Procédure devant la Cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés respectivement le 31 juillet 2015, le 21 janvier 2016, le 10 novembre 2016 et le 20 avril 2017, le MINISTRE DES FINANCES ET DES COMPTES PUBLICS oppose une fin de non-recevoir à la demande de M. E...tendant à la rectification de l'erreur matérielle qu'auraient commise les premiers juges sur le quantum de la décharge sollicitée et demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° de renvoyer la demande de M.E... au Tribunal administratif de Montreuil ;
3° dans l'hypothèse où elle déciderait d'évoquer, de remettre à la charge de M. E... les compléments d'impôt sur le revenu, de prélèvements sociaux et de majorations auxquels il a été assujetti au titre des années 2008 à 2011 dont il a été déchargé en première instance et de rejeter les conclusions tendant à une décharge supérieure à celle sollicitée dans la réclamation préalable ;
4° à titre subsidiaire, de limiter la décharge aux impositions supplémentaires contestées par le requérant devant les premiers juges et ayant un lien de connexité avec les moyens qu'elle aurait préalablement accueillis.
Il soutient que :
- dans sa réclamation du 27 mars 2013, M. E...n'avait demandé la décharge que de la somme de 467 583 euros, inférieure à la somme de 472 080 euros dont il demande la décharge devant la Cour par son mémoire du 30 septembre 2016 ;
- les premiers juges ont statué ultra petita, en prononçant une décharge totale, alors que certains chefs de redressement n'étaient pas contestés, notamment ceux relatifs à la modification du quotient familial pendant les années 2009 à 2010 ;
- ils ont pareillement manqué à leur office en prononçant cette décharge, sans répondre au moyen, distinct de celui de l'irrégularité du droit de communication auprès du Parquet, tiré de la déclaration non tardive des revenus de l'année 2010 et de la majoration de 10 % qui en résulte, et sans prendre en considération que les rectifications notifiées au titre de l'année 2011 en revenus distribués résultent de l'exercice du droit de communication auprès d'un établissement bancaire, la Société générale ;
- l'administration n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 82 C du livre des procédures fiscales, relatif au droit de communication auprès du Parquet, une lettre du 27 septembre 2012 du procureur de la République près le Tribunal de grande instance de Nanterre attestant la clôture le 9 février 2012 de l'enquête préliminaire et la décision de renvoi devant le Tribunal correctionnel le 2 avril 2012, jour même de la consultation du dossier pénal par le vérificateur ;
- la notion d'instance au sens de l'article L. 82 C est moins restrictive que celle prévue à l'article L. 170, devenu l'article L. 188 C du livre des procédures fiscales ;
- la substitution dans l'article L. 82 C, par l'article 92 de la loi n° 2015-1786 du 29 décembre 2015, du terme " procédure judiciaire " au terme " instance " ne tend qu'à harmoniser les dispositions du livre des procédures fiscales avec la modification du délai de reprise en matière de fiscalité douanière ;
- les rectifications notifiées pour l'année 2008 n'étaient pas prescrites, en raison du droit de reprise de 10 ans prévu par l'article L. 170, désormais codifié à l'article L. 188 C du livre des procédures fiscales ;
- l'administration a respecté l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales, ayant mentionné la teneur et l'origine des documents consultés et communiqué au contribuable l'ensemble des documents détenus par elle ;
- elle n'a pas méconnu les principes de présomption d'innocence et de secret de l'enquête au sens de l'article 6-2 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- les dispositions de l'article 11 du code de procédure pénale ne créent aucune obligation envers les agents de l'administration fiscale ;
- les prestations de services réalisées par la société 5B2S étaient fictives et s'inscrivaient dans le cadre d'une communauté d'intérêts entre cette société et la société Orion Holding ;
- il en va de même des prestations de services facturées par la société BS One, qui était dépourvue de salariés, de moyens matériels et de comptabilité probante, à la société Orion Holding ;
- M. E...a perçu de manière occulte de ces sociétés ainsi que de M. B...A..., des revenus distribués notamment sous couvert de salaires ou de remboursements de prêt personnel ;
- il ne justifie pas d'un dépôt de sa déclaration de revenus pour 2010 avant le 2 novembre 2011, soit peu après le premier rendez-vous de l'examen de sa situation fiscale personnelle ;
- la majoration de 10 % pour dépôt tardif de sa déclaration de revenus pour 2010 ne saurait être contestée, sous prétexte que le service aurait perdu sa déclaration ;
- la majoration de 80 % pour manoeuvres frauduleuses est justifiée.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de procédure pénale ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Soyez,
- les conclusions de M. Errera, rapporteur public,
- et les observations de MeC..., de la SCP C...Le Vaillant avocats, pour M. E....
