règlement (UE) n° 604/2013 :
" (...) 2. [...] / Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'État membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet État membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'État membre procédant à la détermination de l'État membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre État membre peut être désigné comme responsable. / Lorsqu'il est impossible de transférer le demandeur en vertu du présent paragraphe vers un État membre désigné sur la base des critères énoncés au chapitre III ou vers le premier État membre auprès duquel la demande a été introduite, l'État membre procédant à la détermination de l'État membre responsable devient l'État membre responsable. (...) ".
13. M. B...fait valoir que l'arrêté prononçant son transfert aux autorités italiennes a été pris en méconnaissance des dispositions de l'article 3, 2 du règlement dont il est fait application, citées au point précédent, relatives à la situation dans laquelle l'État membre procédant à la détermination de l'État membre responsable devient l'État membre responsable quand le demandeur serait exposé à un risque de traitement inhumain ou dégradant en cas de transfert vers un autre État, en raison des conditions de traitement des demandes d'asile et des conditions d'accueil des demandeurs. Toutefois, l'intéressé n'invoque la situation des demandeurs d'asile en Italie que dans des termes très généraux et ce moyen doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 3 du présent arrêt.
14. En cinquième et dernier lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. ".
15. Si M. B...fait valoir que l'arrêté attaqué a été pris en violation des stipulations citées au point précédent de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il n'assortit pas ce moyen des précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé.
16. Il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à demander l'annulation des arrêtés du PREFET DES YVELINES du 10 janvier 2019 prononçant son transfert aux autorités italiennes pour l'examen de sa demande d'asile et l'assignant à résidence.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Versailles n° 1900505 du 24 janvier 2019 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. A...C...B...devant le Tribunal administratif de Versailles est rejetée.
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N° 19VE00746