Par un jugement n° 1501923 du 18 juillet 2016, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
I°) Par une requête et des mémoires, enregistrés les 18 avril et 5 octobre 2016, et 18 septembre 2017 sous le numéro 16VE01171, la société LABORATOIRES LEURQUIN MEDIOLANUM, représentée par Me Zapf, avocat, demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :
1° d'annuler le jugement n° 1501923 du 29 février 2016 ;
2° de prononcer la réduction des montants de cotisation foncière des entreprises et de taxe pour frais de chambre de commerce et d'industrie en litige à hauteur de la somme de 38 461 euros ;
3° de mettre à la charge de l'État une somme de 5 000 euros au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- elle est fondée à rechercher l'annulation du jugement avant-dire droit rendu le 29 février 2016, dès lors que celui-ci a statué définitivement sur la méthode d'évaluation de la valeur locative de l'immeuble ;
- les dispositions de l'article 1499-0-A du code général des impôts ne sont pas applicables pour son immeuble industriel situé au 72, rue Louis Ampère à Neuilly-sur-Marne, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges ;
- conformément à la décision du Conseil d'État, n° 395410 Société Laboratoires Leurquin Mediolanum du 24 février 2017, le prix de revient d'un immeuble affecté à un usage industriel, au sens et pour l'application de l'article 1499 du code général des impôts, peut être regardé, lorsque l'acquisition intervient au terme du contrat de crédit-bail, comme correspondant à la différence entre, d'une part, la valeur du bien au moment de la signature de ce contrat, et d'autre part, le total des dotations aux amortissements qui auraient été enregistrées si le bien avait été acquis dès ce moment, au regard notamment des engagements hors bilan ; en l'espèce, la valeur du bien au moment de la signature du contrat se décompose entre, d'une part, le prix de revient des locaux acquis par voie de crédit bail le 15 mars 1988 et valorisés dans le patrimoine des bailleurs à la somme de 1 300 000 francs, soit 198 170, 73 euros, ainsi que celui des terrains à bâtir acquis par le même convention et valorisés dans le patrimoine des bailleurs à la somme de 2 200 000 francs ou 335 365, 85 euros, et d'autre part, le prix de revient des locaux construits après le 15 mars 1988 et acquis par voie de crédit-bail le 10 juillet 1990, qui s'élève à la somme de 19 228 502, 29 francs ou 2 931 366 euros. Compte tenu des dotations aux amortissements qui auraient été enregistrées entre la signature des deux conventions de crédit-bail et la date de levée de l'option, s'agissant d'immeubles industriels amortissables sur une durée de vingt ans, la valeur résiduelle de l'ensemble immobilier s'élevait, le 29 juin 2005, à la somme de 1 099 573 euros ; compte tenu de la valeur des aménagements, la valeur locative totale de l'ensemble au titre de l'année 2010 doit donc être évaluée à la somme de 101 645 euros, ce qui justifie le montant de la réduction demandée.
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II°) Par une requête et des mémoires enregistrés les 16 septembre 2016, 18 septembre 2017, et 26 avril et 6 juin 2018 sous le numéro 16VE02329, la société LABORATOIRES LEURQUIN MEDIOLANUM, représentée par Me Zapf, avocat, demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :
1° d'annuler le jugement n° 1501923 du 18 juillet 2016, ainsi que le jugement avant-dire droit du 29 février 2016 ;
2° de prononcer la réduction des montants de cotisation foncière des entreprises et de taxe pour frais de chambre de commerce et d'industrie en litige à hauteur de la somme de 38 461 euros ;
4° de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 50 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient, en dernier lieu, que :
- elle est fondée à interjeter appel du jugement dont elle conteste la méthode de calcul retenue ;
- conformément à la décision du Conseil d'État, n° 395410 Société Laboratoires Leurquin Mediolanum du 24 février 2017, le prix de revient d'un immeuble affecté à un usage industriel, au sens et pour l'application de l'article 1499 du code général des impôts, peut être regardé, lorsque l'acquisition intervient au terme du contrat de crédit-bail, comme correspondant à la différence entre, d'une part, la valeur du bien au moment de la signature de ce contrat, et d'autre part, le total des dotations aux amortissements qui auraient été enregistrées si le bien avait été acquis dès ce moment, au regard notamment des engagements hors bilan ; en l'espèce, la valeur du bien au moment de la signature du contrat se décompose entre, d'une part, le prix de revient des locaux acquis par voie de crédit bail le 15 mars 1988 et valorisés dans le patrimoine des bailleurs à la somme de 1 300 000 francs, soit 198 170, 73 euros, ainsi que celui des terrains à bâtir acquis par le même