Par un jugement n° 1504895 du 28 novembre 2017, le tribunal administratif de Versailles a condamné solidairement le centre hospitalier Sud Francilien (CHSF) et la société hospitalière d'assurances mutuelles (SHAM) à verser à la jeune B..., représentée par ses parents, une somme de 109 379,96 euros ainsi que, si l'intéressée vit au domicile de ses parents ou d'un membre de sa famille, une rente trimestrielle au taux horaire de 14,50 euros calculée, en retenant 103 jours par trimestre, sur la base d'une assistance de 8 heures par jour sept jours sur sept, et, si l'intéressée vit seule, une rente trimestrielle au même taux horaire, sur la base d'une assistance de 8 heures par jour, sous déduction, le cas échéant, des sommes versées au titre de la prestation de compensation du handicap, correspondant à un besoin d'aides humaines, qu'il appartiendra à l'intéressée de porter à la connaissance du centre hospitalier, précisant que cette rente sera, en cas de placement de l'intéressée dans un établissement, versée au prorata du nombre d'heures passées à domicile et que son versement interviendra par trimestre échu, avec revalorisation par application des coefficients prévus à l'article L. 434-17 du code de la sécurité sociale et déduction de 50 % compte tenu du taux de perte de chance. Il a également condamné solidairement le centre hospitalier Sud Francilien et la société hospitalière d'assurances mutuelles à verser à Mme G... A... D... une somme de 23 490,85 euros et à verser à M. F... A... D... une somme de 10 000 euros. Enfin, le tribunal a condamné le centre hospitalier Sud Francilien (CHSF) à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Essonne une somme de 5 024,90 euros.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 5 février 2018 et des mémoires complémentaires enregistrés le 5 mars 2018, le 29 août 2018, le 19 septembre 2018, le 19 juin 2019 et le 5 décembre 2019, le centre hospitalier Sud Francilien (CHSF) et la société hospitalière d'assurances mutuelles (SHAM), représentés par Me Le Prado, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de rejeter les conclusions de la demande de M. et Mme A... D..., ainsi que les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Essonne ;
3°) à titre subsidiaire, de réduire les sommes mises à leur charge.
Ils soutiennent que :
- la responsabilité du centre hospitalier n'est pas engagée dès lors qu'aucune faute ne peut lui être reprochée, ni dans l'information de l'intéressée sur les risques relatifs à la tentative d'accouchement par voie basse après césarienne et les risques relatifs à la césarienne programmée, ni dans la prise en charge de l'accouchement de Mme A... D... ;
- le taux de perte de chance de 50 % retenu par les premiers juges à raison du défaut d'information est surévalué ;
- les préjudices réparés par le jugement attaqué ont été surévalués.
............................................................................................
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de la sécurité sociale ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme C...,
- les conclusions de Mme Margerit, rapporteur public,
- et les observations de Me E..., pour le CHSF et la SHAM.
Une note en délibéré présentée pour le centre hospitalier Sud Francilien (CHSF) et la société hospitalière d'assurances mutuelles (SHAM) a été enregistrée le 22 janvier 2021.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A... D..., enceinte de son deuxième enfant, a été admise en urgence au centre hospitalier Sud Francilien (CHSF) le 28 juillet 2012 en raison de contractions régulières. L'intéressée a été placée en salle de travail à 21 heures en vue d'un accouchement par voie basse. Appelé par la sage-femme en raison d'un rythme cardiaque foetal pathologique, le médecin obstétricien a diagnostiqué une rupture utérine et a décidé, à 22h28, de procéder à une césarienne en urgence. L'enfant est né à 22 heures 49 en état de mort apparente et a été réanimé. Toutefois, il a été constaté, au service de réanimation néonatale, qu'elle présentait une encéphalopathie sévère précoce. Un examen d'imagerie par résonance magnétique (IRM) a révélé, neuf jours plus tard, une atteinte des noyaux gris centraux.
