Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 28 juillet 2020, M. C..., représenté par Me Wak-Hanna, avocat, demande à la cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° d'annuler cet arrêté ;
3° d'enjoindre au préfet de l'Essonne, à titre principal, de délivrer à l'intéressé un titre de séjour, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande de titre de séjour, dans un délai de trois mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de cent euros par jour de retard et de lui délivrer dans cette attente une autorisation provisoire de séjour ;
4° de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
M. C... soutient que :
Sur la régularité du jugement attaqué :
- ce jugement a été prononcé par un magistrat seul matériellement incompétent ;
Sur le bien-fondé du jugement contesté :
- la décision de refus de titre de séjour méconnaît l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît la circulaire du 28 novembre 2012 du ministre de l'intérieur ;
- l'arrêté litigieux méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. A... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., ressortissant algérien né le 2 novembre 1976, relève appel du jugement n° 2002975 du 29 juin 2020 par lequel le magistrat désigné du Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 10 avril 2020 par lequel le préfet de l'Essonne a rejeté sa demande d'admission au séjour en qualité de salarié, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I.- L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; /(...) ; 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; /(...). ". Aux termes de l'article L. 512-1 du même code : " (...). I bis.- L'étranger qui fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français sur le fondement des 1°, 2°, 4° ou 6° du I de l'article L. 511-1 et qui dispose du délai de départ volontaire mentionné au premier alinéa du II du même article L. 511-1 peut, dans un délai de quinze jours à compter de sa notification, demander au président du tribunal administratif l'annulation de cette décision, ainsi que l'annulation de la décision mentionnant le pays de destination et de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français qui l'accompagnent le cas échéant. /(...). Le président du tribunal administratif ou le magistrat qu'il désigne à cette fin parmi les membres de sa juridiction ou parmi les magistrats honoraires inscrits sur la liste mentionnée à l'article L. 222-2-1 du code de justice administrative statue dans un délai de six semaines à compter de sa saisine. /(...). ".
3. Aux termes de l'article R. 776-13-1 du code de justice administrative : " Les dispositions de la présente sous-section sont applicables aux recours formés, en application du I bis ou du II de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, contre les décisions d'obligation de quitter le territoire français prise sur le fondement des 1°, 2°, 4° ou 6° du I de l'article L. 511-1 du même code et les décisions mentionnées à l'article R. 776-1 du présent code notifiées simultanément, lorsque l'étranger n'est pas placé en rétention, ni assigné à résidence. Elles sont également applicables, dans ce cas, aux demandes de suspension de l'exécution de la mesure d'éloignement mentionnées à l'article R. 776-1, lorsque cette dernière est prise sur ces mêmes fondements. ". Aux termes de l'article R. 776-13-1 du même code : " La présentation, l'instruction et le jugement des recours obéissent, sans préjudice de la section 1, aux règles définies au premier alinéa de l'article R. 776-13, aux articles R. 776-15, R. 776-18, R. 776-20-1, R. 776-22 à R. 776-26, aux deuxième et quatrième alinéas de l'article R. 776-27 et à l'article R. 776-28. ". Selon l'article R. 776-13-3 du même code : " Le président du tribunal administratif ou le magistrat désigné statue dans le délai de six semaines prévu au quatrième alinéa du I bis de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. ".
4. Lorsqu'une décision relative au séjour est néanmoins intervenue concomitamment et fait l'objet d'une contestation à l'occasion d'un recours dirigé contre une obligation de quitter le territoire français prise sur le fondement des 1°, 2°, 4° ou 6° du I de l'article L. 511-1, cette contestation suit le régime contentieux applicable à l'obligation de quitter le territoire. Dès lors, les dispositions du I bis de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi, notamment, que celles de l'article R. 776-13-3 du code de justice administrative, sont applicables à l'ensemble des conclusions présentées au juge administratif dans le cadre de ce litige, y compris celles tendant à l'annulation de la décision relative au séjour.
5. Il résulte de l'arrêté litigieux du 10 avril 2020 que, pour prononcer une obligation de quitter le territoire français à l'encontre de M. C..., le préfet de l'Essonne a retenu que l'intéressé n'a pas justifié être régulièrement entré en France en décembre 2014, en se bornant à produire un visa C de 90 jours délivré le 24 novembre 2014 par les autorités consulaires françaises à Alger, à défaut d'avoir produit un document transfrontière revêtu d'un cachet de la police aux frontières établissant le lieu et la date d'entrée sur le territoire français. Ainsi, cet arrêté préfectoral est fondé sur les dispositions, mentionnées au point 2, de l'article L. 511-1 (1°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dès lors, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Versailles tenait des dispositions du I bis de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article R. 776-13-3 du code de justice administrative la compétence pour statuer sur la demande de M. C... tendant à l'annulation de l'arrêté du 10 avril 2020 par lequel le préfet de l'Essonne a rejeté sa demande d'admission au séjour en qualité de salarié, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence matérielle du magistrat désigné doit être écarté.
Sur le bien-fondé du jugement contesté :
6. Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. Un décret en Conseil d'Etat définit les modalités d'application du présent article. ".
7. Dans la mesure où les stipulations de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 susvisé régissent d'une manière complète et exclusive les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France et y exercer une activité professionnelle, les règles concernant la nature des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés, ainsi que les conditions dans lesquelles leurs conjoints et leurs enfants mineurs peuvent s'installer en France, un étranger de nationalité algérienne ne peut utilement invoquer les dispositions, mentionnées au point 6, de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui sont relatives aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à titre exceptionnel à séjourner en France soit au titre d'une activité salariée, soit au titre de la vie familiale.
8. Toutefois, si l'accord franco-algérien ne prévoit pas, pour sa part, de semblables modalités d'admission exceptionnelle au séjour, il y a lieu d'observer que ses stipulations n'interdisent pas au préfet de délivrer un certificat de résidence à un ressortissant algérien qui ne remplit pas l'ensemble des conditions auxquelles est subordonnée sa délivrance de plein droit. Il appartient au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, compte tenu de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation.
9. Il ressort des pièces du dossier que M. C... soutient qu'il réside continûment en France depuis près de six années à la date de l'arrêté litigieux et qu'il y justifie, par la production de quatorze bulletins de salaire, de l'exercice d'une activité professionnelle significative. Toutefois, ces circonstances ne suffisent pas à elle seules à faire regarder comme affectée d'erreur manifeste d'appréciation la décision par laquelle le préfet de l'Essonne a, dans le cadre de son pouvoir discrétionnaire de régularisation, rejeté la demande d'admission au séjour présentée par l'intéressé en qualité de salarié.
10. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
11. S'agissant du moyen de sa requête d'appel, tiré de l'atteinte disproportionnée portée à son droit au respect de la vie privée et familiale, M. C... n'apporte aucun élément de fait ou de droit de nature à remettre en cause l'appréciation portée par le magistrat désigné du Tribunal administratif de Versailles sur son argumentation de première instance. Il y a lieu, par suite, d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par le premier juge aux points 4 et 6 de son jugement.
12. M. C... ne peut utilement se prévaloir à l'encontre de la décision refusant de l'admettre au séjour en France des termes de la circulaire du 28 novembre 2012 du ministre de l'intérieur, qui, relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière, se borne à énoncer des orientations générales que le ministre de l'intérieur a adressées aux préfets pour les éclairer dans la mise en oeuvre de leur pouvoir de régularisation. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de cette circulaire est inopérant.
13. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
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N° 20VE01784