convention et valorisés dans le patrimoine des bailleurs à la somme de 2 200 000 francs ou 335 365, 85 euros, et d'autre part, le prix de revient des locaux construits après le 15 mars 1988 et acquis par voie de crédit-bail le 10 juillet 1990, qui s'élève à la somme de 19 228 502, 29 francs ou 2 931 366 euros. Compte tenu des dotations aux amortissements qui auraient été enregistrées entre la signature des deux conventions de crédit-bail et la date de levée de l'option, s'agissant d'immeubles industriels amortissables sur une durée de vingt ans, la valeur résiduelle de l'ensemble immobilier s'élevait, le 29 juin 2005, à la somme de 1 099 573 euros. Compte tenu de la valeur des aménagements, la valeur locative totale de l'ensemble au titre de l'année 2010 doit donc être évaluée à la somme de 101 645 euros, ce qui justifie le montant de la réduction demandée ;
- l'administration fiscale ne saurait, d'une part, remettre en cause la valorisation patrimoniale des biens acquis par voie de crédit-bail le 15 mars 1988 telle qu'elle ressort des stipulations de cette convention en se fondant exclusivement sur l'existence d'un emprunt dont rien n'établit qu'il avait été exclusivement consacré à la construction des immeubles faisant l'objet du crédit-bail ; elle n'est pas davantage fondée à majorer les prix d'acquisition qu'elle propose en prenant en compte l'évolution de l'indice des prix à la construction de l'INSEE, alors même que le terrain d'assiette et les immeubles en cause n'ont pu qu'être pollués du fait de l'exploitation industrielle de l'ensemble et qu'ils ont donc ainsi perdu une partie de leur valeur initiale ; d'autre part, rien ne justifie la remise en cause de l'application de la durée d'amortissement de vingt ans admise pour les immeubles affectés à un usage industriel, la qualification d'immeuble commercial ne pouvant uniquement se déduire de la seule circonstance que les immeubles édifiés en 1976 n'étaient pas totalement amortis en 1988.
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Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- le code général des impôts et le livre de procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique ;
- le rapport de M. Livenais, président assesseur,
- les conclusions de M. Huon, rapporteur public,
- et les observations de MeA..., substituant Me Zapf, avocat, représentant la société LABORATOIRES LEURQUIN MEDIOLANUM.
Considérant ce qui suit :
1. Les requêtes enregistrées sous les numéros 16VE01171 et 16VE02923 de la société LABORATOIRES LEURQUIN MEDIOLANUM présentent à juger des mêmes questions et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a donc lieu de les joindre pour y statuer par un même arrêt.
2. La société LABORATOIRES LEURQUIN MEDIOLANUM, qui exerce une activité de fabrication de spécialités pharmaceutiques, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité qui a porté sur l'ensemble des déclarations fiscales ou opérations concernant les exercices clos en 2009 et 2010. A l'issue de cette vérification, l'administration fiscale a notamment procédé au rehaussement de sa base d'imposition à la cotisation foncière des entreprises au titre de l'année 2010, à raison de la prise en compte de la valeur locative du bâtiment industriel situé au n° 72 de la rue Louis Ampère à Neuilly-sur-Marne (Seine-Saint-Denis), qui relève de la méthode d'évaluation prévue à l'article 1499 du code général des impôts. Le supplément de cotisation foncière des entreprises et de taxe pour frais de chambre de commerce et d'industrie en résultant pour l'année 2010, d'un montant de 40 490 euros, a été mis en recouvrement le 30 novembre 2012. La société LABORATOIRES LEURQUIN MEDIOLANUM a présenté, le 21 janvier 2014, une réclamation préalable tendant à la décharge de ces suppléments d'imposition, ainsi qu'à la réduction de la cotisation foncière des entreprises initialement mise à sa charge au titre de l'année 2010. Cette réclamation ayant été rejetée dans son intégralité, la société a demandé au Tribunal administratif de Montreuil tant la décharge de la cotisation supplémentaire que la réduction de la cotisation initiale de contribution foncière des entreprises et de taxe pour frais de chambre de commerce et d'industrie ainsi mises à sa charge au titre de l'année 2010. La SOCIETE LABORATOIRES LEURQUIN MEDIOLANUM fait appel, d'une part, du jugement n° 1501923 du 29 février 2016 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a procédé à un supplément d'instruction aux fins d'inviter la société requérante à lui communiquer le montant des loyers versés depuis la conclusion du contrat de crédit-bail, déduction faite des intérêts et, d'autre part, du jugement du 18 juillet 2016 par lequel cette même juridiction a rejeté sa demande tendant à la décharge des suppléments d'imposition et à la réduction des cotisations initiales mis à sa charge.