2. Les consorts A... D... ont saisi le 24 octobre 2012 la commission régionale de conciliation et d'indemnisation d'Ile-de-France (CRCI). Au regard des conclusions des experts qu'elle a désignés, la commission régionale de conciliation et d'indemnisation d'Ile-de-France a conclu, par un avis du 7 janvier 2014, à un défaut d'information à la charge du médecin ayant pris en charge l'accouchement de Mme A... D..., constitutif d'une faute de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier Sud Francilien, qui a généré une perte de chance pour Mme A... D... de solliciter la réalisation d'une césarienne programmée de 50 % et a invité le centre hospitalier à formuler une offre d'indemnisation à M. et Mme A... D... en réparation des préjudices énumérés dans l'avis. La société hospitalière d'assurances mutuelles, assureur de l'établissement, ayant refusé toute indemnisation, M. et Mme A... D... ont, par lettre du 2 septembre 2014, sollicité la substitution de l'Office national des infections nosocomiales, des infections iatrogènes et des accidents médicaux (ONIAM) à l'assureur du centre hospitalier. Par une lettre du 2 octobre 2014, l'ONIAM a refusé de se substituer à l'assureur du centre hospitalier et de leur présenter une offre d'indemnisation. Mme A... D... et son époux, agissant tant en leur nom personnel qu'en qualité de représentants de leur fille mineure B..., ont demandé au tribunal administratif de Versailles de condamner solidairement le centre hospitalier Sud Francilien et la société hospitalière d'assurances mutuelles à leur verser une somme totale de 1 016 454,05 euros en réparation des préjudices qu'ils estiment avoir subis. Le centre hospitalier Sud Francilien et la société hospitalière d'assurances mutuelles relèvent appel du jugement du 28 novembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Versailles a partiellement fait droit à la demande de M. et Mme A... D.... Par la voie de l'appel incident, M. et Mme A... D... demandent la réformation du jugement et l'augmentation des sommes qui leur sont dues. Par la voie de l'appel incident, la caisse primaire d'assurance maladie de l'Essonne demande également la réformation du jugement en tant qu'il a limité le montant de la somme devant lui être versée par le centre hospitalier Sud Francilien et la condamnation dudit établissement à lui verser la somme provisoire de 10 823,02 euros, avec intérêts de droit, au titre de l'indemnisation des dépenses de santé et de transport actuelles, ou, à tout le moins, la somme de 5 411,50 euros avec intérêts de droit et le remboursement des dépenses de santé et de transport en lien avec le handicap de l'enfant B..., non connues à ce jour ou susceptibles d'être servies ultérieurement, soit intégralement, soit, à tout le moins, à concurrence de 50 %.
Sur la responsabilité :
En ce qui concerne les fautes commises par le centre hospitalier dans la prise en charge de l'accouchement de Mme A... D... :
3. Les consorts A... D... peuvent être regardés comme soulevant le moyen tiré de la faute commise par le centre hospitalier dans la prise en charge de l'accouchement de Mme A... D.... Il résulte toutefois du rapport d'expertise diligenté par la commission de conciliation et d'indemnisation que le comportement de l'équipe médicale dans l'établissement du diagnostic de la rupture utérine, l'organisation et le fonctionnement du service notamment la surveillance du travail par la sage-femme qui a correctement interprété le rythme cardiaque foetal (RCF), ont été conformes aux règles de l'art et aux données acquises de la science à l'époque du fait générateur. Ledit rapport relève qu'avant la bradycardie constatée à 22 h 20, qui témoigne de la rupture utérine, il n'y avait pas d'indication à prendre l'avis du senior de garde, qu'il n'y a eu ni douleur suspecte au niveau de la cicatrice, les douleurs ayant été soulagées à 22 heures par l'analgésie péridurale, ni métrorragie qui aurait pu faire évoquer une pré-rupture. Cela est confirmé par l'expertise du professeur Sagot, qui conclut qu'il n'existe pas de retard dans le diagnostic de rupture utérine, une bradycardie foetale sévère en cours ou en fin de travail, dans un contexte d'utérus cicatriciel, éventuellement accompagnée de la disparition des contractions utérines qui ne peut, à elle seule, conduire à un tel diagnostic, étant la seule anomalie du rythme cardiaque foetal très fortement associée au diagnostic de rupture utérine. Il s'ensuit que les consorts A... D... ne sont pas fondés à soutenir qu'une faute serait imputable au centre hospitalier dans la prise en charge de l'accouchement de Mme A... D....
