2° Sous le n° 400049, par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 24 mai, 11 juillet et 15 décembre 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la Fédération de l'hospitalisation privée (FHP) et la Fédération de l'hospitalisation privée - Syndicat des soins de suite et de réadaptation (FHP-SSR) demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du ministre des finances et des comptes publics et du ministre des affaires sociales et de la santé du 25 mars 2016 fixant pour l'année 2016 les éléments tarifaires mentionnés aux 1° à 3° du I de l'article L. 162-22-3 du code de la sécurité sociale des établissements de santé mentionnés au d de l'article L. 162-22-6 du code de la sécurité sociale ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
....................................................................................
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;
- le code de la santé publique ;
- le code de la sécurité sociale ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Frédéric Puigserver, maître des requêtes,
- les conclusions de M. Rémi Decout-Paolini, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Capron, avocat de la Fédération de l'hospitalisation privée ;
Considérant ce qui suit :
1. En vertu des dispositions des articles L. 162-22, L. 162-22-1 et R. 162-29-1 du code de la sécurité sociale, les frais des activités de soins de suite et de réadaptation et des activités de soins de psychiatrie des établissements de santé privés ayant conclu un contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens avec l'agence régionale de santé mentionnés au d de l'article L. 162-22-6 du même code sont pris en charge, en tout ou partie, par les régimes obligatoires de sécurité sociale sur la base de tarifs journaliers fixés pour chaque établissement par le directeur général de l'agence régionale de santé. En vertu des dispositions des articles L. 162-22-3 et R. 162-41-1 du même code, un arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale détermine chaque année, dans le respect de " l'objectif quantifié national " fixé en application des articles L. 162-22-2 et R. 162-41, l'évolution moyenne nationale et l'évolution moyenne dans chaque région de ces tarifs ainsi que les variations maximales et minimales des taux d'évolution des tarifs fixés pour chaque établissement par les agences régionales de santé. Par deux requêtes qu'il y a lieu de joindre, la Fédération de l'hospitalisation privée, agissant seule ou, pour 2016, conjointement avec la Fédération de l'hospitalisation privée - Syndicat des soins de suite et de réadaptation, demande l'annulation pour excès de pouvoir des arrêtés du 22 avril 2015 et du 25 mars 2016, intervenus sur le fondement de ces dispositions, par lesquels le ministre des affaires sociales et de la santé et le ministre des finances et des comptes publics ont fixé ces taux d'évolution ainsi que les limites encadrant le taux d'évolution des tarifs alloués à chaque établissement, respectivement, pour les années 2015 et 2016.
Sur l'intervention de l'Union nationale des cliniques psychiatriques privées :
2. L'Union nationale des cliniques psychiatriques privées justifie d'un intérêt suffisant à l'annulation de l'arrêté attaqué du 25 mars 2016. Ainsi, son intervention au soutien de la requête de la Fédération de l'hospitalisation privée et de la Fédération de l'hospitalisation privée - Syndicat des soins de suite et de réadaptation est recevable.
Sur la contrariété au droit européen du régime mis en oeuvre :
3. Aux termes du paragraphe 3 de l'article 108 du même traité sur le fonctionnement de l'Union européenne : " La Commission est informée, en temps utile pour présenter ses observations, des projets tendant à instituer ou à modifier des aides. Si elle estime qu'un projet n'est pas compatible avec le marché intérieur, aux termes de l'article 107, elle ouvre sans délai la procédure prévue au paragraphe précédent. L'Etat membre intéressé ne peut mettre à exécution les mesures projetées, avant que cette procédure ait abouti à une décision finale ". Il résulte toutefois de la décision 2012/21/UE de la Commission du 20 décembre 2011, ainsi que l'a relevé la Cour de justice de l'Union européenne dans son arrêt rendu le 22 octobre 2015 dans l'affaire C-185-14, que des aides d'Etat sous la forme de compensations de service public octroyées à des entreprises chargées de la gestion de services d'intérêt économique général sont compatibles avec le marché intérieur et exemptées de l'obligation de notification préalable à condition qu'elles remplissent les conditions énoncées par cette décision.