Sur l'étendue du litige :
3. Par décision du 21 mars 2018, postérieure à l'introduction de la requête, l'administration fiscale a accordé à la SOCIETE LABORATOIRES LEURQUIN MEDIOLANUM le dégrèvement, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires de cotisation foncière des entreprises mises à sa charge au titre de l'année 2010 à hauteur de la somme de 805 euros. Dans cette mesure, les conclusions aux fins de décharge présentées par la société requérante sont devenues sans objet. Il n'y a donc plus lieu d'y statuer.
Sur les fins de non-recevoir opposée par le ministre à la requête n° 16VE01171 :
4. En premier lieu, aux termes de l'article R. 811-6 du code de justice administrative : " Par dérogation aux dispositions du premier alinéa de l'article R. 811-2, le délai d'appel contre un jugement avant dire droit, qu'il tranche ou non une question au principal, court jusqu'à l'expiration du délai d'appel contre le jugement qui règle définitivement le fond du litige".
5. En vertu de ces dispositions, la recevabilité d'une requête dirigée contre un jugement avant dire droit prescrivant une mesure d'instruction complémentaire est limitée à la contestation de l'utilité de cette mesure et à la contestation des motifs de ce jugement qui ne sont pas étrangers à la mesure d'instruction ordonnée.
6. Le jugement avant dire droit attaqué a tranché au principal, dans son point 3, la question de la méthode de calcul de la valeur locative de l'immeuble sis 72, rue Louis Ampère à Neuilly-sur-Marne et, afin d'apprécier si la valeur locative ainsi évaluée était de nature à justifier, ou non, la cotisation foncière des entreprises mise à la charge de la société LABORATOIRES LEURQUIN MEDIOLANUM, a ordonné un supplément d'instruction en vue d'obtenir de la société requérante le montant des loyers versés depuis la conclusion du contrat de crédit-bail souscrit au titre de cet immeuble, déduction faite des intérêts. Dans ces conditions, l'administration fiscale n'est pas fondée à soutenir que la société appelante serait irrecevable à contester le jugement du 29 février 2016 au motif que le Tribunal administratif de Montreuil n'aurait pas épuisé sa compétence en se bornant à statuer sur les modalités d'évaluation de la valeur locative du local en cause, dès lors que ce point, s'il n'est pas repris dans le dispositif de ce jugement avant dire droit, n'est pas étranger au fondement de la mesure d'instruction prescrite par ce jugement.
7. En second lieu, l'article R. 196-3 du livre des procédures fiscales dispose : " Dans le cas où un contribuable fait l'objet d'une procédure de reprise ou de redressement de la part de l'administration des impôts, il dispose d'un délai égal à celui de l'administration pour présenter ses propres réclamations. ". L'article 174 du code général des impôts précise, pour sa part : " Les omissions ou les erreurs concernant la taxe professionnelle, la cotisation foncière des entreprises et la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises peuvent être réparées par l'administration jusqu'à l'expiration de la troisième année suivant celle au titre de laquelle l'imposition est due ".
8. Le contribuable à l'égard duquel l'administration met en oeuvre le pouvoir de réparation des erreurs ou omissions que lui confère l'article L. 174 précité du livre des procédures fiscales en matière de cotisation foncière des entreprises doit être regardé comme faisant l'objet d'une procédure de reprise au sens de l'article R. 196-3 du même livre, en application duquel il dispose, dès lors, pour présenter ses propres réclamations, d'un délai dont l'expiration coïncide avec celle du délai de répétition restant ouvert à l'administration elle-même. Dans le cadre de ce délai spécial, un redevable de la contribution foncière des entreprises peut ainsi présenter une réclamation relative non seulement aux cotisations supplémentaires mises à sa charge mais également à l'ensemble des cotisations primitives dues au titre de la même année dans les rôles de la même commune.
