Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 21 juin 2016, la société Le Ciel de Parly, représentée par la SELARL Parme, avocats, demande à la Cour :
1° d'annuler le jugement ;
2° d'annuler l'arrêté du 12 mars 2013 du maire de la commune du Chesnay ;
3° d'enjoindre à la commune du Chesnay de procéder à une nouvelle instruction de sa demande et au maire de la commune du Chesnay de se prononcer sur celle-ci dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, le tout sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;
4° de mettre à la charge de la commune du Chesnay le versement d'une somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le Tribunal a omis de répondre au moyen opérant tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 421-6 du code de l'urbanisme ;
- le Tribunal a insuffisamment motivé le jugement en ne précisant pas la règle jurisprudentielle fondant selon lui en droit l'arrêté ;
- le Tribunal a omis de répondre au moyen opérant tiré de ce que le maire s'était basé à tort sur l'ouvrage et non sur les travaux envisagés pour apprécier le caractère indivisible ;
- une règle jurisprudentielle ne peut pas fonder un refus au sens de l'article L. 421-6 du code de l'urbanisme ; le Tribunal a opéré une substitution de base légale qui n'avait pas lieu d'être ;
- le permis n'ayant pas pour objet le respect des règles de construction, leur respect est sans incidence sur la méconnaissance des dispositions de l'article L. 421-6 du code de l'urbanisme ;
- l'arrêté est entaché d'une erreur de droit en se fondant sur l'indivisibilité de l'ensemble immobilier au lieu de l'indivisibilité des travaux ;
- il est entaché d'une erreur de fait dès lors qu'il n'existe ni lien fonctionnel, ni lien physique avec les travaux entrepris par les autres propriétaires du centre commercial dans le cadre des permis de construire délivrés les 28 juillet 2009 et 8 février 2011 ; les lots sont isolés, les accès sont indépendants et les exigences en terme de places de stationnement demeurent... ; l'établissement est isolé comme le montre l'avis favorable au projet de la commission de sécurité.
..................................................................................................................inchangées
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Geffroy,
- les conclusions de Mme Ribeiro-Mengoli, rapporteur public,
- et les observations de Me B...pour la société Le Ciel de Parly et de MeC..., substituant MeA..., pour la commune du Chesnay.
Une note en délibéré présentée pour la commune du Chesnay a été enregistrée le
9 mai 2018.
1. Considérant que la société Le Ciel de Parly relève régulièrement appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 mars 2013 par lequel le maire de la commune du Chesnay lui a refusé la délivrance d'un permis de construire portant sur un changement de destination de bureaux, une modification de l'aspect extérieur des locaux et le réaménagement des terrasses attenantes ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 612-6 du code de justice administrative : " Si, malgré une mise en demeure, la partie défenderesse n'a produit aucun mémoire, elle est réputée avoir acquiescé aux faits exposés dans les mémoires du requérant " ; que si la commune du Chesnay n'a pas observé le délai imparti par la cour en application des dispositions règlementaires précitées, elle a produit un mémoire enregistré avant que la cour ne statue ; que, dans ces conditions, et en tout état de cause, elle ne peut être regardée comme ayant acquiescé aux faits exposés dans la requête ;
Sur le bien-fondé du jugement attaqué sans qu'il soit besoin de statuer sur sa régularité :
3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 421-6 du code de l'urbanisme : " Le permis de construire ou d'aménager ne peut être accordé que si les travaux projetés sont conformes aux dispositions législatives et réglementaires relatives à l'utilisation des sols, à l'implantation, la destination, la nature, l'architecture, les dimensions, l'assainissement des constructions et à l'aménagement de leurs abords et s'ils ne sont pas incompatibles avec une déclaration d'utilité publique. (...) " ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article R. 421-14 de ce code dans sa version applicable à la date du refus litigieux : " Sont soumis à permis de construire les travaux suivants, exécutés sur des constructions existantes, (...) c) Les travaux ayant pour effet de modifier les structures porteuses ou la façade du bâtiment, lorsque ces travaux s'accompagnent d'un changement de destination entre les différentes destinations définies à l'article R. 123-9 ; (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 123-9 dans sa version alors applicable : " (...) Les règles édictées dans le présent article peuvent être différentes, dans une même zone, selon que les constructions sont destinées à l'habitation, à l'hébergement hôtelier, aux bureaux, au commerce, (...) " ;
4. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que la construction d'un ensemble immobilier unique, même composé de plusieurs éléments, doit en principe faire l'objet d'une seule autorisation de construire, sauf à ce que l'ampleur et la complexité du projet justifient que des éléments de la construction ayant une vocation fonctionnelle autonome puissent faire l'objet de permis distincts, sous réserve que l'autorité administrative soit en mesure de vérifier, par une appréciation globale, que le respect des règles et la protection des intérêts généraux que garantirait un permis unique sont assurés par l'ensemble des permis délivrés ; qu'en revanche, des constructions distinctes, ne comportant pas de liens physiques ou fonctionnels entre elles, n'ont pas à faire l'objet d'un permis unique, mais peuvent faire l'objet d'autorisations distinctes, dont la conformité aux règles d'urbanisme est appréciée par l'autorité administrative pour chaque projet pris indépendamment ;
