Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 16 février 2016, la société Ris, représentée par Me C... E..., administrateur judiciaire, et par Me A..., avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement en tant qu'il a rejeté la demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Essonne en date du 12 novembre 2012 ;
2° à titre principal, d'annuler, pour excès de pouvoir, à titre principal, l'arrêté du préfet de l'Essonne en date du 12 novembre 2012 et le titre de perception correspondant daté du même jour ou, à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise avant dire droit aux fins de déterminer si les opérations d'agrandissement de la surface du plan d'eau, d'amélioration de la qualité du chenal, d'empoissonnement et de plantations ont ou non été réalisés par la société ;
3° à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise avant dire droit ayant pour objet d'établir si les travaux requis ont été réalisés ;
4° de mettre à la charge de l'Etat les entiers dépens et le versement de la somme de 2 800 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La société Ris soutient que le tribunal administratif a commis une double erreur de fait en affirmant que la société Ris n'avait pas contesté les éléments figurant dans le procès-verbal du 6 octobre 2014 et que le terrain n'a pas été remis en état par ses soins, alors que les cotes altimétriques figurant dans les documents établis par un géomètre-expert sont revenues à celles qui figuraient dans le document du 10 septembre 2013.
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Par un arrêt avant dire droit en date du 21 juin 2018, la Cour administrative d'appel de Versailles a décidé qu'il serait procédé à une expertise en vue de déterminer si les travaux de remise en état initial prescrits par l'arrêté du préfet de l'Essonne en date du 3 novembre 2011 ont été en tout ou partie réalisés et de donner la liste des travaux effectivement réalisés ainsi que, le cas échéant, celle des travaux restant à effectuer et de déterminer le coût à prévoir de ces derniers.
Vu :
- les autres pièces du dossier ;
- l'ordonnance du 18 septembre 2018 du président de la Cour de céans désignant M. F... B... comme expert ;
- le rapport d'expertise enregistré au greffe de la Cour le 6 février 2020 ;
- l'ordonnance du 20 février 2020 du président de la Cour de céans taxant et liquidant les frais et honoraires de l'expertise à la somme de 9 915 euros et les mettant à titre provisoire à à la charge de la Société Lyonnaise de Marchand de Biens (SLMB) venant aux droits de la société Ris.
Vu :
- le code de commerce ;
- le code de l'environnement ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme D...,
- les conclusions de M. Bouzar, rapporteur public,
- et les observations de Me A... pour la Société Lyonnaise de Marchand de Biens (SLMB) venant aux droits de la SNC Ris.
Une note en délibéré présentée pour la société Ris a été enregistrée le 24 décembre 2020.
Une note en délibéré présentée pour la ministre de la transition écologique a été enregistrée le 24 décembre 2020.
Considérant ce qui suit :
1. La société Ris a relevé appel du jugement en date du 17 décembre 2015 du Tribunal administratif de Versailles en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 12 novembre 2012 par lequel le préfet de l'Essonne a mis en oeuvre la procédure prévue à l'article L. 216-1 du code de l'environnement et procédé à la consignation d'une somme de 3 540 000 euros représentant le coût des travaux prescrits par l'arrêté préfectoral en date du 3 novembre 2011. Par un arrêt avant dire droit en date du 21 juin 2018, la Cour administrative d'appel de Versailles a décidé qu'il serait procédé à une expertise en vue de déterminer si les travaux de remise en état initial prescrits par l'arrêté du préfet de l'Essonne en date du 3 novembre 2011 ont été en tout ou partie réalisés et de donner la liste des travaux effectivement réalisés ainsi que, le cas échéant, celle des travaux restant à effectuer et de déterminer le coût à prévoir de ces derniers. L'expert désigné par le président de la Cour de céans a remis un " rapport d'expertise en l'état ", enregistré au greffe le 6 février 2020. La Société Lyonnaise de Marchand de Biens (SLMB) vient aux droits de la société Ris.
2. Aux termes de l'article L. 214-1 du code de l'environnement : " Sont soumis aux dispositions des articles L. 214-2 à L. 214-6 les installations ne figurant pas à la nomenclature des installations classées, les ouvrages, travaux et activités réalisés à des fins non domestiques par toute personne physique ou morale, publique ou privée, et entraînant des prélèvements sur les eaux superficielles ou souterraines, restitués ou non, une modification du niveau ou du mode d'écoulement des eaux, la destruction de frayères, de zones de croissance ou d'alimentation de la faune piscicole ou des déversements, écoulements, rejets ou dépôts directs ou indirects, chroniques ou épisodiques, même non polluants. ".
