Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 27 septembre 2019, M. B..., représenté par Me D..., avocat, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet des Hauts-de-Seine de lui délivrer un titre de séjour, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et d'effacer son signalement dans le système d'information Schengen sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'obligation de quitter le territoire français a été prise en méconnaissance de son droit à être entendu ; n'ayant pas été informé de son droit à être représenté par un avocat comme prévu à l'article L. 611-1-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il n'a pas été en mesure de présenter des observations pertinentes ;
- l'arrêté est entaché d'erreur de fait et d'un défaut d'examen de sa situation personnelle et familiale ;
- l'arrêté porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale tel que protégé par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;
- il ne pouvait raisonnablement lui être demandé de quitter le territoire sans délai alors qu'il avait transféré le centre de ses intérêts sur le territoire français ;
- l'interdiction de retour est dénuée de tout motif de fait ;
- les éléments tirés de sa situation personnelle et familiale auraient justifié qu'il ne soit pas prononcé d'interdiction de retour ; cette décision est également entachée d'erreur d'appréciation.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. C...,
- et les observations de Me D..., pour M. B....
Considérant ce qui suit :
1. M. A... B..., ressortissant marocain né le 25 août 1974 à Figuig (Maroc), a déclaré être entré en France en 2014. Le 29 juillet 2019, le requérant a été interpellé par les services de police à la station de métro " Mairie de Clichy ". Par un arrêté du 29 juillet 2019, pris en application du I du 1° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet des Hauts-de-Seine l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le Maroc comme pays à destination duquel il est susceptible d'être reconduit et lui a interdit de revenir en France pendant une durée d'un an. M. B... fait régulièrement appel du jugement en date du 9 septembre 2019 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté préfectoral.
Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
2. En premier lieu, M. B... soutient, en se prévalant des dispositions de l'article L. 611-1-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ne pas avoir bénéficié d'une notification des droits afférents à la mesure d'éloignement, ne pas avoir été informé de son droit à bénéficier d'un avocat et avoir été auditionné sans l'assistance d'un avocat. Toutefois, les mesures de contrôle et de retenue que prévoient les dispositions de l'article L. 611-1-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sont uniquement destinées à la vérification du droit de séjour et de circulation de l'étranger qui en fait l'objet et sont placées sous le contrôle du procureur de la République. Elles sont distinctes des mesures par lesquelles le préfet fait obligation à l'étranger de quitter le territoire. Dès lors qu'il n'appartient pas au juge administratif de se prononcer sur la régularité des conditions du contrôle et de la retenue qui ont, le cas échéant, précédé l'intervention de mesures d'éloignement d'un étranger en situation irrégulière, les conditions dans lesquelles M. B... a été contrôlé en application des dispositions précitées de l'article L. 611-1-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sont sans incidence sur la légalité de l'arrêté du 29 juillet 2019 du préfet des Hauts-de-Seine lui faisant obligation de quitter le territoire français sans délai.
3. En deuxième lieu, le droit d'être entendu, qui relève des droits de la défense figurant au nombre des principes généraux du droit de l'Union européenne, implique que l'autorité préfectorale, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision portant obligation de quitter le territoire français, mette l'intéressé à même de présenter ses observations écrites et lui permette, sur sa demande, de faire valoir des observations orales de telle sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu'elle n'intervienne. Toutefois, une atteinte à ce droit n'est susceptible d'affecter la régularité de la procédure à l'issue de laquelle la décision défavorable est prise que si la personne concernée a été privée de la possibilité de présenter des éléments pertinents qui auraient pu influencer le contenu de la décision, ce qu'il lui revient, le cas échéant, d'établir devant la juridiction saisie.
4. M. B... soutient ne pas avoir été informé de ce qu'il était susceptible de faire l'objet d'une décision d'éloignement. S'il ne ressort pas des pièces du dossier et notamment du procès-verbal d'audition du requérant que celui-ci aurait, à l'occasion du contrôle dont il a été l'objet le 29 juillet 2019, reçu une telle information, M. B... n'établit pas avoir été empêché, avant que ne soit prise à son encontre la décision qu'il conteste, de porter à la connaissance de l'administration des informations tenant à sa situation personnelle qui, communiquées à temps, auraient été de nature à faire obstacle à l'édiction de cette décision. Par suite, le moyen tiré de ce que l'obligation de quitter le territoire français en litige serait intervenue au terme d'une procédure irrégulière doit être écarté.
