Cergy-Pontoise a rejeté leur demande.
Procédure initiale devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 19 novembre 2015 et 20 octobre 2016, M. et Mme A..., représentés par Me Hadjiveltchev, avocat, ont demandé à la Cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° de prononcer la décharge des impositions litigieuses, en ce qu'elles résultent de la remise en cause du bénéfice de l'exonération d'impôt prévue par les dispositions du I de l'article 81 A du code général des impôts ;
3° de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutenaient que :
- ils peuvent prétendre au bénéfice de l'exonération d'impôt prévue par les dispositions du I de l'article 81 A du code général des impôts au titre des salaires versés à M. A... par la société Thales Communications pour les activités exercées à l'étranger ; les conditions fixées par l'article 81 A du code général des impôts pour toutes les exonérations totales d'impôt qu'il prévoit sont réunies dès lors que M. A... a son domicile fiscal en France, qu'il exerce une activité salariée, que son employeur est établi en France et que les salaires litigieux correspondent à des activités exercées hors de France ;
- les activités exercées à l'étranger par M. A..., dans le cadre de ses fonctions de directeur " fusions acquisitions ", correspondent à des activités de prospection commerciale ; ils produisent une attestation de l'employeur de M. A... en ce sens ; l'instruction administrative référencée 5 B-15-06 publiée au bulletin officiel des impôts n°63 du 6 avril 2006 indique que le bénéfice de l'exonération ne sera pas remis en cause si, pour justifier la nature de ses activités, le contribuable produit, comme c'est le cas en l'espèce, une attestation de son employeur selon laquelle il exerce une activité de prospection commerciale ;
- la durée à prendre en compte au titre de l'activité exercée par M. A... à l'étranger est de 87 jours au titre des missions à l'étranger, à laquelle il convient d'ajouter 54 jours au titre des congés et récupérations correspondants, soit une durée totale supérieure à 120 jours ; pour le décompte de la durée d'activité à l'étranger, il n'y a pas lieu d'exclure les temps de transport ; l'instruction administrative référencée 5 B-15-06 publiée au bulletin officiel des impôts n°63 du 6 avril 2006, qui prévoit d'inclure les temps de transport dans le calcul de la durée d'activité à l'étranger, est opposable à l'administration sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ; la circonstance que les temps de trajet ne relèvent pas du temps de travail effectif est sans incidence sur l'application des dispositions de l'article 81 A du code général des impôts.
..........................................................................................................
Par un arrêt n° 15VE03516 du 18 mai 2017, contre lequel M. et Mme A... se sont pourvus en cassation, la Cour a rejeté l'appel formé par ces derniers contre ce jugement.
Procédure devant le Conseil d'État :
Le Conseil d'État, par une décision n° 412525 du 26 octobre 2018, a annulé l'arrêt de la Cour et lui a renvoyé le jugement de l'affaire, réenregistrée sous le n° 18VE03617.
Procédure devant la Cour après renvoi du Conseil d'État :
Par un mémoire, enregistré le 21 novembre 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête, pour les mêmes motifs que ceux exposés lors de la procédure initiale devant la Cour.
Par un mémoire, enregistré le 21 mai 2019, M. et Mme A..., désormais représentés par la SCP Potier de la Varde-Buk Laurent-Robillot, avocats au Conseil et à la Cour, déclarent porter au montant de 5 000 euros la somme dont ils demandent la mise à la charge de l'État au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et, pour le surplus, concluent aux mêmes fins que leur requête introductive d'instance, par les mêmes moyens que précédemment.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique du 15 octobre 2019 :
- le rapport de M. B...,
- et les conclusions de M. Huon, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... occupe les fonctions de directeur " fusions acquisitions " au sein de la société Thales Communications. Au titre de l'année 2009, il a appliqué à une fraction des salaires tirés de cette activité professionnelle, à hauteur de la somme de 42 845 euros, le régime d'exonération d'impôt sur le revenu des traitements et salaires perçus en rémunération d'une activité exercée à l'étranger dans le cadre d'opérations de prospection commerciale prévu par le I de l'article 81 A du code général des impôts. L'administration fiscale, à l'issue d'un contrôle sur pièces de la situation fiscale de M. et Mme A..., a toutefois réintégré ces sommes à leur revenu imposable au titre de 2009 et a mis à leur charge, par voie de conséquence, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu pour l'année 2009, s'élevant, en droits et pénalités, à la somme totale de 18 817 euros. M. et Mme A... ont demandé la décharge de ces impositions supplémentaires au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise qui, par un jugement n° 1308247 du 22 septembre 2015, a rejeté leur demande. Par un arrêt n° 15VE03516 du 18 mai 2017, la Cour a rejeté la requête de M. et Mme A... dirigée contre ce jugement. Par une décision n° 412525 du 26 octobre 2018, le Conseil d'État, statuant au contentieux et saisi par M. et Mme A..., a annulé cet arrêt et renvoyé l'affaire à la Cour, où elle a été enregistrée sous le n° 18VE03617.
