Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 30 juin 2016, M.B..., représenté par Me Mollanger, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
3° d'enjoindre au préfet de l'Essonne de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4° de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision portant obligation de quitter le territoire est insuffisamment motivée ;
- le préfet a entaché son arrêté d'une erreur manifeste d'appréciation en considérant, d'une part, qu'il n'entre pas dans une des catégories de délivrance de plein droit définies aux
6° et 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, d'autre part, en estimant que sa décision ne portait pas une atteinte disproportionnée à son droit à une vie privée et familiale ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire méconnait le 6° de l'article
L. 511-4 du code précité même s'il a reconnu l'enfant postérieurement à cette décision ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- elle méconnait les articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3 et 9 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 20 novembre 1989, signée par la France le 26 janvier 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Geffroy a été entendu au cours de l'audience publique.
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
1. Considérant que M.B..., ressortissant des Comores né le
31 décembre 1982, qui est arrivé en France en décembre 2009 muni d'un visa étudiant et a été titulaire d'un titre de séjour en cette qualité jusqu'en 2014, se prévaut de ce qu'il travaille en France depuis 2014 et de ce que sa compagne, ressortissante française, était, à la date du
14 janvier 2016 à laquelle la mesure d'éloignement a été prise, enceinte de trois mois ; que si la communauté de vie dont l'intéressé fait état présentait, à cette date, un caractère récent de quelques mois en raison de l'exigüité du logement de sa compagne de nationalité française, il ressort des pièces du dossier que le requérant assumait les charges de loyer de sa compagne depuis dix-huit mois ; qu'au demeurant postérieurement à la décision attaquée le requérant a reconnu le 18 janvier 2016 l'enfant à naitre et a déclaré en personne la naissance de son fils à la mairie de Corbeil-Essonnes le 20 juillet 2016 ; qu'il ressort, par ailleurs, des pièces du dossier, que M. B...travaille depuis le 1er juillet 2014 en tant qu'agent de propreté avec un contrat de travail à durée indéterminée signé en juin 2014 alors qu'il était encore titulaire d'un titre de séjour l'autorisant à travailler pour un revenu brut annuel perçu en 2015 de
12 560 euros ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances particulières de l'espèce, alors même que l'intéressé aurait conservé des attaches familiales dans son pays d'origine, la mesure d'éloignement en litige prise aux motifs que l'intéressé n'était pas titulaire d'un titre de séjour et travaillait en France sans y être autorisé, est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. B...; que ledit arrêté doit, dès lors, être annulé, de même, par voie de conséquence, que la décision du même jour désignant le pays de renvoi qui a été prise pour son application ;
2. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...est, dès lors, fondé à demander l'annulation du jugement attaqué et de l'arrêté du 14 janvier 2016 ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :
3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ; qu'aux termes de l'article L. 911-2 du même code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé " ;
4. Considérant qu'aux termes du dernier alinéa de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Si l'obligation de quitter le territoire français est annulée (...) l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas (...) " ;
5. Considérant que le présent arrêt qui annule une mesure d'éloignement n'implique pas la délivrance d'un titre de séjour ; qu'en revanche, il y a lieu d'enjoindre au préfet de l'Essonne de délivrer à M. B...une autorisation provisoire de séjour et de procéder au réexamen de sa demande dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, sans qu'il soit besoin d'assortir cette injonction d'une astreinte ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à
M. B...;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1602034 du 7 juin 2016 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise et l'arrêté du 14 janvier 2016 du préfet de l'Essonne sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de l'Essonne de délivrer une autorisation provisoire de séjour à M. B...et de réexaminer sa situation dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à M. B...une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
N° 16VE02041 4