Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 7 avril 2021, M. A..., représenté par Me Traoré, avocat, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié " sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
3°) de mettre à la charge de de l'Etat la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le tribunal a méconnu le principe du contradictoire en ne prenant pas en compte ses observations formulées par mémoire du 25 février 2021 en réponse au courrier du tribunal relatif à une substitution de base légale ;
- le tribunal a statué infra petita en ne répondant pas au moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 5221-33 du code du travail ;
- il peut prétendre à la délivrance d'un titre de séjour en vertu de l'article 3 de l'accord franco-tunisien au regard de son contrat de travail signé le 21 octobre 2020, soit antérieurement à la date de notification de l'arrêté du 3 août 2020, intervenue le 27 novembre 2020 ;
- l'obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour.
Par un mémoire en défense, enregistré le 30 juillet 2021, le préfet de l'Essonne conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.
Vu :
- le jugement attaqué ;
- les autres pièces du dossier ;
Vu :
- l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code du travail ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Mauny a été entendu au cours de l'audience publique.
1. M. A..., ressortissant tunisien né le 22 décembre 1970, a déclaré, sans en justifier, être entré en France en avril 2011. Il a obtenu un titre de séjour en qualité de salarié, valable du 12 mars 2018 au 11 mars 2019, après avoir obtenu une autorisation de travail au regard de son contrat avec la société Classique coiffure. Il a sollicité le renouvellement de son titre en se prévalant d'un nouveau contrat de travail avec la société RJ. New Shop. La direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi a émis le 6 août 2019 un avis défavorable à la demande de M. A..., la société ne lui ayant pas adressé les documents qui lui ont été réclamés. Par un arrêté du 3 août 2020, le préfet de l'Essonne a rejeté la demande de renouvellement de M. A... et a assorti sa décision d'une obligation de quitter le territoire français. Par un jugement du 15 mars 2021, dont M. A... demande l'annulation, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 3 août 2020.
Sur la régularité du jugement :
2. Aux termes de l'article R. 611-7 du code de justice administrative : " Lorsque la décision lui paraît susceptible d'être fondée sur un moyen relevé d'office, le président de la formation de jugement ou le président de la chambre chargée de l'instruction en informe les parties avant la séance de jugement et fixe le délai dans lequel elles peuvent, sans qu'y fasse obstacle la clôture éventuelle de l'instruction, présenter leurs observations sur le moyen communiqué. ".
3. Si M. A... soutient que le tribunal a méconnu le principe du contradictoire en ne tenant pas compte des conclusions formulées dans son mémoire du 25 février 2021 adressé en réponse au courrier du 18 février 2021 par lequel le tribunal a informé les parties qu'il était susceptible de substituer les stipulations de l'article 3 de l'accord franco-tunisien susvisé aux dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il ressort des pièces du dossier que ledit mémoire est intitulé " Mémoire complémentaire " et qu'il ne comporte aucune observation en réponse au moyen d'ordre public communiqué par le tribunal, qu'il ne mentionne d'ailleurs même pas. Il en ressort également que ce mémoire, visé par le tribunal, a été enregistré postérieurement à la clôture de l'instruction intervenue le 5 février 2021. Enfin, si les parties ont été invitées à formuler jusqu'à la date de l'audience des observations sur le moyen d'ordre public communiqué par le tribunal, les dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative n'ont pas pour effet de rouvrir l'instruction mais uniquement de permettre aux parties de formuler ces observations sur le seul moyen communiqué en dépit d'une clôture d'instruction. Il suit de là que M. A... n'est pas fondé à soutenir que le tribunal aurait méconnu le principe du contradictoire en n'analysant pas son mémoire du 25 février 2021.