3. Aux termes des dispositions du I de l'article L. 216-1 du code de l'environnement, en vigueur à la date de l'arrêté litigieux du 12 novembre 2012 et dont les dispositions ont été reprises à l'article L. 171-8 du même code et applicables depuis le 27 juillet 2019 : " Indépendamment des poursuites pénales éventuellement encourues, en cas de méconnaissance des articles L. 211-2, L. 211-3, L. 211-5, L. 211-7, L. 211-12, L. 211-14, du II de l'article L. 212-5-1 et des articles L. 214-1 à L. 214-9, L. 214-11 à L. 214-13, L. 214-17, L. 214-18, L. 215-14 et L. 215-15 ou des règlements et décisions individuelles pris pour leur application, l'autorité administrative met en demeure l'exploitant ou, à défaut, le propriétaire d'y satisfaire dans un délai déterminé. Elle peut prescrire tous contrôles, expertises ou analyses qui s'avéreraient nécessaires, les dépenses étant à la charge de l'exploitant ou du propriétaire. Si, à l'expiration du délai fixé, il n'a pas été obtempéré à cette injonction, l'autorité administrative peut, par décision motivée et après avoir invité l'intéressé à faire connaître ses observations : 1° L'obliger à consigner entre les mains d'un comptable public une somme correspondant au montant des travaux à réaliser avant une date qu'elle détermine. La somme consignée est restituée à l'exploitant ou au propriétaire au fur et à mesure de l'exécution des travaux. A défaut de réalisation des travaux avant l'échéance fixée par l'autorité administrative, la somme consignée est définitivement acquise à l'Etat afin de régler les dépenses entraînées par l'exécution des travaux en lieu et place de l'intéressé. Cette somme bénéficie d'un privilège de même rang que celui prévu à l'article 1920 du code général des impôts. Il est procédé à son recouvrement comme en matière de créances de l'Etat étrangères à l'impôt et au domaine. Le comptable peut engager la procédure d'avis à tiers détenteur prévue par l'article L. 263 du livre des procédures fiscales ; /(...). ".
4. L'ouverture d'une procédure collective à l'encontre d'une société n'a pas pour effet de faire obstacle à la mise en oeuvre des pouvoirs de police spéciale dont dispose le préfet de département dans le cadre de la police administrative de l'eau. L'autorité préfectorale peut, en particulier, décider la consignation prévue par les dispositions, mentionnées au point 3, sans préjudice de la suite réservée à la libération des sommes consignées dans le cadre de la procédure collective. Les dispositions régissant le redressement ou la liquidation judiciaires d'une entreprise ne font pas davantage obstacle à ce que le juge administratif statue sur les contestations auxquelles ces actes donnent lieu ou sur les litiges qui opposent les entreprises à l'administration en ce qui concerne le principe et l'étendue des droits de cette dernière. Dès lors, la société Ris n'est pas fondée à soutenir que l'ouverture à son encontre d'une procédure de liquidation judiciaire et l'absence de déclaration de la créance environnementale, postérieurement à l'édiction de l'arrêté litigieux du préfet de l'Essonne en date du 12 novembre 2012, auraient eu pour conséquence de rendre caduc cet arrêté. Par suite, le moyen doit être écarté.
5. Il résulte de l'instruction que la société Ris est propriétaire d'un terrain d'une superficie d'un peu plus de 20 hectares à usage industriel, cadastré sections AC 26 à 29, 32 et 42 et AD 328, situé avenue Mac-Cormick et en bordure de la Seine à Ris-Orangis. Ce terrain, constitué d'anciennes gravières et qui comportait deux plans d'eau, est localisé, pour sa plus grande partie, dans le lit majeur de la Seine et en zone inondable rouge du plan de prévention des risques d'inondations. Cette société a confié au cours des années 2010 et 2011 à la société Urano des travaux de comblement des étangs et de rehaussement des sols accomplis sans autorisation, qui ont eu pour effet la disparition de deux étangs qui constituaient des frayères à brochets. Après avoir constaté que ces travaux avaient été accomplis sans autorisation en méconnaissance des dispositions, mentionnées au point 2, de l'article L. 214-1 du code de l'environnement, le préfet de l'Essonne a, par un arrêté du 3 novembre 2011, prescrit à la société Ris de remettre le terrain en l'état dans un délai de quatre mois, notamment en réalisant des travaux de recréation des plans d'eau. Après avoir constaté que ces travaux n'avaient pas été exécutés, le préfet de l'Essonne a, en application des dispositions mentionnées au point 3 du code de l'environnement, procédé à la consignation de la somme de 3 540 000 euros correspondant au coût des travaux de remise en état du site.
