2° d'annuler le certificat d'urbanisme que leur a délivré le maire de la commune de Ville-d'Avray le 28 juillet 2015 ;
3° de condamner la commune de Ville-d'Avray à leur verser la somme de 1 200 000 euros en réparation de leur préjudice.
Par un jugement n° 1508329 du 12 décembre 2017, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 12 février 2018, et un mémoire en réplique, enregistré le 9 octobre 2019, M. et Mme L... et autres, représentés par Me J..., avocat, demandent à la Cour :
1° d'annuler le jugement ;
2° avant-dire droit, d'ordonner une visite des lieux en application de l'article R. 622-1 du code de justice administrative ;
3° à titre principal, d'annuler les décisions portant classement en espace vert à protéger (EVP) de la parcelle et servitude d'inconstructibilité générale attachée aux EVP ;
4° de condamner la commune de Ville-d'Avray à leur verser la somme de 1 200 000 euros en réparation de leur préjudice, avec les intérêts de retard et la capitalisation des intérêts ;
5° d'enjoindre à la commune de Ville-d'Avray de ne pas appliquer le classement
litigieux EVP sur leur parcelle, de retirer ce classement du plan de zonage et de leur délivrer un certificat d'urbanisme ne comportant plus la mention de l'EVP, et, à défaut, de procéder à une nouvelle instruction de leur demande ;
6° de mettre à la charge de la commune de Ville-d'Avray une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens pour une somme de 6 500 euros.
Ils soutiennent que :
- le jugement n'est pas motivé en méconnaissance de l'article L. 9 du code de justice administrative ;
- le jugement est entaché d'une omission à statuer sur les conclusions relatives à la demande de mesure avant-dire droit et à la demande de condamnation au titre des frais compris dans les dépens ;
- le classement en espace vert à protéger (EVP) résulte d'une absence d'information du public dans le cadre de la concertation et de l'enquête publique alors que la surface des EVP représente dans le plan local d'urbanisme (PLU) le triple de la surface des espaces boisés classés (EBC) du POS dans une commune qui n'est pas déficitaire en espaces verts ; une nouvelle concertation aurait dû avoir lieu, d'autant que la dernière exposition publique ne s'était pas tenue avant le bilan de la concertation ; il y a eu non respect d'une modalité de concertation prévue et privation d'une garantie ; ni le conseil municipal, ni le public n'ont été mis en mesure de comprendre la modification substantielle introduite ; la concertation a été incomplète, insuffisante et déloyale ;
- le classement EVP et l'inconstructibilité totale attachée reposent sur une justification insuffisante du rapport de présentation en méconnaissance, notamment, de l'article R. 123-2 du code de l'urbanisme ; le rapport de présentation ne comporte aucune indication sur les secteurs concernés par les EVP, ne renvoie à aucune disposition du règlement et ne définit pas la " niche écologique " ; l'OAP n° 1 ne peut servir de justification aux EVP ; le plan n'identifie aucun arbre remarquable sur leur parcelle ; le rapport de présentation est insuffisant sur la prétendue trame verte de Ville-d'Avray ; le choix des parcelles frappées de la servitude d'inconstructibilité d'EVP est arbitraire ; le rapport de présentation n'a pas non plus étudié la compatibilité de l'instauration en zone urbaine des EVP avec l'objectif du schéma directeur de la région Ile-de-France (SDRIF) de densifier à proximité des gares ; il ne comporte pas d'indicateur de suivi en méconnaissance des articles L. 123-2-1-6°, L. 123-12-1, R. 123-2-5 du code de l'urbanisme ;
- la note de synthèse transmise aux conseillers municipaux en vue de de la délibération du 26 juin 2013 portant approbation du bilan de concertation ne les a pas informés sur les EVP sur des parcelles privées ;