Une note en délibéré, présentée pour M.E..., par la SCP C...Le Vaillant avocats, a été enregistrée le 8 avril 2019.
Considérant ce qui suit :
1. M.E..., dirigeant et seul associé des sociétés Orion Holding et BS One, lesquelles ont une activité dans le domaine du multimédia et du conseil en entreprise, a fait l'objet d'un examen de sa situation fiscale personnelle au titre des années 2008, 2009 et 2010 à l'issue duquel l'administration lui a proposé des rectifications en matière d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux. M. E...a également fait l'objet d'un contrôle sur pièces au titre de l'année 2011 à l'issue duquel il fait l'objet de redressements en matière d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux. Par un jugement du 1er juin 2015, le Tribunal administratif de Montreuil a accueilli le moyen tiré de ce que l'administration avait consulté dans des conditions irrégulières les pièces de la procédure pénale dirigée contre le contribuable. Pour ce motif, il a prononcé la décharge des compléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux contestés par M.E.... Le MINISTRE DES FINANCES ET DES COMPTES PUBLICS relève appel de ce jugement.
Sur la fin de non-recevoir opposée par le MINISTRE DES FINANCES ET DES COMPTES PUBLICS aux conclusions de M. E...relatives au montant de la décharge prononcée par les premiers juges :
2. Dans son mémoire en défense du 30 septembre 2016, M. E...se plaint de ce que les premiers juges ne lui ont accordé qu'une décharge d'un montant de 467 583 euros, alors que les impositions en litige s'élevaient à 472 080 euros. Mais, d'une part, comme le fait valoir le MINISTRE DES FINANCES ET DES COMPTES PUBLICS, M. E...avait seulement sollicité, dans sa réclamation du 27 mars 2013, la décharge d'une somme de 467 583 euros et ce pour les années 2008 à 2010. D'autre part et au demeurant, ses conclusions tendant à la réformation du jugement sur ce point ont été présentées pour la première fois le 30 septembre 2016, soit plus de deux mois après le délai d'appel contre le jugement en date du 1er juin 2015, et sont donc, pour ce motif, tardives. Par suite, la fin de non-recevoir opposée par le MINISTRE DES FINANCES ET DES COMPTES PUBLICS à l'encontre des conclusions demandant la décharge d'une somme supérieure à la somme de 467 583 euros et portant sur l'année 2011 doit être accueillie.
Sur la régularité du jugement attaqué :
3. En premier lieu, l'administration a ramené à 1 le quotient familial de 1,5 dont s'est prévalu M. E...dans ses déclarations de revenus des années 2009 et 2010, en constatant que son fils Raphaël, né en 1997, était en fait confié à la garde de sa mère, dont le contribuable était divorcé. Il est constant que ce chef de redressement, s'il découle de l'examen de la situation fiscale personnelle de M.E..., est sans rapport avec l'irrégularité, admise par les premiers juges, de la consultation par le vérificateur des documents détenus par l'autorité judiciaire, consultation qui a corroboré, aux yeux de l'administration, la distribution occulte de revenus de capitaux mobiliers au contribuable par les sociétés Orion et BS One. De plus, comme le fait valoir le MINISTRE DES FINANCES ET DES COMPTES PUBLICS, le contribuable n'a contesté ce chef de redressement ni dans les observations du 11 septembre 2012, ni dans sa réclamation du 27 mars 2013, ni dans sa requête introductive de première instance. De même, il résulte de l'instruction qu'il n'a pas contesté au titre de 2010 le redressement en base, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, d'un montant de 11 euros. Par suite, en se fondant sur la méconnaissance de l'article L. 82 C du livre des procédures fiscales pour prononcer la décharge des compléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquels M. E... a été assujetti au titre de la réduction de son quotient familial les premiers juges ont statué sur un chef de redressement dont ils n'étaient pas saisis et entaché sur ce point d'irrégularité leur jugement.