4. M. A... soutient également que le tribunal a omis de répondre à son moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 5221-33 du code du travail, aux termes duquel, dans sa rédaction alors en vigueur : " Par dérogation à l'article R. 5221-32, la validité de l'autorisation de travail mentionnée au 8° de l'article R. 5221-3 est prorogée d'un an lorsque l'étranger se trouve involontairement privé d'emploi à la date de la première demande de renouvellement.(...) ". Il ressort toutefois des écritures du requérant en première instance que cette disposition a été invoquée à l'appui du moyen de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de l'accord franco-tunisien susvisé, auquel le tribunal a répondu. Au surplus, M. A... n'entrant pas dans le champ de ces dispositions puisqu'il travaillait à la date de sa première demande de renouvellement de son titre de séjour salarié, le tribunal n'était pas tenu de répondre à un tel moyen. Le moyen tiré de l'omission de réponse à ce moyen doit donc être écarté.
Sur le bien-fondé du jugement :
5. L'article 3 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988, qui soumet la délivrance aux tunisiens d'un titre de séjour portant la mention " salarié " à la présentation d'un contrat
de travail visé par les autorités compétentes, renvoie ainsi pour son application, à défaut
de stipulations spécifiques prévues dans cet accord, aux dispositions du code du travail relatives aux conditions de délivrance des autorisations de travail. Aux termes de l'article R. 5221-32
du code du travail : " Le renouvellement d'une autorisation de travail mentionnée à
l'article R. 5221-11 est sollicité dans le courant des deux mois précédant son expiration. /
La demande de renouvellement est accompagnée de documents dont la liste est fixée par arrêté conjoint des ministres chargés de l'immigration et du travail. / L'autorisation de travail est renouvelée dans la limite de la durée du contrat de travail restant à courir ou de la mission restant à accomplir en France ". Aux termes de l'article R. 5221-34 de ce code :
" Le renouvellement d'une des autorisations de travail mentionnées aux articles R. 5221-32 et
R. 5221-33 peut être refusé en cas de non-respect des termes de l'autorisation par l'étranger ou en cas de non-respect par l'employeur : / 1° De la législation relative au travail ou
à la protection sociale ; / 2° Des conditions d'emploi, de rémunération ou de logement fixées
par cette autorisation ".
6. M. A..., qui ne remet pas en cause les motifs retenus par le tribunal pour rejeter sa demande d'annulation de l'arrêté du 3 août 2020, à savoir qu'il n'avait pas soumis à la validation de l'administration compétente le contrat de travail qu'il avait signé avec la SASU RJ New shop coiffure, que les documents réclamés à cette société par le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi ne lui ont pas été retournés et qu'il ne justifiait d'aucun contrat de travail à la date de la décision attaquée, se borne à soutenir devant la cour que l'administration aurait dû prendre en compte le contrat de travail qu'il a signé le 21 octobre 2020 puisqu'il serait antérieur à la date à laquelle l'arrêté du 3 août 2020 a été porté à sa connaissance, soit le 27 novembre 2020. Toutefois, dès lors que la légalité d'une décision administrative s'apprécie à la date de sa signature et non à celle de sa notification, le moyen soulevé par M. A... ne peut qu'être écarté.
7. Enfin, dès lors que le présent arrêt écarte le moyen soulevé à l'encontre de la décision portant refus de renouvellement de titre de séjour, M. A... n'est pas fondé à se prévaloir de son illégalité par la voie de l'exception à l'appui de ses conclusions à fin d'annulation de l'obligation de quitter le territoire français.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement du tribunal administratif de Versailles du 15 mars 2021. Il y a lieu de rejeter, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction.
Sur les frais liés au litige :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Les conclusions présentées à ce titre par M. A... doivent donc être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Essonne.
Délibéré après l'audience du 23 septembre 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Albertini, président de chambre,
- M. Mauny, président-assesseur,
- Mme Moulin-Zys, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 octobre 2021.
Le rapporteur,
O. MAUNY Le président,
P.- L. ALBERTINI
La greffière,
F. PETIT-GALLAND
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme
La greffière,
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N° 21VE01001