Résumé de la décision
La société Paris Clichy a demandé réparation à l'État pour un préjudice résultant de l'application d'une disposition législative déclarée contraire à la Constitution par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2013-336 QPC du 1er août 2013. Ce préjudice était lié à l'article 15 de l'ordonnance du 21 octobre 1986, devenu l'article L. 442-9 du Code du travail. Toutefois, le Conseil d'État, saisi à titre de juge de cassation, a jugé que les dispositions de l'article L. 141-1 du Code de l'organisation judiciaire, relatives à la responsabilité de l'État pour le fonctionnement défectueux du service public de la justice, n'étaient pas applicables au litige. Par conséquent, il a décidé qu'il n'y avait pas lieu de renvoyer la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel.
Arguments pertinents
1. Applicabilité de l'article L. 141-1 : Le Conseil a souligné que l'article L. 141-1 du Code de l'organisation judiciaire, qui concerne la responsabilité de l'État en cas de faute lourde ou déni de justice, n’a pas été invoqué lors des instances précédentes. Il a jugé que « les dispositions de l'article L. 141-1 du code de l'organisation judiciaire n'ont pas été invoquées par les parties devant la cour ni appliquées par elle ».
2. Non-recherche de la conformité judiciaire : La question de la conformité des dispositions de l'article L. 141-1 aux droits et libertés garantis par la Constitution est sans incidence sur la régularité de l'arrêt contesté. Le Conseil a affirmé que le moyen souligné par la société Paris Clichy était inapplicable étant donné que les considérations portaient sur une loi déjà déclarée inconstitutionnelle.
3. Absence de renvoi au Conseil Constitutionnel : La décision conclut qu'il n'est pas nécessaire de transmettre la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel, indiquant que « sans qu’il soit besoin de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée, le moyen tiré de ce que l'article L. 141-1 [...] doit être écarté. »
Interprétations et citations légales
1. Article L. 141-1 du Code de l'organisation judiciaire :
- Cet article stipule que « L'Etat est tenu de réparer le dommage causé par le fonctionnement défectueux du service public de la justice. / Sauf dispositions particulières, cette responsabilité n'est engagée que par une faute lourde ou par un déni de justice ». L'interprétation de cet article dans le contexte de la décision met en avant qu'il ne peut être appliqué sans éléments prouvant une faute lourde ou un déni de justice, ce qui ne se retrouvait pas dans la demande de Paris Clichy.
2. Ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 :
- L'article 23-5 de cette ordonnance précise que les dispositions législatives portant atteinte aux droits garantis par la Constitution peuvent être soulevées au Conseil d'État, mais le Conseil d'État a jugé que la loi contestée n'était pas applicable au litige en cours.
3. Décision n° 2013-336 QPC du Conseil constitutionnel :
- Cette décision constitue une référence clé, car elle a déclaré inconstitutionnelle l'application d’une disposition applicable à la société Paris Clichy. Le Conseil d'État a utilisé cette déclaration pour justifier qu'il s'agissait là d'une question déjà tranchée, et non d'une question nouvelle à soumettre à une deuxième évaluation.
Ainsi, le Conseil d’État a tranché en faveur de l'absence de renvoi au Conseil constitutionnel et a conclu que la question prioritaire de constitutionnalité, bien que soulevée, était inapplicable et n’affectait pas les fondements de la décision contestée.