4. En deuxième lieu, M. E...a contesté la majoration de 10 % qui lui a été infligée sur le fondement de l'article 1728 du code général des impôts, motif pris qu'il n'aurait déposé que le 2 novembre 2011, soit après l'engagement de l'examen de sa situation fiscale personnelle, sa déclaration de revenus de l'année 2010. Comme le fait valoir le MINISTRE DES FINANCES ET DES COMPTES PUBLICS, ce chef de redressement ne procède pas davantage de l'exercice par le vérificateur du droit de communication auprès de l'autorité judiciaire, et les premiers juges n'ont pas examiné le moyen tiré de ce que M. E...aurait souscrit dans les délais sa déclaration de revenus pour l'année 2010. En s'abstenant d'examiner ce moyen, et en déchargeant la majoration en cause qui ne procède pas de l'exercice, jugé irrégulier, du droit de communication auprès de l'autorité judiciaire, les premiers juges ont pareillement entaché leur jugement d'irrégularité.
5. Enfin, M. E...contestait en première instance les rectifications résultant, d'une part, des traitements et salaires d'un montant de 95 000 euros au titre de 2010 déclarés après l'engagement de l'examen de situation fiscale personnelle, d'autre part, pour les revenus de l'année 2011, de l'encaissement d'une somme d'un montant total de 16 445 euros (4 784 euros et 11 661 euros) par la société BS One qui aurait fait l'objet, le 6 mai 2011, d'un chèque du même montant à l'ordre de l'intimé. Toutefois, l'imposition des traitements et salaires en cause ne résulte pas de l'exercice du droit de communication auprès du ministère public et, par ailleurs, il résulte de l'instruction et en particulier des termes de la proposition de rectification adressée à la société BS One le 2 juillet 2012 que ce chef de redressement résultait exclusivement du droit de communication exercé, sur le fondement de l'article L. 81 du livre des procédures fiscales, auprès de la Société générale. Par suite, les premiers juges ne pouvaient sans irrégularité, et en tout état de cause compte tenu de ce qui a été dit au point 2, prononcer la décharge des impositions découlant de ce chef de redressement relatif à l'année 2011, en se fondant sur la seule méconnaissance de l'article L. 82 C du livre des procédures fiscales.
6. Il résulte de ce qui précède que le jugement entrepris doit être annulé en tant qu'il a prononcé la décharge des impositions résultant des chefs de redressement mentionnés aux points 3, 4 et 5 et qu'il y a lieu de statuer, par la voie de l'évocation, sur ces impositions et, par effet dévolutif de l'appel, sur le surplus.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :
7. Aux termes de l'article L. 82 C du livre des procédures fiscales dans sa version applicable à cette procédure : " A l'occasion de toute instance devant les juridictions civiles ou criminelles, le ministère public peut communiquer les dossiers à l'administration des finances ". Aux termes de l'article 388 du code de procédure pénale : " Le tribunal correctionnel est saisi des infractions de sa compétence soit par la comparution volontaire des parties, soit par la citation, soit par la convocation par procès-verbal, soit par la comparution immédiate, soit enfin par le renvoi ordonné par la juridiction d'instruction. ".
8. Il résulte des termes mêmes de l'article L. 82 C du livre des procédures fiscales que l'exercice du droit de communication auprès du ministère public, s'entend de la consultation des pièces de la procédure pénale à compter de l'ouverture de l'instance. Ces dispositions renvoient à une phase du procès pénal, l'instance, définie et régie par le droit de la procédure pénale, notamment par l'article 388 du code de procédure pénale. En application de ce droit, seul l'engagement de poursuites, qui inclut, le cas échéant, la phase de l'instruction conduite par le juge d'instruction, doit être regardé comme ouvrant l'instance. Ni l'ouverture d'une enquête préliminaire ni l'examen des poursuites par le ministère public, selon les formes et conditions prévues par le code de procédure pénale, n'ont, eux-mêmes, un tel effet. Par suite, et sans qu'il y ait lieu de se référer aux débats parlementaires ayant précédé l'adoption de l'article L. 82 C du livre des procédures fiscales, l'instance exclut la phase de l'enquête préliminaire et toute phase de procédure pénale antérieure à l'engagement des poursuites ou à la saisine du juge d'instruction.