- ce classement en EVP est entaché d'une inexactitude matérielle des faits, d'une erreur de droit, d'incohérences, d'une erreur manifeste d'appréciation et d'une rupture de l'égalité de traitement devant les charges publiques ; la servitude d'EVP et l'inconstructibilité qu'elle implique rompent le principe d'équilibre et constituent une entrave au droit de propriété et à l'exercice de l'une de ses garanties fondamentales qui est celle de ne pas être dépossédé sans une juste et préalable indemnité ; les auteurs du PLU ne peuvent se servir des EVP pour instaurer une servitude d'inconstructibilité en zone urbaine, sur des parcelles entières et sur des surfaces de 1500 m² ; ce classement se heurte à l'objectif du SDRIF qui est de densifier les quartiers à proximité de la gare et au classement comme secteur d'urbanisation à potentiel mesuré du schéma de cohérence territoriale (SCOT) ; l'institution de la servitude est contraire au principe d'équilibre de l'ancien article L. 121-1 ou du nouvel article L. 101-2 du code de l'urbanisme par l'institution sur des propriétés privées de 17 hectares d'inconstructibilité en pleine zone urbaine ; une collectivité ne peut se servir du PLU pour interdire les divisions portant ainsi atteinte à des droits réels, alors qu'il n'y a aucun site naturel, ni sur la parcelle des exposants, ni sur les parcelles directement avoisinantes dans la même zone UDd ;
- la faute résulte de la délivrance d'un certificat d'urbanisme erroné et illégal par voie de conséquence du refus illégal de déclassement de l'EVP et d'abrogation de la servitude d'inconstructibilité frappant leur parcelle ; dans tous les cas leur préjudice est anormal et spécial ;
- une indemnisation globale de tous les chefs de préjudices confondus, à hauteur de 1 200 000 euros, devra réparer la perte de valeur vénale, leur préjudice moral, les troubles dans les conditions d'existence et la réparation de l'immobilisation de la maison ; les frais mis en oeuvre pour faire rétablir leurs droits devront également être réparés ou bien intégrés dans les dépens pour 6 500 euros.
.....................................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code civil ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme F...,
- les conclusions de M. Bouzar, rapporteur public,
- les observations de Me J... pour M. et Mme L... et autres, et les observations de Me D..., substituant Me C..., pour le commune de Ville-d'Avray.
Une note en délibéré présentée pour la commune de Ville-d'Avray a été enregistrée le 22 octobre 2019.
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme L... et autres sont propriétaires d'une parcelle cadastrée section AD n° 250, située 11 chemin Desvallières sur le territoire de la commune de Ville-d'Avray, classée en zone UDd du plan local d'urbanisme (PLU) de cette commune, approuvé le 18 décembre 2013. Ce plan a inclus graphiquement environ deux tiers du terrain de 2 330 m² supportant la maison des requérants dans un " espace vert à protéger " (EVP) d'une superficie continue totale d'environ 3 200 m², sur le fondement du 7° de l'article L. 123-1-5 du code de l'urbanisme alors applicable. Par courrier du 1er juin 2015, M. et Mme L... ont demandé au maire de Ville-d'Avray de modifier le PLU de la commune afin de supprimer le classement de cette parcelle en " espace vert à protéger " et d'abroger " la règle générale d'inconstructibilité attachée à l'emprise des EVP ". Ils ont, par le même courrier, demandé à la commune de réparer les conséquences de ce classement et de l'inconstructibilité de leur parcelle. Alors que leur demande a été implicitement rejetée, par une seconde décision du 28 juillet 2015, l'adjointe au maire, déléguée à l'urbanisme, de Ville-d'Avray a délivré pour la parcelle un certificat d'urbanisme précisant notamment que " la propriété comprend un espace vert protégé ". Les époux L... et leurs enfants relèvent régulièrement appel du jugement du 12 décembre 2017 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande tendant à l'annulation de ces décisions et à l'indemnisation des préjudices qu'ils estiment avoir subis.