En ce qui concerne le manquement du centre hospitalier à son devoir d'information :
4. Aux termes de l'article L. 1111-2 du code de la santé publique : " Toute personne a le droit d'être informée sur son état de santé. Cette information porte sur les différentes investigations, traitements ou actions de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu'ils comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les conséquences prévisibles en cas de refus. (...) Cette information incombe à tout professionnel de santé dans le cadre de ses compétences et dans le respect des règles professionnelles qui lui sont applicables. Seules l'urgence ou l'impossibilité d'informer peuvent l'en dispenser. (...) En cas de litige, il appartient au professionnel ou à l'établissement de santé d'apporter la preuve que l'information a été délivrée à l'intéressé dans les conditions prévues au présent article. Cette preuve peut être apportée par tout moyen. ".
5. Il résulte de l'article L. 1111-2 du code de la santé publique (CSP) que doivent être portés à la connaissance du patient, préalablement au recueil de son consentement à l'accomplissement d'un acte médical, les risques connus de cet acte qui, soit présentent une fréquence statistique significative, quelle que soit leur gravité, soit revêtent le caractère de risques graves, quelle que soit leur fréquence. En cas de manquement à cette obligation d'information, si l'acte de diagnostic ou de soin entraîne pour le patient, y compris s'il a été réalisé conformément aux règles de l'art, un dommage en lien avec la réalisation du risque qui n'a pas été porté à sa connaissance, la faute commise en ne procédant pas à cette information engage la responsabilité de l'établissement de santé à son égard, pour sa perte de chance de se soustraire à ce risque en renonçant à l'opération. Il n'en va autrement que s'il résulte de l'instruction, compte tenu de ce qu'était l'état de santé du patient et son évolution prévisible en l'absence de réalisation de l'acte, des alternatives thérapeutiques qui pouvaient lui être proposées ainsi que de tous autres éléments de nature à révéler le choix qu'il aurait fait, qu'informé de la nature et de l'importance de ce risque, il aurait consenti à l'acte en question. La circonstance que l'accouchement par voie basse constitue un événement naturel et non un acte médical ne dispense pas les médecins, dès lors, de l'obligation de porter, le cas échéant, à la connaissance de la femme enceinte les risques qu'il est susceptible de présenter eu égard notamment à son état de santé, à celui du foetus ou à ses antécédents médicaux, et les moyens de les prévenir. En particulier, en présence d'une pathologie de la mère ou de l'enfant à naître ou d'antécédents médicaux entraînant un risque connu en cas d'accouchement par voie basse, l'intéressée doit être informée de ce risque ainsi que de la possibilité de procéder à une césarienne et des risques inhérents à une telle intervention.