4. D'une part, les dispositions mentionnées au point 1, sur le fondement desquelles les arrêtés attaqués ont été pris, n'accordent pas d'avantage sélectif aux établissements de santé privés qui en bénéficient et ne peuvent, dès lors, être regardées comme organisant un régime d'aide d'Etat au sens des stipulations du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne. D'autre part, à supposer que la prise en charge, par une dotation annuelle de financement, des frais des activités de soins de suite et de réadaptation et des activités de soins de psychiatrie des établissements publics de santé et des établissements de santé privés à but non lucratif mentionnés aux b et c de l'article L. 162-22-6 du code de la sécurité sociale, en vertu des articles L. 174-1, L. 174-1-1 et R. 162-29-2 de ce code et de l'article R. 6145-26 du code de la santé publique, doive être regardée comme constitutive, au moins en partie, d'une aide d'Etat au sens de ces mêmes stipulations, la circonstance qu'une telle aide ne serait pas compatible avec le marché intérieur et n'aurait pas été notifiée à la Commission est, par elle-même, sans incidence sur la légalité des arrêtés attaqués, qui ne concernent que les établissements de santé privés mentionnés au d de l'article L. 162-22-6 du code de la sécurité sociale. Par suite, les fédérations requérantes ne peuvent utilement soutenir que les arrêtés qu'elles attaquent seraient illégaux pour ce motif.
Sur l'exception d'illégalité de l'arrêté du 26 février 2015 fixant l'objectif quantifié national mentionné à l'article L. 162-22-2 du code de la sécurité sociale :
5. D'une part, aux termes de l'article L. 162-22-2 du code de la sécurité sociale : " I.- Chaque année est défini un objectif quantifié national relatif aux activités mentionnées au 2° de l'article L. 162-22 qui sont exercées par les établissements de santé privés mentionnés aux d et e de l'article L. 162-22-6. Cet objectif est constitué par le montant annuel des charges afférentes aux frais d'hospitalisation au titre des soins dispensés dans le cadre de ces activités au cours de l'année et supportées par les régimes obligatoires d'assurance maladie et tient compte notamment des créations et fermetures d'établissements. Le contenu de cet objectif est défini par décret. / Le montant de l'objectif quantifié national est arrêté par l'Etat en fonction de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie. Il distingue la part afférente à chacune des activités mentionnées au 2° de l'article L. 162-22. (...) / II.- Un décret en Conseil d'Etat, pris après avis des organisations nationales les plus représentatives de ces établissements, précise les éléments pris en compte pour la détermination de cet objectif ainsi que les modalités selon lesquelles, chaque année, sont déterminées les évolutions des tarifs des prestations compatibles avec le respect de cet objectif. Il prend en compte à cet effet, notamment, les prévisions de l'évolution de l'activité des établissements pour l'année en cours ". Aux termes de l'article R. 162-41 du même code : " Chaque année, dans un délai de quinze jours suivant la promulgation de la loi de financement de la sécurité sociale, les ministres chargés de la santé, de la sécurité sociale et du budget arrêtent, sur recommandation du conseil de l'hospitalisation, le montant de l'objectif quantifié national mentionné à l'article L. 162-22-2. / Le montant de cet objectif est déterminé en tenant compte notamment des éléments suivants : / 1° L'état provisoire et l'évolution des charges d'assurance maladie au titre des soins dispensés l'année précédente ; / 2° L'évaluation des charges des établissements ; / 3° L'évaluation des gains de productivité réalisés et envisageables dans le secteur ; / 4° Les changements de régime juridique ou de financement de certains établissements, ou services ou activités des établissements concernés ". Dès lors que les éléments tarifaires mentionnés au point 1 doivent être fixés, aux termes de l'article R. 162-41-1 du même code, " dans le respect " de cet objectif, assurant ainsi sa mise en oeuvre, l'arrêté attaqué du 22 avril 2015 doit être regardé comme pris pour l'application de l'arrêté du 26 février 2015 fixant pour 2015 l'objectif quantifié national. Par suite, la Fédération de l'hospitalisation privée peut utilement invoquer, par voie d'exception, l'illégalité de cet arrêté à l'appui de son recours tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 avril 2015.
