Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 13 mai 2019, régularisée le 20 mai 2019, un mémoire enregistré le 21 septembre 2020 et des mémoires à fin de production de pièces, enregistrés les 3 juin 2019, 21 septembre 2020 et les 12 et 14 octobre 2020, M. E..., représenté par Me B..., avocat, demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :
1° d'annuler ce jugement ;
2° d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté en tant qu'il porte refus d'admission au séjour et obligation de quitter le territoire français ;
3° d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour portant autorisation de travailler.
Il soutient que :
- la décision de refus de séjour est insuffisamment motivée, souffre d'un défaut d'examen particulier et d'une erreur de fait ;
- la décision de refus de séjour et l'obligation de quitter le territoire français méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, celles de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant et sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation ;
- en écartant le moyen tiré de la violation de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant, les premiers juges ont méconnu l'autorité de la chose jugée attachée au jugement n° 1802497 du Tribunal administratif de Montreuil du 25 avril 2018 ;
- la décision fixant le délai de départ volontaire à quinze jours est insuffisamment motivée ;
- cette décision est également disproportionnée au regard de sa situation personnelle et familiale.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme A...,
- et les observations de Me B... pour M. E....
Considérant ce qui suit :
1. M. C... E..., ressortissant serbe né en 1974, a fait l'objet d'un arrêté du 12 mars 2018 par lequel le préfet du Val-d'Oise l'a obligé à quitter le territoire sans délai, a fixé le pays de renvoi et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans. Cet arrêté a été annulé par le jugement n° 1802497 du Tribunal administratif de Montreuil en date du 25 avril 2018, devenu définitif, lequel a également enjoint au préfet de procéder au réexamen de la demande dans un délai de deux mois. En exécution de ce jugement, le préfet de la Seine-Saint-Denis a, par une décision du 30 janvier 2019, rejeté la demande d'admission au séjour de M. E..., lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de quinze jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être renvoyé. M. E... relève appel du jugement du 9 mai 2019 par lequel D... administratif de Montreuil a annulé la décision par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis lui a accordé un délai de départ volontaire d'une durée de quinze jours et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.
Sur la décision portant refus de séjour :
2. En premier lieu, M. E... reprend en appel, en des termes identiques, les moyens, soulevés en première instance et tirés de l'insuffisance de motivation et du défaut d'examen particulier. Toutefois, ainsi que l'ont retenu à bon droit les premiers juges, la décision contestée comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde et, contrairement à ce que soutient le requérant, la circonstance que ses enfants soient scolarisés en France y a été mentionnée et a ainsi fait l'objet d'un examen par le préfet. Il suit de là que ces moyens doivent être écartés pour ces motifs et par adoption des motifs retenus à bon droit par D... administratif aux points 3 et 4 du jugement attaqué. Par ailleurs, M. E... reprend également en appel, en des termes identiques, le moyen tiré de l'erreur de fait de l'arrêté qui a retenu la date de son entrée en France au 21 juillet 2015 alors qu'il soutient y résider depuis 2011. Il y a toutefois lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, qui ont relevé que cette assertion n'était que la reprise des déclarations du requérant relatives à la date de son entrée en France.
3. En deuxième lieu, M. E... soutient que la décision contestée méconnaît l'autorité de la chose jugée qui s'attache au jugement susmentionné du Tribunal administratif de Montreuil du 25 avril 2018 annulant la mesure d'éloignement dont il avait fait l'objet le 12 mars 2018 au motif de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant. Toutefois, l'autorité absolue de la chose jugée qui s'attache à ce jugement et au motif qui en constitue le soutien nécessaire, si elle doit faire obstacle à ce que puisse être jugée légale toute nouvelle mesure d'éloignement prise pour l'exécution de la décision du 12 mars 2018, n'impose pas par elle-même que le juge saisi de conclusions directes contre la décision du 30 janvier 2019 de refus de délivrance de titre de séjour prise à l'issue d'un réexamen, par le préfet de la Seine-Saint-Denis, de la situation de l'intéressé, en prononce l'annulation pour excès de pouvoir. Ainsi, M. E... n'est pas fondé à soutenir qu'en regardant la décision du 30 janvier 2019 qui lui était déférée comme ne méconnaissant pas les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant, D... administratif de Montreuil aurait méconnu, dans son jugement attaqué du 9 mai 2019, l'autorité du jugement du 25 avril 2018.
4. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " et aux termes de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent des enfants, qu'elles soient le fait (...) des tribunaux, des autorités administratives (...), l'intérêt supérieur des enfants doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces dernières stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.
5. M. E... soutient qu'il démontre sa présence habituelle et continue depuis 2011 en France où il a obtenu, en décembre 2018, un contrat à durée indéterminée en qualité de chauffeur-livreur, et qu'il justifie de liens familiaux intenses et stables avec son épouse, avec laquelle il est marié depuis 2003 et qui l'a rejoint en 2015 avec leurs deux enfants mineurs nés en 2003 et en 2005, ces derniers, en particulier l'aîné, poursuivant une excellente scolarité qui témoigne d'efforts soutenus d'insertion. Il ressort toutefois des pièces du dossier que l'insertion professionnelle du requérant, qui établit sa présence continue en France à compter de 2014, est extrêmement récente et que, nonobstant la réussite scolaire de ses enfants, M. E... ne fait valoir aucun élément faisant obstacle à ce que la cellule familiale se reconstitue hors de France avec son épouse, qui se trouve également en situation irrégulière et leurs deux enfants, qui ont vécu jusqu'en 2015 dans leur pays d'origine, où lui-même a vécu, à tout le moins, jusqu'à l'âge de trente-sept ans. Par suite, la décision contestée n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise et n'a pas davantage méconnu l'intérêt supérieur de ses deux enfants. Les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de celles de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doivent donc être écartés. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation doit également être écarté.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
6. Les moyens tirés de ce que l'obligation de quitter le territoire français prise à l'encontre de M. E... méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés pour les motifs déjà exposés au point 5 du présent arrêt.
7. Il résulte de tout ce qui précède que M. E... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, D... administratif de Montreuil a rejeté les conclusions de sa demande autres que celles auxquelles il a été fait droit par l'article 1er de ce jugement. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ainsi que celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. E... est rejetée.
N° 19VE01739 2