2. Aux termes des dispositions de l'article 81 A du code général des impôts : " I. - Les personnes domiciliées en France au sens de l'article 4 B qui exercent une activité salariée et sont envoyées par un employeur dans un Etat autre que la France et que celui du lieu d'établissement de cet employeur peuvent bénéficier d'une exonération d'impôt sur le revenu à raison des salaires perçus en rémunération de l'activité exercée dans l'Etat où elles sont envoyées. / L'employeur doit être établi en France ou dans un autre Etat membre de la Communauté européenne, ou dans un Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention fiscale qui contient une clause d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude ou l'évasion fiscale. / L'exonération d'impôt sur le revenu mentionnée au premier alinéa est accordée si les personnes justifient remplir l'une des conditions suivantes : [...] / 2° Avoir exercé l'activité salariée dans les conditions mentionnées aux premier et deuxième alinéas : [...] - soit pendant une durée supérieure à cent vingt jours au cours d'une période de douze mois consécutifs lorsqu'elle se rapporte à des activités de prospection commerciale [...] ". Il résulte de ces dispositions que pour bénéficier de l'exonération d'impôt sur le revenu à raison des salaires perçus en rémunération de l'activité exercée dans l'État où il est envoyé, l'article 81 A du code général des impôts exige du contribuable qu'il établisse avoir exercé une activité salariée de prospection commerciale à l'étranger pendant une durée supérieure à cent vingt jours au cours d'une période de douze mois consécutifs.
Sur l'exercice par M. A... d'une activité de prospection commerciale :
3. Il résulte de l'instruction que, si M. et Mme A... justifient que ce dernier a effectué en cours de l'année 2009 divers déplacements dans plusieurs États étrangers, notamment les Emirats Arabes Unis, la Croatie et le Kazakhstan, pour le compte de son employeur, les documents que les requérants ont présenté dans un premier temps à l'appui de leur demande de décharge, notamment le contrat de travail de M. A... et ses ordres de mission, ne permettaient pas de déterminer la nature des missions confiées dans ce cadre à M. A... et si ces dernières se rapportaient à des opérations de prospection commerciale au sens du 2° du I de l'article 81 A du code général des impôts
4. Toutefois, aux termes de l'instruction administrative référencée 5 B-15-06 publiée au bulletin officiel des impôts n° 63 du 6 avril 2006 et relative au champ d'application de l'exonération totale d'impôt sur le revenu accordée au titre de l'exercice de certaines activités à l'étranger sur le fondement de l'article 81 A du code général des impôts, dont M. et Mme A... sont fondés à se prévaloir sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Si, dans le cadre d'un contrôle, l'intéressé produit une attestation de son employeur précisant qu'il exerce bien une activité de prospection, il sera admis de ne pas remettre en cause le bénéfice de l'exonération, sauf si l'exercice du droit de communication ou une vérification de comptabilité de l'entreprise permettait d'établir que le contribuable n'a en fait pas exercé l'activité précitée ". Il résulte de ces dispositions de la doctrine administrative que l'administration fiscale admet que la production, par le contribuable, d'une attestation provenant de son employeur et indiquant qu'il exerce une activité de prospection commerciale à l'étranger suffit à établir l'exercice par ce dernier d'une telle activité, et ne permet donc pas, sous réserve du respect des autres conditions fixées au même article, de remettre en cause le bénéfice de l'exonération qu'il prévoit, sauf à ce que l'administration fiscale rapporte la preuve, par l'exercice d'un droit de communication ou d'une vérification de comptabilité de l'entreprise concernée, de ce que le contribuable n'a en fait pas exercé cette activité.