6. D'autre part, il résulte de l'article 244 quater C introduit dans le code général des impôts par l'article 66 de la loi du 29 décembre 2012 de finances rectificative pour 2012 que les entreprises imposées à l'impôt sur les sociétés ou à l'impôt sur le revenu " d'après leur bénéfice réel ou exonérées en application des articles 44 sexies, 44 sexies A, 44 septies, 44 octies, 44 octies A et 44 decies à 44 quindecies peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt ayant pour objet le financement de l'amélioration de leur compétitivité à travers notamment des efforts en matière d'investissement, de recherche, d'innovation, de formation, de recrutement, de prospection de nouveaux marchés, de transition écologique et énergétique et de reconstitution de leur fonds de roulement ", qui " est assis sur les rémunérations que les entreprises versent à leurs salariés au cours de l'année civile (...) n'excédant pas deux fois et demie le salaire minimum de croissance ".
7. Sur le fondement des dispositions des articles L. 162-22-2 et R. 162-41 du code de la sécurité sociale, les ministres chargés de la santé, de la sécurité sociale et du budget peuvent légalement tenir compte du niveau respectif des charges réellement exposées par les établissements des différentes catégories mentionnées à l'article L. 162-22-6 du même code ainsi que des produits susceptibles de venir en atténuation des charges que les tarifs ont vocation à financer. Ces dispositions ne font pas obstacle, à ce titre, à ce qu'ils prennent en considération des charges de nature fiscale, ainsi que des atténuations de charge participant du régime fiscal auquel les établissements sont soumis. Les tarifs applicables aux activités de soins de suite et de réadaptation et de soins de psychiatrie exercées par les établissements de santé privés mentionnés au d de l'article L. 162-22-6 du code de la sécurité sociale ayant vocation à financer, sans distinction, toutes les charges afférentes à ces activités, les ministres ont pu légalement tenir compte, pour fixer l'objectif quantifié national relatif à ces activités, de l'incidence positive du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi sur le niveau des charges de ces établissements, sans distinguer selon qu'elles étaient supportées par les régimes obligatoires de l'assurance maladie ou par les patients eux-mêmes. Ainsi, le moyen, soulevé par voie d'exception, tiré de l'illégalité de l'arrêté du 26 février 2015 doit être écarté.
Sur la prise en compte des effets du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi par les arrêtés attaqués :
8. En premier lieu, si l'arrêté attaqué du 22 avril 2015 prend en considération, dans la fixation des taux d'évolution des tarifs des prestations de soins de suite ou de réadaptation et de psychiatrie, l'incidence du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi sur la moyenne des charges des établissements de santé privés à but lucratif, il n'en résulte pas pour autant qu'il modifierait les règles relatives à l'assiette et au taux des impositions de toutes natures et empièterait ainsi sur le domaine réservé au législateur par l'article 34 de la Constitution. Par suite, la Fédération de l'hospitalisation privée n'est pas fondée à soutenir que les auteurs de cet arrêté auraient, pour ce motif, excédé leur compétence.
9. En deuxième lieu, ainsi qu'il a été dit au point 7, les ministres chargés de la santé, de la sécurité sociale et du budget peuvent légalement, pour fixer " l'objectif quantifié national ", tenir compte des atténuations de charge participant du régime fiscal auquel les établissements sont soumis, telles que celles qui résultent du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi. S'ils procèdent ainsi, ils doivent alors tirer les conséquences de " l'objectif quantifié national " ainsi fixé et déterminer les éléments tarifaires mentionnés aux 1° à 3° du I de l'article L. 162-22-3 du code de la sécurité sociale en tenant compte, sur le fondement de l'article
R. 162-41-1 de ce code, des mêmes atténuations de charges. Par suite, en prenant en considération, pour édicter les arrêtés attaqués, l'incidence positive du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi sur le niveau des charges des établissements privés de santé à but lucratif mentionnés au d de l'article L. 162-22-6, les ministres n'ont pas pris une décision entachée d'incompétence, n'ont pas commis d'erreur de droit et n'ont pas entaché leurs arrêtés de détournement de pouvoir ou de procédure.
10. En troisième lieu, le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi, dont le taux était de 4 % au titre des rémunérations versées en 2013 et de 6 % au titre des rémunérations versées à compter de 2014, peut être imputé au plus tôt au moment de la liquidation du solde de l'impôt dû au titre de l'exercice clos au 31 décembre de l'année de versement des rémunérations sur lesquelles il est calculé. Compte tenu de la montée en charge progressive des effets de ce crédit d'impôt et de la répartition sur les exercices 2013 à 2016 de la prise en compte de ces effets par les ministres compétents, les fédérations requérantes ne sont pas fondées à soutenir que les auteurs des arrêtés attaqués, en amputant, en raison de ces effets, le taux d'évolution moyen national des tarifs pour respectivement 2015 et 2016, alors qu'ils avaient opéré une réduction, pour le même motif, du taux d'évolution des tarifs pour 2014, auraient pris en compte deux fois les mêmes allègements de charges.