9. Il résulte de l'instruction qu'après avoir formulé une demande en ce sens le 20 mars 2012, le service vérificateur a consulté le 2 avril 2012 les pièces de la procédure pénale en cours dirigée contre M. E...au parquet du Tribunal de grande instance de Nanterre. Il n'est pas sérieusement contesté qu'avant cette date, le 9 février 2012, était close l'enquête préliminaire concernant le contribuable, consécutive au dépôt d'une plainte de la société LCH contre la société Orion Holding. En réponse aux critiques du contribuable sur l'exercice de ce droit de communication, l'administration a produit une lettre du 27 septembre 2012 par laquelle le procureur de la République près le Tribunal de grande instance de Nanterre atteste avoir, le 2 avril 2012, pris une décision de renvoi devant le tribunal correctionnel par voie de citation directe. La circonstance que le MINISTRE DES FINANCES ET DES COMPTES PUBLICS n'ait pas produit copie de cette citation directe, alors que M. E...produit un mandatement de citation du parquet le concernant en date du 6 novembre 2014, citation qui au demeurant peut être nécessitée par une modification des faits poursuivis, de leur incrimination ou par un incident de procédure, ne suffit pas à remettre en cause l'attestation délivrée par l'autorité judiciaire. Ainsi l'instance pénale doit être regardée comme engagée à compter du 2 avril 2012, jour de saisine du tribunal correctionnel par citation directe du ministère public. Dans ces conditions, c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil s'est fondé, pour prononcer la décharge des impositions contestées, sur le motif tiré de la méconnaissance des conditions fixées par l'article L. 82 C du livre des procédures fiscales pour l'exercice du droit de communication auprès du ministère public.
10. Mais aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande. ". L'obligation faite par ces dispositions à l'administration de tenir à la disposition du contribuable qui les demande ou de lui communiquer, avant la mise en recouvrement des impositions, les documents ou copies de documents qui contiennent les renseignements qu'elle a utilisés pour procéder aux redressements ne peut porter que sur les documents effectivement détenus par les services fiscaux. Dans l'hypothèse où les documents que le contribuable demande à examiner sont détenus non par l'administration fiscale, qui les a seulement consultés dans l'exercice de son droit de communication, mais par l'autorité judiciaire, il appartient à l'administration fiscale d'en informer l'intéressé afin de le mettre en mesure, s'il s'y croit fondé, d'en demander communication à cette autorité et, en tout état de cause, de porter à sa connaissance l'ensemble des renseignements fondant l'imposition que cette autorité lui avait permis de recueillir.
11. À l'issue de l'examen de la situation fiscale personnelle de M.E..., l'administration a intégré dans le revenu imposable de ce dernier des revenus de capitaux mobiliers, en se fondant sur le contenu des pièces de la procédure pénale mentionnée au point 9. L'administration a informé le contribuable, dans la proposition de rectification du 2 juillet 2012, de l'origine et de la teneur des renseignements ainsi obtenus dans l'exercice par le vérificateur du droit de communication auprès du ministère public. Dans ses observations en réponse à la proposition de rectification, M. E...a demandé, le 11 septembre 2012, à l'administration, copie de tous les documents dont découlaient ces renseignements.
12. Si M. E...fait valoir que nombre de ces documents ne sont pas joints à la réponse du 8 octobre 2012 à ses observations, contrairement aux mentions portées par le service dans cette réponse, il résulte de l'instruction, comme le fait valoir l'administration, qu'elle n'a pas été autorisée à prendre copie de toutes les pièces du dossier pénal concernant M. E...et qu'elle a transmis à ce dernier la copie des documents auxquels elle a eu accès comme suite à sa demande du 11 septembre 2012.
13. Pour soutenir que l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales a été méconnu, M. E...fait valoir que l'administration ne lui a pas clairement et explicitement indiqué, dans les pièces de procédure, les documents dont elle n'avait pas pu prendre copie auprès du Procureur de la République qui les détenait, mais s'est bornée à indiquer l'adresse du Procureur auprès duquel elle a exercé son droit de communication. Il ajoute que même si elle avait satisfait à cette obligation, il n'aurait pas pu avoir accès aux documents au motif que lors de l'enquête préliminaire, les parties n'ont pas accès au dossier.