5. M. et Mme A... ont produit à l'appui de leur requête une attestation de la société Thalès Communications précisant que M. A... a effectué en sa qualité d'ingénieur commercial export les missions de prospection commerciale à l'étranger faisant l'objet du litige, et doivent ainsi être regardés comme établissant le respect de la condition relative à la nature de l'activité exercée à l'étranger posée par le 2° du I de l'article 81 A du code général des impôts, comme l'admet dans ce cas la doctrine administrative précitée. L'administration fiscale ne rapportant pas la preuve contraire, qui lui incombe dans ce cas ainsi qu'il est dit ci-dessus, elle n'est pas fondée à soutenir que M. A... n'a pas accompli les missions donnant droit à l'application du régime d'exonération d'impôt sur le revenu en cause.
Sur la durée des missions de prospection commerciale effectuées par M. A... :
6. D'une part, pour l'application des dispositions précitées du 2° du I de l'article 81 A du code général des impôts, la durée totale d'activité salariée à l'étranger du contribuable intéressé, qui ne doit pas être inférieure à 120 jours pendant une période de douze mois consécutifs, comprend notamment, d'une part, les congés payés et congés de récupération auxquels donne droit la réalisation de la mission à l'étranger confiée au salarié par son employeur.
7. D'autre part, cette durée comprend également, contrairement à ce que fait valoir le service, la totalité des jours consacrés par le salarié aux trajets entre la France et les États dans lesquels il est amené à effectuer ses missions de prospection commerciale, alors même que le temps de trajet effectif d'une destination à une autre n'occuperait qu'une fraction des jours en cause, dès lors qu'en premier lieu, ces trajets sont indissociables de l'exercice des missions de prospection confiées au contribuable concerné et relèvent ainsi de son activité salariée à l'étranger au sens des dispositions précitées, quelle que soit la durée de la mission à laquelle ces voyages se rapportent et qu'en second lieu, ces mêmes dispositions qui apprécient la durée d'activité salariée en jours entiers et non d'heure à heure, ne sauraient permettre d'exclure du calcul de cette période les journées qui ne sont pas intégralement consacrées à cette activité.
8. Il résulte de l'instruction que, eu égard aux modalités de décompte exposées ci-dessus, M. A... établit que la durée cumulée de ses périodes d'activité salariée à l'étranger consacrées à la prospection commerciale au cours de l'année 2009 s'élève à 141 jours et est donc supérieur au nombre requis fixé à 120 jours. Par suite, et contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, il doit être regardé comme satisfaisant à l'ensemble des conditions posées par le 2° du I de l'article 81 A du code général des impôts pour bénéficier de l'exonération d'impôt sur le revenu des salaires perçus par lui au titre de l'année 2009 et se rapportant à ses périodes d'activité salariée à l'étranger. Dès lors, c'est à tort que l'administration fiscale a remis en cause l'application de ce dispositif par M. et Mme A... au titre de leur revenu imposable au titre de l'année 2009 et a mis à leur charge les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu en litige ainsi que les majorations correspondantes.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A... sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande.
Sur les conclusions présentées par M. et Mme A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. et Mme A... et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1308247 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise en date du
22 septembre 2015 est annulé.
Article 2 : M. et Mme A... sont déchargés des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu mises à leur charge au titre de l'année 2009 ainsi que des majorations correspondantes, en ce qu'elles résultent de la remise en cause du bénéfice de l'exonération d'impôt prévue par les dispositions du I de l'article 81 A du code général des impôts.
Article 3 : L'État versera à M. et Mme A... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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N° 18VE03617