11. En dernier lieu, le principe d'égalité ne s'oppose pas à ce que l'autorité investie du pouvoir réglementaire règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu'elle déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que, dans l'un comme l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la norme qui l'établit et ne soit pas manifestement disproportionnée au regard des motifs susceptibles de la justifier.
12. D'une part, contrairement à ce que soutiennent les fédérations requérantes, les dispositions des arrêtés attaqués, applicables à l'ensemble des établissements privés mentionnés au d de l'article L. 162-22-6 du code de la sécurité sociale, n'établissent par elles-mêmes aucune différence de traitement entre établissements à but lucratif et établissements à but non lucratif. Au demeurant, les dispositions de l'article 244 quater C du code général des impôts permettant aux établissements de santé privés à but non lucratif de bénéficier du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi au titre des rémunérations versées aux salariés affectés à leurs activités exonérées d'impôt sur les bénéfices - au nombre desquelles figurent leurs activités de soins - ne sont pas applicables au titre de 2015 et 2016, en l'absence de décision de la Commission européenne l'autorisant, ce dont il résulte que les établissements de santé privés à but non lucratif ne sont pas dans la même situation que les établissements à but non lucratif.
13. D'autre part, les arrêtés attaqués se bornent à fixer l'évolution moyenne nationale et l'évolution moyenne dans chaque région des tarifs des prestations des soins de suite ou de réadaptation et de psychiatrie ainsi que les variations maximales et minimales des taux d'évolution des prestations qui peuvent être allouées aux établissements, ainsi que le prévoit l'article L. 162-22-3 du code de la sécurité sociale, sans faire obstacle à ce que les agences régionales de santé fixent le tarif de chaque établissement en tenant compte de sa situation particulière. Ainsi, contrairement à ce que soutiennent les fédérations requérantes, les arrêtés attaqués ne prévoient pas une baisse uniforme des tarifs et leur argumentation tenant aux conséquences d'une telle baisse au regard du principe d'égalité ne peut qu'être écartée.
Sur la prise en compte des effets du pacte de responsabilité et de solidarité :
14. Il résulte de l'article L. 241-6-1 introduit dans le code de la sécurité sociale par la loi du 8 août 2014 de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014, mettant en oeuvre le " pacte de responsabilité et de solidarité ", que le taux des cotisations à la charge de l'employeur au titre des allocations familiales, au titre des rémunérations versées à compter du 1er janvier 2015, a été " réduit de 1,8 point pour les salariés (...) dont les rémunérations ou gains n'excèdent pas 1,6 fois le salaire minimum de croissance " puis, en vertu de la loi du 21 décembre 2015 de financement de la sécurité sociale pour 2016, au titre des rémunérations versées à compter du 1er avril 2016, pour les salariés " dont les rémunérations ou gains n'excèdent pas 3,5 fois le salaire minimum de croissance ", et il résulte des modifications apportées à l'article L. 241-13 du même code par la loi du 8 août 2014 que la réduction dégressive applicable aux cotisations à la charge de l'employeur est élargie.
15. D'une part, pour les motifs exposés aux points 7 et 9, les ministres pouvaient légalement, pour fixer les éléments tarifaires en litige, tenir compte des allègements de charges sociales bénéficiant aux établissements.
16. D'autre part, ainsi qu'il a été dit au point 4, les activités de soins de suite et de réadaptation et de soins de psychiatrie des établissements de santé privés à but non lucratif mentionnés aux b et c de l'article L. 162-22-6 du code de la sécurité sociale sont financés par une dotation annuelle de financement, en vertu des articles L. 174-1, L. 174-1-1 et R. 162-29-2 de ce code et de l'article R. 6145-26 du code de la santé publique. Il ne ressort pas des pièces des dossiers que l'objectif pour les années 2015 et 2016 des dépenses d'assurance maladie mentionné à l'article L. 174-1-1 du code de la sécurité sociale, fixé par arrêtés des 28 février 2015 et 26 février 2016, non plus que les dotations régionales des établissements de santé privés à but non lucratif mentionnées au même article, fixées pour les années 2015 et 2016 par arrêtés des 22 avril 2015 et 12 mai 2016, n'auraient pas été calculés en prenant également en considération les incidences du pacte de responsabilité et de solidarité sur les charges de ces établissements, ainsi d'ailleurs que le ministre des affaires sociales, de la santé et des droits de femmes en fait mention, pour 2015, dans l'instruction ministérielle du 22 avril 2015, dont se prévaut également la Fédération de l'hospitalisation privée. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du principe d'égalité entre établissements de santé privés doit être écarté.