6. Dans la mesure où aux termes de l'article L. 171-11 du code de l'environnement, dans sa rédaction applicable à la date du présent arrêt, " Les décisions prises en application des articles L. 171-7, L. 171-8 et L. 171-10 sont soumises à un contentieux de pleine juridiction. ", il appartient ainsi à la Cour de déterminer, à la date de sa décision, si l'arrêté de consignation demeure justifié tant dans son principe que dans son quantum.
7. Il résulte de l'instruction, comme il est dit au point 5, que, par l'arrêté en date du 3 novembre 2011 précité, le préfet de l'Essonne a prescrit notamment la réalisation de travaux de recréation des deux plans d'eaux préexistants avec une profondeur suffisante pour leur alimentation constante en contact avec la nappe phréatique. Un procès-verbal rédigé le 6 octobre 2014 par un inspecteur de l'environnement a constaté que les plans d'eau recréés ne l'ont pas été à leur emplacement initial, que 90% et 95% de leur surface respective n'ont pas été mises en eaux, que la profondeur est restée insuffisante, qu'aucune végétation de berge n'a été implantée, que les sols n'ont pas été préparés pour permettre une telle implantation et que les caractéristiques des deux plans d'eau rendent très improbable leur connexion biologique ainsi que la réussite d'une opération d'empoissonnement. Si la société requérante produit une attestation établie par la société Urano, qui fait état de travaux d'agrandissement et d'approfondissement des plans d'eaux et évoque des travaux ultérieurs de végétalisation et d'empoissonnement, cette seule attestation, tout à fait imprécise quant à la consistance, à l'ampleur et au montant des travaux effectivement réalisés, n'est pas de nature à démontrer la réalité de la remise en état du site telle qu'elle a été prescrite par l'arrêté du 3 novembre 2011 du préfet de l'Essonne. Ni l'avis du 5 novembre 2019 du préfet de l'Essonne sur le projet de restauration du terrain litigieux, ni les termes du rapport d'expertise déposé le 6 février 2020, ni le planning d'exécution de la restauration de zones humides et du volume inondable produit au nom de la société Ris et daté du 25 août 2020 ne permettent de tenir pour acquise la réalisation des travaux prescrits par l'arrêté préfectoral du 3 novembre 2011 ni leur conformité à cet arrêté. Si la société Ris s'est prévalue au cours de l'audience publique de la réception des travaux en cause, elle n'a apporté aucune justification de la vérification par l'administration de la conformité de ces travaux à l'arrêté du 3 novembre 2011 du préfet de l'Essonne. Par suite, la Société Lyonnaise de Marchand de Biens venant aux droits de la société Ris n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté litigieux devrait être abrogé par l'autorité préfectoral ni que le montant des sommes consignées devrait être minoré.
8. Il résulte de tout ce qui précède que la Société Lyonnaise de Marchand de Biens (SLMB) venant aux droits de la société Ris n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté de consignation du 12 novembre 2012 du préfet de l'Essonne. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
9. Il y a lieu de mettre les frais d'expertise taxés et liquidés à la somme de 9 915 euros par l'ordonnance susvisée du président de la Cour en date du 20 février 2020 à la charge définitive de la Société Lyonnaise de Marchand de Biens venant aux droits de la société Ris.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la Société Lyonnaise de Marchand de Biens (SLMB) venant aux droits de la SNC Ris est rejetée.
Article 2 : Les frais de l'expertise, taxés et liquidés à la somme de 9 915 euros par ordonnance du 20 février 2020 du président de la Cour administrative d'appel de Versailles sont mis à la charge définitive de la Société Lyonnaise de Marchand de Biens (SLMB) venant aux droits de la SNC Ris.
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N° 16VE00496