Résumé de la décision
La décision concerne le recours de M. A..., qui a été détenu au centre pénitentiaire de Maubeuge et a contesté le mode de calcul de sa rémunération pour son travail en détention (2015-2017). Bien que l'administration pénitentiaire ait reconnu une créance de 3 502,68 euros en sa faveur, M. A... n'a pas reçu cette somme après avoir signé un protocole transactionnel lui promettant le paiement et renonçant à tout recours. Après avoir saisi le tribunal administratif, le juge des référés a condamné l'État à lui verser la provision demandée. La Garde des Sceaux a formé un pourvoi, mais la décision a été maintenue en raison d'une erreur de droit commise concernant la validité des transactions au regard des conditions de rémunération des détenus.
Arguments pertinents
1. Validité du protocole transactionnel : Les juges ont estimé que même si un protocole transactionnel a été signé, il ne peut pas priver M. A... de son droit de saisir le juge pour le paiement de sommes qui lui sont légalement dues. En effet, "la rémunération du travail des personnes détenues ne peut être inférieure à un taux horaire fixé par décret" (Code pénal - Article 717-3).
2. Erreur de droit : Le juge des référés a commis une erreur de droit en considérant que la transaction pouvait faire obstacle à l'exercice du recours juridictionnel. Selon les juges, le protocole ne concernait pas une réparation de préjudice mais simplement le versement de salaires dus, ce qui ne pouvait être négocié.
3. Règles de l'ordre public : Le tribunal a également souligné que les dispositions régissant la rémunération des détenus sont d'ordre public, ce qui signifie qu'elles ne peuvent pas faire l'objet de concessions ou de réglementations alternatives, renforçant ainsi le droit de M. A... à réclamer son dû devant le juge.
Interprétations et citations légales
1. Code civil - Article 2044
Cet article stipule que « la transaction est un contrat par lequel les parties, par des concessions réciproques, terminent une contestation née, ou préviennent une contestation à naître ». Cela souligne que pour qu'une transaction soit valide, elle doit inclure des concessions équilibrées, ce qui n'était pas le cas ici, puisque les droits de M. A... étaient réglés par des textes légaux.2. Code civil - Article 2052
Ici, il est précisé que « la transaction fait obstacle à l'introduction ou à la poursuite entre les parties d'une action en justice ayant le même objet ». En raison de la nature des créances dues à M. A..., le tribunal a jugé que cette stipulation ne s'appliquait pas car ce qui était contesté était la rémunération due par l'administration, soumise à des règles précises de droit public.3. Code des relations entre le public et l'administration - Article L. 423-1
Cet article permet la conclusion de transactions avec l'administration « sous réserve qu'elle porte sur un objet licite et contienne des concessions réciproques ». La décision a relevé que le cadre légal définissant la rémunération des détenus exclut de telles concessions, car il impose des minima légaux inéluctables.4. Code de procédure pénale - Article 717-3
Ces règles définissent expressément que les rémunérations des détenus sont soumises à un taux horaire indexé sur le SMIC et excluent la possibilité d'arrangements qui pourraient en modifier les conditions. Cette disposition souligne l'absence de flexibilité dans les droits des détenus à percevoir une rémunération adéquate pour leur travail.En conclusion, la décision confirme que la protection offerte par le droit public sur les droits des détenus en matière de rémunération prime sur les accords transactionnels qui pourraient les altérer. La Garde des Sceaux a donc été déboutée de son pourvoi, confirmant l'obligation de l'État de verser au requérant la somme qui lui est due.