5. En troisième lieu, M. B... reprend en appel son moyen tiré des erreurs de fait dont serait entaché l'arrêté et qui démontreraient un défaut d'examen de sa situation personnelle. Toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier et en particulier des termes de l'arrêté qui mentionne les déclarations du requérant qui n'apporte aucun élément sur sa date d'entrée en France, que l'autorité préfectorale aurait été informée des éléments relatifs à son visa italien dont le requérant fait état devant le juge ou mise en possession d'une pièce attestant de sa date d'entrée en France. Par ailleurs, si l'intéressé indique que l'arrêté ne fait pas état de ses attaches familiales sur le territoire, il est constant que l'arrêté mentionne que l'intéressé est célibataire et sans enfant et que ses liens personnels et familiaux en France ne sont pas anciens, intenses et stables, notamment compte tenu qu'il a vécu dans son pays d'origine jusqu'à l'âge de 40 ans. Dès lors, le moyen tiré de ce que le préfet des Hauts-de-Seine n'aurait pas procédé à un examen particulier et approfondi de la situation du requérant ne peut qu'être écarté.
6. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; / 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
7. S'agissant du moyen tiré de l'atteinte disproportionnée portée à la vie privée et familiale, repris par M. B... en cause d'appel, le premier juge a relevé que l'intéressé, entré en France en 2014 à l'âge de 40 ans, déclare résider habituellement en France depuis cette date mais n'en justifie pas. En outre, célibataire et sans enfant, il n'établit pas non plus être dépourvu d'attache familiale dans son pays d'origine. Par ailleurs, l'intéressé ne justifie d'aucune activité professionnelle en France. Dans ces conditions, eu égard à la durée et aux conditions de son séjour sur le territoire français, et nonobstant la présence en France d'un frère, d'un oncle et d'un cousin, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la mesure d'éloignement prononcée aurait porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ou que le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de l'arrêté attaqué sur sa situation personnelle. Le moyen doit donc encore être écarté, pour les motifs retenus à bon droit par le premier juge.
Sur la légalité de la décision refusant un délai de départ volontaire :
8. Aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : (...) / 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) / b) Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France, sans avoir sollicité la délivrance d'un titre de séjour (...) ".
9. Il ressort des pièces du dossier que M. B... s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa sans avoir sollicité la délivrance d'un titre de séjour. Ainsi, il entrait dans le cas visé au b) du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire, le risque de fuite étant dans cette hypothèse présumé. Si le requérant fait valoir l'ancienneté de son séjour, ses relations familiales et son insertion professionnelle, ces éléments au demeurant non établis ne suffisent pas à caractériser des circonstances particulières qui auraient justifié qu'un délai lui soit accordé.
Sur la légalité de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :
10. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) III. - L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger. / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. / (...) L'étranger à l'encontre duquel a été prise une interdiction de retour est informé qu'il fait l'objet d'un signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen (...) / La durée de l'interdiction de retour mentionnée aux premier, sixième et septième alinéas du présent III (...) sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ".
11. Il ressort des termes même de ces dispositions que l'autorité compétente doit, pour décider de prononcer à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français sans délai une interdiction de retour et en fixer la durée, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères qu'elles énumèrent, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'un ou plusieurs d'entre eux. La décision d'interdiction de retour doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, de sorte que son destinataire puisse à sa seule lecture en connaître les motifs. Si cette motivation doit attester de la prise en compte par l'autorité compétente, au vu de la situation de l'intéressé, de l'ensemble des critères prévus par la loi, aucune règle n'impose que le principe et l'interdiction de retour fassent l'objet de motivations distinctes, ni que soit indiquée l'importance accordée à chaque critère.
12. M. B... reprend en appel son moyen tiré de ce que la décision d'interdiction de retour serait dénuée de tout motif de fait. Le magistrat désigné par le président du tribunal administratif a relevé qu'il ressort des pièces du dossier que la décision attaquée portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an vise le III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et mentionne notamment que M. B... s'est maintenu irrégulièrement en France depuis 2014 sans avoir sollicité de titre de séjour et qu'il ne dispose pas en France de liens personnels et familiaux anciens, intenses et stables, notamment compte tenu du fait qu'il a vécu dans son pays d'origine jusqu'à l'âge de 40 ans. Il ressort également des termes de la décision attaquée que le préfet a procédé à l'examen des quatre critères sus-énoncés. Dès lors, le moyen tiré de ce que la décision attaquée serait insuffisamment motivée doit être écarté pour les motifs retenus à bon droit par le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise.
13. Le moyen tiré de ce que la décision en litige, qui ne fixe qu'une durée d'interdiction d'un an, serait entachée d'erreur d'appréciation et porterait atteinte à sa vie privée et familiale en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté, pour les mêmes motifs que ceux développés au point 7.
14. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
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N° 19VE03304