Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 8 février 2016, la société SCALIMMO, représentée par Me Sitri, avocat, demande à la Cour d'annuler ce jugement, de prononcer la restitution de la cotisation à l'impôt sur les sociétés à laquelle a été assujettie la société Les marronniers, aux droits et obligations de laquelle elle vient, au titre de l'exercice clos en 2006, ainsi que des pénalités afférentes et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la procédure d'imposition est entachée d'irrégularité dès lors que la période de vérification ne pouvait excéder trois mois ;
- la provision pour dépréciation des stocks inscrite en 2006 est justifiée par la réalisation d'une expertise judiciaire diligentée par le commissaire à l'exécution du plan de continuation ; par ailleurs, le bien situé à Conflans-Sainte-Honorine doit être évalué en prenant en compte son état insalubre ainsi que la présence d'amiante et de plomb, comme cela a été constaté par un huissier de justice dans un constat effectué le 12 octobre 2007 ;
- le bien situé à Orgeval n'a pas été sous-évalué ; l'administration a pris comme terme de comparaison le bien situé au 387 rue Berthemont, en refusant toutefois de prendre en compte la surface exacte de ce bien ; l'administration s'est en outre fondée sur des parcelles d'une superficie inférieure à celles qu'elle avait retenues ; l'administration ne rapporte pas la preuve de l'année de construction des immeubles qu'elle a retenus comme termes de comparaison ; elle n'a pas non plus pris en compte que les constructions récentes avaient un prix supérieur à des constructions plus anciennes ; enfin, l'administration n'a pas retenu que, les associés ayant des intérêts divergents, ces derniers n'avaient aucun intérêt à minorer le prix de vente de ce bien ; aucun élément n'est apporté par l'administration pour établir l'existence d'un acte anormal de gestion.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pilven,
- et les conclusions de M. Errera, rapporteur public.
1. Considérant que la société Les marronniers, aux droits de laquelle vient la société SCALIMMO, qui exerçait une activité de marchand de biens, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité, à l'issue de laquelle le service a mis à sa charge des suppléments d'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos en 2006 ; que la société SCALIMMO a demandé la restitution de la cotisation à l'impôt sur les sociétés à laquelle a été assujettie la société Les marronniers, aux droits et obligations de laquelle elle vient, au titre de l'exercice clos en 2006, correspondant à la remise en cause des provisions pour dépréciation de stocks et à l'insuffisance de prix d'une cession d'un bien immobilier ainsi que des pénalités afférentes ; que, par jugement du
30 novembre 2015, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande ;
Sur le bien-fondé des impositions :
En ce qui concerne les provisions pour dépréciation de stocks :
2. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article 38 du code général des impôts : " 3. (...) les stocks sont évalués au prix de revient ou au cours du jour de la clôture de l'exercice, si le cours est inférieur au prix de revient " ; qu'aux termes de l'article 38 decies de l'annexe III au même code : " Si le cours du jour à la date de l'inventaire des marchandises, matières premières, matières et fournitures consommables, produits intermédiaires, produits finis et emballages commerciaux perdus en stock au jour de l'inventaire est inférieur au coût de revient défini à l'article 38 nonies, l'entreprise doit constituer, à due concurrence, des provisions pour dépréciation " ; qu'aux termes de l'article 39 du même code : " 1. Le bénéfice est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : (...) 5° les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou des charges nettement précisées et que des évènements en cours rendent probables, à condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice (...) " ; que lorsqu'un marchand de biens constate que l'un ou plusieurs des immeubles qu'il possède en stock ont, à la date de clôture de l'exercice, une valeur probable de réalisation inférieure à leur prix de revient, il est en droit de constituer, à concurrence de l'écart constaté, une provision pour dépréciation ; que pareille provision ne peut toutefois être admise en déduction de ses résultats que si le contribuable est en mesure de justifier de la réalité de cet écart en établissant la valeur vénale des immeubles ;
3. Considérant que l'administration a remis en cause la provision pour dépréciation de stock, constituée au titre de l'exercice 2006 pour deux terrains et un immeuble d'un montant global de 338 178,15 euros ; que, toutefois, pour contester la remise en cause de ces provisions, la société requérante se borne à indiquer qu'elles ont été constituées par la société Les marronniers, alors placée en liquidation judiciaire, conformément au plan de continuation sous le contrôle du tribunal de commerce et à la suite de l'expertise réalisée à la demande du commissaire à l'exécution du plan, sans apporter d'autres éléments que des projets de comptes annuels pour l'exercice 1993 ou des comptes intermédiaires du 1er janvier 1994 au
28 février 1994, au caractère non probant ; que la société requérante n'apporte notamment aucun élément permettant d'établir qu'au moment de la prise en compte de ces biens et au
29 décembre 2006, leur valeur vénale était inférieure au prix auquel ils ont été acquis et comptabilisés dans les stocks de la société requérante ;
En ce qui concerne l'acte anormal de gestion :