9. Ainsi qu'il a été dit au point 2, la société LABORATOIRES LEURQUIN MEDIOLANUM, par sa réclamation préalable du 21 janvier 2014, a demandé, tant la décharge des impositions supplémentaires mises à sa charge par l'administration fiscale au titre de l'année 2010 que la réduction de la cotisation foncière des entreprises primitive qui lui avait été assignée pour cette même année. Ces deux demandes, ayant trait à l'imposition de la société au titre d'un même ensemble immobilier situé dans la même commune, ont été formées dans le délai prévu par l'article R. 196-3 du livre des procédures fiscales. Par ailleurs, elles ont donné lieu, d'une part, à une décision de rejet opposée le 12 février 2015 par la direction de contrôle fiscal Ile-de-France Est à la demande en décharge des impositions supplémentaires et, d'autre part, à une décision implicite de rejet de la demande tendant à la réduction des impositions primitives en cause, née du silence gardé pendant plus de six mois sur cette demande par le service des impôts des entreprises de Neuilly-sur-Marne, à laquelle la direction de contrôle fiscal avait transmis l'instruction de cette partie de la réclamation préalable. Par suite, et contrairement à ce que fait valoir le ministre de l'action et des comptes publics, la société LABORATOIRES LEURQUIN MEDIOLANUM est recevable à demander, tant la décharge des suppléments de cotisation foncière des entreprises et de taxe pour frais de chambre de commerce et d'industrie mis à sa charge au titre de l'année 2010 que la réduction du montant de cotisation foncière des entreprises auquel elle a été primitivement assujettie au titre de cette année.
Sur le bien-fondé de la cotisation foncière des entreprises litigieuse :
10. Aux termes de l'article 1467 du code général des impôts dans sa rédaction applicable : " La cotisation foncière des entreprises a pour base la valeur locative des biens passibles d'une taxe foncière situés en France, (...) dont le redevable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle (...). / La valeur locative des biens passibles d'une taxe foncière est calculée suivant les règles fixées pour l'établissement de cette taxe. / Pour le calcul de l'impôt, la valeur locative des immobilisations industrielles définie à l'article 1499 est diminuée de 30 % (...). ". L'article 1499 du même code, applicable à l'acquisition en cause, dispose pour sa part : " la valeur locative des immobilisations industrielles passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties est déterminée à partir du prix de revient... ". L'article 324 AE de l'annexe III au code général des impôts, qui définit le prix de revient mentionné à l'article 1499, précise que ce prix " s'entend de la valeur d'origine pour laquelle les immobilisations doivent être inscrites au bilan en conformité de l'article 38 quinquies. (...) ". Enfin, l'article 324 AF de la même annexe dispose : " Lorsqu'il ne résulte pas des énonciations du bilan, le prix de revient est déterminé, en tant que de besoin, à partir de tous documents comptables ou autres pièces justificatives et à défaut par voie d'évaluation sous réserve du droit de contrôle de l'administration ".
11. Par ailleurs, en vertu de l'article 239 sexies du code général des impôts, le preneur d'un contrat de crédit-bail doit, au moment de la levée d'option, réintégrer dans ses bénéfices une fraction des loyers, qui diffère selon que le contrat a été conclu avant ou après le 1er janvier 1996. L'article 239 sexies C du même code précise, pour les contrats conclus avant le 31 décembre 1995 et pour ceux qui ont été conclus après cette date, que " le prix de revient des biens acquis à l'échéance d'un contrat de crédit bail est majoré " des sommes réintégrées en application, notamment, des dispositions de l'article 239 sexies et fixe les modalités d'amortissement de ces biens.
