Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 9 mars 2017, et un mémoire complémentaire, enregistré le 4 avril 2017, le département du Val-d'Oise, représenté par Me Bazin, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement et les titres exécutoires ;
2° de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement est entaché d'un défaut de motivation en réponse au moyen tiré de ce que l'opération litigieuse de construction d'un palais de justice relevait de la compétence exclusive de l'Etat et ne revêtait aucun intérêt départemental ;
- le jugement est entaché d'une omission de statuer sur le moyen tiré du vice de forme entachant les titres de recettes litigieux ;
- la délibération du 26 octobre 2012 du conseil départemental publiée et transmise au contrôle de légalité et au ministre de la justice, exécutoire de plein droit conformément à l'article L. 3131-1 du code général des collectivités territoriales, qui a résilié la convention du 15 décembre 2007 et l'avenant du 23 avril 2010 pour un motif d'intérêt général, fait obstacle par son caractère définitif au recouvrement par l'Etat des créances litigieuses ; les titres ne pouvaient donc pas être fondés sur la convention du 15 décembre 2007 modifiée ;
- le projet litigieux ne présentait pas d'intérêt départemental et relevait de la compétence exclusive de l'Etat, entachant ainsi d'illégalité la convention du 15 décembre 2007 ; l'intervention des collectivités territoriales dans le domaine de la justice n'est autorisée que par l'article L. 1311-2 du code général des collectivités territoriales ;
- la résiliation de la convention du 15 décembre 2007 a été prononcée au motif tiré du manquement grave par l'Etat à ses obligations contractuelles ;
- à titre subsidiaire, les créances afférentes aux exercices 2012 et 2013 n'étaient ni exigibles ni certaines, leur existence ayant été contestée par la délibération du 26 octobre 2012 et l'échéancier ne lui imposant pas de versement avant le 31 décembre 2012 et le 31 décembre 2013.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Geffroy,
- et les conclusions de Mme Rollet-Perraud, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Le département du Val-d'Oise et l'Etat ont conclu le 15 décembre 2007 une convention relative à la mise en oeuvre d'un fonds de concours pour la construction du palais de justice de Montmorency prévoyant une contribution du département du Val-d'Oise à cette opération pour un montant total de 4 878 000 euros. Trois titres exécutoires ont été émis le 31 mai 2013 par le ministre de la justice à l'encontre du département du Val-d'Oise pour les montants annuels prévus par un avenant cosigné par le département du 23 avril 2010. Le département du Val-d'Oise relève appel du jugement du 12 janvier 2017 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces trois titres de perception.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Il résulte des termes mêmes du jugement attaqué que les premiers juges ont répondu avec suffisamment de précisions à l'ensemble des moyens dont ils étaient saisis, alors qu'ils n'avaient pas à répondre à l'ensemble des arguments présentés par le département du Val-d'Oise. Les premiers juges n'étaient pas davantage tenus de répondre au moyen tiré d'un vice de forme des titres de perception qui n'a été soulevé que par une note en délibéré. Par suite, les moyens tirés de l'insuffisante motivation du jugement et de l'omission à statuer doivent être écartés.
Sur le fond :
3. L'article L. 1111-2 du code général des collectivités territoriales, dispose que les départements " règlent par leurs délibérations les affaires de leur compétence. / Ils concourent avec l'Etat à l'administration et à l'aménagement du territoire, au développement économique, social, sanitaire, culturel et scientifique, ainsi qu'à la protection de l'environnement, à la lutte contre l'effet de serre par la maîtrise et l'utilisation rationnelle de l'énergie, et à l'amélioration du cadre de vie. ". Aux termes de l'article L. 3211-1 du même code dans sa version applicable : " Le conseil général règle par ses délibérations les affaires du département. / Il statue sur tous les objets sur lesquels il est appelé à délibérer par les lois et règlements et, généralement, sur tous les objets d'intérêt départemental dont il est saisi. (...) ".
