2°) de condamner le CHI Robert Ballanger à lui verser une indemnité totale de 70 000 euros en réparation de tous ses préjudices, majorée des intérêts de retard au taux légal, à compter du 22 avril 2016 ;
3°) de mettre à la charge du CHI Robert Ballanger la somme de 1 750 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
..............................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;
- le décret n° 2001-1375 du 31 décembre 2001 ;
- le décret n° 2002-550 du 19 avril 2002 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A...,
- et les conclusions de Mme Danielian, rapporteur public.
I. L'exposé du litige :
1. Mme C..., cadre supérieure de santé, a exercé les fonctions de directrice de l'institut de formation en soins infirmiers (IFSI) du CHI Robert Ballanger d'Aulnay-sous-Bois de 2010 à 2014. Elle a été placée en arrêt de travail du 27 mai au 2 juin 2014, puis du 18 juin 2014 au 4 janvier 2015. A la suite d'un avis favorable du comité d'hygiène et de sécurité des conditions de travail du 4 juillet 2014, Mme C... a été affectée comme adjointe à la directrice des soins à compter du 5 janvier 2015. A compter du 2 mars 2015, elle a, de nouveau, été placée en arrêt de travail. Le 17 mars 2015, la commission de réforme interdépartementale a émis un avis favorable à la reconnaissance de l'imputabilité au service de ses arrêts de travail et de ses soins. Le 21 avril 2016, Mme C... a demandé au CHI Robert Ballanger de lui verser la somme de 70 000 euros à titre de dommages et intérêts. Par un courrier du 20 juin 2016, le centre hospitalier a rejeté sa demande. Mme C... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil de condamner le CHI Robert Ballanger à lui verser la somme de 70 000 euros en réparation de ses préjudices, tant à raison des fautes qu'elle impute à son employeur que des conséquences de sa pathologie imputable au service. Par un jugement du 13 octobre 2017, le Tribunal administratif de Montreuil a condamné le centre hospitalier à verser à Mme C... la somme de 2 000 euros, tous intérêts compris. Mme C... relève appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.
II. Le cadre du litige :
2. Compte tenu des conditions posées à son octroi et de son mode de calcul, l'allocation temporaire d'invalidité doit être regardée comme ayant pour objet de réparer les pertes de revenus et l'incidence professionnelle résultant de l'incapacité physique causée par un accident de service ou une maladie professionnelle. Les dispositions qui instituent cette prestation déterminent forfaitairement la réparation à laquelle les fonctionnaires concernés peuvent prétendre, au titre de ces chefs de préjudice, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions. Elles ne font, en revanche, pas obstacle à ce que le fonctionnaire qui subit, du fait de l'invalidité ou de la maladie, des préjudices patrimoniaux d'une autre nature ou des préjudices personnels, obtienne de la personne publique qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice. Elles ne font pas non plus obstacle à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre la personne publique, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette personne.
III. Sur la responsabilité pour faute du CHI Robert Ballanger :
III.1. S'agissant de l'absence de nomination de Mme C... dans un emploi correspondant à son grade :
3. Mme C... fait valoir que dans la mesure où le statut particulier du corps des cadres de santé de la fonction publique hospitalière ne prévoit pas que les agents ayant le grade de cadre supérieur de santé exercent les fonctions de directeur d'un institut de formation en soins infirmiers, le CHI Robert Ballanger a commis une faute en la nommant à un tel poste.
4. Cependant, en tout état de cause, Mme C... n'indique pas en quoi cette nomination lui aurait causé un préjudice moral ou des troubles dans ses conditions d'existence alors qu'elle a été nommée directrice de l'IFSI en 2010 et qu'elle n'a jamais demandé à quitter ce poste. Elle n'établit pas davantage qu'une telle nomination lui aurait causé un préjudice financier. Par suite, l'intéressée ne peut obtenir une indemnisation à ce titre.
III.2. S'agissant de l'absence d'octroi de la protection fonctionnelle :
5. Aux termes de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Les fonctionnaires bénéficient, à l'occasion de leurs fonctions, d'une protection organisée par la collectivité publique dont ils dépendent, conformément aux règles fixées par le code pénal et les lois spéciales. / (...) La collectivité publique est tenue de protéger les fonctionnaires contre les menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages dont ils pourraient être victimes à l'occasion de leurs fonctions, et de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté. (...) ". Ces dispositions établissent à la charge de l'administration une obligation de protection de ses agents dans l'exercice de leurs fonctions, à laquelle il ne peut être dérogé que pour des motifs d'intérêt général. Cette obligation de protection a notamment pour objet de faire cesser les attaques auxquelles l'agent est exposé. Il appartient dans chaque cas à l'autorité administrative compétente de prendre les mesures lui permettant de remplir son obligation vis-à-vis de son agent, sous le contrôle du juge et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce.