6. Le centre hospitalier Sud Francilien soutient qu'il n'a pas manqué à son obligation d'information et qu'ainsi sa responsabilité ne saurait être engagée de ce fait. D'une part, le centre hospitalier produit une expertise du professeur Sagot, qui affirme que l'information relative aux deux modalités de naissance possibles, la césarienne programmée ou l'épreuve dynamique en vue d'une tentative d'accouchement par voie basse et aux risques que chacune comporte, a bien été délivrée à Mme A... D..., au regard d'un faisceau d'éléments permettant d'y conclure. Toutefois, les circonstances que les mentions " utérus cicatriciel " et " épreuve utérine acceptée " figurent au dossier et que le protocole du centre hospitalier prévoit une telle information, de même que le professionnalisme de la gynécologue dans le suivi prénatal de la grossesse de Mme A... D..., lors des consultations des 2 et 9 juillet 2012, ne suffisent pas à établir de façon probante la réalité de la délivrance de ces informations sur les risques, formellement contestée par Mme A... D... qui ajoute que s'agissant de la consultation du 2 juillet 2012, elle était seulement accompagnée de Mme H... A... D..., qui atteste qu'il n'a pas été question lors de l'entretien de risques liés à l'accouchement, alors que la gynécologue affirmait a posteriori, au sujet de la même consultation, avoir vu " la patiente avec son mari ". D'autre part, s'il est constant que Mme A... D... a été négligente dans le suivi de sa grossesse, il ne résulte pas plus de l'instruction, compte tenu du fait qu'une deuxième césarienne, acte courant, ne l'empêchait pas d'avoir d'autres enfants, des risques majeurs pour l'enfant en cas de rupture utérine, et du fait que l'intéressée, qui au demeurant a accouché de son troisième enfant par césarienne, allègue que si elle avait été informée desdits risques elle aurait demandé à faire pratiquer une césarienne programmée, qu'informée de la nature et de l'importance de ce risque, Mme A... D... aurait consenti à une tentative d'accouchement par voie basse. Par suite, le CHSF n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal a retenu qu'il avait manqué à son obligation d'information et que ce manquement engageait sa responsabilité pour une perte de chance.
Sur les préjudices des consorts A... D... :
En ce qui concerne le taux de perte de chance :
7. Il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise amiable, que le risque de rupture utérine lors d'une tentative d'accouchement par voie basse après césarienne est dit " significativement augmenté par rapport à une césarienne programmée " et que l'expert a conclu que le défaut d'information sur ce risque, ainsi que le défaut d'information des risques spécifiques d'une césarienne, ont généré une perte de chance pour Mme A... D... d'éviter la réalisation du dommage de 50 %. Contrairement à ce qu'allègue le centre hospitalier, le caractère exceptionnel du risque, les risques de complication d'une césarienne pour les grossesses futures et le rapport bénéfices/risques défavorable à la mère ne suffisent pas à contredire l'appréciation portée sur ce point par le tribunal administratif, qui a considéré, à bon droit, que le taux de perte de chance de 50 %, tel que fixé par le rapport d'expertise, pouvait être retenu d'autant que Mme A... D... allègue que si elle avait été informée desdits risques, elle aurait demandé à faire pratiquer une césarienne programmée et qu'au demeurant celle-ci a accouché de son troisième enfant par césarienne.
En ce qui concerne les préjudices à caractère patrimonial :
S'agissant des frais de santé :
8. D'une part, le centre hospitalier Sud Francilien et la société hospitalière d'assurances mutuelles ne contestent pas que les consorts A... D... ont effectué des dépenses liées à des frais pharmaceutiques et de consultations restées à leur charge pour un montant de 773,05 euros et les intéressés justifient aussi, par des pièces nouvelles produites en appel, avoir exposé la somme de 12,90 euros pour des pansements orthoptiques. En revanche, les consorts A... D... ne justifient pas avoir exposé les frais supplémentaires relatifs à des séances de rééducation, à un bilan en ergothérapie et à une prise en charge en psychomotricité, pour lesquels ils se bornent encore en appel à produire des devis estimatifs. D'autre part, la caisse primaire d'assurance maladie de l'Essonne établit avoir exposé la somme de 10 823,02 euros, en produisant une fiche de débours au titre des frais médicaux, des frais pharmaceutiques et des frais d'appareillage ainsi qu'une attestation d'imputabilité détaillée, faisant état du lien de causalité entre lesdits débours et le dommage. En revanche, elle n'établit pas la réalité des dépenses de santé éventuelles dont elle demande réparation. Ainsi le préjudice total au titre des dépenses de santé doit être fixé à la somme de 11 608,79 euros. Par suite, il y a lieu, compte tenu du taux de perte de chance retenu, de condamner le centre hospitalier Sud-Francilien à verser aux consorts A... D... la somme de 393 euros et à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Essonne la somme de 5 411,51 euros.