4. L'article 2 de la convention conclue le 15 décembre 2007, modifié par l'avenant du 23 avril 2010 stipule : " L'Etat s'engage à réaliser sous sa maîtrise d'ouvrage, l'opération de construction du palais de justice de Montmorency, dont le coût TTC est arrêté à 9 400 000 euros, toutes dépenses confondues. / Compte-tenu de l'intérêt que représente cette opération au plan local, le Département s'engage à contribuer au financement de l'opération selon la répartition prévue en annexe 1. (...) ". L'article 3 de cette convention précise : " Le département s'engage à verser à l'Etat sa participation sous forme d'une offre de concours. / Les versements s'effectueront au vu des titres de perception émis par le ministère de la justice et selon l'échéancier conforme au calendrier prévisionnel de l'opération, ci-annexé. (...) / L'échéancier des versements correspondant à la participation de la collectivité locale sera révisé en fonction de l'avancement de l'opération. L'ajustement de l'échéancier fera l'objet d'un avenant à la présente convention. ".
5. A supposer que le département se prévale de la nullité de la convention du 15 décembre 2007 modifiée, il ressort des pièces du dossier que le département a toutefois entendu concourir à la réalisation de l'objectif " être et se sentir en sécurité " d'un projet départemental " Horizon 2015 " par sa participation financière au schéma directeur de restructuration du patrimoine immobilier judiciaire du Val-d'Oise. Le rapport au conseil général de la séance du 3 juillet 2009 inscrit ainsi la mise en oeuvre du fonds de concours dans " l'action du conseil général en faveur de la justice, de l'accès au droit, de l'aide aux victimes et de la prévention de la récidive etc... ". En se bornant à soutenir que l'investissement en cause n'a pas un intérêt local, la compétence en matière de justice relevant de l'Etat, le département n'établit pas le caractère illicite et donc la nullité de la convention sur le fondement de laquelle les titres de perception ont été émis.
6. En l'absence dans la convention de stipulations expresses en ce sens, la délibération du 26 octobre 2012 par laquelle le conseil général du Val-d'Oise a décidé, postérieurement au début des travaux pour laquelle l'offre de concours avait été formulée et acceptée, de résilier unilatéralement la convention du 15 décembre 2007 est sans effet sur l'obligation mise à la charge du département du fait de l'acceptation de son offre de concours par l'Etat. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de base de liquidation des titres de perception litigieux en ce qu'est mentionnée la convention du 15 décembre 2007 doit être écarté.
7. Le cocontractant lié à une personne publique par un contrat administratif est tenu d'en assurer l'exécution, sauf en cas de force majeure, et ne peut notamment pas se prévaloir des manquements ou défaillances de l'administration pour se soustraire à ses propres obligations contractuelles, sauf si les parties ont prévu les conditions auxquelles le cocontractant de la personne publique peut résilier le contrat en cas de méconnaissance par cette dernière de ses obligations. Alors que la convention du 15 décembre 2007 modifiée n'a rien prévu de tel et n'a pas imposé, en tout état de cause, un début des travaux pour l'année 2011 dont le non respect aurait pu être qualifié de manquement ou de conditions mises par le département à son offre de concours, ce dernier n'est pas fondé à soutenir qu'un manquement grave de l'Etat lui permettait de s'exonérer de l'obligation mise à sa charge par son offre de concours pour la réalisation des travaux de construction du nouveau palais de justice de Montmorency achevé en 2013.
8. Le département soutient également que les créances 2012 et 2013 n'étaient ni certaines ni exigibles à la date d'émission des titres de perception le 31 mai 2013. Toutefois aucune mention dans la convention ou dans l'avenant ne prévoit que les versements de la participation du département ne pourraient intervenir qu'à compter du 31 décembre de chaque exercice.
9. Il résulte de tout ce qui précède que le département du Val-d'Oise n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande. Par voie de conséquence du rejet de sa requête, les conclusions du département du Val-d'Oise tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête du département du Val-d'Oise est rejetée.
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N° 17VE00801