6. Il ne résulte pas de l'instruction que Mme C... aurait formulé une demande de protection fonctionnelle auprès de l'établissement, ni qu'elle ait été victime de menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages par ses collègues.
7. Il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à rechercher, pour ce motif, la responsabilité pour faute du CHI Robert Ballanger.
III.3. S'agissant des conditions dans lesquelles est intervenu son changement d'affectation :
8. En premier lieu, si l'intervention d'une décision entachée d'illégalité externe peut constituer une faute susceptible d'engager la responsabilité de l'administration, elle ne saurait donner lieu à réparation si, dans le cas d'une procédure régulière, la même décision aurait pu légalement être prise.
9. En l'espèce, Mme C... soutient qu'avant de l'affecter d'office comme adjointe à la directrice des soins à compter du 2 mars 2015, le CHI Robert Ballanger était tenu de l'informer des griefs retenus à son encontre, de la mettre à même de consulter son dossier et, le cas échéant, de recueillir ses observations.
10. Il résulte cependant de l'instruction et notamment des comptes-rendus de la réunion qui s'est déroulée à l'IFSI le 12 octobre 2013 et, de celles du groupe " équipe IFSI " du 6 mars 2014 et du groupe " direction IFSI " du 20 mars 2014, que ce service était affecté de dysfonctionnements sérieux concernant son organisation, ses modalités de management et les relations humaines lorsqu'il était dirigé par Mme C.... Si cette dernière soutient que ses mérites professionnels étaient reconnus et que les dysfonctionnements constatés n'étaient pas de son fait, et produit à cet effet deux attestations émanant de collègues, ainsi que le contenu de sa fiche de notation de 2013 faisant était de ses qualités professionnelles, ceci ne permet pas de remettre en cause le constat de ces dysfonctionnements. Son changement d'affectation, intervenu alors que l'intéressée était en poste depuis plus de trois ans, répondait donc à l'intérêt du service. Par suite, les vices de légalité externe dont serait entachée cette décision, ne peuvent, en tout état de cause, pas fonder une réparation.
11. En second lieu, Mme C... soutient que sa nouvelle affectation sur le poste d'adjointe à la directrice des soins de l'établissement est fictive dès lors qu'elle ne disposait en réalité ni de bureau, ni de fiche de poste. Elle soutient en outre que la directrice des soins a refusé de l'accueillir. Cependant, Mme C... n'étaye ses allégations d'aucun commencement de preuve. La faute alléguée selon laquelle elle n'aurait pas reçu une réelle affectation correspondant à son grade n'est, dès lors, pas établie.
IV. La responsabilité sans faute du CHI Robert Ballanger :
IV.1. Sur le partage de responsabilité :
12. Il n'est pas contesté que les arrêts de travail allant du 27 mai au 2 juin 2014, du 18 juin 2014 au 4 janvier 2015 et à compter du 4 mars 2015, résultant du syndrome dépressif dont souffre Mme C..., sont imputables au service. Elle est par suite fondée à solliciter du CHI Robert Ballanger, la réparation de son préjudice personnel en lien avec ces arrêts, même en l'absence de faute de ce dernier. Contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, il n'est pas établi ni même allégué par le centre hospitalier que les carences constatées dans le management de Mme C... - telles qu'elles ressortent notamment des comptes-rendus des réunions groupes de travail " direction IFSI " et " équipe IFSI " - caractériseraient l'existence d'une faute de nature à exonérer partiellement le centre hospitalier de sa responsabilité.
IV. 2. Sur les préjudices :
13. En premier lieu et en tout état de cause, il ne résulte pas de l'instruction que Mme C... aurait subi une perte de revenus à raison de ses arrêts de travail.
14. En second lieu, il ne résulte pas de l'instruction que Mme C... aurait subi une atteinte à sa réputation liée à sa pathologie.
15. En troisième et dernier lieu, la durée et la fréquence des périodes de congés de maladie de Mme C... révèlent une certaine gravité de sa pathologie. Le tribunal administratif a évalué le préjudice moral et les troubles dans les conditions d'existence de l'intéressée en résultant, en fixant le montant du préjudice à la somme de 3 000 euros tous intérêts compris. Mme C... n'apporte en appel aucun document ou justificatif de nature à établir que cette évaluation serait insuffisante.
16. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a fixé à 1 000 euros au lieu de 3 000 euros l'indemnité qui lui est due au titre de son préjudice moral et de ses troubles dans ses conditions d'existence.
V. Sur les frais liés au litige :
17. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du CHI Robert Ballanger la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme C... et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La somme que le CHI Robert Ballanger est condamné à verser à Mme C... est portée à 3 000 euros tous intérêts compris.
Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Montreuil n° 1606406 du 13 octobre 2017 est réformé en ce qu'il de contraire au présent arrêt.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme C... est rejeté.
Article 4 : Le CHI Robert Ballanger versera à Mme C... la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
2
N° 17VE03816