Sur la recevabilité de la demande de première instance :
2. Les conclusions d'une requête collective émanant de plusieurs requérants et dirigée contre plusieurs décisions sont recevables dans leur totalité si elles présentent entre elles un lien suffisant. Si le lien n'est pas suffisant l'irrecevabilité tirée du seul fait qu'un requérant n'a présenté qu'une seule demande ne peut être opposée sans que le requérant ait été invité à régulariser la procédure en présentant des demandes distinctes. En outre, la recevabilité d'une requête présentée conjointement par plusieurs requérants contre plusieurs décisions est subordonnée à la condition que la solution du litige ne nécessite pas un examen distinct de la situation individuelle de chacun des requérants.
3. En l'espèce, les décisions en litige et les conclusions indemnitaires fondées sur la responsabilité pour faute et la responsabilité sans faute de la commune ont pour objet le classement en " espace vert à protéger " assorti d'une prescription d'inconstructibilité concernant un même terrain dont les consorts L... sont propriétaires et présentent entre elles un lien suffisant. La commune de Ville-d'Avray n'est, dès lors, pas fondée à soutenir que la demande présentée en première instance est irrecevable.
Sur la légalité du refus d'abroger un " espace vert à protéger " :
4. La décision implicite de rejet de la demande reçue le 2 juin 2015 par le maire de la commune de Ville-d'Avray doit être regardée comme le refus du maire d'inscrire la question à l'ordre du jour du conseil municipal, pour permettre à celui-ci, seul compétent pour ce faire, de prononcer l'abrogation des dispositions du plan local d'urbanisme portant classement en " espace vert à protéger " de leur parcelle au titre de l'article L. 123-1-5 du code de l'urbanisme dont l'illégalité était invoquée par M. et Mme L....
5. Aux termes des dispositions de l'article L. 123-1-5 du code de l'urbanisme dans sa version applicable aux décisions litigieuses : " (...) III.-Le règlement peut, en matière de caractéristiques architecturale, urbaine et écologique : (...)2° Identifier et localiser les éléments de paysage et délimiter les quartiers, îlots, immeubles, espaces publics, monuments, sites et secteurs à protéger, à mettre en valeur ou à requalifier pour des motifs d'ordre culturel, historique, architectural ou écologique, notamment pour la préservation, le maintien ou la remise en état des continuités écologiques et définir, le cas échéant, les prescriptions de nature à assurer leur préservation. Lorsqu'il s'agit d'espaces boisés, ces prescriptions sont celles prévues à l'article L. 130-1 ; (...) ".
6. D'une part, l'article 13 des dispositions générales du règlement du PLU, relatif aux " Obligations imposées aux constructeurs en matière de réalisation d'espaces libres, d'aires de jeux et de loisirs et de plantations " dispose " Un " espace vert protégé " est un ensemble paysager existant sur un ou plusieurs terrains, que le PLU protège, en application de l'article L. 123-1-5, 7° du code de l'urbanisme, pour son rôle dans le maintien des équilibres écologiques et pour sa qualité végétale ou arboricole. / Il s'agit d'espaces verts le plus souvent plantés d'arbres, où la construction de bâtiments n'est pas autorisée pour protéger leur rôle important dans les paysages de la ville, le fonctionnement de la faune/flore locales et la gestion des eaux pluviales (espaces de pleine terre). Outre les plantations, seuls des aménagements légers y sont autorisés (kiosques, mobilier léger démontable, sans fondation ...). (...) Seuls sont autorisés les travaux et aménagements ne générant pas l'abattage d'arbres de haute tige, ne compromettant pas le caractère de ces espaces et les travaux nécessaires à leur entretien et à leur mise en valeur, tels que l'aménagement de sentiers, l'installation légère de mobiliers de jeux pour enfants, abris de jardins, kiosques, pergolas, bancs etc... ".