S'agissant des frais d'assistance par tierce personne :
9. Tout d'abord, pour la période comprise entre le 28 juillet 2014 et la date de mise à disposition du présent arrêt, il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise du 25 juin 2013, que l'état de santé de B..., dont les lésions ne sont pas consolidées et qui n'a pas été placée dans une institution spécialisée, nécessite l'assistance quotidienne d'une tierce personne pour l'aide aux actes de la vie quotidienne, la stimulation et la surveillance, à raison de 8 heures par jour. Il y a lieu dès lors de porter la somme fixée par le tribunal pour l'assistance par tierce personne temporaire, à un montant de 156 470,10 euros, compte tenu du taux de perte de chance et d'un taux horaire de 14,50 euros pour une aide sans qualification spécifique, en tenant compte des charges et congés payés.
10. Ensuite, pour ce qui est des préjudices futurs de la victime, non couverts par des prestations, il appartient au juge de décider si leur réparation doit prendre la forme du versement d'un capital ou d'une rente selon que l'un ou l'autre de ces modes d'indemnisation assure à la victime, dans les circonstances de l'espèce, la réparation la plus équitable. Si le juge n'est pas en mesure de déterminer lorsqu'il se prononce si la victime sera placée dans une institution spécialisée ou si elle sera hébergée au domicile familial, il lui appartient de lui accorder une rente trimestrielle couvrant les frais de son maintien au domicile familial, en fixant un taux quotidien et en précisant que la rente sera versée au prorata du nombre d'heures qu'elle aura passées à ce domicile au cours du trimestre considéré. Il ne peut être exclu qu'à l'avenir, l'état de santé de B... El D..., qui, à la date du présent arrêt, n'est pas consolidé, requière son placement dans une institution spécialisée. Ainsi, en l'absence d'élément concernant les conditions de la prise en charge de B... pour l'avenir et jusqu'à ses dix-huit ans, il y a lieu de lui accorder, à compter de la date de mise à disposition du présent arrêt, une rente trimestrielle couvrant les frais de son maintien au domicile familial. Cette rente, à la charge du centre hospitalier Sud Francilien et versée à chaque trimestre échu, doit, compte tenu du salaire minimum augmenté des charges patronales et eu égard aux coûts salariaux supplémentaires liés aux congés payés, aux dimanches et aux jours fériés, être calculée en retenant un taux horaire de 14,50 euros et sera revalorisée par application des coefficients prévus à l'article L. 434-17 du code de la sécurité sociale.
S'agissant des dépenses d'aménagement du domicile :
11. Les consorts A... D..., en leur qualité de représentants légaux de leur fille B..., demandent le remboursement de frais d'aménagement de leur salle de bain liés au handicap de B... et produisent à ce titre deux devis pour des travaux, l'un d'un montant de 9 682 euros, l'autre d'un montant de 7 833,65 euros. Toutefois, ces documents ne permettent pas d'établir, en l'état de l'instruction et en l'absence de toute production de factures, la réalité des dépenses exposées, contestée par le centre hospitalier, ni leur montant. Par suite, la demande formée à ce titre ne peut être accueillie.
S'agissant des pertes de gains professionnels de M. et Mme A... D... :
12. L'indemnisation des frais d'assistance d'une tierce personne ne peut intervenir qu'au profit de la victime, sans préjudice de la possibilité pour les proches de la victime qui lui apportent une assistance d'être indemnisés par le responsable du dommage au titre des préjudices qu'ils subissent de ce fait. L'indemnité accordée à ce titre ne fait pas double emploi avec la somme allouée à la victime pour la mettre en mesure d'assumer, à l'avenir, les frais afférents à l'assistance par une tierce personne. Ce préjudice propre peut être évalué de façon forfaitaire.
