Par une lettre enregistrée le 27 octobre 2017, la SAS BALIKA INVESTISSEMENTS, représentée par Me Jorion, avocat, a saisi le président de la Cour d'une demande d'exécution de l'arrêt n° 13VE03736 du 26 mars 2015.
Elle demande à la Cour :
- de prescrire les mesures propres à assurer l'entière exécution de l'arrêt susmentionné ;
- d'enjoindre à la commune de Montreuil de signer la vente du bien situé
25 rue Brulefer à son bénéfice pour le prix de 70 000 euros dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard ;
- de mettre à la charge de la commune de Montreuil la somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la commune avait accepté la rétrocession pour le prix de 70 000 euros et autorisé son maire à vendre le bien qui était libre de toute occupation, d'après constat d'huissier du 6 décembre 2016 ;
- la commune n'a jamais signé l'acte de vente à la suite de manoeuvres dilatoires, alors que la société requérante a versé le prix convenu au notaire le 15 mars 2017 ;
- l'astreinte est justifiée, dès lors que l'arrêt de la Cour aurait dû être exécuté depuis plus de deux ans.
Par une ordonnance du 28 novembre 2017, le président de la Cour administrative d'appel de Versailles a décidé l'ouverture d'une procédure juridictionnelle.
.......................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pilven,
- les conclusions de M. Errera, rapporteur public ;
- et les observations de MeB..., pour la société requérante, et de MeA..., pour la commune de Montreuil ;
Une note en délibéré, présentée pour la commune de Montreuil, a été enregistrée le
30 mars 2018.
Sur la demande d'exécution :
1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-4 du code de justice administrative : " En cas d'inexécution d'un jugement ou d'un arrêt, la partie intéressée peut demander au tribunal administratif ou à la cour administrative d'appel qui a rendu la décision d'en assurer l'exécution. / Toutefois, en cas d'inexécution d'un jugement frappé d'appel, la demande d'exécution est adressée à la juridiction d'appel. / Si le jugement ou l'arrêt dont l'exécution est demandée n'a pas défini les mesures d'exécution, la juridiction saisie procède à cette définition. Elle peut fixer un délai d'exécution et prononcer une astreinte " ;
2. Considérant, d'une part, qu'il résulte de ces dispositions qu'en l'absence de définition, par le jugement ou l'arrêt dont l'exécution lui est demandée, des mesures qu'implique nécessairement cette décision, il appartient au juge saisi sur le fondement de l'article L. 911-4 du code de justice administrative d'y procéder lui-même en tenant compte des situations de droit et de fait existant à la date de sa décision ; que, si la décision faisant l'objet de la demande d'exécution prescrit déjà de telles mesures en application de l'article L. 911-1 du même code, il peut, dans l'hypothèse où elles seraient entachées d'une obscurité ou d'une ambigüité, en préciser la portée ; que, le cas échéant, il lui appartient aussi d'en édicter de nouvelles en se plaçant, de même, à la date de sa décision, sans toutefois pouvoir remettre en cause celles qui ont précédemment été prescrites ni méconnaître l'autorité qui s'attache aux motifs qui sont le soutien nécessaire du dispositif de la décision juridictionnelle dont l'exécution lui est demandée ; qu'en particulier, la rectification des erreurs de droit ou de fait dont serait entachée la décision en cause ne peut procéder que de l'exercice, dans les délais fixés par les dispositions applicables, des voies de recours ouvertes contre cette décision ;
3. Considérant, d'autre part, qu'il appartient au juge saisi sur le fondement de l'article L. 911-4 d'apprécier l'opportunité de compléter les mesures déjà prescrites ou qu'il prescrit
lui-même par la fixation d'un délai d'exécution et le prononcé d'une astreinte suivi, le cas échéant, de la liquidation de celle-ci, en tenant compte tant des circonstances de droit et de fait existant à la date de sa décision que des diligences déjà accomplies par les parties tenues de procéder à l'exécution de la chose jugée ainsi que de celles qui sont encore susceptibles de l'être ;
4. Considérant que, par un jugement du 31 octobre 2013, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté la demande de la société requérante tendant à l'annulation de l'arrêté du
12 décembre 2012 par lequel le maire a préempté les parcelles cadastrées I 137, I 139 et I 141 situées 25 rue Brulefer à Montreuil ; que, par un arrêt du 26 mars 2015, la Cour a annulé ce jugement et cet arrêté et a enjoint à la commune de Montreuil de proposer à la société requérante d'acquérir le bien au prix mentionné dans la déclaration d'intention d'aliéner dans un délai de deux mois à compter de la notification de cet arrêt ; que si le conseil municipal de la commune de Montreuil a autorisé le maire, par délibération du 30 septembre 2015, à vendre le bien en cause, il est constant qu'elle avait autorisé un apiculteur à installer des ruches sur les terrains en cause, lesquels n'ont été rendus libres de toute occupation qu'à compter du 1er décembre 2017 ; que, par ailleurs, la commune a fait valoir, dans ses dernières écritures avant l'audience, que le bien en litige était grevé lors de son acquisition en juillet 2013 d'une hypothèque au profit du Trésor public jusqu'en 2022, d'un montant de 26 959 euros ; que si l'acte de vente de ce bien du 22 juillet 2013 mentionne que le vendeur, mandataire judiciaire de la société Etablissements Guy Poncelet, devait obtenir la mainlevée de cette hypothèque dans les trois mois suivant l'acte de vente, il n'est pas contesté que la commune n'a accompli aucune diligence en ce sens pendant cinq ans, en l'absence de réalisation de cette obligation, et qu'elle n'a informé la société requérante de cette hypothèque qu'au stade contentieux de la présente procédure d'exécution ; qu'ainsi, et alors que la société requérante a consenti à l'achat du bien au prix fixé par la déclaration d'intention d'aliéner, et a déposé le 15 mars 2017 chez son notaire la somme correspondante, la commune de Montreuil ne peut sérieusement soutenir qu'elle a fait preuve de diligences en vue d'exécuter l'arrêt de la Cour trois ans après sa notification ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de prononcer contre la commune de Montreuil, à défaut pour elle de justifier de mesures suffisantes pour réaliser la vente des terrains en cause dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, une astreinte de 100 euros par jour de retard jusqu'à la date à laquelle l'arrêt n° 13VE03736 aura reçu exécution ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Montreuil le versement de la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la SAS BALIKA INVESTISSEMENTS et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Une astreinte est prononcée à l'encontre de la commune de Montreuil si elle ne justifie pas avoir, dans les deux mois suivant la notification du présent arrêt, pris les mesures suffisantes de nature à assurer l'exécution de l'arrêt n° 13VE03736 du 26 mars 2015 et jusqu'à la date de cette exécution. Le taux de cette astreinte est fixé à 100 euros par jour, à compter de l'expiration du délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt.
Article 2 : La commune de Montreuil communiquera à la Cour copie des actes justifiant des mesures prises pour exécuter l'arrêt n° 13VE03736 mentionné à l'article 1er.
Article 3 : La commune de Montreuil versera la somme de 2 000 euros à la SAS BALIKA INVESTISSEMENTS en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
2
N° 17VE03580