7. D'autre part, le préambule de la zone UD du règlement du PLU de la commune de Ville-d'Avray indique que cette zone " correspond à différents quartiers résidentiels, urbanisés dans des formes à dominante d'habitat individuel. Elle est répartie en 5 secteurs " et que le secteur UDd correspond aux " quartiers où dominent les grands terrains, largement plantés et arborés ". L'article UD 13 relatif aux " Obligations imposées aux constructeurs en matière de réalisation d'espaces libres, d'aires de jeux et de loisirs et de plantations " dispose qu'en complément des prescriptions de l'article 13 des dispositions générales : " Des espaces verts de pleine terre doivent être aménagés sur au moins 40 % de la superficie du terrain en secteurs Uda, Udb et Udc, portés à 60% en secteur Udd et Ude. (...) ".
8. Les requérants soutiennent que le classement de la majeure partie de leur parcelle au titre de l'article 13 du PLU, cité au point 6, ne se justifie pas dès lors notamment que l'article UD 13 du même règlement cité au point 7 dont ils ne contestent pas la légalité prévoit déjà une mesure de protection des espaces verts de pleine terre.
9. Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.
10. Il ressort des pièces du dossier, notamment du rapport de présentation du PLU, que le conseil municipal a décidé d'instaurer dans les " grandes propriétés d'habitat individuel " de la commune de Ville-d'Avray, " une trame particulière, en superposition du zonage " correspondant à des " espaces verts remarquables existants " où les constructions autres que précaires sont interdites par l'article 13 du règlement. Toutefois, il ressort des pièces du dossier, ainsi que le soutiennent les requérants, que leur jardin, certes arboré et entretenu par leurs soins, ne présente pas un caractère particulièrement remarquable et ne s'inscrit pas davantage dans la perspective visuelle lointaine alléguée par la commune, ni dans une " trame verte " notamment pas dans le prolongement de l'alignement d'arbres remarquables allant jusqu'au domaine de la Ronce dont il est séparé par une zone urbaine d'habitats collectifs dépourvu de tout espace vert protégé. Par ailleurs, alors que les requérants soutiennent que l'article UD 13 précité au point 7 instaure une protection suffisante des espaces verts existants sur leur parcelle même en cas de projet de division parcellaire, la commune ne le conteste pas utilement en se bornant à produire une photo aérienne et à se prévaloir du caractère de " poche de verdure " du terrain qui n'est pas de nature à justifier l'identification d'un élément de paysage assorti d'une règle d'inconstructibilité au sens du 7° de l'article L. 123-1-5 du code de l'urbanisme. Dans ces conditions, en décidant de localiser un " espace vert à protéger " inclus dans la parcelle AD n° 250 la rendant par l'application des dispositions de l'article 13 pour sa majeure partie inconstructible alors qu'entourée d'habitations en zone urbaine, elle ne remplit les caractéristiques ni d'un coeur d'îlot ni d'une " niche écologique " particulière, le conseil municipal a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.
11. Pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, en l'état du dossier, aucun des autres moyens, sans qu'il soit besoin d'examiner leur recevabilité, soulevés par les consorts L..., tirés de l'absence d'information du public et du conseil municipal sur les " espaces verts à protéger " dans le cadre de la concertation et de l'enquête publique, du non respect d'une modalité de la concertation prévue, de l'insuffisance de la note de synthèse transmise aux conseillers municipaux pour la délibération du 26 juin 2013 portant approbation du bilan de la concertation, de l'insuffisance du rapport de présentation, de l'incompatibilité de l'instauration en zone urbaine des EVP avec l'objectif du schéma directeur de la région Ile-de-France (SDRIF) de densifier à proximité des gares et avec le schéma de cohérence territoriale (SCOT), d'une erreur de droit par la rupture du principe d'équilibre et d'une rupture de l'égalité de traitement devant les charges publiques, n'est susceptible de fonder l'annulation des décisions prononcées par le présent arrêt.
12. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement, les consorts L... sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leurs conclusions tendant à l'annulation du refus implicite du maire de la commune de soumettre au conseil municipal l'abrogation du règlement, et par voie de conséquence du certificat d'urbanisme, en tant qu'ils disposent que " la propriété comprend un espace vert protégé " dans lequel " la construction de bâtiments n'est pas autorisée ".
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
13. D'une part, aux termes de l'article L. 600-2 du code de l'urbanisme : " Lorsqu'un refus opposé à une demande d'autorisation d'occuper ou d'utiliser le sol (...) a fait l'objet d'une annulation juridictionnelle, la demande d'autorisation (...) confirmée par l'intéressé ne peut faire l'objet d'un nouveau refus ou être assortie de prescriptions spéciales sur le fondement de dispositions d'urbanisme intervenues postérieurement à l'intervention de la décision annulée, sous réserve que l'annulation soit devenue définitive et que la confirmation de la demande ou de la déclaration soit effectuée dans les six mois suivant la notification de l'annulation au pétitionnaire. ". L'article L. 911-2 du code de justice administrative dispose que : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. / La juridiction peut également prescrire d'office l'intervention de cette nouvelle décision.".
14. Si les dispositions de l'article L. 600-2 du code de l'urbanisme ne s'appliquent pas aux certificats d'urbanisme, elles ne s'opposent pas à ce qu'il soit enjoint au maire de la commune de Ville-d'Avray de procéder à une nouvelle instruction de la demande de certificat d'urbanisme dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
15. D'autre part, aux termes de l'article R. 153-19 du code de l'urbanisme : " L'abrogation d'un plan local d'urbanisme est prononcée par l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale compétent ou par le conseil municipal après enquête publique menée dans les formes prévues par le chapitre III du titre II du livre Ier du code de l'environnement. (...) ". L'article L. 243-2 du code des relations entre le public et l'administration dispose que : " L'administration est tenue d'abroger expressément un acte réglementaire illégal ou dépourvu d'objet, que cette situation existe depuis son édiction ou qu'elle résulte de circonstances de droit ou de fait postérieures, sauf à ce que l'illégalité ait cessé. (...) ". L'article L. 2121-10 du code général des collectivités territoriales, relatif à la convocation du conseil municipal, dispose que : " Toute convocation est faite par le maire. Elle indique les questions portées à l'ordre du jour (...) ".
16. Il résulte de la combinaison de ces dispositions et des termes du présent arrêt que le maire de la commune de Ville-d'Avray est tenu d'inscrire la question à l'ordre du jour du conseil municipal, pour permettre à celui-ci, seul compétent pour ce faire, de prononcer l'abrogation des dispositions illégales. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'enjoindre au maire de la commune de Ville-d'Avray de procéder à l'inscription de cette question dans un délai de quatre mois à compter de la notification du présent arrêt.
Sur le préjudice :
17. En premier lieu, les requérants sollicitent sur le terrain de la responsabilité pour faute de la commune l'indemnisation du préjudice résultant, d'une part, de l'impossibilité de vendre leur bien depuis le classement litigieux à un juste prix et, d'autre part, de l'impossibilité de vivre du revenu ainsi dégagé. Toutefois, il ne résulte pas de l'instruction que l'illégalité fautive du classement serait, ainsi que le fait valoir la commune de Ville-d'Avray, eu égard aux autres règles d'urbanisme applicables à la parcelle fixées par l'article UD3 en termes de largeur des accès, en lien direct et certain avec une perte de bénéfices qu'une opération de vente du bien ou de division de la parcelle auraient éventuellement rapportés.
18. En deuxième lieu, les consorts L... demandent le remboursement de frais " d'expertise " et de diagnostic paysager si ces derniers ne leur sont pas remboursés au titre de l'article R. 761-1 du code de justice administrative. Alors qu'aucune imprudence imputable aux requérants n'est susceptible d'atténuer la responsabilité de la commune, les frais qu'ils ont exposés pour la somme de 6 500 euros correspondant aux interventions, d'une part, d'un expert foncier qui, outre la rédaction d'un rapport, a essayé en vain d'obtenir du service d'urbanisme de la commune des précisions sur les critères, hors photo aérienne, déterminant le classement litigieux, d'autre part, d'un diagnostic paysager de leur parcelle, qui ne sont pas compris dans les dépens, présentent en l'espèce un lien direct et certain avec les décisions litigieuses. Par suite, les requérants sont fondés à être indemnisés à ce titre.