4. Considérant qu'en vertu des dispositions combinées des articles 38 et 209 du code général des impôts, le bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés est celui qui provient des opérations de toute nature faites par l'entreprise, à l'exception de celles qui, en raison de leur objet ou de leurs modalités, sont étrangères à une gestion normale ; que le fait, pour une entreprise, de céder un immeuble à un prix notablement inférieur à sa valeur réelle ne relève pas, en règle générale, d'une gestion normale, sauf s'il apparaît qu'en consentant un tel avantage, l'entreprise a agi dans son propre intérêt ; que s'il appartient à l'administration d'apporter la preuve des faits sur lesquels elle se fonde pour estimer que l'avantage consenti sans contrepartie à l'occasion de cette cession constitue un acte anormal de gestion, à concurrence de l'insuffisance du prix stipulé, elle est réputée apporter cette preuve dès lors que cette entreprise n'est pas en mesure de justifier qu'elle a bénéficié en retour de contreparties ;
5. Considérant que, le 13 janvier 2006, la société Les marronniers, aux droits et obligations de laquelle vient la société requérante, a cédé à l'un de ses associés au prix de 600 000 euros un bien situé 172 chemin de la Malrue à Orgeval acquis pour un montant de 447 649 euros en mai 1990 ; que l'administration a considéré, après avis de la commission départementale des impôts directs et taxes sur le chiffre d'affaires, que l'immeuble en cause, constitué d'une maison de dix pièces, de caves, d'un garage et d'un chalet composé d'une pièce et de sanitaires, d'une surface habitable totale de 234, 45 m², sur une parcelle de 5 410 m², avait été cédé pour un prix inférieur à sa valeur vénale, qu'elle a définitivement arrêtée à 3 971 euros par m², soit 903 000 euros ; que l'administration fiscale a dès lors réintégré dans le résultat de l'entreprise la somme de 303 000 euros correspondant, selon elle, à la minoration du prix de cession du bien immobilier, estimant que cette opération était constitutive d'un acte anormal de gestion ;
6. Considérant que la société requérante ne peut utilement contester le prix de
2 700 euros au m² retenu par l'administration pour l'évaluation du bien situé au 387 rue Béthemont à Orgeval, dès lors qu'elle a retenu le même prix pour l'estimation de son bien, situé
172 chemin de la Malrue à Orgeval, avant application par l'administration d'un indice de correction, d'ailleurs non contesté, afin de tenir compte de la différence de superficie des deux terrains en cause et d'obtenir le prix de 3 971 euros le m² pour le bien situé 172 chemin de la Malrue ;
7. Considérant que la société requérante ne peut non plus soutenir que l'administration, qui n'a retenu in fine comme terme de comparaison que le bien situé au 387 rue Béthemont d'une superficie de 2 475 m², aurait retenu un bien d'une superficie inférieure à la moyenne des parcelles, d'une superficie de 1 693 m², qu'elle entend retenir comme termes de comparaison ; que, par ailleurs, les biens dont la société requérante demande la prise en compte aux fins d'évaluation du bien en litige, ne peuvent être regardés comme plus pertinents que celui retenu par l'administration, en raison de leur superficie inférieure ou de leur situation géographique plus éloignée de la propriété située 172 chemin de la Malrue ; qu'en outre, la société requérante n'apporte aucun élément permettant d'établir que des constructions plus récentes que le bien en cause seraient en toute hypothèse d'une valeur plus élevée dès lors que doivent être pris en compte l'architecture, la qualité de la construction et son implantation géographique pour déterminer sa valeur vénale ;
8. Considérant que la circonstance que les parties au contrat de vente auraient eu des intérêts divergents voire conflictuels, à les supposer établis, ne suffit pas à établir que la vente du bien en litige n'aurait pas fait l'objet d'une minoration de prix ;
9. Considérant, dès lors, que l'administration doit être regardée comme établissant que la vente du bien en litige, pour un prix de 600 000 euros, a été effectuée à l'issue d'une évaluation inexacte de sa valeur vénale, arrêtée à 903 000 euros, et qu'en l'absence de contrepartie à cet avantage financier, elle est constitutive d'un acte anormal de gestion ; que l'administration était ainsi en droit de réintégrer cet écart de prix, pour un montant de
303 000 euros, dans le résultat imposable de la société requérante au titre de l'exercice clos en 2006 ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
10. Considérant qu'aux termes de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales :
" I. - Sous peine de nullité de l'imposition, la vérification sur place des livres ou documents comptables ne peut s'étendre sur une durée supérieure à trois mois en ce qui concerne : 1° Les entreprises industrielles et commerciales ou les contribuables se livrant à une activité non commerciale dont le chiffre d'affaires ou le montant annuel des recettes brutes n'excède pas les limites prévues au I de l'arti cle 302 septies A [763 000 euros] du code général des impôts (...) " ;
11. Considérant qu'il résulte de l'instruction et des motifs qui précèdent aux points 4 à 9 que le chiffre d'affaires rectifié de la société SCALIMMO excède, au titre de l'exercice en litige, le seuil de 763 000 euros ; que la société n'est dès lors pas fondée à opposer à l'administration le délai de trois mois mentionné à l'article L. 52 du livre des procédures fiscales, dans le champ d'application duquel elle n'entre pas ;
12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 30 novembre 2015, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa requête tendant à la restitution de la cotisation à l'impôt sur les sociétés à laquelle a été assujettie la société Les marronniers, aux droits et obligations de laquelle elle vient, au titre de l'exercice clos en 2006, ainsi que des pénalités afférentes ;
Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
13. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, la somme que la société SCALIMMO demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la société SCALIMMO est rejetée.
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N° 16VE00380