13. D'une part, c'est par une juste appréciation que le tribunal a évalué le préjudice au titre de la perte de gains professionnels actuels de Mme A... D..., sur la base d'un salaire mensuel net de 899,39 euros, sur une période de 30 mois, à une somme de 13 490,85 euros, compte tenu du taux de perte de chance.
14. D'autre part, M. A... D... n'établit pas, en produisant, notamment, une attestation du directeur de l'un des centres dans lesquels il exerce, à titre libéral, la profession de kinésithérapeute, selon laquelle il a été remplacé du 30 juillet au 19 août 2012, et d'un certificat médical établi le 3 octobre 2012 attestant qu'il est suivi depuis le 31 juillet 2012 pour une dépression réactionnelle sévère, le lien de causalité entre la faute du centre hospitalier et la baisse de ses revenus pour les années postérieures à la naissance de B... ni le caractère réel, direct et certain du préjudice allégué. C'est donc à bon droit que les premiers juges n'ont pas fait droit à la demande d'indemnisation présentée à ce titre.
En ce qui concerne les préjudices à caractère extrapatrimonial :
15. En premier lieu, il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise, que B... El D... a subi un déficit fonctionnel temporaire de 50 %. C'est par une juste appréciation que le tribunal a évalué ce préjudice, entre le 28 juillet 2012 et le 28 juillet 2030, correspondant à la date de la majorité de l'enfant B..., en fixant la réparation à la somme totale de 54 000 euros, soit 27 000 euros compte tenu du taux de perte de chance retenu.
16. En deuxième lieu, il résulte du rapport d'expertise du 25 juin 2013 que les souffrances endurées par B... El D... ont été estimées à 3, sur une échelle de 7. C'est par une juste appréciation que les premiers juges ont évalué l'indemnisation de ce préjudice, compte tenu du taux de perte de chance retenu, à la somme de 1 500 euros.
17. En troisième lieu, le préjudice esthétique temporaire, évalué par l'expert à 2 sur une échelle de 7, a été justement apprécié par les premiers juges en étant fixé à la somme de 750 euros.
18. En quatrième lieu, c'est par une juste appréciation que le tribunal administratif a évalué les préjudices d'affection et d'accompagnement subis par les parents de B... El D... consécutivement au handicap de leur fille en fixant leur indemnisation à la somme de 20 000 euros chacun soit, compte tenu du taux de perte de chance, à 10 000 euros pour chacun des parents. Toutefois, les consorts A... D... n'établissent pas le préjudice d'affection et d'accompagnement que subirait leur fille aînée, Manel. Par suite, leurs conclusions présentées sur ce dernier fondement doivent, en tout état de cause, être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
19. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du centre hospitalier Sud Francilien et de la société hospitalière d'assurances mutuelles une somme de 2 000 euros à verser tant à M. et Mme A... D... qu'à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Essonne sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er : La somme que le centre hospitalier Sud Francilien et la société hospitalière d'assurances mutuelles sont solidairement condamnés à verser à l'enfant B... A... D..., représentée par ses parents M. et Mme A... D..., est portée à 186 113,10 euros.
Article 2 : Le centre hospitalier Sud Francilien et la société hospitalière d'assurances mutuelles sont solidairement condamnés à verser à l'enfant B... A... D..., représentée par ses parents M. et Mme A... D..., si celle-ci vit au domicile de ses parents ou d'un membre de sa famille, à compter du présent arrêt et jusqu'à ses dix-huit ans, une rente trimestrielle dans les conditions prévues au point 10 du présent arrêt.
Article 3 : La somme que le centre hospitalier Sud Francilien a été condamné, par le tribunal administratif de Versailles, à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Essonne est portée à 5 411,51 euros. Elle portera intérêts à compter du 11 janvier 2016.
Article 4 : Le jugement n° 1504895 du 28 novembre 2017 du tribunal administratif de Versailles est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 5 : Le centre hospitalier Sud Francilien et la société hospitalière d'assurances mutuelles verseront tant à M. et Mme A... D... qu'à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Essonne une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 6 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
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N° 18VE00440