Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 2 août 2018 et 7 janvier 2020, la société KAWASAKI MOTORS EUROPE N.V., représentée par Mes Berger-Picq et B..., avocats, demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° de prononcer la décharge sollicitée ;
3° de mettre à la charge de l'État la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que le service lui a, à tort, refusé le bénéfice de l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée applicable aux services d'intermédiation dans l'octroi des crédits, prévue au a. du 1. de l'article 261 C du code général des impôts.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- la sixième directive 77/388/CEE du Conseil des Communautés européennes du 17 mai 1977, relative à l'harmonisation des législations des Etats membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires ;
- l'arrêt de la Cour de justice des communautés européennes du 21 juin 2007 (C-453/05) ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme A...,
- les conclusions de M. Huon, rapporteur public,
- et les observations de Me B..., avocate de la société KAWASAKI MOTORS EUROPE N.V.
Considérant ce qui suit :
1. La société KAWASAKI MOTORS EUROPE N.V., qui exerce une activité de production, distribution et fourniture de services en relation avec des motos, scooters, quads et jet skis, à travers un réseau de revendeurs établis notamment sur le territoire français, a sollicité la restitution de la taxe sur la valeur ajoutée qu'elle estime avoir collectée à tort en février 2013, janvier 2014 et mars 2015, à concurrence de, respectivement, 44 772, 45 271 et 42 069 euros, à raison de services d'intermédiation dans l'octroi de crédits fournis au département Viaxel de la SA CA Consumer Finance. Elle fait appel du jugement du 10 juillet 2018 par lequel le Tribunal administratif de Versailles, confirmant le rejet de sa réclamation préalable, a rejeté sa demande tendant à la restitution des droits de taxe sur la valeur ajoutée ainsi acquittés.
2. Aux termes de l'article 13 B de la sixième directive du conseil des communautés européennes du 17 mai 1977, les États membres exonèrent : " d. les opérations suivantes : / (...) / 2° la négociation et la prise en charge d'engagements, de cautionnements et d'autres sûretés et garanties ainsi que la gestion de garanties de crédits effectuée par celui qui a octroyé les crédits ". Aux termes de l'article 261 C du code général des impôts, pris pour la transposition de cette directive : " Sont exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée : / 1° Les opérations bancaires et financières suivantes : / a. L'octroi et la négociation de crédits, la gestion de crédits effectuée par celui qui les a octroyés, les prêts de titres effectués dans les conditions prévues aux articles L. 211-22 à L. 211-26 du code monétaire et financier et les pensions réalisées dans les conditions prévues par les articles L. 211-27 à L. 21134 du même code ; (...) ". Pour l'application de ces dispositions, les opérations de négociation s'entendent des opérations d'entremise par lesquelles une personne autre que l'une des parties au contrat fait le nécessaire pour que ces parties concluent effectivement un tel contrat, sans que le négociateur ait un intérêt propre quant à son contenu. Ne revêtent pas ce caractère les opérations qui ne sont pas assorties de prestations d'entremise visant à la conclusion individuelle d'un tel contrat.
3. Il résulte de l'instruction que la société KAWASAKI MOTORS EUROPE N.V. a conclu, le 24 février 2011, un contrat de coopération avec la SA CA Consumer Finance, département Viaxel, aux termes duquel la première, dite " Constructeur ", préconise à son réseau de distributeurs les services financiers de la seconde, dite " Financier " et la seconde apporte un service de financement des ventes aux clients finaux et des solutions de crédit adaptées pour les distributeurs.
4. La société KAWASAKI MOTORS EUROPE N.V. soutient que, dans ce cadre, elle est amenée à exercer des opérations de négociation de crédits au sens et pour l'application des dispositions de l'article 261 C précité du code général des impôts et que c'est donc, à tort, que ses services ont été taxés à la taxe sur la valeur ajoutée. Elle indique ainsi qu'elle participe activement à la commercialisation des produits de financement, d'une part, par l'organisation périodique de réunions entre la SA CA Consumer Finance, département Viaxel, et ses services commerciaux au cours desquelles sont définis ou ajustés tous les éléments qui participent à l'offre qui sera proposée au grand public en matière de taux, de durée de crédit et d'apport personnel et, d'autre part, par des campagnes de communication, auprès notamment de ses distributeurs, avec l'objectif constant qu'un crédit soit consenti par l'organisme de financement, et ce par le biais de publicités dans des journaux nationaux spécialisés, par la distribution d'affichettes ou d'affiches déclinant ces annonces aux concessionnaires pour communication en magasin, et par l'édition et l'envoi de brochures aux concessionnaires pour distribution en magasin. A cet égard, elle se prévaut de l'arrêt du 21 juin 2007 dit " Volker Ludwig contre Finanzamt Luckenwalde " (C-453/05), par lequel la Cour de justice des communautés européennes a admis, en son point 37., que " l'article 13, B, sous d), point 1, de la sixième directive ne s'oppose pas à ce que (...) le service de négociation de crédits se divise en deux prestations, l'une fournie par l'agent principal, (...), dans le cadre de la négociation avec les établissements financiers prêteurs, et l'autre par son sous-agent (...), dans le cadre de la négociation avec les emprunteurs ".
5. Toutefois, il résulte de l'instruction que, dans le cadre du contrat susmentionné, le rôle de la société KAWASAKI MOTORS EUROPE N.V. se limite à proposer " Le Financier (...) auprès de son réseau de distributeurs ", à " préconiser à ses distributeurs les produits du Financier (...) " et à prendre part à un comité de pilotage décrit comme un " comité commercial chargé du suivi " du contrat de partenariat ainsi qu'à une " réunion annuelle de concertation ", sans intervenir, comme elle le soutient, dans la détermination en amont des modalités de financement qui seront proposées aux clients finaux. Si la requérante indique que cette intervention aurait lieu lors de réunions qui ne sont pas décrites dans le contrat mais font partie de la " vie économique de la relation commerciale ", elle n'apporte aucun élément à l'appui de ses allégations de nature à en établir la réalité et, par suite, à justifier de l'existence d'une forme de " double négociation " des contrats de prêts à son niveau et au niveau de ses distributeurs. Dans ces conditions et alors même que sa rémunération serait basée sur un système d'intéressement aux résultats, l'activité de la société KAWASAKI MOTORS EUROPE N.V., dans le cadre du contrat susmentionné, ne peut s'analyser en une opération globale de négociation de crédits, ni même en une des prestations relevant du service de négociation de crédits au sens de l'arrêt Volker Ludwig contre Finanzamt Luckenwalde précité, exonérées de taxe sur la valeur ajoutée en application du a) du 1° de l'article 261 C du code général des impôts. Dès lors, c'est à bon droit que le ministre de l'action et des comptes publics a refusé de faire droit à sa demande de remboursement de taxe sur la valeur ajoutée.
6. Il résulte de tout ce qui précède que la société KAWASAKI MOTORS EUROPE N.V. n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande. Ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la société KAWASAKI MOTORS EUROPE N.V. est rejetée.
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N° 18VE02715