12. Il résulte de ces dernières dispositions que ces réintégrations extracomptables n'ont été prévues que pour le calcul des bases imposables à l'impôt sur les sociétés et à l'impôt sur le revenu dans les catégories des bénéfices industriels et commerciaux, des bénéfices agricoles et des bénéfices non commerciaux. En l'absence de renvoi explicite à ces dispositions dans les articles du code général des impôts relatifs à la détermination des valeurs locatives pour l'établissement de la taxe foncière sur les propriétés bâties, elles ne sauraient donc être regardées comme applicables à la détermination de la valeur locative d'immobilisations passibles de cette taxe. Cependant, le loyer versé par le preneur d'un contrat de crédit-bail a pour contrepartie, non seulement la disposition du bien, mais également le droit d'opter pour son acquisition au terme du crédit, constituant ainsi une modalité de financement du bien. Le prix de revient d'un tel bien, au sens et pour l'application de l'article 1499 du code général des impôts, lorsqu'il est acquis par l'exercice de l'option d'achat prévue par le contrat ne résulte ainsi pas uniquement de la valeur d'origine à laquelle il a alors été inscrit au bilan, laquelle correspond au seul montant acquitté au moment de la levée d'option, mais il comprend, en outre, la fraction hors intérêt des loyers prévus par le contrat et versés antérieurement à la levée d'option, qui excède le coût de la mise à disposition du bien. A défaut d'autres éléments, ce prix de revient peut, être regardé, lorsque l'acquisition intervient au terme du contrat de crédit-bail, comme correspondant à la différence entre, d'une part, la valeur du bien au moment de la signature de ce contrat, et d'autre part, le total des dotations aux amortissements qui auraient été enregistrées si le bien avait été acquis dès ce moment, au regard notamment des engagements hors bilan.
13. En premier lieu, il résulte de l'instruction que la valeur des terrains à bâtir et des immeubles acquis par voie de crédit-bail par la SOCIETE LABORATOIRES LEURQUIN MEDIOLANUM auprès des sociétés Sophia et Natexis Bail le 15 mars 1988 était évaluée dans le patrimoine des bailleurs, aux termes de l'article 11 du contrat de crédit-bail, aux sommes, respectivement, de 2 200 000 francs, soit 335 365, 85 euros, en ce qui concerne les terrains à bâtir et de 1 300 000 euros, soit 198 170, 73 euros, en ce qui concerne les immeubles édifiés à cette date. Ces sommes, en l'absence de documents comptables permettant d'apprécier le montant pour lesquels ces biens étaient inscrits à l'actif des bailleurs à la date de conclusion de l'accord de crédit-bail, doivent ainsi être regardées comme confirmées par une pièce justificative au sens et pour l'application de l'article 234 AF de l'annexe III au code général des impôts. L'administration fiscale ne peut remettre en cause une telle évaluation de la valeur de ces biens en faisant état de ce que le terrain d'assiette avait été acquis au cours de l'année 1976 pour un montant de 2 316 120 francs, faute pour elle de justifier que la valeur de ce terrain n'aurait subi aucune dépréciation entre la date de son acquisition et celle de la conclusion du contrat de crédit-bail. Elle ne peut pas davantage, pour contester cette évaluation, invoquer la circonstance selon laquelle les bailleurs ont contracté le 8 juin 1976 un emprunt de 5 500 000 francs auprès de la Caisse d'équipement des petites et moyennes entreprises ayant donné lieu, le même jour, à l'inscription d'une hypothèque conventionnelle de même montant, dans la mesure où aucun élément des dossiers ne permet d'établir que, comme le prétend l'administration fiscale, le montant de cet emprunt correspondrait totalement et exclusivement au coût de la construction des immeubles cédés par voie de crédit-bail à la société requérante le 15 mars 1988.
14. En outre, le prix de revient des immobilisations industrielles faisant l'objet du contrat de crédit-bail du 15 mars 1988 doit être évalué, ainsi qu'il a été dit, dans les conditions prévues par l'article 1499 du code général des impôts et les articles 234 AE et 234 AF de l'annexe III à ce code, qui ne réservent l'évaluation de ce prix de revient par voie d'évaluation directe qu'à défaut de recours possible aux autres méthodes d'évaluation comptable de ce prix. Dans ces conditions, l'administration fiscale ne saurait faire valoir qu'il y a lieu de faire application, pour déterminer le prix de revient des immobilisations en cause, de l'évolution de l'indice du coût de la construction de l'INSEE entre l'année 1976 et le premier trimestre de l'année 1988, dans la mesure où cet indice, qui ne retrace d'ailleurs que l'évolution du coût de la construction des seuls immeubles d'habitation, ne saurait être utilisé pour apprécier le prix de revient d'un immeuble industriel déterminé par une pièce justificative au sens de l'article 234 AF de l'annexe III u code général des impôts précité.
15. Enfin, l'administration fiscale ne conteste pas que le prix de revient des immeubles édifiés en extension des locaux acquis par voie de crédit-bail le 15 mars 1988 et qui ont fait, à leur tour, l'objet d'une acquisition en crédit-bail par la SOCIETE LABORATOIRES LEURQUIN MEDIOLANUM auprès des sociétés Sophia et Natexis Bail par convention conclue le 10 juillet 1990, doit être évalué, ainsi qu'il est prévu par cette seconde convention, à la somme de 19 228 502, 29 francs, soit 2 931 366 euros.