19. En troisième lieu, les consorts L... font état de préjudice moral et de troubles dans les conditions d'existence liés au sentiment d'être spolié de leur bien et victime de " tracas administratifs " alors notamment que M. et Mme L... sont des personnes âgées. S'il ne résulte pas de l'instruction que les intéressés ont subi des troubles dans les conditions d'existence, il sera fait une juste appréciation du préjudice moral depuis juillet 2015 en allouant aux requérants une indemnité globale de 1 000 euros.
20. En quatrième lieu, eu égard à l'illégalité du classement litigieux retenue par le présent arrêt, aucune servitude de " secteur à protéger " ne grève la parcelle des requérants. Ainsi les conclusions tendant à une indemnisation au titre de l'article L. 105-1 du code de l'urbanisme et de la responsabilité sans faute de la commune au titre de la rupture d'égalité devant les charges publiques au motif que leur parcelle aurait été la seule de la commune à être amputée des deux tiers de sa superficie ne sont pas fondées.
21. Il résulte de tout ce qui précède que les consorts L... sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande et qu'il y a lieu de condamner la commune de Ville-d'Avray à leur verser la somme globale de 7 500 euros.
22. Les consorts L... ont droit aux intérêts de la somme de 7 500 euros qui leur est due à compter du 2 juin 2015, date de réception par la commune de Ville-d'Avray de leur demande d'indemnisation. Ils ont demandé la capitalisation des intérêts par mémoire enregistré le 12 février 2018. Il y a lieu, conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil, de faire droit à cette demande à compter du 2 juin 2016, date à laquelle les intérêts étaient dus pour une année entière, et à chaque échéance annuelle à compter de cette date.
Sur les frais liés au litige :
23. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge des consorts L..., qui ne sont pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la commune de Ville-d'Avray demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par les consorts L... au titre de ces dispositions en mettant à la charge de la commune de Ville-d'Avray le versement de la somme de 2 000 euros.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1508329 du 12 décembre 2017 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise est annulé.
Article 2 : Le certificat d'urbanisme du 28 juillet 2015 et la décision implicite du maire de la commune de Ville-d'Avray en tant que ces décisions ont identifié un " espace vert protégé " dans lequel " la construction de bâtiments n'est pas autorisée " sur la parcelle de M. et Mme L... et autres, sont annulés.
Article 3 : Il est enjoint à la commune de Ville-d'Avray de procéder à une nouvelle instruction de la demande de certificat d'urbanisme de M. et Mme L... et autres dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 4 : Il est enjoint au maire de la commune de Ville-d'Avray d'inscrire la question de l'illégalité du plan local d'urbanisme en tant qu'un " espace vert protégé " dans lequel " la construction de bâtiments n'est pas autorisée " a été identifié sur la parcelle de M. et Mme L... et autres à l'ordre du jour du conseil municipal dans le délai de quatre mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 5 : La commune de Ville-d'Avray est condamnée à verser une somme globale de 7 500 euros à M. et Mme L... et autres. La somme de 7 500 euros portera intérêts au taux légal à compter du 2 juin 2015. Les intérêts sur la somme de 7 500 euros seront capitalisés à la date du 2 juin 2016 et à chaque échéance annuelle à compter de cette date pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 6 : La commune de Ville-d'Avray versera à M. et Mme L... et autres une somme globale de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 7 : Le surplus des conclusions de M. et Mme L... et autres et les conclusions de la commune de Ville-d'Avray présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.
N° 18VE00512 2