14. Il résulte des termes de la réponse aux observations du contribuable du 8 octobre 2012 que si le vérificateur y a indiqué les coordonnées complètes du Procureur de la République auprès duquel il a exercé le droit de communication prévu par l'article L. 82 C du livre des procédures fiscales, il n'a pas indiqué au contribuable qu'il lui appartenait, en particulier pour les documents que l'administration fiscale ne détenait pas, de présenter cette demande à l'autorité judiciaire. Il s'ensuit que l'administration ne peut être regardée comme ayant porté à la connaissance de M. E...l'ensemble des renseignements fondant l'imposition que l'autorité judiciaire lui avait permis de recueillir dans l'exercice de son droit de communication dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction que l'administration aurait porté à la connaissance du contribuable l'ensemble des renseignements fondant l'imposition que l'autorité judiciaire lui avait permis de recueillir dans l'exercice de son droit de communication. Ainsi, M. E... n'a pas été en mesure d'exercer, au cours de la procédure de rectification, les droits de la défense garantis par les dispositions précitées du livre des procédures fiscales, alors que l'enquête préliminaire était close depuis le 9 février 2012. Dès lors, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens soulevés à l'encontre des rectifications découlant de l'exercice du droit de communication auprès de l'autorité judiciaire, le MINISTRE DES FINANCES ET DES COMPTES PUBLICS n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement entrepris, les premiers juges ont prononcé la décharge des compléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux, en droits et pénalités, auxquels M. E...a été assujetti au titre des revenus distribués révélés par l'exercice de ce droit de communication.
Pour le surplus, en ce qui concerne le bien-fondé des impositions ne résultant pas de l'exercice du droit de communication auprès de l'autorité judiciaire :
15. En revanche, faute pour M. E...d'avoir demandé la décharge de celles des impositions litigieuses qui découlent de la réduction du quotient familial dont il se prévalait dans ses déclarations de revenus, le MINISTRE DES FINANCES ET DES COMPTES PUBLICS est fondé à demander le rétablissement de ces impositions.
16. Par ailleurs, en vertu des dispositions de l'article 1728 du code général des impôts, une majoration de 10 % est infligée au contribuable ayant déposé tardivement sa déclaration de revenus. Si M. E...prétend avoir déposé dans les délais la déclaration de ses revenus de l'année 2010, laquelle aurait été ensuite égarée par l'administration, il n'a gardé aucune trace de ce dépôt. Dans ces conditions, et comme le fait valoir le MINISTRE DES FINANCES ET DES COMPTES PUBLICS, seule doit être prise en compte, pour vérifier le bien-fondé de la majoration litigieuse, la déclaration de revenus déposée le 2 novembre 2011, après l'engagement de l'examen de la situation fiscale personnelle de M.E.... Par suite, les conclusions de l'intimé tendant à la décharge de la majoration prévue à l'article 1728 du code général des impôts ne peuvent qu'être rejetées.
17. Comme il a été dit au point 5, l'administration a obtenu, par voie de communication auprès de la Société générale, sur le fondement de l'article L. 81 du livre des procédures fiscales, copie des encaissements d'une somme globale de 16 445 euros par la société BS One qui a fait l'objet, le 6 mai 2011, d'un chèque du même montant à M.E.... L'administration rapporte la preuve, faute de contestation sérieuse de ce dernier, que la société BS One ne disposait d'aucun moyen matériel ou humain pour accomplir des prestations à l'origine de cette somme, et qu'elle n'avait conclu avec le bénéficiaire du chèque aucun contrat de travail. Par suite, le MINISTRE DES FINANCES ET DES COMPTES PUBLICS a pu regarder cette somme comme une distribution de revenus occultes au sens du c de l'article 111 du livre des procédures fiscales.
18. Il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DES FINANCES ET DES COMPTES PUBLICS est seulement fondé à demander, d'une part, l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il a prononcé la décharge des impositions résultant de la réduction du quotient familial dont M. E...s'était prévalu au titre des années 2019 et 2010, du versement d'un chèque de 16 445 euros par la société BS One au cours de l'année 2011, des impositions dues par M. E...au titre des traitements et salaires et revenus de capitaux mobiliers au titre de l'année 2010 ainsi que de la majoration de 10 % correspondante, d'autre part, le rétablissement de ces impositions.
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
19. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'Etat, partie perdante pour l'essentiel, une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. E... et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1310600 du 1er juin 2015 du Tribunal administratif de Montreuil est annulé en tant qu'il a prononcé la décharge des impositions résultant de la réduction du quotient familial dont M. E...s'était prévalu au titre des années 2009 et 2010, du versement d'un chèque de 16 445 euros par la société BS One au cours de l'année 2011 et des impositions et majoration dues par M. E...au titre de l'année 2010.
Article 2 : Les impositions citées à l'article 1er ci-dessus sont remises à la charge de M. E....
Article 3 : L'Etat versera à M. E...une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
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N° 15VE02574