Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 11 avril 2017, la SOCIETE AIR FRANCE, représentée par Me Gravé, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement et la décision du ministre de l'intérieur du 11 juin 2015 ;
2° à titre subsidiaire, de ramener le montant de l'amende à une somme n'excédant pas 500 euros ;
3° de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La SOCIETE AIR FRANCE soutient que :
- les falsifications du visa n'étaient pas manifeste à l'oeil nu, d'ailleurs l'administration a produit des agrandissements et c'est à tort que les premiers juges ont retenu le caractère manifeste de cette falsification ;
- la mention dans la décision de ce qu'elle n'a pas émis d'observations de nature à mettre en cause le bien-fondé de la procédure et l'engagement de sa responsabilité manque en fait, dès lors qu'elle a produit des observations par lettre du 18 mai 2015 ;
- le montant de l'amende qui lui a été infligée est disproportionné.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le règlement (CE) n° 562/2006 du Parlement européen et du Conseil du 15 mars 2006 établissant un code communautaire relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes (code frontières Schengen) ;
- le code des transports ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Besson-Ledey,
- et les conclusions de Mme Rollet-Perraud, rapporteur public.
Sur la légalité de l'arrêté attaqué :
1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 6421-2 du code des transports : " Le transporteur ne peut embarquer les passagers pour un transport international qu'après justification qu'ils sont régulièrement autorisés à atterrir au point d'arrivée et aux escales prévues " ; qu'aux termes du 1er alinéa de l'article L. 625-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Est punie d'une amende d'un montant maximum de 5 000 euros l'entreprise de transport aérien ou maritime qui débarque sur le territoire français, en provenance d'un autre Etat, un étranger non ressortissant d'un Etat de l'Union européenne et démuni du document de voyage et, le cas échéant, du visa requis par la loi ou l'accord international qui lui est applicable en raison de sa nationalité. Est punie de la même amende l'entreprise de transport aérien ou maritime qui débarque, dans le cadre du transit, un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne et démuni du document de voyage ou du visa requis par la loi ou l'accord international qui lui est applicable compte tenu de sa nationalité et de sa destination " ; qu'aux termes de l'article L. 625-2 du même code : " Le manquement est constaté par un procès-verbal établi par un fonctionnaire appartenant à l'un des corps dont la liste est définie par décret en Conseil d'Etat. Copie du procès-verbal est remise à l'entreprise de transport intéressée. Le manquement ainsi relevé donne lieu à une amende prononcée par l'autorité administrative compétente. L'amende peut être prononcée autant de fois qu'il y a de passagers concernés. Son montant est versé au Trésor public par l'entreprise de transport. / L'entreprise de transport a accès au dossier et est mise à même de présenter ses observations écrites dans un délai d'un mois sur le projet de sanction de l'administration. La décision de l'autorité administrative, qui est motivée, est susceptible d'un recours de pleine juridiction. / L'autorité administrative ne peut infliger d'amende à raison de faits remontant à plus d'un an " ; enfin, qu'aux termes de l'article L. 625-5 du même code : " Les amendes prévues aux articles L. 625-1 (...) ne sont pas infligées : (...) 2° Lorsque l'entreprise de transport établit que les documents requis lui ont été présentés au moment de l'embarquement et qu'ils ne comportaient pas d'élément d'irrégularité manifeste " ;
2. Considérant qu'il résulte tant de ces dispositions, adoptées en vue de donner leur plein effet aux stipulations de l'article 26 de la convention de Schengen signée le 19 juin 1990, que de l'interprétation qu'en a donnée le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 92-307 DC du 25 février 1992, qu'elles font obligation aux transporteurs aériens de s'assurer, au moment des formalités d'embarquement, que les voyageurs ressortissants d'Etats non membres de la Communauté économique européenne, devenue l'Union européenne, sont en possession de documents de voyage leur appartenant, le cas échéant revêtus des visas exigés par les textes, non falsifiés et valides ; que si ces dispositions n'ont pas pour objet et ne sauraient avoir pour effet de conférer au transporteur un pouvoir de police aux lieu et place de la puissance publique, elles lui imposent de vérifier que l'étranger est muni des documents de voyage et des visas éventuellement requis et que ceux-ci ne comportent pas d'éléments d'irrégularité manifeste, décelables par un examen normalement attentif des agents de l'entreprise de transport ; qu'en l'absence d'une telle vérification, le transporteur encourt l'amende administrative prévue par les dispositions précitées ;
3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. A...B...a débarqué le 20 juillet 2014 à l'aéroport Roissy Charles-de-Gaulle du vol n° AF 889 en provenance de Kinshasa (RDC), muni d'un passeport congolais revêtu d'un visa Schengen que les services de la police aux frontières ont considéré comme manifestement contrefait ; que par la décision litigieuse du 11 juin 2015, le ministre de l'intérieur a infligé à la SOCIETE AIR FRANCE une amende de 5 000 euros pour avoir débarqué sur le territoire français un ressortissant étranger muni d'un document de voyage manifestement falsifié en ce que les mentions fixes intitulées " NOM, PRENOM " présentent un décalage et que la vignette visa présente une absence totale de la micro ligne " EUR ", située au dessous du numéro de visa dans la partie supérieure droite du document authentique ; que si la SOCIETE AIR FRANCE soutient que ces malfaçons n'étaient pas décelables à l'oeil nu et que le ministre a dû avoir recours à des agrandissements, il ressort des motifs de la décision en litige que ces malfaçons ont été, dans un premier temps, détectées à l'oeil nu par les services de la police aux frontières et que ce n'est que dans un second temps qu'il a été procédé à des agrandissements et annotations pour décrire les irrégularités ; qu'il résulte de l'instruction, et notamment de l'examen de la photocopie du visa litigieux, qui figure au dossier, que des signes visibles de falsification, à savoir le décalage des mentions fixes " NOM-PRENOM " et l' absence de la micro-ligne " EUR " située au dessous du numéro de visa dans la partie supérieure droite d'un document authentique, étaient manifestes et susceptibles d'être décelés par un examen normalement attentif d'un agent d'embarquement, sans recourir à du matériel spécialisé ou à des agrandissements ; qu'il s'ensuit que le moyen tiré de l'erreur d'appréciation doit être écarté ;
4. Considérant que la décision en litige fait mention des observations présentées par la SOCIETE AIR FRANCE le 18 mai 2015 ; que le moyen tiré de ce que la décision en cause aurait indiqué qu'elle n'a pas émis d'observations manque en fait ;
5. Considérant qu'il appartient au juge administratif, saisi d'un recours de pleine juridiction contre la décision infligeant une amende sur le fondement des dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de statuer sur le bien-fondé de la décision contestée et de réduire, le cas échéant, le montant de l'amende infligée en tenant compte de l'ensemble des circonstances de l'espèce ;
6. Considérant que, compte tenu du caractère aisément décelable des irrégularités relevées et en l'absence de toute circonstance particulière invoquée par la SOCIETE AIR FRANCE, cette dernière n'est pas fondée à demander la réduction du montant de l'amende qui lui a été infligée par la décision contestée ;
7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SOCIETE AIR FRANCE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande ; que, sa requête doit dès lors être rejetée y compris, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SOCIETE AIR FRANCE est rejetée.
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N° 17VE01153