Sur le taux d'évolution moyen national des tarifs des prestations de soins :
17. Aux termes du I de l'article L. 162-22-2-1 du code de la sécurité sociale : " Lors de la détermination annuelle de l'objectif mentionné au I de l'article L. 162-22-2, une part de son montant peut être affectée, par arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale, à la constitution d'une dotation mise en réserve, de manière à concourir au respect de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie ".
18. Il ressort des pièces des dossiers que si les arrêtés des 26 février 2015 et 2016 ont fixé " l'objectif quantifié national " respectivement à 2 904,1 millions d'euros pour 2015 et 2 981,7 millions d'euros pour 2016, en progression par rapport à chacune des années précédentes, et si les dotations mises en réserve ont été fixées respectivement, par des arrêtés des 22 avril 2015 et 25 mars 2016, à 8,59 et 14,43 millions d'euros, les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale ont apprécié l'augmentation du volume d'activité à 4,3 % pour les soins psychiatriques et 5 % pour les soins de suite et de réadaptation en 2015 et à respectivement 3,5 et 4,2 % pour ces mêmes soins en 2016. Il ne ressort pas des pièces des dossiers que les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale, qui pouvaient tenir compte, sans erreur de droit, d'une évolution plus rapide du volume prévisionnel des prestations que de l'objectif quantifié national, aient, ce faisant, commis une erreur manifeste d'appréciation. Dans ces conditions, les fédérations requérantes ne sont pas fondées à soutenir qu'en fixant les taux d'évolution moyen national des tarifs des prestations de soins de suite ou de réadaptation et de psychiatrie à respectivement - 2,3 % et - 2,65 % pour 2015 et 2016, les arrêtés attaqués auraient, en réalité, imposé un gel d'une partie de l'objectif quantifié national, dans des proportions au demeurant très supérieures aux dotations mises en réserve, en méconnaissance de l'article L. 162-22-2-1 du code de la sécurité sociale. Elles ne sont pas plus fondées à soutenir que les ministres auraient méconnu l'article L. 111-1 du code de la sécurité sociale et l'article L. 321-1 du même code dans sa rédaction antérieure à la loi du 21 décembre 2015, relatifs aux frais pris en charge par l'assurance maladie, non plus que les dispositions, mentionnées au point 1, en vertu desquelles les éléments tarifaires en litige doivent être fixés.
19. Il résulte de tout ce qui précède que la Fédération de l'hospitalisation privée et la Fédération de l'hospitalisation privée - Syndicat des soins de suite et de réadaptation ne sont pas fondées à demander l'annulation des arrêtés du 22 avril 2015 et du 25 mars 2016 qu'elles attaquent.
20. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soient mises à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, les sommes que la Fédération de l'hospitalisation privée et la Fédération de l'hospitalisation privée - Syndicat des soins de suite et de réadaptation demandent à ce titre. L'Union nationale des cliniques psychiatriques privées, intervenante en demande, n'étant pas partie à la présente instance, ces dispositions font également obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions qu'elle présente au même titre.
D E C I D E :
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Article 1er : L'intervention de l'Union nationale des cliniques psychiatriques privées au soutien de la requête n° 400049 est admise.
Article 2 : Les requêtes de la Fédération de l'hospitalisation privée et de la Fédération de l'hospitalisation privée - Syndicat des soins de suite et de réadaptation sont rejetées.
Article 3 : Les conclusions de l'Union nationale des cliniques psychiatriques privées présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la Fédération de l'hospitalisation privée, à la Fédération de l'hospitalisation privée - Syndicat des soins de suite et de réadaptation, à l'Union nationale des cliniques psychiatriques privées, au ministre de l'économie et des finances et à la ministre des affaires sociales et de la santé.