16. En second lieu, l'administration fiscale, qui n'a à aucun moment contesté que la valeur locative des biens litigieux doit être évaluée dans les conditions prévues par l'article 1499 du code général des impôts relatif aux " immobilisations industrielles ", ne peut, au seul motif que l'emprunt précité de 5 500 000 francs contracté en 1976 par les bailleurs n'aurait pas été intégralement remboursé en 1988, soit douze ans après l'acquisition des immeubles édifiés par ces bailleurs à compter de l'achat du terrain d'assiette, remettre en cause la qualification d'établissement industriel de ces immeubles ainsi que de ceux acquis par voie de crédit-bail par la SOCIETE LABORATOIRES LEURQUIN MEDIOLANUM le 10 juillet 1990 dans lesquels elle exerce une activité de production et de stockage de médicaments. Par suite, elle ne peut faire valoir que la durée d'amortissement de ces immeubles devrait être fixée à une durée supérieure à vingt ans.
17. Dans ces conditions, compte tenu de la valeur des différents éléments de l'immeuble litigieux et de la durée écoulée entre l'acquisition de ces derniers et la levée de l'option d'achat opérée par la SOCIETE LABORATOIRES LEURQUIN MEDIOLANUM, au cours de laquelle celle-ci aurait enregistré les dotations aux amortissements correspondant aux différents éléments composant l'ensemble immobilier industriel en cause, il y a lieu, comme le demande la société requérante, de fixer le prix de revient de l'immeuble industriel situé au 72, rue Ampère à Neuilly-sur-Marne à la somme de 1 099 573 euros. Par suite, il y a également lieu de retenir cette somme, ainsi que la valeur, non contestée, des agencements à prendre en compte pour le calcul de la valeur locative totale de cet immeuble, pour déterminer cette dernière.
18. Il résulte de tout ce qui précède que la SOCIETE LABORATOIRES LEURQUIN MEDIOLANUM est seulement fondée à demander l'annulation des jugements attaqués en ce que, d'une part, ils prévoient une méthode d'évaluation de la valeur locative de l'immeuble litigieux contraire au présent arrêt et, d'autre part, en ce qu'ils rejettent les conclusions aux fins de réduction du montant total de cotisation foncière des entreprises et de taxe pour frais de chambre de commerce et d'industrie à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2010, à hauteur de la somme correspondant à la différence entre la valeur locative retenue par l'administration fiscale, compte tenu du dégrèvement partiel intervenu en cours d'instance, pour l'établissement de cette imposition et celle résultant du présent arrêt, dans la limite de la somme de 38 461 euros demandée par la société requérante.
Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
19. Il y a lieu, en vertu de ces dispositions, de mettre à la charge de l'État le paiement à la SOCIETE LABORATOIRES LEURQUIN MEDIOLANUM d'une somme totale de 2 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.
DECIDE
Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer, à hauteur de 805 euros, sur les conclusions à fin de réduction de la cotisation foncière des entreprises à laquelle a été assujettie la SOCIETE LABORATOIRES LEURQUIN MEDIOLANUM au titre de l'année 2010.
Article 2 : Le jugement avant-dire droit n° 1501923 du Tribunal administratif de Montreuil du 29 février 2016 est annulé.
Article 3 : La SOCIETE LABORATOIRES LEURQUIN MEDIOLANUM est déchargée du montant de la cotisation foncière des entreprises et de la taxe pour frais de chambre de commerce et d'industrie à laquelle elle a été initialement assujettie au titre de l'année 2010 et des cotisations supplémentaires, en droits et pénalités, à ces impositions mises à sa charge au titre de cette même année, à hauteur de la somme correspondant à la différence entre la valeur locative retenue par l'administration fiscale pour l'établissement de cette imposition et celle résultant du présent arrêt, dans la limite de la somme, en droits, de 38 461 euros.
Article 4 : Le jugement n° 1501923 du Tribunal administratif de Montreuil du 18 juillet 2016 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 5 : L'État versera à la SOCIETE LABORATOIRES LEURQUIN MEDIOLANUM une somme totale de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 6 : le surplus des conclusions des requêtes de la SOCIETE LABOARTOIRES LEURQUIN MEDIOLANUM est rejeté.
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N° 16VE01171, 16VE02329