5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que sur la section AP 37 et 41 située RD 186, avenue Dutartre et avenue Charles de Gaulle, était implanté un immeuble comportant au niveau 135 une galerie marchande d'une superficie d'environ 87 771 m² et au niveau 145 deux corps de bâtiments en rez-de-terrasse et R+1 reliés entre eux par des passerelles à destination de bureaux surmontant partiellement le toit du centre commercial pour une superficie d'environ 5 000 m² et qu'un projet initial des copropriétaires du centre commercial Parly 2 ayant donné lieu à des permis de construire délivrés les 28 juillet 2009 et 8 février 2011 par le maire de la commune du Chesnay prévoyait la rénovation et l'extension de Parly 2 par la création de superficie commerciale supplémentaire d'environ 25 000 m² sans modification des bureaux ; que la société requérante, propriétaire depuis le 30 novembre 2012 de l'ensemble des lots privatifs de bureaux laissés vacants à l'issue du départ des services de l'inspection académique, a déposé le 17 juillet 2012 une demande de permis de construire complétée le 4 octobre 2012 projetant un changement de destination en un ensemble commercial d'une trentaine de boutiques, une modification d'aspect extérieur des façades et de la toiture et un réaménagement des terrasses attenantes ;
6. Considérant, en premier lieu, que la commune a refusé le permis de construire au motif du caractère indivisible de l'ensemble immobilier, l'immeuble de bureaux étant " indissociable physiquement et fonctionnellement du reste de l'ensemble immobilier dit
Parly 2 ", " plusieurs points en contradiction avec le projet " autorisé par les permis de 2009 et 2011 " particulièrement en ce qui concerne les conditions d'accès, en modifiant sensiblement le flux et le volume de trafic automobile, mais également sur un plan architectural (rénovation des façades...) " et enfin de ce que seule l'échelle de l'ensemble immobilier dit " Parly 2 " serait à même d'assurer le respect des prescriptions édictées par les avis de la sous-commission départementale de sécurité du 31 août 2012 et d'ERDF du 6 août 2012 ; que si la commune a ainsi entendu caractériser les liens physiques et fonctionnels entre les travaux projetés sur une construction existante et le reste de cette construction pouvant faire obstacle à la délivrance d'un permis distinct, il ressort toutefois des pièces du dossier que les permis délivrés en 2009 et 2011 en cours d'exécution se bornaient à inclure la rénovation des façades des bureaux en cause " pour assurer une image cohérente " de la construction, que ces locaux sont depuis 1969 accessibles aux piétons par l'extérieur de ce centre par des accès préexistants indépendants, que le changement de destination projeté sans construction nouvelle ne conduit qu'à une augmentation d'environ 6% de la superficie commerciale de l'ensemble de la construction et que le respect des avis favorables de la sous-commission départementale de sécurité et d'ERDF ne requière que des accords privés internes à la copropriété ; que si la commune fait valoir à l'encontre de la vocation fonctionnelle autonome des locaux que la fréquentation d'une trentaine de boutiques supplémentaires, pouvait remettre en cause la pertinence des constats de l'étude d'impact de septembre 2008 et des enquêtes publiques conjointes de février 2009 relatives au permis de construire concernant l'extension du centre commercial de Parly 2 et l'aménagement d'un nouvel accès à ce centre, il ressort cependant des pièces du dossier que le service instructeur était en mesure de déterminer si le projet, s'agissant notamment d'aménagements de parties communes à la copropriété, ne méconnaissait pas les dispositions du plan local d'urbanisme applicables notamment sur la sécurité des accès et sur les stationnements ; qu'ainsi, dans les circonstances de l'espèce, l'administration était en mesure d'évaluer l'incidence réciproque des deux projets indépendants sur le plan fonctionnel et de porter une appréciation globale sur le respect des règles d'urbanisme, notamment au regard du parti architectural des permis précédents, au demeurant modifié par un second permis de construire modificatif délivré le 23 octobre 2014 ayant pour objet notamment d'exclure les locaux de la société requérante du périmètre du permis initial de 2009 ;
7. Considérant, en second lieu, qu'il ressort des pièces du dossier, notamment du courrier adressé le 19 mars 2013 à la société requérante par le maire de la commune du Chesnay, que l'arrêté attaqué a eu pour objet d'imposer à la société, par ailleurs bénéficiaire de l'autorisation préalable requise en vue de créer une galerie commerciale de 5 313 m² de surface de vente, de réaliser une cafétéria ou une crèche privée et de maintenir des bureaux tout en n'excluant pas l'ouverture d'un commerce de bricolage ; que, dans les circonstances de l'espèce, le refus de permis de construire est ainsi intervenu pour un motif étranger aux attributions de la commune en matière d'urbanisme ; que, par suite, le moyen tiré du détournement de pouvoir doit également être regardé comme fondé ;
8. Considérant que, pour l'application des dispositions de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun autre moyen n'est de nature à justifier l'annulation de l'arrêté du 12 mars 2013 ;
9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Le Ciel de Parly est fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté du 12 mars 2013 ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
10. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-2 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. " ;
11. Considérant que l'exécution du présent arrêt implique nécessairement que le maire de la commune du Chesnay procède à un nouvel examen de la demande de permis de construire de la société Le Ciel de Parly dont elle se trouve à nouveau saisie ; qu'il y a lieu d'enjoindre un tel réexamen dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu, en l'état de l'instruction, d'assortir cette injonction d'une astreinte ;
Sur les frais liés au litige :
12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la requérante, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que réclame la commune du Chesnay au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu en revanche dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune du Chesnay le versement à la société Le Ciel de Parly, d'une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du 22 avril 2016 du Tribunal administratif de Versailles et l'arrêté du 12 mars 2013 du maire de la commune du Chesnay sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au maire de la commune du Chesnay de réexaminer, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, la demande de permis de construire de la société Le Ciel de Parly.
Article 3 : La commune du Chesnay versera à la société Le Ciel de Parly une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
N° 16VE01893 2